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Rechercher : Rémi Hugues. histoire & action française. Rétrospective : 2018 année Maurras

  • Entretien • Marin de Viry : « Le roi, c’est la France telle que l’éternité l’a voulue »

     

    Entretien - d'un grand intérêt, notamment pour nous, royalistes - paru dans l'Action Française 2000 [[n° 2951 du 16 Mars 2017]]].

     
    Redoutant la faillite de l’État, Marin de Viry appelle à lever l’hypothèque qui pèse sur l’avenir. Dans cette perspective, il explique qu’un roi, facteur d’unité, contribuerait à redonner à la France la confiance qui lui manque.

    Un roi immédiatement : tel est le titre de votre dernier livre. La Ve République ne répondrait-elle plus à sa définition de monarchie républicaine, conciliant un exécutif fort avec les exigences d’un parlementarisme raisonné ?

    La Ve République n’a plus rien à voir avec le régime que les constituants avaient imaginé en 1958. Pas seulement pour des raisons institutionnelles – certes, les institutions ont un peu évolué et l’Europe a changé la donne –, mais aussi et surtout à cause de l’esprit politique qui a conduit depuis quarante ans à hypothéquer d’abord l’avenir – pardon de parler d’argent, mais je pense à la dette que nous allons rembourser encore longtemps, nos enfants naissant avec plus de 30 000 euros de dette publique dans leur berceau –, ensuite le présent – c’est-à-dire les politiques que nous n’avons plus la capacité de mettre en place en raison de cette dette – et enfin le passé – le capital qui nous a été transmis et que nous allons dilapider pour payer cette dette. Aucun régime ne résiste à une dette aussi énorme que la nôtre, qui touche à la fois l’héritage, l’action présente et l’action future. Le quantitatif agresse le qualitatif, la civilisation est menacée par notre compte en banque, et le scandaleux destin de la Grèce nous pend au nez. Quand vous êtes en quasi-faillite, vous n’avez plus d’espace politique, plus de souveraineté, vous n’avez plus le droit de penser votre avenir tout seul. Le roi est nu. Il ne vous reste qu’à espérer que le régime a assez de force pour redresser la situation. La Ve République était un régime supposément fort et équilibré. Pas sûr qu’il résiste au stress de la faillite. Quant au parlementarisme raisonné, l’expression avait un sens quand l’exécutif était raisonnable et les parlementaires exagérément généreux : les parlementaires dissipaient, l’exécutif gardait, et les finances publiques étaient bien gardées. Aujourd’hui, les deux dissipent…

    La Ve République vous semble avoir laissé de côté la société civile. Une monarchie vous semblerait-elle mieux à même de laisser vivre et se développer les élites du pays réel ?

    Le pays réel… Je ne vais pas vous taquiner là-dessus. Disons plutôt le pays du principe de réalité. Le pays des Français qui ont une certaine idée d’eux-mêmes, de leur réalisation, de leur idéal, et qui se frottent aux réalités. Quand d’une part les réalités deviennent très dures et l’idée qu’ils se font de leur réalisation est méprisée, et que d’autre part la source de ce mépris et de ces difficultés est la même, c’est-à-dire tout ce qui est “officiel”, où il y a le gouvernement mais aussi les médias et la vie culturelle, alors le résultat est mécanique, politique, humain, ce que vous voulez, mais il est clair : ils détestent cette source. D’aucuns l’appellent le “système” ; dans le système, le principe de réalité n’agit pas, tout simplement. S’il agissait, nous aurions le sentiment d’une certaine raison dans les politiques et d’une certaine stabilité dans la situation. Dans l’idéal, la monarchie apporterait une réponse à cette question, en distinguant les citoyens – ou les sujets, je ne suis pas très regardant sur la terminologie – qui seraient véritablement utiles ; et au sommet, véritablement nobles, c’est-à-dire ayant administré la preuve qu’ils font passer leur honneur, lequel est toujours au service des hommes et donc de la société, avant leur intérêt personnel. Le principe de réalité, c’est tout simplement le champ d’application de l’intelligence pratique qui vise un principe. Je vise quelque chose, j’ai des moyens pour le réaliser et je cherche la bonne combinaison. Quand j’écoute beaucoup de responsables politiques, je me dis que l’intelligence les a désertés. Non pas qu’ils soient idiots, mais l’esprit de l’intelligence ne leur est tout simplement pas utile pour réussir. Il leur suffit de se promener avec des grilles de lecture en l’air, comme des cerfs-volants, pour réussir.

    Par sa présence, écrivez-vous dans votre livre, le roi fait peuple. Pouvez-vous préciser votre pensée ?

    C’est d’abord un vieux paradoxe : nous serions plus unis, donc plus peuple, par un roi catholique qui n’aurait pas été choisi que nous ne le sommes par un président qui a été choisi, mais pas par tous, et qui a une durée de légitimité de plus en plus faible. Le roi est à l’abri des trolls de Facebook et d’ailleurs qui font et défont la popularité. Ensuite, c’est une affaire de métaphysique : le roi, c’est la France telle que l’éternité l’a voulue. Pas une sorte de communauté de rencontre que l’on traîne d’accident en accident jusqu’à son éventuelle disparition matérielle. Il faut croire que Dieu a voulu la France, ou alors c’est un nom de marque comme Coca-Cola. Enfin, le roi est une personne, et la république un mot. Le hasard ou la providence, l’éternité, l’incarnation : sous ces trois idées, dans un pays donné, chacun peut se sentir le voisin de l’autre.

    Vous demandez un roi immédiatement. Il y a donc urgence selon vous… Quels sont les principaux défis que notre pays a à relever ?

    Un seul : celui d’une belle conscience de lui-même, car il le mérite. Généreuse, forte, intelligente, humble, entreprenante, ardente : les idées de démocratie directe et de monarchie peuvent beaucoup contribuer à introduire ces adjectifs dans la conscience collective et individuelle. Dans ce pays, il nous manque un sommet et une base. Nous avons un milieu en perdition, qu’on appelle le système. Il faut s’en débarrasser sans haine, avec des idées claires sur la manière dont plus de libertés donneraient de meilleurs résultats dans tous les domaines. Mais ne perdons pas de temps.

    Votre conception de la royauté est solidaire de votre foi catholique : la laïcité ne vous semble-t-elle pas avoir tenu ses promesses ?

    Ce qu’il faut garder de l’esprit de la laïcité, c’est qu’aucune puissance ne doit être autorisée à prendre le contrôle des consciences. L’Éducation nationale doit continuer d’exister, avec le mandat de développer les connaissances, la capacité critique de chacun, mais en lien étroit avec la notion d’intérêt général ; elle doit cultiver une discrétion bienveillante, prudente, respectueuse, en ce qui concerne les croyances de la personne et de la famille de la personne. Il se trouve qu’être citoyen n’épuise pas les aspirations de la personne. La laïcité laisse un vide et laisse une liberté. Laissons le roi donner l’exemple d’un vide comblé, et laissons les hommes libres de le combler à leur guise. Sacrons le roi, et laissons les hommes reconnaître Dieu, ou pas. Garantissons la permanence de la présence du catholicisme en France, et laissons l’Église polariser les âmes si elle le peut. Mais c’est bien au christianisme catholique que nous devons donner les clefs des symboles, c’est-à-dire de l’union de ce qui est séparé. Le lien entre l’homme et Dieu, entre les hommes, entre les sexes, entre la France et les Français. En un prodigieux travail multiséculaire, le catholicisme a délégitimé la violence, a donné à chacun les clefs d’un destin individuel pacifique, utile, aimant, maintenu l’espérance en les fins dernières, et constamment maintenu l’invisible présent dans le visible. Ce n’est pas assez que de rappeler que le catholicisme est dans nos racines. Il est ce que nous sommes. Un roi catholique, c’est le début de la fin de la haine de nous-mêmes. 

    Marin de Viry, Un roi immédiatement, éditions Pierre-Guillaume de Roux, mars 2017, 144 pages, 18,50 euros.

  • La liberté d’expression à nouveau foulée aux pieds, par Olivier Perceval.

    Renais­sance catho­lique mis en examen

    Nous appre­nons avec conster­na­tion cette nou­velle effa­rante : Jean Pierre Mau­gendre, pré­sident fon­da­teur de Renais­sance Catho­lique que nous connais­sons bien et qui est venu déjà pré­sen­ter son action de défen­seur des prin­cipes catho­liques dans cer­taines de nos réunions d’Action Fran­çaise est pour­sui­vi par les tri­bu­naux de la Répu­blique pour avoir pro­cla­mé la doc­trine de l’Église

    olivier perceval.jpgNous nous fou­tons comme de nos der­nières chaus­settes du lob­by homo­sexuel et autre LGBTQ+, dans la mesure où celui-ci ne vient pas nous inter­dire de pen­ser autre­ment que lui. L’accusation de pro­vo­ca­tion à la dis­cri­mi­na­tion qui est invo­quée par les plai­gnants pour­rait du reste se retour­ner contre eux, car ce qu’ils remettent en cause est la doc­trine qui est à l’origine de la civi­li­sa­tion occi­den­tale, ils peuvent la contes­ter, mais sou­haitent ils l’interdire et jeter les chré­tiens en pri­son, comme il y a 2000 ans on les lapi­dait ou les livrait aux fauves dans les cirques romains ?

    L’AF reven­dique la liber­té d’expression pour tous, et le droit de contes­ter les lois sus­cep­tibles de cau­ser un grand désordre dans la socié­té. Il peut y avoir débat, mais dès lors que la répres­sion judi­ciaire s’abat sur un sujet qui fait diver­gence, ce sont les liber­tés publiques qui sont en jeu et c’est un devoir pour tous les hommes atta­chés aux liber­tés de se lever contre un pro­cès inique. En outre, c’est contre Rome, ou sa repré­sen­ta­tion en France que devrait avoir lieu un tel pro­cès et non contre un chré­tien pra­ti­quant qui se contente de rap­pe­ler la posi­tion offi­cielle de l’Église. (NDLR)

    « Mer­cre­di 24 février Jean-Pierre Mau­gendre a été mis en exa­men, comme direc­teur de publi­ca­tion du site inter­net Renais­sance catho­lique, par le juge d’instruction pour « pro­vo­ca­tion à la dis­cri­mi­na­tion à l’égard d’un groupe de per­sonnes à rai­son de leur orien­ta­tion sexuelle ». Ceci fait suite à une plainte, avec consti­tu­tion de par­tie civile, dépo­sée par l’association Stop homo­pho­bie le 30 juillet dernier.

            Il est repro­ché à Renais­sance catho­lique d’avoir publié sur son site, le 13 juin 2019, un article inti­tu­lé :L’Église du Dieu vivant : la colonne et l’appui de la véri­té (1 Tim 3 ‚15) tenant « notam­ment les pro­pos sui­vants : « Les auto­ri­tés civiles ne doivent pas éta­blir d´unions civiles ou légales entre deux per­sonnes du même sexe, qui clai­re­ment imitent l´union du mariage, même si de telles unions ne reçoivent pas le nom de mariage, puisque de telles unions encou­ra­ge­raient le péché grave pour les per­sonnes concer­nées et seraient cause d´un grave scan­dale pour d´autres (cf. Congré­ga­tion pour la Doc­trine de la Foi, Consi­dé­ra­tions à pro­pos des pro­jets de recon­nais­sance juri­dique des unions entre per­sonnes homo­sexuelles, 3 juin 2003) ».

