UA-147560259-1

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Rechercher : qu'est ce que le système ?

  • Pourquoi la gauche a perdu les intellectuels, selon Vincent Tremolet de Villers *

     

    Nous avons maintes fois évoqué ce sujet important dans Lafautearousseau. Et, sans-doute, n'en aurons-nous pas fini de longtemps. Vincent Tremolet de Villers dresse ici de l'évolution d'une bonne partie des intellectuels français un tableau synthétique brillant, saisissant et utile.  LFAR

     

    ob_b41265_vincent-temolet-de-villers.jpg« Pseudo-intellectuels ! » On croyait que Najat Vallaud- Belkacem était une élève appliquée, on a découvert la plus affranchie des anarchistes. Il lui aura fallu une formule prononcée le 30 avril sur RTL pour faire trembler tout ce qui, à Paris, fait la vie de l'esprit. Le Collège de France, l'Académie française, la revue Le Débat, l'Ecole des hautes études… Au bowling, ça s'appelle un strike, au tennis un grand chelem. Marc Fumaroli, Pierre Nora, Jacques Julliard, Régis Debray, Alain Finkielkraut, Luc Ferry, Pascal Bruckner, Patrice Gueniffey : son tableau de chasse ferait pâlir d'envie le dernier des Enragés de 68. « Professeurs, vous êtes vieux… votre culture aussi », écrivaient-ils sur les murs ; « Intellectuels, imposteurs », leur a-t-elle dit en substance. Depuis, la bonne élève a repris le dessus et elle fait mine de trier le bon grain (Nora, Julliard) de l'ivraie (Finkielkraut, Ferry, Bruckner). Le gouvernement dans son ensemble s'est souvenu que le maître d'œuvre des Lieux de mémoire n'était pas un vulgaire porte-parole de l'UMP. Mais il est trop tard, le mal est fait. La confrérie des « pseudos », partagés entre la colère et l'effarement, épargne Najat Vallaud-Belkacem, mais le propre d'un universitaire, d'un chercheur ou d'un savant est d'avoir la mémoire longue.

    D'autant que le Premier ministre a pris, lui aussi, la mauvaise habitude de cibler penseurs et essayistes. En six mois, il a réussi le tour de force de se mettre à dos quatre auteurs à très grands succès. Il a d'abord affirmé que le livre d'Eric Zemmour ne devait pas être lu. A expliqué que celui de Houellebecq le méritait peut-être. Avant de tomber sur Michel Onfray dans une démonstration embrouillée (Manuel Valls lui reprochait en substance de préférer avoir raison avec Alain de Benoist plutôt que tort avec BHL) puis sur Emmanuel Todd (qui n'en demandait pas tant), coupable, par les considérations abracadabrantesques que l'on peut lire dans son dernier essai Qui est Charlie? (Seuil), de désespérer le canal Saint-Martin. « Crétin ! », « Pétain ! » a reçu Manuel Valls en retour.

    Tout fout le camp ! La gauche avait déjà perdu le peuple, voilà les intellectuels qui la désertent. Ils y étaient pourtant plus chez eux qu'un banquier à la City, à tel point que l'on apposait naturellement, comme un poing sous une rose, les mots « de gauche » à celui d'« intellectuel ». Las ! Les images de philosophes à cheveux longs, belles gueules, clope au bec, dans un cortège de mains jaunes illustrent désormais les livres scolaires. SOS Racisme est une petite entreprise en difficulté, François Hollande, un Mitterrand de poche et la jeunesse de France, atomisée. La planète de l'intelligence s'éloigne chaque jour un peu plus de celle de la politique et, si le divorce n'a pas été prononcé solennellement, la séparation est un fait. « Où sont les intellectuels ? Où sont les grandes consciences de ce pays, les hommes, les femmes de culture qui doivent monter au créneau. Où est la gauche ? » a lancé Manuel Valls, en meeting dans la petite ville de Boisseuil, près de Limoges (Haute-Vienne). C'était le 5 mars, avant les départementales. Nul, sinon l'écho, n'a répondu à sa plainte.