                 Le texte incri­mi­né était signé des car­di­naux Burke, patron de l’Ordre de Malte, Pujats, arche­vêque émé­rite de Riga, et des évêques Peta, arche­vêque de Sainte-Marie en Asta­na, Len­ga, arche­vêque émé­rite de Kara­gan­da et Schnei­der évêque auxi­liaire de Sainte-Marie en Asta­na.   L’association Stop homo­pho­bie fait par­tie de cette constel­la­tion d’associations dont la voca­tion est d’assurer « la veille en temps réel sur les réseaux sociaux et inter­net » et de lut­ter « contre les dis­cri­mi­na­tions liées au sexe, au genre ou à l’orientation sexuelle ». Elle inter­vient en milieu sco­laire et pro­fes­sion­nel sur ces pro­blé­ma­tiques et mène des actions judi­ciaires. Cette asso­cia­tion est lar­ge­ment sub­ven­tion­née par la puis­sance publique, en par­ti­cu­lier la région Ile-de-France diri­gée par l’élue ex-LR Valé­rie Pécresse. Le site de la région Ile de France, sous le titre, « La lutte contre l’homophobie, une prio­ri­té pour la Région­so­li­daire » men­tionne Stop homo­pho­bie par­mi les asso­cia­tions béné­fi­ciant régu­liè­re­ment de fonds publics – 1,1 mil­lions d’Euros entre 2016 et 2020 pour 71 associations-. 

                Notre avo­cat sera maître Jérôme Triomphe, bien connu des défen­seurs de la vie humaine inno­cente. Nous espé­rons vive­ment qu’au-delà de la mise en cause de notre modeste asso­cia­tion de nom­breux catholiques : 

    laïcs, prêtres et évêques com­pren­dront que ce pro­cès sera, en fait, celui de la liber­té de l’Église à pro­cla­mer son ensei­gne­ment moral, à la lumière de l’Évangile et à rap­pe­ler ses exi­gences, dans une socié­té sécularisée. 

    Avec l’aide de Dieu nous ne nous déro­be­rons pas ! En ce temps de carême nous confions cette inten­tion à la prière de nos amis, connus ou incon­nus. Nous savons que demain, mal­gré le triomphe appa­rent des méchants, brille­ra sur ceux qui se tiennent au pied de la croix la lumière de Pâques. »

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

  • Jeunes de France : Donnez-leur un idéal !

     

    La juste analyse de Madeleine Bazin de Jessey            

    Pour Madeleine de Jessey la pertinence d'une civilisation se mesure à l'aune de sa vigueur culturelle : c'est parce que nous avons laissé notre culture s'effondrer que la barbarie est réapparue. Et parce que « le mal est en nous. »

    Frappes en Syrie, fermetures des mosquées salafistes, perquisitions et arrestations… Ces opérations s'imposaient, elles ont été prises immédiatement et nous ferons tous bloc derrière le gouvernement pour qu'il les mène à bien, jusqu'au bout.

    Il serait illusoire, cependant, de penser que ces mesures d'urgence suffiront. Qu'on se le dise: l'élimination de l'Etat islamique en Syrie ne nous mettra pas hors de danger, car le mal est en nous. Et la neutralisation des individus dangereux en France s'avèrera temporairement efficace, certes, mais d'autres s'empresseront de reprendre le flambeau, sous des formes toujours nouvelles et toujours plus barbares. Pourquoi? Tout simplement parce que notre modèle de civilisation est aujourd'hui incapable de retenir ces jeunes assoiffés de radicalité et d'absolu. Si Daech a pu planter dans le crâne de ces Français son sinistre drapeau noir, c'est parce que nous y avions nous-mêmes semé la culture du vide.

    Ces jeunes avaient besoin de repères, nous leur avons donné une société sans racines, sans projet commun et sans limites.

    Ils avaient besoin de cadres, nous leur avons appris à renier toute forme d'autorité, à tuer ancêtres, père et mère pour qu'ils grandissent comme des herbes folles dans le mythe fallacieux de l'homme auto-fondé.

    Ils avaient besoin d'histoire et de modèles identificatoires, nous leur avons appris à haïr notre passé à travers des séances d'auto-flagellation permanentes qui les ont entretenus, pour les uns, dans une culpabilité étouffante, et pour les autres, dans une victimisation haineuse.

    Ils avaient besoin d'action, de dévouement et de sacrifice, nous avons remplacé le service militaire par des écrans, des jeux vidéo et quelques terrains de sport, en pensant que ces succédanés d'action suffiraient à calmer leur bougeotte.

    Ils avaient besoin d'amour, nous leur avons appris à jouir en toute sécurité en exhibant dans nos kiosques, à la vue de tous, les stars du X qui leur montrent la voie de la «performance».

    Ils avaient besoin de cette beauté qui élève l'âme, nous les avons entourés de fer et de béton ; nous avons remplacé l'étude des plus beaux extraits de notre littérature par des cours techniques, insipides et jargonnants, sans chercher à développer de lien charnel entre eux et les plus grandes réalisations de notre patrimoine.

    Ils avaient besoin de spiritualité, nous avons fait d'une laïcité creuse une valeur absolue et érigé la consommation comme seul voie d'accomplissement, en leur accordant au passage l'ouverture des centre commerciaux le dimanche pour qu'ils trouver un sens à leur vie en contemplant des objets qu'ils ne pourront sans doute jamais se procurer.

    Bref, ils avaient besoin de ferveur, ils étaient prêts au dépassement d'eux-mêmes, et nous leur avons appris à zapper et à se divertir.

    Comme le disait très justement Natacha Polony trois jours avant les attentats du 13 novembre: «Nous avons réduit la société occidentale à ce qu'elle a de plus faible: le bien-être et le droit des peuples à disposer d'un écran.» Comment s'étonner, dès-lors, que cette culture du rien soit aujourd'hui concurrencée par le nihilisme de Daech?

    L'humanité d'une civilisation se mesure à l'aune de sa vigueur culturelle. C'est parce que nous avons laissé notre culture s'effondrer que la barbarie est réapparue. Nous avons cru que l'affirmation de ce que nous sommes agresserait les nouveaux venus en France, alors que c'était au contraire la condition même de leur intégration parmi nous et, partant, de leur épanouissement. C'est parce que nous avons renié notre héritage et nos racines que nous voyons aujourd'hui resurgir parmi nos fils et nos filles une violence qu'on croyait à tout jamais bannie de notre territoire.

    Notre réponse à l'Islam radical sera vaine si elle se limite à des réactions sécuritaires, militaires ou politiques ; sur le long-terme, nous ne gagnerons la guerre qu'à la condition d'aimer et de faire aimer un héritage culturel commun. Notre société devra réaffirmer l'amour de sa culture et de ses grands penseurs, la fierté de toute son histoire, des Gaulois à notre République, et l'attachement aux racines judéo-chrétiennes qui lui donnent sa stabilité et ses ressources spirituelles. La culture du seul divertissement et de la consommation sans limites ne satisfait plus personne. Nos enfants ne résisteront aux sirènes de l'islamisme qu'à la condition d'être intégrés à une civilisation qui réponde à l'exigence de leurs aspirations. Il est temps de leur donner un idéal.  •

    Madeleine de Jessey est agrégée de Lettres classiques. Porte-parole de Sens Commun, elle est déléguée nationale des Républicains en charge des programmes de formation.

    Madeleine Bazin de Jessey     

     

  • « Lettres d’Ailleurs au Prince qui vient » : Louis XIV au prince Jean de France

    Par Jacques Trémolet de Villers

    Nos amis du blog de La Couronne ont eu la bonne idée de publier hier ces lignes signées de Jacques Trémolet de Villers, reprises de son livre Lettres d’Ailleurs au Prince qui vient, paru en 1999. Nous avons décidé de les reprendre à notre tour en appui de notre article qui précède, Des origines à nos jours, la branche actuelle de la Famille de France.  LFAR    

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    « Nous ne sommes pas et nous n’avons jamais été des prétendants. Nous sommes des serviteurs. »

    « Mon cher neveu,

    Et aussi pour une part que j’ai trop aimée, mon cher fils, ce que j’ai à vous dire est simple et grave. Mais c’est moi, et moi seul qui puis vous le dire. Vous êtes l’héritier légitime, le seul héritier légitime du trône de France, au regard des lois de succession, du droit international, du droit interne et du respect de mes volontés qui ont été déterminées par le seul intérêt de la France et de la paix en Europe. 

    Quand, j’ai envoyé la chair de ma chair et le sang de mon sang régner sur le Trône d’Espagne, ce fut, à la condition expresse, absolue, irrévocable, jurée devant l’Europe entière sur ce que nous avons de plus sacré, que ceux qui devenaient ainsi les Bourbons d’Espagne s’attachaient à l’Espagne et, en preuve irrévocable de cet attachement, renonçaient, pour eux et pour leurs descendants, à toute prétention à la couronne de France. Ce qui est dit est dit. Ce qui est juré est juré. Le respect de la parole donnée, la foi jurée des traités sont les conditions premières de la vie nationale et internationale. Nous ne sommes pas de la race de ceux qui renient ou les déchirent comme chiffon de papier. Nous nous interdisons de revenir dessus. Nul n’a le droit de rendre ses ancêtres parjures. 

    Depuis la fin de l’ère féodale et l’émergence des nations chrétiennes, les dynasties des grandes nations, et de la France en tout premier lieu, sont nationales. Ce qui signifie qu’elles épousent le sort de leur peuple, qu’elles vivent avec lui, en lui, de ses espoirs et de ses craintes. Elles sont dans le cœur du peuple comme le peuple est présent dans leur cœur. C’est pour que mes enfants servent loyalement l’Espagne que j’ai accepté qu’ils ne soient plus Français, espérant que par ce sacrifice, qui n’est pas sans analogie avec celui qui fut demandé à Abraham (…), je ferai d’une Europe d’adversaires une Europe de frères ou de cousins, seule façon plausible d’en faire une Europe de paix. Mais je savais aussi, par expérience acquise comme par raison naturelle et leçon d’histoire, que chaque famille, chaque nation doit d’abord être maîtresse chez elle. 

    L’important, pour nous autres Bourbons, n’était pas le renom des Bourbons. L’important, le primordial, notre raison d’être, c’était la France, et, pour ceux qui sont devenus d’Espagne, c’était l’Espagne. Nous ne sommes pas et nous n’avons jamais été des prétendants. Nous sommes des serviteurs, ou nous ne sommes rien. Nous sommes les serviteurs de l’État, les défenseurs de la république et les protecteurs de l’intérêt privé des Français, particulièrement des plus humbles. Là réside notre légitimité, et, là seulement. Elle n’est pas dans notre patronyme, non plus que dans exégèses de juristes qui prétendent que les renonciations auxquelles j’ai demandé à mes enfants de procéder seraient nulles ou non avenues. Un héritage ne se divise pas. C’est de moi, de mon sang, de mes filiations qu’ils tiennent leur droit. Ils l’ont reçu, ce droit, avec les réserves et les limites que je leur ai fixées. Qui viendra réformer ma décision ? Un aréopage de professeurs de droits et d’historiens va-t-il constituer une cour suprême qui jugera de la validité des décisions royales ? Mais je ne réponds que devant Dieu de ce que j’ai décidé et, en matière de royaume, ce que j’ai lié est lié. Ce que j’ai institué a permis à l’Espagne d’être l’Espagne, à la France d’être la France (…) Qui ne voit que nos histoires, pour être cousines, n’en sont pas moins différentes ? 

    Et au moment où le peuple de France, plus que jamais dans son pèlerinage temporel, éprouve le besoin physique de se reconnaître dans un prince incontestable, au service de tous, le connaissant et vivant avec lui, la même soi-disant cour suprême voudrait que le seul légitime fût Espagnol ! Ne laissez jamais, mon neveu, les juristes et historiens, les philosophes et les hommes de lettres, usurper sur ce qui est votre autorité propre et tient en trois mots : le bon sens. Le métier du roi est de faire prévaloir, en toutes choses, le bon sens. C’est très simple à voir, et très difficile à réaliser, car le cœur de l’homme, même celui des rois, est prompt d’abord au sophisme et à la complication. Il y faut une éducation que j’ai reçue et que j’ai voulu transmettre aux miens, c’est-à-dire au peuple entier, aux générations à venir. J’ai fait le siècle classique, qui fut celui de la beauté, de la grandeur, du charme et de la lumière qui s’attachent au bon sens. C’était très humble et ce fut très noble. 