    Sans s'en douter, le Premier ministre renvoyait à la première querelle, la plus profonde. Son discours reprenait, en effet, les mots de Max Gallo, alors porte-parole du gouvernement Mauroy, qui, en 1983, signait dans Le Monde une tribune sur « le silence des intellectuels ». 1983: c'était alors le tournant libéral et la première rupture. L'enjeu : l'autre politique et la sortie de la France du Système monétaire européen (SME). Après moult hésitations, Mitterrand avait choisi la ligne « orthodoxe ». « Sur l'Europe, 1983 fut pour les socialistes ce que 1992 fut pour les gaullistes », explique Eric Zemmour. Ce fut l'occasion d'un affrontement idéologique qui a creusé les premières tranchées. A gauche, les marxistes, mais aussi ce qu'on appellera beaucoup plus tard les souverainistes, les défenseurs de « l'Etat stratège », du modèle social, du soldat de Valmy, du prolo des usines que Renaud, pas encore passé de la mob au 4 x 4, chante avec talent. Pour eux, depuis 1983, «l e peuple est la victime émissaire des élus du marché libre » (Michel Onfray). A droite, les pragmatiques, et les membres de ce qu'Alain Minc appellera beaucoup plus tard « le cercle de la raison ». Ils sont progressistes, défenseurs de la construction européenne et de l'Alliance atlantique. En politique, c'est Jean-Pierre Chevènement contre Jacques Attali. Mitterrand apaisa ces courants contraires en faisant souffler « l'esprit du Bien ». Avec l'aide de Julien Dray, Bernard-Henri Lévy, Harlem Désir, il inventa l'antiracisme au moment même où il aidait le Front national à prendre son envol. La droite la plus bête du monde foncera tête baissée. Trente ans après, elle continue de tourner sans but dans l'arène. La gauche se grisera avec la lutte contre le FN pour oublier que sa pensée s'épuise. Au début, c'est caviar et champagne ! C'est nous qu'on est les penseurs ! L'intelligence, le talent, la culture, les paillettes sont de gauche. Le magistère intellectuel aussi. Le mécanisme énoncé par Régis Debray en 1979 dans Le Pouvoir intellectuel en France (Folio) - « Les médias commandent à l'édition, qui commande à l'université » - est parfaitement huilé. « Mitterrand était un homme complexe, cultivé, spontanément monarchique, se souvient Pascal Bruckner. Il y avait une cour autour de lui. »

    De Mitterrand à Hollande

    C'est « la République des bonnes blagues, des petits copains »

    Pascal Bruckner

    Près de trente ans après, un socialiste est toujours à l'Elysée, mais c'est « la République des bonnes blagues, dit Bruckner, des petits copains ». Quant à l'antiracisme, les bombes de l'islamisme conquérant l'ont désorienté. « C'est un train fou duquel de plus en plus de gens ont envie de descendre » (Finkielkraut). Le Président bichonne la société civile, mais les comédiens, les rappeurs (JoeyStarr), les comiques (Debbouze), les artistes passent avant les intellos. Bernard-Henri Lévy passe parfois en voisin, mais c'est pour prendre la défense des Ukrainiens, des peshmergas ou des chrétiens d'Orient. Régis Debray préfère dîner avec Eric Zemmour ou deviser avec son voisin de palier, Denis Tillinac. Pascal Bruckner, malgré les sarcasmes de ses amis qui moquent « un combat de droite », se rend à Erbil à la rencontre des chrétiens d'Irak. Alain Finkielkraut est élu à l'Académie française au fauteuil de Félicien Marceau. L'ancien mao Jean-Pierre Le Goff fustige avec un talent redoutable le « gauchisme culturel ». Jacques Julliard déplore le « néant spirituel et intellectuel contemporain ». Pierre Nora considère que « la crise identitaire que traverse la France (est) une des plus graves de son histoire ». Tous reconnaissent un divorce avec la gauche qui nous gouverne. Le communiste Alain Badiou voit-il sa prophétie prendre corps ? En 2007, il confiait au Monde: « Nous allons assister, ce à quoi j'aspire, à la mort de l'intellectuel de gauche, qui va sombrer en même temps que la gauche tout entière (…) (Sa) renaissance ne peut se faire que selon le partage : ou radicalisme politique de type nouveau, ou ralliement réactionnaire. Pas de milieu.» Le radicalisme politique de type nouveau pousse à la gauche de la gauche. Il regarde vers Syriza ou Podemos et dénonce, avec Jean-Claude Michéa, la complicité idéologique entre gauche et droite françaises « sous le rideau fumigène des seules questions “sociétales” ». Que reste-t-il pour le gouvernement ? Un quarteron de sociologues, le sourire de Jacques Attali et la mèche d'Aymeric Caron.

    « L'antiracisme est un train fou duquel de plus en plus de gens ont envie de descendre »

    Alain Finkielkraut

    Le 11 janvier n'est plus ce qu'il était

    Les intellos, François Hollande pense pourtant les connaître par cœur. Un déjeuner, quelques compliments, un shake-hand et le tour est joué. Le PS, c'est chez eux: ils reviendront à la maison à la première occasion. Le 11 janvier, le président de la République a cru à la grande réconciliation. « Il a vécu une lune de miel avec les intellectuels, raconte Pascal Bruckner. Et, très vite, la gauche est revenue à son péché originel : croire qu'elle est le sanctuaire inaliénable de l'intelligence et de la pensée. Hors les penseurs godillots, les intellectuels n'ont pas suivi et ceux qui ne suivent pas sont excommuniés.» L'esprit du 11 janvier a laissé la place à l'esprit de parti. Très vite, il ne s'agissait plus de combattre le terrorisme islamiste, mais le Front national et « l'islamophobie ». La défense de la liberté d'expression a laissé place à une surveillance du « dérapage », de l'amalgame, de la stigmatisation. Un détournement grossier qui a laissé des traces. « On invoque “l'esprit du 11 janvier”, tempêtait Jean-Pierre Le Goff dans FigaroVox, en même temps, le débat et la confrontation intellectuelle sont placés sous la surveillance d'associations communautaristes qui se sont faites les dépositaires de la morale publique.» Quand Laurent Joffrin célébrait le 11 janvier comme une épiphanie de la gauche morale, Alain Finkielkraut voyait naître « la division du monde politique, médiatique et intellectuel entre deux partis. Il y a d'un côté “le parti du sursaut” et “le parti de l'Autre”. La vision était prophétique. « L'antifascisme mondain » (Elisabeth Lévy) a volé en éclats et « le parti de l'Autre » a tombé le masque. Avec Edwy Plenel et Emmanuel Todd, il fait des musulmans d'aujourd'hui « les juifs des années 30 » et de la réaction des Français aux attentats la preuve de leur « islamophobie ». Après les avoir célébrées, s'en prendre aux foules du 11 janvier est devenu un must. La preuve d'«une fuite en avant dans la radicalité chic» (Finkielkraut). Sur l'autre versant de l'antiracisme, de Bernard-Henri Lévy en Philippe Val, on nomme l'ennemi prioritaire: « le drapeau noir du califat ».

    La vérité est que la folie djihadiste a mis au jour une ligne de fracture très profonde et que l'on ne peut plus enfouir : celle de l'identité ainsi qu'une question obsédante: « Qu'est-ce qu'être Français ? » L'universitaire Laurent Bouvet se souvient d'un colloque organisé en 2011, par le PS, sur le sujet. Il avait défendu l'idée d'une angoisse identitaire qui traversait le pays et développé la notion d'« insécurité culturelle ». Il fut considéré, au mieux comme un zozo, au pire comme un allié objectif de Marine Le Pen.

    Impuissante à y répondre, sourde à ces paniques, oscillant sans choisir entre le parti de « l'Autre» et celui du «sursaut », dépourvue de marges de manœuvre économiques, la gauche Hollande, pour combler son vide idéologique, est en proie à une véritable frénésie sociétale. Le mariage, la filiation, le genre, l'IVG, la fin de vie : il faut légiférer sur tous les aspects de l'existence, de la conception jusqu'à la mort naturelle. Là encore, tous les intellos ne suivent pas. « Ils veulent changer la condition humaine », s'est exclamé Claude Lanzmann dans Le Figaro. Onfray signe avec José Bové et Sylviane Agacinski une tribune dans Libé contre la GPA. Dans Le Figaro, il qualifie Pierre Bergé, favorable à cette pratique, de « Berlusconi, la vulgarité en plus ». « Le mariage pour tous, comme la réforme du collège, devait être pour leurs promoteurs une simple mesure d'ajustement à la société d'aujourd'hui, explique l'historien Pierre Nora. Ils ont tout, pour leurs détracteurs, d'un ébranlement social profond.»

    Le collège ! Le dernier champ de bataille entre les intellos et le gouvernement. Les premiers reprochent un nivellement par le bas, les seconds veulent libérer l'élève de son ennui. « La civilisation, ça n'est pas le Nutella, c'est l'effort », a lancé Régis Debray comme un cri de ralliement. Alain Finkielkraut reconnaît avec ses pairs que droite et gauche sont pareillement coupables dans l'effondrement de l'école. Il s'inquiète cependant des déclarations martiales de Najat Vallaud-Belkacem: « L'école était une promesse, elle est devenue une menace, explique-t-il. A l'insécurité culturelle, le gouvernement ajoute une insécurité scolaire, indiquant aux parents qui veulent le meilleur pour leurs enfants qu'ils sont pris au piège et que les “resquilleurs de mixité” seront punis. Leur attitude de plus en plus compassionnelle est aussi de plus en plus totalitaire.»

    L'inculture pour tous

    « Les intellectuels peinent à trouver leur place dans un système d'information où le manichéisme et la pensée ­binaire feront toujours plus d'audience que la nuance »

    Pierre Nora

    Pour Pierre Nora, au-delà même des idées, cette rupture était inéluctable. « Les politiques se méfient des intellectuels, reconnaît-il. Ils ont en tête leurs fourvoiements d'autrefois et leur reprochent d'être déconnectés de la réalité du terrain, de la complexité des dossiers. Ils ne pèsent rien dans les formations politiques, pas plus que dans les élections.» Mais, à l'entendre, la clé est ailleurs. « Les intellectuels, poursuit-il, peinent à trouver leur place dans un système d'information où le manichéisme et la pensée binaire feront toujours plus d'audience que la nuance, où animateurs et politiques se mettront le plus souvent d'accord pour considérer “le penseur” comme un coupeur de cheveux en quatre.»