    Tenez bon, mon neveu. Vous arrivez, comme je suis arrivé, ce qui n’est pas donné à beaucoup, au moment opportun, vous voici venir quand il faut et comme il faut. Ne vous laissez pas ébranler et ne laissez pas vos fidèles se perdre dans des débats qui ne sont même pas divertissants. Balayez ces vieilleries. Vous êtes un homme d’action et non un mannequin pour revue nostalgique. L’heure est à l’action. Montrez qui vous êtes, mon digne et légitime héritier. »   

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    Jacques Trémolet de Villers

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    lettre-au-prince-qui-vient-200x300.pngLettres d’Ailleurs au Prince qui vient

    Par Jacques Trémolet de Villers

    Édition Dominique Martin Morin

    Dans cet essai, Jacques Trémolet de Villers livre treize lettres, venues d’ailleurs, pour un prince d’ici, qui existe vraiment. Ces correspondants du ciel parlent à la terre. Les habitants de l’éternité s’adressent au prince de ce temps, le Prince Jean de France.

  • Sérotonine, de Michel Houellebecq. Le Oui et le Non à la vie

     Par Javier Portella

    blue-wallpaper-continuing-background-wallpapers-bigest-images - Copie.jpgJusqu'ici Javier Portella nous avait remarquablement éclairés sur les événements d'Espagne, nous permettant d'ajouter ses réflexions très documentées aux nôtres. Mais nous constatons qu'il a bien des cordes à son arc. Voici en effet qu'il vient de produire un article superbe et profond [Boulevard Voltaire, 13.01] sur le dernier livre-événement de Michel Houellebecq. Nous avons déjà dit que nous reviendrions sur ce dernier opus. Et nous n'en avons pas fini car son importance n'est pas - si l'on peut dire - seulement littéraire. Lisez donc !    LFAR

     

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    Il m’a laissé à la fois heureux et accablé, le dernier roman d’Houellebecq. Heureux ? Non. Quel bonheur peut apporter une histoire qui, aussi réjouissants que soient ses sarcasmes à l’encontre des bobos, baigne dans une tristesse si épaisse ? Oublions le bonheur, le plus usé (et faux) des mots. Ce que cette histoire m’a apporté, c’est la plénitude déchirée – ce n’est pas pareil : c’est infiniment mieux – qu’apporte tout grand chef-d’œuvre.

    Et celui-là en est un. C’est peut-être la plus grande des œuvres qu’Houellebecq nous a offertes. C’est, en tout cas, la plus déchirée et décharnée, la plus nihiliste et désespérée. Nul espoir n’y est permis. Cent ans de solitude, disait García Márquez. Pas cent ans, cent siècles, semble dire Houellebecq, en songeant surtout au nôtre : au siècle dont les hommes tombent plus seuls et plus nus que jamais dans l’abîme où halètent échec, ruine et décomposition.

    Et pourtant…

    Si ce n’était que cela ; si Houellebecq se bornait à cela ; si tout se réduisait à un plaidoyer sur la noirceur du monde et le non-sens de la vie, ni ce livre n’aurait rien à voir avec l’art, ni je ne m’y serais plongé à fond. C’est toujours la même chose qui m’arrive avec Houellebecq – et avec Céline aussi, cet autre génie auquel il ressemble à tant d’égards.

    En un sens, je suis profondément en désaccord avec ses idées. Ma sensibilité, si différente, ne peut que se soulever face à une vision tellement désolée du monde. Comment pourrais-je y adhérer quand, tout en souffrant et tout en combattant cette désolation, je fais mien l’amor fatinietzschéen : l’acceptation – non résignée : offensive – des desseins du sort ; le grand vitalisme qui conduit Nietzsche à s’exclamer : « Je veux en toute circonstance être celui qui dit Oui »« le grand Oui à toutes les choses élevées, belles, téméraires, le grand, le sacré Oui à la vie ».

    2051844117.jpgEt face à cela, le grand Non à la vie que balbutient les personnages d’Houellebecq, notamment ce Florent-Claude Labrouste dont les actions… ou non-actions charpentent Sérotonine. Ce qui se passe, c’est que le Non d’Houellebecq n’est jamais univoque. Il l’exprime avec un tel humour et un tel art qu’à travers lui grouille toute la contradictoire complexité d’une vie qui, avec ses mille tendresses et mesquineries, ses mille amours et désamours, ses mille bontés et méchancetés, souffle et se débat face au grand Néant qui prétend l’engloutir.

    À l’occasion – et elle est cruciale –, la vie souffle même en prenant la hauteur d’un combat politique où Houellebecq manifeste toutes ses sympathies. Elles vont à l’ancienne et aujourd’hui dépossédée aristocratie rurale, ainsi qu’aux paysans – les seuls à se sauver du grand désastre postmoderne – en butte à la spoliation entreprise par Bruxelles et par les grandes entreprises du capitalisme mondialisé.

    Non, le désarroi qui anéantit les personnages d’Houellebecq n’est pas seulement un désarroi psychologique, intime, individuel. Ou, s’il est individuel, c’est dans la mesure où il est individualiste. Ce qui les accable, c’est le désarroi qui fait chavirer les hommes dépourvus d’amour érotique, et d’attaches familiales, et des liens d’un peuple, et de l’enracinement dans des traditions, et de la fermeté d’un ordre donnant un sens à la vie vouée à la mort.

    S’il en est ainsi, si se déploient dans l’œuvre les deux moteurs qui, s’affrontant, poussent le monde – le Oui et le Non, la vie et la mort –, qu’importe alors que la littéralité de l’œuvre privilégie celui des deux moteurs qui ne serait peut-être celui qu’on tendrait à privilégier ? ■  

    Écrivain et journaliste espagnol

  • Jean-Frédéric Poisson : « Le gouvernement profite de la crise sanitaire pour raboter nos libertés publiques ».

    Au micro de Boulevard Voltaire, Jean-Frédéric Poisson dénonce la gestion de la crise sanitaire par le gouvernement qui, selon lui, se sert « des contraintes sanitaires pour faire taire les oppositions », et dénonce les « incohérences » des mesures prises, en particulier celles concernant le port du masque.

    https://soundcloud.com/bvoltaire/jean-frederic-451540792

    Le ministre de la Santé, Olivier Véran et l’ensemble du gouvernement semblent préparer les Français depuis quelques jours à un éventuel reconfinement. Que pensez-vous de l’action du gouvernement ?

    L’action du gouvernement est une catastrophe depuis le début de la crise sanitaire. On est passé d’une attitude de déni avec un président de la République qui 48 heures avant l’annonce du confinement généralisé demandait à tout le monde d’aller au théâtre et au cinéma parce que finalement rien n’était grave. Je passe sur les incohérences multiples que nous avons tous connues sur « les masques ne servent à rien et puis ensuite tout le monde doit en porter ».
    Aujourd’hui, on dit que tout le monde doit être testé, mais on attend les résultats pendant trois semaines quand on arrive à trouver un laboratoire qui accepte de le faire. Tout cela est anxiogène. C’est incompréhensible et ne repose sur aucune espèce de certitudes sanitaires et scientifiques. Quand je vois l’énergie que déploient les grands pontes médicaux de notre pays à se crêper le chignon pour savoir qui a raison, je me dis qu’au fond, les Français ont de quoi être très inquiets, absolument pas rassurés.
    Je comprends qu’ils aient perdu confiance en le gouvernement. Ils voient comme tout le monde une crise sociale et économique sans doute sans précédent pointer son nez si j’ose dire au début de l’année prochaine avec là encore, un plan de relance qui ne ressemble à rien. Personne ne comprend comment il marche. Tout le monde a déjà compris que seules les grandes entreprises en profiteront. Conclusion, je ne suis pas loin de penser que tout cela relève d’intentions sans doute louables, mais je suis de plus en plus interrogatif sur une tentative de manipulation généralisée. Je ne comprends pas pour quels motifs, on restreint nos libertés. Je ne comprends pas ou alors je comprends trop bien pourquoi on décide de prolonger de cinq mois l’interdiction de se réunir. Je vois bien qu’on profite aussi de cette crise sanitaire pour raboter nos libertés publiques dans des proportions inédites jusque là.
    Au fond, si la gestion de la crise sanitaire n’était que pilotée par des impératifs de santé, je dirais que c’est une catastrophe puisque personne ne comprend rien et qu’en réalité tout le monde à la trouille.
    En revanche, si d’autres motifs sont davantage politiques, sociétaux, alors là je trouve que c’est très habile de la part du gouvernement et c’est très dangereux pour nous tous.

    L’ancien Premier ministre, Édouard Philippe fait un peu de prospective sur l’année à venir et prédit que ce sera une année de tempête. On a parfois l’impression que cette crise sanitaire tombe à point nommé pour étouffer toutes contestations sociales.

    Je partage assez ce point de vue. Je suis très surpris de la tonalité des propos d’un Premier ministre qui était encore en fonction il y a trois mois, oubliant qu’il a été aux manettes de notre pays pendant trois ans. Sa part personnelle de responsabilité dans la situation est très lourde. C’est presque irresponsable de sa part de tenir des propos d’une telle nature. On attend plutôt d’un Premier ministre ne fut-il plus en fonction, des paroles qui ne soient pas rassurantes. Les Français ne sont pas tous des enfants. À quoi sert le politique s’il n’est pas là pour donner des perspectives ?
    Encore une fois, cette capacité pour le pouvoir en place de profiter d’un reconfinement ou de contraintes particulières liées à la crise sanitaire pour étouffer les protestations de toutes natures et faire taire les oppositions, je ne sais pas si c’est l’intention de départ, mais en tout cas aujourd’hui cela y ressemble beaucoup. À défaut que ce soit initialement une intention originelle, je pense que tout est fait pour que les protestations étouffent. Il nous appartient à nous adversaires du pouvoir en place, de rappeler les choses, de les dire, de faire de la pédagogie et de continuer à se bagarrer pour dire qu’il y a d’autres solutions que la France ne disparaîtra pas. Si effectivement, on continue avec une telle gouvernance et de tels responsables publics, il y a des chances que nous entrions dans l’ornière pour un moment.

    Comment expliquer que les contestions visibles soient d’ordre racialiste avec les mouvements autour de la mort d’Adama Traoré et d’autre part autour de ceux qu’on appelle encore des Gilets jaunes même si ce terme est maintenant sujet à caution autour de personnalité comme Jérôme Rodrigues. Cette contestation est-elle légitime en France ?

    Elle est légitime, mais il y a plusieurs raisons au silence. La première c’est que faire peur aux Français fonctionne. Tout le monde est exaspéré et moi le premier de devoir porter un masque partout et tout le temps pour des raisons que personnes ne comprend. De plus, ces raisons sont incohérentes. Lorsque je marche sur le trottoir, que je me tiens à 50 cm pour téléphoner sur les trottoirs parisiens, que deux personnes sont assises à la terrasse d’un café à 50 cm de moi et qui elles, parce qu’elles sont à une terrasse de café, ont le droit de ne pas porter de masques, où est la cohérence ?
    Vous roulez à moto et sous le casque, vous êtes obligé de porter un masque. En revanche, si vous roulez à vélo, vous avez le droit de ne pas en porter. Expliquez-moi comment cette affaire-là fonctionne. Que comprenez-vous ? Sinon que, en chambre, le Conseil scientifique et les cabinets mystérieux et brumeux décident des trucs un peu contradictoires.
    On fait peur aux gens et cela fonctionne. La peur empêche, d’une certaine manière, de poser les problèmes sur la table.
    Deuxièmement, lorsque vous entendez le vice-président des Républicains, Guillaume Peltier expliquer qu’il préfère être en meilleure santé avec moins de libertés que l’inverse, je me dis que décidément je ne partage pas cette vision du monde. Quand vous êtes dans cette vision du monde, vous préférez être rassuré d’être en bonne santé, ce que personne ne peut vous garantir au prix d’une réduction de vos libertés. Où est la nécessité de s’opposer ? Cela ne sert à rien !
    D’une certaine façon, le virus n’a pas pénétré uniquement les poumons et les bronches, c’est un virus mental qui nous attaque tous et qui réduit notre capacité de résistance entretenue par des gens qui devraient au contraire, participer à l’éclaircissement des intelligences et des esprits. Ils ont renoncé à cette tâche-là parce qu’au fond ils n’ont rien à dire. Je pense que cette situation convient très bien au pouvoir en place qui va pouvoir aborder les prochaines échéances électorales avec des oppositions très très affaiblies qui n’ont rien à dire et qui d’ailleurs, n’ont pas l’intention de dire quoi que ce soit de plus.