    Comment réfléchir dans la perspective étroite et desséchante de la conquête du pouvoir? Comment méditer sur les fractures françaises quand vous êtes attendu sur une radio à 8 heures, une télé d'information continue deux heures plus tard, à un déjeuner avec des journalistes avant de vous rendre à l'Assemblée et à un colloque le soir dans un lycée de lointaine banlieue sur « le vivre-ensemble » ? Le tout en ayant échangé une centaine de textos ?

    Dans l'agenda d'une politique, la vie intellectuelle est un encombrant.

    Nous sommes au début des années 2000. Le PS a pris des bonnes résolutions. Il reçoit tour à tour les grandes figures de la pensée. Ce matin, c'est Marcel Gauchet qui planche. Le thème: « La sortie du religieux ». Une quinzaine d'auditeurs sont présents avec, au premier rang, le premier secrétaire du parti, François Hollande. A peine l'orateur a-t-il commencé que le député de Corrèze commence à compulser un dossier qu'il lit avec attention page par page. Au milieu de la communication, son attachée de presse apporte, l'air affairé, un autre dossier. Tandis que Gauchet poursuit son propos, Hollande se plonge un peu plus dans ses papiers. Une fois la conférence terminée, il oublie ses dossiers sur la table. Que contenaient-ils? Des dépêches politiques du fil AFP !

    Pour Jean-Pierre Le Goff, cette inculture est de plus en plus rédhibitoire : « Une élite ? Des gens qui, par un certain nombre de conditions, sont arrivés au pouvoir. Mais ils sont totalement incultes. Dénués des oripeaux du pouvoir, ils ne sont plus rien. » « Ceux qui affirment, sans gêne, que l'on critique sans avoir étudié, que lisent-ils ? », interroge Alain Finkielkraut. Ce qu'un ancien secrétaire général de l'Elysée sous François Mitterrand résume en ces termes: « Les ministres d'aujourd'hui ont le niveau des attachés parlementaires des années 80.» Cette inculture, cependant, n'est pas l'apanage de la gauche. Et la droite s'illusionne si elle pense adopter ces orphelins. « Mon parti n'existe pas », confie Alain Finkielkraut. Bruckner, lui non plus, n'a pas de port d'attache. Le Goff anime le groupe Politique autrement. Régis Debray ou Michel Onfray se situent désormais en surplomb de ce qu'ils considèrent comme un divertissement de masse. Ce qui les relie les uns aux autres ? Quelques mots d'Albert Camus : « Chaque génération, sans doute, se croit vouée à refaire le monde. La mienne sait pourtant qu'elle ne le refera pas. Mais sa tâche est peut-être plus grande. Elle consiste à empêcher que le mo

  • Culture & Education • Robert Redeker : « L'école s'applique à effacer la civilisation française »

     

    Par Patrice de Méritens

    Nous partageons pleinement l'analyse sans concession de la situation, qui est donnée ici, comme les solutions proposées. Simplement, à l'inverse de l'auteur, nous pensons que l'universalisme idéologique républicain est à la source du refus de la fraternité nationale et du mépris de l'identité française. [Entretien Le Figaro, le 26.08] LFAR

     

    En ne remplissant plus sa fonction traditionnelle de transmission, l'école de la République est devenue une fabrique de zombies et d'individus hors sol, explique le Robert Redeker dans L'École fantôme, un essai percutant dans lequel il analyse les causes de ce désastre et trace des voies pour l'avenir.

    Robert Redeker est un philosophe à l'esprit lucide et au verbe tranchant. Il le paye depuis dix ans en vivant loin du monde sous garde rapprochée, suite à une chronique célèbre où il dénonçait les intimidations de l'islamisme. Auteur de nombreux ouvrages, il n'a cependant jamais cessé de publier du fond de sa retraite. Il livre aujourd'hui un terrible constat de ce qu'est devenue l'école en France. Crise de l'enseignement, crise de l'éducation, crise de la vie. Selon lui, il n'y a pas d'école sans une pensée de l'homme, de la société et de l'identité nationale, toutes notions qui ont profondément été bouleversées depuis 1981.

    17178152.2.jpgLa question de l'école n'a-t-elle pas pris une dimension quasi ontologique en cette période de trouble ?