     

    Jean-Frédéric Poisson

    Président du Parti Chrétien-Démocrate
     
  • L'idéologie au pouvoir : l'analyse politique d'Hilaire de Crémiers*

    H D C - Copie.jpgLa conscience politique des Français peut-elle arriver à maturité ? C’est toute la question. Des politiciens qui vivent de la République, ont tout intérêt à les maintenir dans cet état d’infantilisme qui les empêche de porter sur la politique le regard franc et direct qui s’impose aujourd’hui.

    La popularité de François Hollande est au plus bas. Les politologues se penchent gravement sur le cas. Mais il n’est pas besoin d’être grand clerc pour en saisir les raisons. Cet homme n’est pas à sa place ; mais alors pas du tout ! Aucune épaisseur historique, aucune sincérité psychologique, aucune hauteur de vue, aucune droiture de vie, aucun jugement de fond, le type même du politicien tel que la République française l’a toujours façonné et dont la médiocrité est à l’image du système dont il vit. Il a réussi ses concours, dit-on ; oui, en débitant des ritournelles idéologiques qui servent de principes au système. Il a gagné les élections, ajoute-t-on ; oui, mais en utilisant avec ruse toutes les ressources d’un système qui tourne en rond sur lui-même. Sérieusement, ce n’est pas pour ça qu’il est le meilleur. C’est une très fausse idée que le régime actuel impose, selon laquelle le candidat qui gagne, a pour lui, avec le pouvoir qu’il acquiert, l’intelligence, la sagesse, la perspicacité, le courage que ce même pouvoir requiert. L’illusion des Français sur ce point est totale. D’où leur déception récurrente. 

     

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    Où est l’intérêt national ?

    L’Allemagne ne connaît pas cette incohérence. Angela Merckel est chancelière pour un troisième mandat : elle s’inscrit dans une politique allemande continue qui, au-delà de son prédécesseur Schröder, se relie naturellement à celle d’un Kohl et d’un Adenauer. Ce qui prime dans la pensée et dans l’action de ces hommes d’état allemands, c’est l’intérêt de l’Allemagne, celle d’après-guerre qui a réussi son redressement, sa réunification et qui place maintenant son économie au centre de l’Europe, comme seul moteur possible de cette Europe qu’elle ne conçoit plus qu’à l’allemande.

    En Angleterre, il en est de même, en dépit d’une classe politique presque aussi détestable que la nôtre : l’intérêt anglais, fût-il des plus vulgaires, prime sur toute autre considération, même au milieu des querelles doctrinales les plus violentes, ce qui réduit à néant toutes les vaines tentatives de la France de ramener l’Angleterre à ses conceptions. L’Angleterre sortira de la crise, sans nous en demander la permission, tout comme l’Allemagne. 

    Les mêmes considérations peuvent se développer à propos des Etats-Unis dont les institutions ne fonctionnent jamais que dans et pour l’intérêt de leur économie, de leur dollar, de leur conception politique, qui forment un tout, sans aucun souci des répercussions de leurs décisions, en particulier monétaires, sur les autres économies, mais avec la certitude absolue que la seule règle d’or pour eux ne peut et ne doit être que le salut et la prospérité de « leur » Amérique, condition première de la prospérité et du salut du monde.   

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    Pourquoi donc la France s’enfonce-t-elle dans son déclin ? Question d’hommes, pense-t-on ? L’équipe au pouvoir ne serait qu’un ramassis d’incompétents, d’idéologues, de pervers. Et, certes, l’équipe en place n’est pas brillante et il n’est pas de jour où des propos présidentiels ou ministériels n’ajoutent au ridicule de leur situation déjà amplement dérisoire. Ridicule sur la scène intérieure, ridicule encore sur la scène extérieure. François Hollande à la télévision ou à l’Onu est une « blague » vivante. La France en pâtit. Et la cote du président aussi !

     

    Sortir d’un système pervers

    Mais l’erreur serait de croire que c’est cette clique qui seule est mauvaise et que là résiderait la cause de tous nos maux. C’est évidemment ce que veulent faire croire les opposants, ceux qui prétendent  prendre ou reprendre la place, le pouvoir, ce pouvoir toujours à conquérir, la maladie française par excellence, pire que chez tous les autres peuples civilisés, et qui donne à notre monde politique français ces mœurs de tribus primitives en luttes intestines perpétuelles. La vraie question qu’il serait judicieux de se poser, serait plutôt la suivante : que peut valoir un système politique qui permet l’accession au gouvernement de tels hurluberlus aussi peu en adéquation avec une conception de la France digne de ce nom ? Imaginez que ces énarques qui nous gouvernent, si fiers d’appartenir à la promotion Voltaire, ne savent même pas que l’écrivain le plus antisémite de tous les temps répond à ce nom de Voltaire dont ils se réclament, et que le philosophe le plus méprisant pour le peuple qui ait jamais existé sur cette terre, s’appelle aussi Voltaire dont ils se glorifient d’être les disciples ! S’ils en avaient au moins le style ! Mais même pas ! Leur discours de patauds sont aussi aériens qu’un traité d’économie socialiste.

    Comment la France peut-elle avoir des zozos pareils pour la diriger ? Vraie et seule question, doublée d’une autre qui lui est semblable : avec un tel système, une équipe gouvernementale qui oserait se qualifier de meilleure – ce qui, certes, n’est pas difficile – arriverait-elle à renverser le cours des choses ? Voilà le point crucial et l’expérience est déjà faite, archi-faite. Rien n’a changé depuis des décennies dans tous les domaines. Car c’est le système politique qui en France est idéologique et pervers dans son idéologie ; personne n’y échappe, ni les Fillon, ni les Copé, ni les Marine Le Pen, ni aucun des autres. Un « bon », un supposé « bon », peut-il faire le bien dans un tel cadre ? Et peut-il même envisager de parvenir au pouvoir sans  donner un gage audit système.

    Et pire : le « bon » ou « supposé bon » ne devient-il pas mauvais par le jeu même du système ? Aucune bonne réforme n’a jamais abouti ; le savent bien les rares ministres qui s’y sont essayés ! En revanche, les mauvaises passent comme lettre à la poste. à l’Éducation nationale où tout recommence avec des questionnaires aussi coûteux qu’inutiles, des théories aberrantes qui sont imposées, en dépit du bon sens ; en finances publiques où la taxation et la dette sont la seule règle des gouvernants qui bâtissent leurs projets sur les revenus et les patrimoines de leurs concitoyens ; en défense nationale où les budgets sont réduits au moment précis où le danger apparaît ; en matière de justice où la victime devient le coupable, le gendarme et le policier les bandits à poursuivre et où les magistrats sont sans cesse soumis aux oukazes d’idéologues sans foi ni loi ; en matière de mœurs où il est évident que tout était réglé d’avance selon l’accord fondamental qui a déterminé la candidature et le succès d’Hollande jusqu’au denier remaniement du comité d’éthique pour permettre le passage de toutes les lois dites sociétales.

    Comment oser parler d’écologie après de tels traficotages ? Leur prétendue loi de transparence politicienne et d’interdiction du cumul des mandats aboutira concrètement à une mainmise des partis politiques encore renforcée sur la représentation, avec partout des stipendiés aux ordres, sans que la corruption ne cesse pour autant, au contraire, comme il est archi-démontré.

    Ce système est tellement outrageant pour le peuple français qu’il exprimera son rejet profond aux prochaines élections municipales et européennes. Ceux qui vivent du système en ont peur mais ils savent aussi que leur système a été jusqu’ici toujours assez fort pour surmonter de telles crises… Jusqu’au jour où, tout à coup, ce seront les institutions mêmes dudit système qui s’effondreront. C’est dès aujourd’hui ce qu’il faut prévoir. En travaillant à la seule et véritable relève. 

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    * Article paru dans le n° 122 de Politique magazine (octobre 2013)

  • Louis XVI 2OI7 ! Une très, très longue liste ...

     

    « On est près du grand mouvement de l’inversion ». Lequel ? Celui qui mettra en cause la Révolution, la Révolution historique (« La terreur est dans son ADN ») mais aussi la Révolution agissant aujourd’hui. « Il y a des signes du sursaut ; des gens qui bougent ; des voix qui s’élèvent et qui parlent de plus en plus fort ». Philippe de Villiers 

    Vous trouverez ici, au fur et à mesure qu'elles seront annoncées, les messes et activités prévues dans votre région - du moins, toutes celles dont nous aurons eu connaissance. Vous aurez certainement à cœur d'y prendre part. Il ne s'agit pas de simples commémorations et votre présence, nombreuse, leur donnera leur plein sens actuel.  

    Annonces

    Nous publierons ici la liste des messes, conférences, débats et manifestations dont nous aurons eu connaissance. Une très très longue liste ...

    Les organisateurs de messes et manifestations autour du 21 janvier 2017 peuvent, d'ores et déjà, nous en communiquer les détails, pour être publiés ici. Courriel : lafautearousseau@outlook.fr]

    On se reportera en fin de liste pour atteindre les dates encore à venir. 

    DIMANCHE 15 JANVIER

    Nice : 10h,  Chapelle des Pénitents rouges, rue Jules Gilly (extrémité Est du Cours Saleya). A 12h, Déjeuner à l'Hôtel Aston, 12 Avenue Félix Faure. A 15h, conférence de Philippe Pichot-Bravard : « Louis XVI, sa personnalité, ses idées politiques, son attitude face à la révolution française ».

    VENDREDI 20 JANVIER

    •Bruxelles : 18h30 : Messe de Requiem uivie de la lecture du Testament de Louis XVI, Eglise Saints Jean et Etienne aux Minimes, rue des Minimes n°27, 1000 Bruxelles.

    Tournai [Belgique] : 11h, Cathédrale Notre-Dame de Tournai (Chapelle du Saint-Sacrement).

    SAMEDI 21 JANVIER

    Paris : 11h, Saint-Germain-l'Auxerrois, paroisse des Rois de France, Messe célébrée à la demande de l’Oeillet Blanc pour le repos de l’âme du roi Louis XVI, en présence des Princes de la Maison de France. 

    - A 10h, cérémonie et dépôt de gerbe Place de la Concorde, devant la statue de Rouen et l'Hôtel Crillon. Participation du Choeur Montjoie Saint Denis.

    - 11h : Eglise Saint Eugène - Sainte Cécile, 4 Rue du Conservatoire, 75009.

    - 18h30 : Messe de Requiem avec Absoute à Saint Nicolas du Chardonnet, 23 rue des Bernardins (5ème).

    Marseille : - 11h30 , Basilique du Sacré-Coeur, 81 avenue du Prado. La Messe, dite à la demande de la Fédération Royaliste Provençale et Action Française Provence, ainsi que du Souvenir Bourbonien, sera célébrée par Mgr. Jean-Pierre Ellul, recteur de la basilique. Une rencontre suivra, dont le programme est donné par ailleurs. 

    - 16h30, Monastère Orthodoxe du Saint Archistratège Michel de Marseille, 2, rue Briffaut, pannichyde (Office des défunts http://fraterniteorthodoxe.blogspot.fr/).

    Saint Denis : 12h, Basilique royale.

    Bruxelles : 11h, Eglise du Couvent Sainte Anne, Avenue Léopold Wiener, 28, Bruxelles (1170).

    Bucarest : 12h, Chapelle du Sacré-Coeur, Str. Cpt Demetriade 3.

    Lyon : - 10h30, Eglise de la Rédemption, Place Puvis de Chavannes (6ème).

    - 11h00, Eglise St Georges (5ème).

    18h30: Prieuré Saint Irénée, 23 quai Perrache (2ème).

    Bordeaux : - 12h, Eglise Saint Bruno.

    - 18H30, Eglise Saint Eloi de Bordeaux, 1 Rue Saint-James (près de la Grosse Cloche).

    - 18h30 : Eglise Notre-Dame du Bon Conseil, 62 rue de Lisleferme.

    Bayonne : 12h, Cathédrale de Bayonne, Messe célébrée par Monseigneur Marc Aillet pour le roi Louis XVI et pour la France.

    Toulouse : 11h30, Chapelle Saint Jean Baptiste, 7 rue Antonin Mercié.

    Strasbourg : 17h30, Cathédrale Notre-Dame.

    Versailles : 19h à la  chapelle Notre Dame des Armées, Impasse des gendarmes.

    Lille : 11h, Chapelle Notre-Dame-de-la-Treille, 26 rue d'Angleterre.

    Amiens : 11h30, Chapelle Saint Vincent de Paul, 54ter rue Jules Barni.

    Grenoble : 11h, Collégiale Saint-André, Place Saint André.

    Dijon : 11h, Basilique Saint-Bernard-de-Fontaine-lès Dijon. A 17h, conférence à l'Hôtel Ibis Dijon Gare : « La personnalité et la modernité du roi Louis XVI », par le Prince Alexandre de Kisseley.

    Metz  : 18h, Eglise de l'Immaculée-Conception, 47 rue des Trois-Évêchés, Metz Queuleu.

    Montpellier : 18h, Chapelle des Pénitents bleus, 11 rue des Etuves.

    Toulon : - 18h30, Eglise Saint-François de Paule, Place Louis Blanc.

    - 11h, Eglise Saint Pierre des Moulins, Lotissement des Oliviers, Route du Val d'Ardennes.

    Fontainebleau : 18 h, Eglise du carmel, 8 Boulevard  du Gal. Leclerc.

    Limoges : - 10H30. Chapelle Saint Martial. 7 rue Guillaumin.

    -10H45, Chapelle Saint Antoine des Papillons, rue des Papillons.

    -11H15, Eglise Saint Michel des Lions, 15 Place Saint-Michel.

    Nimes : 11h, Chapelle Sainte Eugénie, rue Sainte Eugénie.

    Béziers : 17h30, Chapelle des Pénitents, rue du 4 septembre. Le dimanche 22, Fête des Rois à Nissan (renseignements : association.louisXVI@gmx.fr - Tel : 04 67 28 26 78 ; 06 70 32 65 88).

    Carcassonne : 10H, Basilique St Nazaire & St Celse.

    Saumur : 11h45, Eglise de Saint Lambert des Levées, 32 Avenue de la Croix de Guerre.

    Louailles : 11h, Eglise de Louailles (72.3000, à 8,5km de Sablé-sur-Sarthe, route de La Flèche-Tours). La Messe sera suivie, à 12h30, d'un Déjeuner-Débat, Salle Polyvalente de Vion (à 3,5km de Louailles) : « Transhumanisme, la fin de l'espèce humaine », par le Docteur Jean-Pierre Dickès. 

    Bazas (Gironde) : 15h, Cathédrale Saint Jean Baptiste, Place de la Cathédrale.

    Boulogne : 18h, Eglise Saint Louis, , rue Félix Adam.

    Nice : 11h, Eglise Saint Paul, Paroisse Saint Jérôme, Boulevard Pessicart.

     Nancy : - 11H, Chapelle du sacré Coeur, 65 rue Maréchal Oudinot.

    - 18H30, Chapelle du sacré-coeur, 65 rue du Maréchal Oudinot.

    Coligny (Ain) : 10h, Eglise Saint Martin, rue Saint Martin.

    La Gaubretière (Vendée) : 18h30, Chapelle Notre-Dame de la Sainte Famille, Ramberge (à 30 km à l'ouest de Mauléon, 10 km au nord-ouest des Herbiers).

    Vichy :  - 9h, Eglise Saint-Louis, 33 rue Sainte Cécile.

    - 19h, Chapelle du Sacré-Coeur de l'école Jeanne-d'Arc de Vichy, 12 rue du Maréchal-Joffre.

    La Roë (Mayenne) : 11h, Eglise de La Roë.

  • Macron-Défense : l’affaire Villiers n’est pas qu’une question de chiffres

     

    Par Roland Hureaux

    Au delà des chiffres et des budgets, Roland Hureaux se livre ici [Causeur - 16.08] à une fine et exacte analyse du rapport personnel de l'actuel président de la République avec nos Armées. Rappelons que Roland Hureaux fut l'un des participants au colloque d'Action française du 7 mai 2016, à Paris, « Je suis royaliste, pourquoi pas vous ? »    LFAR

     

    1871659358.jpgPour beaucoup, le différend qui a opposé le président Macron au général Pierre De Villiers, chef d’état-major des armées, pourrait être ramené à une question de chiffres, ce qui serait après tout normal s’agissant d’un président issu de I’Inspection des finances. Mais une telle approche serait bien réductrice.

    Question de chiffres : Macron avait promis dans son programme électoral de remonter le budget de la Défense à 2 % du PIB. Une promesse qu’avaient d’ailleurs faite aussi Marine le Pen et François Fillon. Comment Emmanuel Macron, adepte inconditionnel de l’OTAN, aurait-il pu proposer autre chose que le minimum que cette organisation a fixé et qui a été rappelé récemment par le président Trump. Mais 2%, c’est beaucoup, environ 44 milliards ; à un budget actuel de 32 milliards, il faudrait donc en ajouter 12.

    Autre chiffre, le déficit autorisé par l’Union européenne : 3 % du même PIB, soit 66 milliards qui sont déjà une tolérance, assortie de la promesse française de le ramener à zéro, jamais respectée par le gouvernement Hollande (dont Macron était le ministre des Finances). Ce n’est pas en effet en accumulant des déficits (et donc avec un supplément d’endettement de 3 % l’an) que l’on réduira une dette qui atteint aujourd’hui les 100 % du PIB. Il reste qu’Emmanuel Macron, qui a voulu entrer en fanfare sur la scène européenne, et pour qui les consignes de Bruxelles, comme les souhaits de Berlin,  sont la Loi et les prophètes, veut à tout prix, pour assurer sa crédibilité, redescendre à ce niveau. Il lui manque pour cela 8 milliards. L’habitude de Bercy dans ce cas-là est de ponctionner les ministères régaliens, à commencer par la Défense à qui, au lieu d’accorder 12 milliards, on demande 850 millions tout en gelant 2,7 milliards.

    Cette logique n’explique pas seule que le mécontentement des armées justement exprimé par leur chef d’état-major en commission de la Défense soit devenu une affaire d’Etat.

    Au-delà des chiffres, le choc des cultures

    On est surpris du degré de mépris dont le président Macron fait l’objet sur la toile dans de nombreux  textes, anonymes ou pas, issus de la communauté militaire. Nicolas Sarkozy et François Hollande, que les militaires n’aimaient pas beaucoup, n’ont jamais essuyé pareille hostilité. Et surtout pas moins de trois mois après leur prise de fonction.

    On peut faire la part des maladresses du nouveau président, de son absence de sensibilité militaire : même s’il fanfaronne ici ou là au milieu des troupes, il est le premier président à n’avoir pas fait de service militaire. La génération X-Y !

    Il faut cependant aller plus profond. La personnalité d’Emmanuel Macron rebute bien des gens, surtout dans les armées. Il porte avec lui un air de légèreté qui n’est pas vraiment le genre de la maison. Depuis la République romaine et sans doute avant, le chef militaire, confronté chaque jour à la mort, réalité ultime, est un homme grave. C’est cette gravitas, signe d’une maturité accomplie, que les militaires attendent du chef de l’Etat qui est aussi le chef des armées. Le moins qu’on puisse dire est que le nouveau président a, en la matière, des progrès à faire. Beaucoup, dans le grand public, ont été par exemple choqués par sa visite à Oradour-sur-Glane où il multipliait de tous côtés les poignées de main à la Chirac semblant confondre ce lieu de mémoire tragique avec un comice agricole.

    Sans doute sa vie privée n’appartient-elle qu’à lui. Mais pour exercer l’autorité, il faut donner le sentiment d’une personnalité accomplie. Or Jacques Lacan nous l’a enseigné, c’est la résolution du complexe d’Œdipe qui ouvre douloureusement le sujet au monde réel. Nous ne dirons pas qu’Emmanuel Macron ne l’a pas résolu. Mais en politique, seules les apparences comptent.

    Militaires contre idéologues

    Il y a plus : sur presque tous les sujets, Emmanuel Macron a fait campagne sur les marqueurs idéologiques qui, depuis 15 ans, définissent ce qui est politiquement correct :  Europe, libre-échange, dépassement de la nation (la France étant accusée par lui de « crime »), mépris des considérations   culturelles et ethniques par l’ouverture à l’immigration, antiracisme, non-discrimination, hyper-écologie, théorie du genre, vaccins à tout va, etc. Sur aucun sujet Macron n’a pris la moindre distance par rapport à la doxa dominante. Il s’est bien gardé aussi de désavouer celles qui ravagent des secteurs comme l’Education nationale (méthode globale) ou la justice (culture de l’excuse). Non pas parce que cela plaisait à ses électeurs, bien au contraire. Mais parce que cela plaisait à ces prescripteurs essentiels que sont les gens de médias, largement inféodés à l’idéologie.

    Presque tous les ministères ont aujourd’hui la leur, qui suscite généralement l’ire de populations pas toujours conscientes de ce qui leur arrive: l’Intérieur veut à toutes forces supprimer 30 000 petites communes, l’équipement veut interdire toute construction hors des périmètres déjà construits, quelles que soient les traditions locales, la Santé veut fonctionnariser la médecine libérale etc. Le ministère de la Défense n’est pas entièrement exempt de telles idéologies (qui ne sont généralement pas beaucoup plus que des idées simplistes jamais remises en cause), mais seulement en manière d’organisation, où les civils ont leur mot à dire : ainsi les bases de défense, répondant à la culture du regroupement, ont mis plus de désordre qu’elles n’ont fait d’économies. Mais dans l’ensemble le ministère de la Défense demeure relativement préservé de l’idéologie. La raison : les engagements opérationnels multiples dans lesquels nos armées sont impliquées permettent un retour d’expérience constant, ce qui n’est pas le cas dans la plupart des administrations civiles. « Quand le canon tonne, les cons se taisent », dit un vieux dicton militaire. Les idéologues aussi, l’idéologie ayant pour caractère de faire perdre le sens du réel, éminemment nécessaire au combat.

    Il semble que l’idéologie et le déficit œdipien aillent ensemble. C’est l’immaturité qui explique le succès des idéologies, particulièrement dans une classe intellectuelle ou médiatique plus à l’abri que le peuple du contact direct avec le réel, parfois si dur. Sur ce chapitre, Emmanuel Macron est bien un enfant du siècle.  

    est essayiste.
  • Un mathématicien égaré en économie, par François Reloujac *

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    Le 13 octobre dernier, l’académie Nobel a attribué le prix d’économie au chercheur français Jean Tirole. Une manifestation de « la France qui gagne » aussitôt saluée par le président de la République et par le Premier ministre. Mais personne ne s’est véritablement interrogé sur la raison qui permet d’affirmer que les travaux de Jean Tirole illustrent la pensée économique française, même si, officiellement, celui-ci a été récompensé pour ses travaux sur « le pouvoir de marché et la régulation ».

    Jean Tirole est un ancien élève de l’école polytechnique. Il est allé mettre en œuvre ses acquis théoriques d’exploitation des statistiques économiques au Massachusetts Institute of Technology, le fameux MIT. C’est là qu’il s’est familiarisé avec la théorie des jeux, un ensemble d’outils qui analyse les situations dans lesquelles l’action optimale pour un agent dépend des anticipations qu’il forme sur la décision d’un autre agent. étant entendu que cet agent peut être aussi bien une personne physique qu’une entreprise.