    L'école de la République est un village Potemkine laissant croire, tel ce trompe-l'œil de propagande, qu'existe toujours, derrière ce mot, ce que les Français supposent être leur école. Par exemple, toute une propagande tente de faire croire, en dépit de l'aveuglante évidence, que le baccalauréat est encore un diplôme et un niveau, que l'école a encore des exigences intellectuelles. Même est le mot, qui a été sauvé, autre est la réalité, qui a été chamboulée. L'école en France a été assassinée, le fantôme de ce qu'elle fut porte son nom. Désignons les assassins. Le pédagogisme, avec à sa tête son âme damnée, Philippe Meirieu, et à sa solde toute la bureaucratie de l'institution. Najat Vallaud-Belkacem, via la réforme du collège, a parachevé le meurtre de l'école de la République avec une rage peu commune.

    « L'enseignement doit être résolument retardataire» , a dit Alain. Il ne prépare l'avenir qu'en plongeant l'élève dans le passé. L'école ne doit pas être explicitement ordonnée au progrès (social, humain, politique), mais à la conservation, qui passe par la transmission de contenus. Or, depuis 1981, réforme après réforme, l'école ne cesse de s'éloigner de sa raison d'être. Elle refuse désormais de transmettre le savoir, spécialement le savoir littéraire, devenant, selon le mot de Jean-Claude Michéa, « l'enseignement de l'ignorance ». Fabriquer des ignorants - en substituant à l'enseignement l'« apprendre à apprendre » - est désormais la pratique de notre système scolaire.

    Voulue, planifiée, organisée, cette destruction poursuit obstinément un but anthropologique : la fabrication d'un homme nouveau, le remplacement du type d'homme tel qu'il existe dans les nations européennes depuis des siècles par un type inédit. Un homme hors sol, déraciné, un zombie hébété. Un homme échangeable avec tous les autres hommes de la planète. Un homme aussi abstrait qu'un numéro : l'homme indéterminé. Un homme équivalent à tous les autres hommes - sur le fond de la confusion entre l'égalité et l'équivalence. Cette perspective rend compte de toutes les récentes réformes, puisque pour la réaliser il faut empêcher l'accès des jeunes générations à la haute culture, changer, à travers des dispositifs comme les ABCD de l'égalité, les cours en heures de propagande pour la transformation anthropologique. Les propos de Najat Valaud-Belkacem laissent toujours paraître cette ambition : changer l'homme, changer la femme, faire émerger un homme nouveau et une femme nouvelle.

    Vers quoi cette volonté politique se dirige-t-elle ?

    L'école contemporaine est régie par la volonté de substituer la société à la nation et au peuple. La société à la place de la nation, que l'on hait ! La société à la place du peuple, que l'on méprise ! Cette école veut engendrer une société d'équivalents - non d'égaux - qui n'a besoin ni d'héritage, ni d'Histoire, ni de racines, dont la culture n'est plus que la culture de masse, l'inculture génératrice d'hébétude. C'est à la constitution de ce type de société que travaille la réforme du collège. Le démantèlement des matières au profit des enseignements décloisonnés et l'abandon des enseignements systématiques visent à former des humains intellectuellement déstructurés.

    Toutes ces réformes combattent le rôle initial de l'école : conserver la civilisation. Précisons : la civilisation française, le type français d'homme et de femme, la manière française d'habiter le monde, d'être un humain, l'amour de la belle langue, l'attention portée aux mots, au bien parler. Elles s'appliquent à liquider le peu qui demeure de civilisation française dans l'enseignement. La volonté de transformer la société s'accompagne de la volonté d'effacer la civilisation française. Afin d'arracher les enfants de France à la terre de France, à son Histoire, car la terre et l'Histoire sont en France la même chose, l'Education nationale dépayse les décors des livres d'apprentissage de la lecture. Dans la région toulousaine, des enfants apprennent à lire dans un ouvrage, Zékéyé et le serpent python, dont le personnage principal, un garçonnet fictif, Zékéyé, vit au Cameroun. Il est fortement conseillé par tous les inspecteurs, ces sous-officiers zélés chargés de contrôler l'adhésion des maîtres à l'idéologie officielle. Ce dépaysement arrache les enfants à leur pays afin de les empêcher d'entrer en fusion avec son histoire et sa culture, afin de prévenir le risque d'enracinement dans cette histoire et cette culture.

    Comment expliquer cet acharnement destructeur ? Par le sanglot du maître blanc, version scolaire du sanglot de l'homme blanc exhibé par Pascal Bruckner. La repentance, qui pousse à fausser les programmes scolaires, masque mal la haine. La haine d'une partie de la jeunesse pour la civilisation française est partagée par une fraction de l'élite politique, administrative, le monde du spectacle et, hélas, une partie des enseignants. Avec ses programmes actuels, basés sur la honte française d'être soi, l'école entretient cette haine. En enseignant la culpabilité de l'Occident, en sacrifiant les grandes figures de l'histoire de France, l'école empêche la fusion entre la jeunesse et la France, faisant involontairement le lit du terrorisme.

    Quel diagnostic culturel portez-vous sur les dernières décennies ?

    La vulgarité d'esprit, qui se fait sentir partout, jusqu'aux sommets de l'Etat quand Mme le ministre de l'Education parle de «bruits de chiottes» jusqu'à la télévision publique, quand une amuseuse ignare d'«On n'est pas couché» soutient faussement à l'antenne que Descartes s'est réfugié en Hollande pour fuir les persécutions religieuses catholiques sans que personne ne bronche. Cette épidémie de vulgarité, corollaire du double raz-de-marée, celui de l'ignorance, celui de l'insignifiance, renvoie à la crise de l'école.

    Les Français ne parlent plus français. Il suffit de les écouter dans la rue. Il suffit d'écouter la radio, de tendre l'oreille aux propos des politiciens. Hollande s'exprime dans un français rachitique, au vocabulaire sommaire et à la grammaire simpliste, multipliant les fautes et les grossièretés (ainsi sa manie du redoublement du sujet). La langue française a été peu à peu remplacée par son ersatz, un faux français, une langue de supermarché ou d'aéroport. L'école est responsable de ce désastre. Il y a un lien entre la langue et la pensée. Quand on parle et écrit mal, pauvre, déstructuré, on pense et écrit mal, pauvre, déstructuré. La pauvreté de la langue entraîne la pauvreté de la pensée. L'affaiblissement de l'enseignement du français entraîne l'abêtissement des Français. Cet abêtissement est voulu par l'école. Nous risquons, à cause de la trahison de l'école, de devenir un peuple de chasseurs de Pokémons !

    Le phénomène le plus significatif, symptôme de toutes les crises, index de toutes les décompositions, horoscope d'une plongée dans la barbarie, est la disparition de la langue française. La langue perdue ! La langue, que l'école refuse d'enseigner sérieusement. Songez à la récente habitude d'employer « juste » pour « seulement » ou « simplement » ; monument d'inculture collective autant que témoignage de l'échec de l'école, cette faute répercutée par tous les médias revient à employer en français le mot « juste » dans son sens anglais (« just ») et non dans son sens français. Ceux qui veulent rendre un peuple barbare savent qu'il faut au préalable le rendre syntaxiquement et lexicalement pauvre. Cet appauvrissement est la triste réussite de l'école de la République!

    Que vous inspire l'enseignement de l'arabe dès le CP ?

    Son effet le plus assuré sera de maintenir en France un peuple parallèle, hors de l'histoire de ce pays, hors de sa culture, en rébellion contre cette histoire et cette culture. Cet enseignement ne va pas éradiquer la haine de la France et de sa culture que l'on constate dans une partie de la population mais au contraire (tout comme l'enseignement de l'Histoire des empires africains) va l'entretenir et l'attiser. Pour assimiler, il faut déraciner sans état d'âme. L'enseignement de l'arabe va en sens inverse. Il serait beaucoup plus intelligent d'enseigner dès le CP le latin et le grec, ainsi que ces parties du génie national que sont les langues régionales.

    Qui détient le pouvoir actuellement au sein de l'enseignement ?

    Plutôt que des personnes, la vérité est : l'idéologie. L'idéologie poststructuraliste, celle de la French Theory et des cultural studies américaines, qu'on appelle parfois gauchisme chic. C'est un magma indigeste de clichés sur les minorités, de compassion victimaire, de haine de la haute culture et de repentance. Dans cette optique, le but de l'école n'est plus la transmission du savoir, d'un héritage national, mais la correction des inégalités ethniques et la promotion des minorités. Soit : construire le vivre-ensemble… Pour la première fois, un ministre et cette idéologie sont entrés en épousailles parfaites. Tout se passe comme si Najat Vallaud-Belkacem avait été sécrétée par cette idéologie, comme si elle en était l'incarnation humaine.

    La droite n'a-t-elle pas été partie prenante dans cette entreprise de démolition ?

    Encéphalogramme plat : la droite n'a aucune pensée sur l'école. Elle ne s'intéresse qu'aux coûts, laissant, même quand elle est au pouvoir, à la gauche la direction idéologique du système. Les uns et les autres désintellectualisent le métier de professeur pour le changer en assistante sociale, aide-psychologue, animateur socio-culturel. Droite et gauche ne veulent plus que les professeurs enseignent. Que les professeurs professent. On aimerait - l'effondrement du niveau du lycée y travaille autant que les officines ministérielles de formatage, les IUFM devenus ESPE, s'en occupent - qu'ils fussent aussi incultes que leurs élèves. Les uns et les autres organisent, par les nouvelles missions qu'ils confient aux enseignants, le remplacement des hussards noirs de la République par les urgentistes du libéralisme.

    Quelles sont vos solutions - et quelle est votre vision de l'avenir ?