    S’il n’a pas pris la nationalité américaine – contrairement à un autre prix Nobel d’économie « français », Gérard Debreu – c’est qu’il est revenu en France pour y créer, sur le modèle des universités américaines, la « Toulouse School of Economics » (TSE). Cette dernière est uniquement financée par des grandes entreprises. Les cours y sont dispensés en anglais à des étudiants qui, pour 60 % d’entre eux sont étrangers, par des professeurs dont bien peu sont de nationalité française.

    Rien d’étonnant, donc, dans le fait que cette école soit soutenue par des grandes entreprises ouvertes à l’international et ayant sur leurs marchés respectifs une position de monopole ou de quasi-monopole. La théorie des jeux et les études statistiques pointues qui sont développées à l’école toulousaine leur sont très utiles : elles leur permettent d’améliorer continuellement leur capacité à analyser toutes les combinaisons possibles des réactions de leurs « partenaires » (administration, fournisseurs, consommateurs). Le jeu est d’autant plus « payant » qu’un joueur principal – une entreprise en position de force sur un marché – est mieux « informé » que les autres. C’est pourquoi cette école cherche à tempérer cet avantage que possède le plus fort par un mécanisme dit de « régulation » dont le but avoué est de maintenir une apparence de libre concurrence.

     

    Que récompense le prix Nobel d’économie ?

    Jean Tirole est un grand mathématicien, un excellent professeur et un chercheur consciencieux. Mais sa distinction révèle les limites du prix Nobel qui ne couronne plus des économistes dont les travaux  cherchent à améliorer le système ou le bien commun économique, mais qui distingue désormais uniquement des spécialistes travaillant sur des secteurs particuliers, fussent-ils utiles à tous ou simplement à un petit nombre.

    De fait, pour Jean Tirole comme pour nombre de ses prédécesseurs, l’économie, relevant de la « science », doit toujours l’emporter sur le politique. Il se rattache donc, comme l’a dit le professeur Christian Stoffaes, « à la gauche utopique pré-marxiste et au positivisme » et, comme la plupart des « ingénieurs-économistes », adhère « à l’idéologie du progrès par la science ». C’est pourquoi Jean Tirole a toujours considéré que le « régulateur » économique – en France, l’Autorité de la concurrence – devait être mis à l’abri de toute influence politique. Il a d’ailleurs tiré les conclusions de cette logique pour justifier la création d’une Union bancaire européenne qui ne dépendrait pas des états : « Il ne faut pas, a-t-il dit, que les gouvernements puissent intervenir dans la réglementation prudentielle car les gouvernants ont leurs propres objectifs qui peuvent après entraîner des difficultés importantes pour les banques ».

    Ainsi, depuis plus de vingt ans, le prix Nobel d’économie ne couronne que des spécialistes de micro-économie. D’une part, parce que l’analyse des statistiques individuelles permet de donner une tournure plus scientifique à la recherche que l’étude des statistiques nationales. D’autre part, parce que de telles études ont une apparence plus « démocratique » que les analyses macro-économiques : pour les « démocrates », en effet, l’intérêt général n’est que la somme des intérêts individuels. Si l’on « maximise » le profit de chacun, on « maximisera » le bien-être de tous. Pour le plus grand bonheur des (grandes) entreprises. 

    C’est l’avis de Manuel Valls qui a remis au goût du jour un projet déjà porté par Nicolas Sarkozy mais qui est maintenant revêtu de l’autorité du prix Nobel : la fusion des contrats à durée indéterminée et des contrats à durée déterminée dans un contrat de travail « unique » !

     

    Que penser du contrat de travail unique ? 

    Derrière cette « réforme » se cache en fait la suppression des CDI, accusés de rigidifier le marché du travail en « surprotégeant » ceux qui en bénéficient, et la généralisation du CDD. Elle est bien vue des grandes entreprises multinationales qui y voient le moyen de délocaliser plus facilement leur production vers des pays où les charges sociales sont moins élevées ou de remplacer les travailleurs autochtones par des immigrés moins exigeants, mais elle se heurte, naturellement, à l’hostilité des syndicats de salariés. Avec une telle réforme, on se rapprocherait du système américain. Mais, si le marché du travail américain est plus fluide et moins contraint que le nôtre, cela ne signifie pas obligatoirement que sa fluidité est « la » cause du plein emploi. à l’inverse, les études statistiques relatives à l’activité des multinationales montrent effectivement qu’elles se portent mieux si elles peuvent « presser le citron et jeter la peau ». Autrement dit, remplacer leurs salariés dès qu’ils sont jugés moins performants. On a beau dire que le marché du travail, en France, protège trop l’emploi et pas assez le salarié, ce n’est pas cette mesure qui, à elle seule, changerait la donne en profondeur. Le chômage ne diminuerait pas uniquement du fait d’une telle « réforme ». Il ne diminuera que si les produits fabriqués en France trouvent preneur au prix auquel ils sont obtenus et s’ils correspondent à un besoin réel des consommateurs. Agir uniquement sur la nature juridique des contrats du travail, c’est s’intéresser à un symptôme dans le but de n’avoir pas à affronter les causes du mal. Qu’un mathématicien, égaré dans le monde économique de la grande entreprise se laisse tenter, soit ; qu’un homme politique, responsable du bien commun, lui emboîte le pas, non !   

    Le prix Nobel d’économie 2014 vient donc couronner un Français qui a fait le choix, à un moment crucial de sa carrière, de revenir en France… Mais dont on peut se demander si, même inconsciemment, il n’est pas plus au service des intérêts américains qu’un Français ayant assimilé les acquis intellectuels américains pour les faire servir au rayonnement de la France dans le monde. ♦

     

    Source : Politique magazine

  • Défense : 17 députés se mobilisent pour Photonis et Latécoère, susceptibles de passer sous pavillon américain par Lauren

    Propriété de la société d’investissement française Ardian, le groupe Photonis a récemment été mis en vente, alors qu’il fait partie des entreprises stratégiques pour le ministère des Armées.

    Ayant pris une longueur d’avance sur ses concurrents dans le domaine de la vision nocturne, avec sa caméra CMOS Kameleon, qui permet de filmer en couleur pendant la nuit, Photonis développe également des tubes de puissance pour les communications militaire ainsi que des composants pour le laser Megajoule [composante du programme « Simulation » de la dissuasion nucléaire], les satellites et les sous-marins nucléaires. Autant de bonnes raisons pour que les États-Unis s’y intéressent…

    Quant à l’équipementier aéronautique Latécoère, il fait l’objet d’une OPA [offre publique d’achat] lancée par la société d’investissement américaine Searchlight Capital Partners, laquelle s’est engagée à acquérir au prix de 3,85 euros par action la totalité des 70.120.791 titres qu’il ne détient pas encore [soit 73,95% du capital]. L’annonce de cette opération a d’ailleurs fait décoller la valeur boursière du groupe toulousain [+32% le 1er juillet 2019]. Et, visiblement, à lire les conseils de certains titres de la presse financière, les actionnaires actuels auraient intérêt à vendre.

    « Au regard d’un historique de performances décevantes, la porte de sortie offerte par Searchlight a été jugée honorable. En effet, le prix proposé valorise Latécoère à 13 fois le résultat opérationnel prévu pour l’exercice en cours, soit 37% de plus que son concurrent américain Spirit, pourtant beaucoup plus dynamique et rentable que le français, alors que contrairement au reste du secteur, le titre reste ainsi bien éloigné de son sommet absolu, touché le 30 janvier 2006, à 40,20 euros », fait ainsi valoir Le Revenu.

    Seulement, Latécoère est développé une innovation qui, appelée LiFi, « permet une expérience de connectivité à bord d’un avion supérieure en termes de bande passante, de latence et de stabilité », sans interférence avec les équipements sensibles présents à bord. « Le LiFi permet également de réduire le câblage et, associée à une mise à niveau de l’infrastructure vers des solutions en fibre optique à faible poids, il réduira le poids et la consommation en carburant de l’avion », précise Latécoère. Cette technologie est en outre 100 fois plus rapide que l’actuel WiFi…

    D’où l’appel transpartisan lancé par 17 députés [*] au Premier ministre, Édouard Philippe.

    « Considérant que Photonis relève de la procédure de contrôle des investissements étrangers en France [IEF] et du 10° de l’article R 153-2 du Code monétaire et financier, cette opération est soumise à autorisation préalable. En outre, l’article R 153-9 autorise le gouvernement à assortir une éventuelle cession de conditions visant à préserver nos intérêts nationaux », font valoir les parlementaires, avant de faire observer que les capteurs ont été « expressément identifiés comme faisant partie d’un domaine « à maîtriser souverainement » par la Revue de Défense et de Sécurité nationale publiée en 2017.

    S’agissant de Latécoére, ces députés ont également estimé que son cas « relève de la procédure de contrôle IEF et du 7° de l’article R 153-2 du Code monétaire et financier. » Et l’OPA dont l’équipentier aéronautique fait l’objet soulève de « nombreuses questions pour la préservation du savoir-faire de la base industrielle et technnologique de défense française au moment même où l’on défend le concept d’autonomie stratégique européenne face à l’extra-territorialité du droit américain et la règlementation ITAR« , plaident-ils.

    « Notre autonomie stratégique repose sur notre aptitude à maîtriser des compétences scientifiques, technologiques et industrielles clés », insistent les parlementaires, avant de demander au Premier ministre les mesures qu’il entendait prendre.

    Lors d’une audition au Sénat, le Délégué général pour l’armement, Joël Barre, avait rappelé les dispositions prévues par le décret dit « Montebourg » [décret n° 2014-479 du 14 mai 2014, « relatif aux investissements étrangers soumis à autorisation préalable », ndlr] ainsi que celles définies par le Code monétaire et financier.

    Cependant, avait précisé M. Barre, « nous avons demandé à deux maîtres d’oeuvre compétents en matière d’optronique, Thales et Safran, de se pencher sur le dossier ». En cas d’entente de ces deux industriels, l’affaire serait réglée. Dans le cas contraire, « nous appliquerons la réglementation en vigueur », avait-il assuré.

    Le cas de Latécoère est plus délicat. On sait seulement que le gouvernement a demandé au fonds français Tikehau d’augmenter sa participation au sein du capital de l’équipementier aéronautique. Pour que Searchlight Capital Partners puisse aller au bout de son projet, il devra composer composer avec un investisseur français agréé par l’État.

    [*] Pour la LREM : Jean-Charles Larsonneur, Didier Baichère, Jean-Jacques Bridey, Christophe Blanchet, Pascale Fontenel-Personne, Fabien Gouttefarde, Christophe Lejeune, Jacques Marilossian, Monica Michel, Natalia Pouzyreff , Stéphane Trompille et Pierre Venteau; Pour UDI, Agir, Indépendants : Olivier Becht et Jean-Christophe Lagarde; Pour LR : François Cornut-Gentille et Jean-Jacques Ferrara; Pour LFI : Bastien Lachaud.

    * Article consultable sur opex360.com

     

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    Annotation 2019-11-29 19540.jpg

     

    https://www.actionfrancaise.net/2019/11/29/et-maintenant-latecoere/

     

  • Résurgence du Pays Réel, effondrement du Pays Légal ...

     

    580234331.2.jpg

    On l'a dit - en reprenant la vieille dialectique maurrassienne : les événements que nous venons de vivre et sans-doute encore ceux qui vont suivre, peuvent s'analyser comme une résurgence du Pays Réel que l'on croyait anéanti à tort, et, sous ses coups de boutoirs, comme un effondrement parallèle du Pays Légal, élargi à toutes les composantes du Système, aujourd'hui décréditées dans leur globalité à un point, semble-il, irréversible. 