    Le but assigné aujourd'hui à l'école est l'apprentissage du vivre-ensemble. Celui-ci est une machine de guerre contre la fraternité, il est antirépublicain. Il conduit - comme l'attestent les propos sur l'Histoire tenus par Najat Vallaud-Belkacem cités dans le livre - à un enseignement clientéliste et communautariste conforme au semblant de politique mené par le Parti socialiste, la politique des minorités ethnico-sexuelles. La fraternité fusionne, le vivre-ensemble disjoint. On promeut le vivre-ensemble dans la mesure où l'on refuse la France. Puisque c'est le vivre-ensemble qu'il faut organiser, on n'enseignera plus rien. L'ignorance et le vide scolaires s'articulent parfaitement à la centralité destructrice du vivre-ensemble. Le vivre-ensemble ne détruit pas que la fraternité, préparant une société antifraternelle, il détruit également l'enseignement dans sa globalité, le savoir et la culture.

    La mission de l'école : donner à chaque enfant l'héritage auquel il a droit, celui de la culture, celui de l'Histoire. De l'école doivent sortir des héritiers. Or, pour des raisons idéologiques, l'école de la République contemporaine fabrique volontairement des inhéritiers.

    Que faire ? Rétablir la culture générale, qui est insupportable au système car elle rend peu malléable. L'esprit est un os, a dit Hegel - quelque chose contre quoi tout bute. Quelque chose, comme le montre le cas Soljenitsyne, qu'on ne peut réduire en cendres. La culture générale est l'esprit en ce sens-là, un os. Cet horizon implique de rétablir le latin et le grec, l'Histoire, un enseignement systématique du français, de remettre au goût du jour l'analyse logique et grammaticale, de rendre toute sa place à l'apprentissage par cœur de la poésie. Soit : développer, via l'Histoire et la littérature, un enseignement qui fasse aimer la civilisation française. 

    « L'Ecole fantôme », de Robert Redeker. Editions Desclée de Brouwer, 208 p., 17,90 €. En librairie le 1er septembre.

    Patrice de Méritens           

  • Retour à THIBON : Le suprême risque et la suprême chance

    Repris de notre Grand Texte IV

     

    Ce qu'a été le rôle et la place de Gustave Thibon dans le monde catholique, l'univers intellectuel, la sphère politique, même, et la pensée philosophique de son temps et du nôtre, serait un vaste sujet où nous n'entrerons pas ici, mais qui mériterait d'être traité.

    Disons simplement que pendant une vingtaine d'années, Thibon a été en quelque façon l'âme et l'esprit des rassemblements royalistes de Provence (Montmajour et Les Baux dans les années 1970 - 1990 ). Il y manifestait son monarchisme enraciné tout autant que sa spiritualité propre, il y apportait réalisme, sagesse et altitude. Il y était attendu, aimé, apprécié et son éloquence rendait perceptible à tous ce que son discours pouvait exprimer de haute philosophie.  

    Voici le texte intégral du discours prononcé par Gustave Thibon lors du Rassemblement royaliste des Baux de Provence de 1986. On se souviendra que le monde soviétique ne s'était pas encore effondré. Mais Thibon pressentait cette évolution en marche qui conduisait inexorablement à la société éclatée qui est aujourd'hui la nôtre. Viendrait alors le temps des hommes de plein vent, et des hommes qui luttent contre le vent. Le temps du suprême risque et de la suprême chance. Celui où nous sommes.  LFAR

     

    187852193.jpgMesdames, Mesdemoiselles, Messieurs et pour la plupart - et même pour la totalité d'entre vous, mes chers amis - car nous sommes dans un climat tout à fait familial ici, je ne déplore qu'une seule chose : le temps ; ce qui me remémore les vers d'un poète argotique, qui fut célèbre à mon époque, qui s'appelait Jehan Rictus et qui, un jour de mauvais temps, un jour pluvieux comme le nôtre, écrivait : "Tout est tellement malpropre, obscur et délétère. C'est à croire que les éléments sont en régime parlementaire".

    Nous n'en sommes pas tellement loin. Nous assistons à une sorte de ressac, à un retour de l'idéologie démocratique, associé aux nuages.

    On nous a parlé, très éloquemment, de façon très vivante, de l'impasse de la politique actuelle. La critique est d'ailleurs extrêmement facile, étant donné la nature des événements et leur succession. La démocratie a fait ses preuves négatives, et bien au-delà de ce qu'en pouvaient rêver ses pires adversaires, non pas tellement par la faute des hommes de ce nouveau gouvernement qui ne fait pas mieux que le précédent - il y a pourtant quelques personnalités qui me paressent valables - mais la faute principale retombe sur l'institution, sur le système. Sur le système reposant sur la loi du nombre et sur les fluctuations d'une opinion outrageusement manipulée. C'est 'extrêmement amusant. d'ailleurs, quand nous voyons la cohabitation dont on nous a parlé plusieurs fois aujourd'hui : vous savez que Maurras appelait la République "la femme sans tête". Hé bien, maintenant, c'est beaucoup mieux, c'est la femme à deux têtes. 