    Certes, la cible principale de la révolte c'est Emmanuel Macron et, bizarrement, comme si nous étions encore en monarchie, c'est aussi son épouse Brigitte, objet de railleries et d’insultes de tous types. Il faut, pour s'en rendre compte, avoir entendu sur le vif les cris de la rue. D’aucuns se sont rappelé que, comme les Anglais et les Russes, les Français sont au propre ou au figuré un peuple régicide... Mais les sondages montrent aussi la déconfiture généralisée des partis - hormis, il est vrai, celui de Marine Le Pen. Les grands partis traditionnels sont tous autour de 10%, voire très au-dessous. Et les syndicats, donc ! Chaque fois qu'ils ont voulu entrer dans le jeu, ils ont été récusés, toute représentativité leur étant à juste titre déniée. Ils ne font plus illusion. Il n'y a plus vraiment d'organisations ouvrières. Il en est de même des parlementaires. Les nostalgiques doivent s'y faire : le  parlementarisme classique, façon XIXe ou XXe siècle, n'est plus du tout au goût du jour. C'est un archaïsme. Les journalistes, universellement décriés, n'ont pas meilleure presse... Méfiance générale à leur endroit. Finalement, ce n'est qu'avec les forces de l'ordre que, paradoxalement, les manifestants de ces derniers samedis ont eu des moments de fraternisation ... 

    Que peut donner une révolte populaire de type spontanéiste, sans commune substance, sauf ce qu'il lui reste d'enracinement, sans organisation, sans hiérarchie, sans conscience claire des conditions et des limites du raisonnable et du possible ? C'est une autre question. Elle est principale. 

    Qu'il existe toujours un peuple français enraciné, capable de « faire société »,  au moins sous forme embryonnaire, et doué d'une faculté de réaction non-négligeable, au point de faire reculer, tanguer, capituler un État puissant mais sans légitimité vraie, est une bonne nouvelle. 

    2432677-la-gauche-francaise-pionniere-de-la-deregulation-financiere.jpgSera-ce au point d'avoir réellement contraint - persuasion ou simple rapport de force - le président de la République à un renversement durable et complet de politique – assimilé à celui opéré par Mitterrand en 1983 -  comme le croit Éric Zemmour ? A ce dernier l'on ne peut dénier expérience, culture et flair politiques. On doute toutefois un peu lorsqu'il écrit : « Macron ne jurait que par l'Europe et le libéralisme. Depuis lundi, il s'est rabattu toute honte bue sur le national et le social.  C'est la grande victoire des gilets jaunes et de cette France périphérique qui avait été jusque-là sacrifiée à la mondialisation. C'est la grande défaite des élites qui avaient hissé Emmanuel Macron sur le pavois » Et encore : « il a été obligé de baiser la babouche de ces Gaulois réfractaires qu'il méprisait et de jeter ses armes au pied de son vainqueur. Son quinquennat est fini. En tout cas celui qu'il avait débuté triomphalement en mai 2017. » Les semaines qui viennent confirmeront-elles ou non cette analyse ? En tout cas, il est clair que ces derniers jours, le pouvoir s'en est constamment tenu aux reculades, à la repentance, aux excuses, aux concessions, aux regrets assortis d'une distribution d'espèces sonnantes et trébuchantes. En réponse aux contestataires et aux émeutiers, « Vous avez raison » a été le maître-mot du Chef de l'État et de ses ministres. En ont-ils eu réellement peur ? C'est bien possible.  

    Le mouvement contestataire vient de très loin et de très profond même s'il est fait d'un peu n'importe quoi et s'il ne repose sur aucune intelligence politique structurée. Est-il fait pour durer, s'amplifier, se métamorphoser ? Nous le verrons. Dans une chronique alarmiste sur Europe 1, Jean-Michel Apathie, pour une fois lucide, a montré en tremblant comment l'État ne tient plus qu'à un fil. "Et ce fil, c'est la police". Elle-même en colère et susceptible de retournement. Dans un entretien de haute volée avec Mathieu Bock-Côté, Alain Finkielkraut signale de son côté que le gouvernement français craint un embrasement des banlieues ! 

    XVM5b1b42c6-fcc1-11e8-b5a2-b44637c34deb - Copie.jpgEmmanuel Todd, enfin, avance une analyse fine, subtile et profonde, à l'encontre d'Emmanuel Macron : son image hier charismatique et forte, s'est transmuée en celle d'un enfant. C’est désormais sous les traits d’un enfant que les Français l’envisagent. L'autorité ayant toujours plus ou moins la figure du père, Emmanuel Macron en a perdu l'apparence et sans doute la réalité. Irrémédiable déchéance ! Décidément, la coupe est pleine. De quoi demain sera-t-il fait ? Mais, en tout temps, les « remises en cause » sont suivies d’une remise en ordre. 

    Vers quel type de remise en ordre, au bout du compte, cela peut-il conduire ? C'est, pour l'instant, la grande inconnue. Les nécessités françaises oscillent entre ces deux impératifs. Un peuple et un Etat. 

    Il n'y aurait plus de nation française sans un Pays Réel minimum. Mais pas de France non plus sans ordre politique et social, sans autorité reconnue, sans un État rétabli, sans une action politique volontariste et nationale,  en bref, sans une incarnation agissante du Bien Commun. 

    Sans-doute, dans cet esprit, comme de nombreux Français le pensent, une période « autoritaire » transitoire de reconstruction du pays serait-elle nécessaire pour affronter la situation présente. A terme, le recours au Prince, le retour au principe dynastique,  demeure la  solution optimale.  ■ 

    Retrouvez l'ensemble des chroniques En deux mots (109 à ce jour) en cliquant sur le lien suivant ... 

    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Concurrence et service public

     

    Par François Reloujac

    Economie. En France, des technocrates néo-libéraux se sont emparés de l’État jacobin. D’où des mixtures auxquelles les Français ont du mal à s’adapter.

     

    180628_manifestation-interprofessionnelle.jpgL’ actualité sociale des dernières semaines a mis sur le devant de la scène, à côté des agents de la Fonction publique, des entreprises nationales telles que la SNCF et Air France. Or, ce qui est à l’origine de cette célébrité médiatique, ce ne sont ni les performances économiques et financières, ni les innovations technologiques, ni la qualité exceptionnelle de leurs services, mais leur persévérance dans la grève. Au-delà des revendications immédiates à propos desquelles chacun peut voir le verre à moitié plein ou à moitié vide selon son humeur ou son intérêt personnel, ces événements devraient nous amener à réfléchir sur quelques aspects fondamentaux de notre système économique et social actuel.

    Des décisions qui ne rencontrent aucun soutien populaire

    À première vue, il semblerait que les causes des deux principaux mouvements sociaux n’ont pas grand-chose en commun. Le premier se présente comme une réponse à un texte législatif qui vise à « réformer » une institution que les élites perçoivent comme obsolète, alors que le second vise à « conserver », et même accentuer, les acquis sociaux obtenus par une catégorie de personnels perçus comme des privilégiés. Et pourtant, ils ont bien en commun quelque chose qui dépasse ces intérêts immédiats. Ces deux conflits résultent de décisions – bonnes ou mauvaises, là n’est pas la question – prises sous la pression d’instances administratives supranationales qui n’ont aucune légitimité et qui, par le biais du dogme de la libre concurrence – libre circulation des biens, des services, des hommes et des capitaux – remettent en cause des systèmes qui fonctionnent mais qui sont onéreux. Pour faire simple, force est de constater que les choix édictés par Bruxelles n’ont d’autre finalité que de faire apparaître comme moins onéreux certains trajets – en fait ceux qui correspondent aux « besoins » des entreprises multinationales – sans se préoccuper réellement ni des nécessités liées à l’aménagement du territoire, ni des coûts cachés discrètement mis à la charge des contribuables, ni du fait qu’en exacerbant les aspirations égoïstes des individus actu4-1.jpgregroupés en catégories uniquement identifiés par une convergence d’intérêts immédiats, ils détruisent la société. Il ne faut pas s’étonner du fait que ces « réformes » n’emportent pas d’adhésion populaire mais en même temps que les actions menées contre elles par ceux qui apparaissent alors aux yeux de tous comme des privilégiés, ne soient pas non plus vues positivement. Et ce n’est pas la propagande gouvernementale abusivement appelée « pédagogie » qui y changera quoi que ce soit, à terme. Si elle permet de calmer le jeu pendant un certain temps, elle générera des frustrations supplémentaires qui viendront grossir les mécontentements.

    Le service public contre le service du public

    Dans ces deux conflits, les grévistes expliquent qu’ils défendent le « service public », mais pour cela, ils prennent en otage ledit public. Que recouvre en fait cette notion de « service public » ? Normalement ce devrait être un service indispensable au bon fonctionnement de la société et qui, de ce fait, devrait pouvoir être assuré en toutes circonstances et auquel tous les citoyens devraient pouvoir avoir recours autant que de besoin. Un service public devrait être un « lien social », une forme d’expression de la solidarité entre les diverses composantes de la société. Dans un monde où les intérêts financiers communs à certains individus ont remplacé les relations entre les personnes comme agents de cohésion, le « service public » se dégrade. Il n’est même plus, ni ce que l’Union européenne considère comme un « service essentiel », ni ce que l’Organisation mondiale du commerce regarde comme un « service d’intérêt économique général ». Il est simplement devenu un secteur économique soutenu par des fonds publics en cas de difficultés, que celles-ci soient inhérentes au fonctionnement de l’entreprise ou qu’elles résultent de choix politiques qui leur sont imposés. Un « service public » est donc devenu aujourd’hui un secteur économique qui peut se permettre de ne pas être rentable, car il sera renfloué par l’argent des contribuables – qui, eux, sont de moins en moins nombreux !

    actu5-1.jpgLors de sa réception du prix Charlemagne, le président Macron a déploré qu’en France on ait « une préférence pour la dépense publique plutôt que pour la norme », comme l’auraient les Allemands. Les Allemands, toujours la norme idéale de l’Europe ! Affirmant que sa politique avait pour but de « bousculer les fétiches », il laissait donc entendre qu’il voulait donner plus d’ampleur aux normes. Comme jusqu’à présent, quoiqu’en dise la « pédagogie » gouvernementale, la dépense publique n’a pas pris le chemin de la baisse, les Français vont pouvoir bénéficier à la fois de plus de dépenses publiques et de plus de normes. Est-ce cela le « changement » attendu ?

    La concurrence contre les privilèges

    Mais ces deux conflits révèlent aussi un autre aspect de l’évolution actuelle de nos sociétés. La « pédagogie » officielle explique que la libre concurrence est un facteur de progrès ; qu’elle permet d’offrir au consommateur plus de services, de meilleurs services, une plus grande qualité, tout cela au moindre coût. Mais dans un monde où seul l’intérêt financier compte, il est plus important de faire apparaître un meilleur coût, facilement mesurable, qu’une plus grande qualité, plus difficile à percevoir, surtout lors des achats impulsifs et compulsifs. Il en résulte que la concurrence a pour but premier de faire baisser les prix, quitte à chercher à masquer derrière une présentation attrayante les différences de qualité. Dans une société où plus personne ne cherche à servir mais où tout le monde cherche à vendre, la concurrence est en fait devenue un outil majeur pour lutter contre les « avantages acquis », pour détruire tous les privilèges, que ceux-ci soient légitimes ou non. En se mettant en grève pour défendre les « spécificités à la française », les cheminots comme les pilotes d’avion sont acculés à défendre leurs privilèges. Il faut bien s’entendre : malgré la propagande égalitaire développée par une démocratie individualiste, les privilèges ne sont pas, en soi, de mauvaises choses. Ce qui est mauvais c’est de les laisser se scléroser et de ne proposer pour remédier à cet abâtardissement que de les supprimer. Pour parler clairement, ce qui est choquant, ce n’est pas que les cheminots bénéficient d’un statut particulier mais que tous les éléments de ce statut ne paraissent plus justifiés.

    En vérité, ce qui est choquant dans ces conflits ce n’est pas de savoir si ces entreprises doivent ou non être détenues, en tout ou en partie, par l’État, mais de voir que malgré leur rôle essentiel au service du bien commun, ils puissent s’arrêter et mettre en péril des quantités d’activités exercées honnêtement par d’autres membres de la communauté nationale. Peut-être, faudrait-il rappeler aux grévistes le discours du pape Pie XII, le 21 octobre 1948 : « Si la grève est un droit inscrit dans la Constitution, auquel certaines catégories de travailleurs se sont trouvées dans la nécessité de recourir à la suite du déséquilibre entre les salaires et les prix, il n’est pas permis de l’employer à des fins politiques, ni d’en user de telle sorte qu’elle finisse par léser la nation elle-même et par porter atteinte à l’autorité de l’État ». Tout est dit.   ■   

    actu6-1.jpg

    Crèches en grève : elles relèvent aussi du service public à la française comme l’Université ! Pourquoi pas les bébés en grève comme les étudiants ?

     
  • Sur le blog ami du Courrier Royal : une Monarchie sociale est nécessaire en France, par Jean-Philippe Chauvin.

    La Monarchie française est éminemment sociale, ou a le devoir impérieux de l’être, ne serait-ce que pour légitimer sa nécessité et son autorité : c’est un élément que je ne cesse de mettre en avant, suscitant parfois une certaine circonspection de la part de mes contradicteurs mais aussi parfois des sympathisants monarchistes eux-mêmes…

    jean philippe chauvin.jpgSans doute faut-il expliquer ce point de vue, et l’approfondir sans cesse, au regard de l’actualité, malheureusement cruelle aujourd’hui envers ceux qui travaillent ou qui cherchent un emploi : si la Monarchie n’est pas un remède miracle, elle est le régime qui peut permettre, avant tout, de garantir la justice sociale et de ne pas abandonner ceux qui souffrent d’une crise (en fait, d’un processus de mondialisation…) dont ils ne sont guère, en tant que tels, responsables !

    L’indépendance de l’institution royale, de par le fait que la naissance ne doit rien à la fortune, lui donne l’occasion (qui est, en fait, un devoir) de parler au-dessus des simples intérêts privés, y compris des plus riches, que ceux-ci soient des individus ou des sociétés privées. Un Louis XIV n’hésita pas, en son temps, à embastiller Nicolas Fouquet, l’homme le plus riche du royaume, sans doute plus comme un rappel que l’Argent ne faisait pas le bonheur et, en tout cas, ne commandait pas à l’Etat royal en France, que comme le règlement d’une simple affaire de corruption…

    De plus, le Roi n’est pas le représentant des classes dominantes (une sorte de suzerain capitaliste, en somme) mais un souverain qui s’impose à tous et encore plus à ceux qui possèdent, et qui a le devoir de n’oublier personne dans son souci politique. S’imposer ne veut pas dire être un dictateur qui terroriserait les riches et flatterait les autres, mais simplement rappeler à tous que l’Etat n’est pas « une place à prendre » mais un pays à servir, au-delà des différences et des libertés particulières qu’il faut organiser, ou plutôt laisser s’organiser dans le respect des équilibres sociaux et de la justice nécessaire à toute œuvre sociale. Dans un monde où l’Argent a pris une telle importance, cela ne sera sans doute pas facile mais la Monarchie a ainsi quelques atouts et il serait dommage pour le pays de ne pas les utiliser… L’indépendance royale, certes menacée par les jeux des groupes de pression financiers dans cette mondialisation qui cherchera à fragiliser l’Etat politique, est un levier important dans la capacité de l’Etat et de son gouvernement, quelle qu’en soit la couleur électorale, à faire accepter les réformes à ceux qui, d’ordinaire, cherchent à s’en abstraire ou à en fuir les conséquences quand elles ne leur conviennent pas. Mais la Monarchie n’oublie pas de permettre à tous, y compris les groupes de pression, de s’exprimer et de proposer, voire de contester : mais c’est la Monarchie qui arbitre et préserve l’Etat et l’intérêt commun, tout en laissant le gouvernement faire son travail et œuvrer au quotidien.

    La Monarchie active « à la française », de par son rôle majeur (sans être omnipotent ni même omniprésent) d’arbitrage politique et  de protecteur social, marque son territoire d’action par sa capacité de décision dans quelques grands domaines, ceux que l’on nomme régaliens (ce qui, d’ailleurs et même en République, veut dire … « royaux » !) : la grande finance, la diplomatie et les affaires militaires, et la garantie de « la protection de tous », en particulier sociale. Si la Monarchie instaurée (le plus tôt sera le mieux !) veut s’enraciner sans se renier, il lui faudra assurer et assumer son rôle éminemment social : dans un monde incertain, face à une mondialisation menaçante, elle doit tracer un sillon social profond en rappelant aux puissants d’aujourd’hui, d’ici comme d’ailleurs, que toute politique crédible et efficace passe par la prise en compte des populations et par le souci de préserver la justice sociale, ciment des sociétés et facteur d’unité nationale. Il lui faudra aussi lancer le grand chantier d’une nouvelle organisation sociale, par le biais d’un syndicalisme vertical qui prenne en compte, dans ses structures, tous les échelons de la hiérarchie, et par la mise en place d’espaces de réflexion et de décision, voire de redistribution dans certains cas (intéressement, actionnariat salarial ou populaire, patrimoine « corporatif », etc.), espaces qui réunissent tous les acteurs de l’activité économique locale, communale, régionale ou nationale, y compris en y intégrant des acteurs extérieurs et étrangers (mais qui ne devront pas avoir vocation à diriger ce qui doit rester aux mains des producteurs locaux) comme les investisseurs ou les représentants des institutions internationales (ceux de l’Union européenne, par exemple) ayant une part dans l’activité économique concernée.

    A l’heure où la République tremble devant les oukases de la Commission européenne et les injonctions d’un Marché devenu incontrôlable, il est temps d’en appeler, fortement, à l’instauration d’une Monarchie sociale pour la France, non par caprice ou utopie, mais par réalisme et nécessité ! C’est, d’ailleurs, sur le terrain social, que le royalisme a, aujourd’hui, le plus de chances de faire entendre sa « musique particulière », au travers de la contestation des mesures antisociales de cette « Europe-là » et de cette République si oublieuse de ses promesses de justice sociale… Mais, au-delà de cette régence sociale que nous assumons, il faut poser, ici et maintenant, les conditions d’une vraie politique sociale inscrite dans le marbre des institutions à venir…

     

    Jean-Philippe Chauvin

    Sources : https://le-courrier-royal.com/

    https://www.facebook.com/lecourrierroyal

  • À Marseille, la tournée médiatique d’un pouvoir impuissant, par Natacha Polony.

    Il n’y a pas de réponse unique à l’horreur qui se banalise dans les quartiers tenus par des dealeurs.
    Hannah Assouline

    Reconstruire la République, à Marseille comme ailleurs, ce n’est pas envoyer davantage de policiers, c’est avant tout instituer des citoyens là où il n’y a plus que des brutes toutes-puissantes, ceux qui les subissent et ceux qui les craignent ou aspirent à les rejoindre, rappelle Natacha Polony.

    C’est la vertu des campagnes électorales : ce qui relevait du banal fait divers, dont les épigones bêlants du bourdieusisme nous expliquaient que cela ne signifiait rien et ne servait qu’à enfermer le bon peuple dans une logique « sécuritaire » pour le détourner des vrais sujets, devient un objet politique. On s’entre-tue dans les rues de Marseille. Il y a déjà longtemps que le trafic de drogue gangrène les quartiers de nombre de villes françaises. Longtemps que l’on constate que la gangrène gagne désormais des villes moyennes, des zones autrefois paisibles, modifiant la sociologie, détruisant l’équilibre de vie, instaurant la loi de la jungle en lieu et place de la loi de la République.

    Cette fois, Emmanuel Macron se rendra sur place. Parce qu’il a bien compris que son point faible, dans cette campagne électorale, se situera là. C’est un paradoxe, d’ailleurs. Car il y aurait bien d’autres éléments à mettre au débit du président sortant. En fait, l’échec total de ce qui constituait le cœur de son programme de 2017, ce fantasme selon lequel, si on joue les bons élèves en appliquant toutes les mesures de dérégulation, pardon, les « réformes » réclamées par Bruxelles et Berlin, on obtiendra en échange un infléchissement de ces choix monétaires et budgétaires qui ruinent l’économie française et la mettent en concurrence avec des pays sans le moindre droit social ou environnemental. Eh bien, non ! Rien. Des mots, de la com, mais l’éradication du tissu industriel français se poursuit sans qu’à aucun moment la France se saisisse des moyens en sa possession pour favoriser ses emplois. Mais les sujets de sécurité sont plus spectaculaires. Ils font de meilleures images qu’une PME qui ferme et une ville moyenne qui meurt.

    Numéro de duettistes

    Comme image, il y a donc eu le numéro de duettistes habituel : Gérald, le petit tout raide, et Éric, le grand tendre. Darmanin expliquant au maire de Marseille que les morts de ces derniers jours sont la preuve que la police gagne du terrain, et lui lançant finalement qu’il n’a qu’à mettre des caméras de surveillance, et Dupond-Moretti annonçant des postes et des moyens. On peut concéder au ministre de la Justice qu’il est le seul à pouvoir se prévaloir d’une augmentation du budget de son ministère après des décennies d’abandon. Mais ceux qui réclament toujours plus de policiers, plus de juges, au moment même où l’on augmente leurs effectifs, se rendent-ils compte que, dans ce tonneau des Danaïdes, ce sont des quartiers entiers qui se noient, des vies que l’on gâche, la promesse républicaine que l’on salit ?

    « Des phrases, du vent. Pourquoi ? Parce qu’on ne peut pas condamner la dérégulation et la destruction de l’État dans les quartiers tout en la prônant dans tous les pans de l’économie. »

    Marianne a écrit maintes fois que l’État ne consacrait plus suffisamment de moyens à ses missions régaliennes. Augmenter les effectifs de fonctionnaires là où ils agissent directement au service du public est évidemment nécessaire. Mais cela revient à arroser le désert si l’on ne commence pas par deux préalables : d’abord, réorganiser l’action de ces juges et de ces policiers pour limiter la bureaucratie qui ronge une part essentielle de leur temps ; ensuite, faire en sorte que l’ensemble de l’appareil d’État se donne pour mission de sanctionner de façon rapide et exemplaire toute infraction à la loi et considère que le sentiment d’impunité qui règne dans certains quartiers est une forme d’agression contre chaque citoyen de ce pays.

    Pathétique posture martiale

    Les postures martiales du ministre de l’Intérieur ont cependant quelque chose de pathétique. Il y aura bientôt vingt ans, Nicolas Sarkozy accédait à ce poste avec les mêmes mimiques, la même façon de surjouer l’autorité. Des phrases, du vent. Pourquoi ? Parce qu’on ne peut pas condamner la dérégulation et la destruction de l’État dans les quartiers tout en la prônant dans tous les pans de l’économie. En 1999, le philosophe Jean-Claude Michéa publiait un court texte, la Caillera et son intégration, analysant en quoi les caïds de banlieue, avec leur tribalisme et leur appétit de prédation, étaient la forme la plus accomplie de l’individu capitaliste. Encore ne connaissait-il pas les réseaux sociaux et leur formidable amplification de cet appétit consumériste qui valorise l’argent facile et ridiculise l’effort, le civisme et le don de soi.

    Il n’y a pas de réponse unique à l’horreur qui se banalise dans les quartiers tenus par des dealeurs. Libérer les policiers de la lutte contre les consommateurs de drogue pour consacrer les effectifs au démantèlement des gros réseaux pourrait être un élément. Marianne a déjà plaidé pour que l’on réfléchisse à une légalisation du cannabis – avec monopole d’État, unique condition pour ne pas laisser une fois de plus la jungle capitaliste gagner un juteux marché. Mais la lutte contre la corruption de l’argent facile passe aussi par l’éducation. Non pas un catéchisme façon Gérald Darmanin, « la drogue, c’est de la merde », mais un travail de fond de l’Éducation nationale sur l’apprentissage de la loi morale, la maîtrise des pulsions et le respect des règles collectives (ce qui passe très tôt par la sanction).

    Reconstruire la République, à Marseille comme ailleurs, ce n’est pas envoyer davantage de policiers, c’est avant tout instituer des citoyens là où il n’y a plus que des brutes toutes-puissantes, ceux qui les subissent et ceux qui les craignent ou aspirent à les rejoindre.

    Source : https://www.marianne.net/