    Donc, nous avions un monstre acéphale autrefois, maintenant nous avons un monstre bicéphale. L'un ne vaut pas mieux que l'autre et le second est sûrement pire que le premier attendu que les deux têtes ne sont pas d'accord. Deux têtes qui se font des croc-en-jambe, cela ne va absolument pas.

    D'autant plus qu'à supposer qu'on prenne d'heureuses réformes, et l'on a prouvé qu'on en fait fort peu, à supposer donc qu'on en fasse, étant donné le système et les fluctuations de l'opinion, que fait-on aujourd'hui? On défait ce qui a été fait hier et on défera demain ce qui a été fait aujourd'hui. Cela ne peut durer indéfiniment;

    Un changement de politique est nécessaire, grâce à un retour à la monarchie. Pierre Pujo nous l'a bien redit : unité de direction, arbitrage indépendant, continuité et adaptation souveraine aux changements. Il suffit de relire Charles Maurras pour être persuadé de cela. Mais Pierre Chauvet m'a prié de parler d'autre chose. 

    Je voudrais insister, aujour­d'hui, sur un point essentiel : la Grande Politique embrasse la totalité de l'homme et l'histoire n'a jamais cessé de prouver que la grande politique ne va pas sans un fondement religieux, sans une référence au sacré. Mon compatriote le Cardinal de Bernis, - il est né dans le même village que moi - écrit quelque part dans un ouvrage "De la religion vengée", qui n'est pas un ouvrage de première valeur, un vers qui reste très actuel : "Où Dieu n'a plus d'autels, les rois n'ont plus de trônes". Jeanne d'Arc représente, entre autres, l'exemple suprême de l'engagement politique qui se situe aux confluents de l'humanité et du divin, de la cité des hommes et de la cité de Dieu : Le sacré dans la politique. Péguy faisait dire à Jeanne d'Arc, quand elle veut restaurer la France, lui rendre son unité, lui rendre la vie, parlant de la Maison de France :

    "La maison souveraine, ainsi qu'aux temps jadis,

    De Monsieur Charlemagne et de Monsieur Saint-Louis

    Quand le Comte Roland mourait face à l'Espagne

    Et face aux Sarrasins qui l'avaient ébloui

    Quand le Comte Roland mourait pour Charlemagne".       

    Voyez cette familiarité, cette convivialité entre le Prince et ses sujets : "Quand le Comte Roland mourait pour Charlemagne !"

    Qui a envie de mourir pour Monsieur Mitterrand ou pour Monsieur Chirac ? Qu'est devenu ce caractère sacré dans le monde moderne ? Je crois que le retour à la Monarchie ne doit pas être conçu comme un talisman, comme une recette magique qui supprimerait tous les problèmes, mais comme un sceau, comme l'incarnation d'un retour à l'ordre éternel : Pas de salut hors de l'esprit.

    Je vous citais le Cardinal de Bernis mais je peux vous citer aussi un incroyant, un autre de mes compatriotes, Rivarol, qui a été dégrisé de certaines idées rationalistes par le spectacle de la révolution française. Rivarol, voltairien, impie, est obligé d'avouer que "les nations sont des navires mystérieux qui ont leurs ancres dans le ciel". C'est cela le problème qui se pose dans la carence actuelle de la religion, dans l'effacement graduel de Dieu sur tous les horizons de la vie terrestre car nous vivons une mutation, jusqu'ici inconnue dans l'histoire, qui est celle qui a procédé de la révolution scientifique et technique laquelle a changé la face du monde. En quelques décennies, dans ce siècle, cela est allé s'accélérant prodigieusement : il s'agit d'un accroissement démesuré des pouvoirs de l'homme sur la nature et sur lui-même. 

    Quand je pense à mon enfance. à ce que pouvait être un village provençal avant la guerre de 1914 où nous vivions dans une communauté, presque comme des paysans grecs d'il y a 2000 ans ! Nous allions chercher l'eau dans un puits qui était à trente mètres, il n'y avait pas de sanitaire, pas de chauffage central. On vivait presque en autarcie. On donnait du blé au boulanger et le boulanger nous donnait du pain en échange et ainsi de suite. Les moyens de communication étaient le cheval et la charrette, on n'allait pas très loin. Les moyens d'information se réduisaient à l'achat du journal, le dimanche, et encore on n'en était pas sûr. Voyez les modifications de maintenant, tout a été bouleversé, changé. Je ne dis pas que tout a changé négativement, mais je dis que cela appelle des réformes profondes à l'intérieur de l'homme. Le mal du siècle, c'est le déséquilibre entre le progrès matériel qui est immense et le progrès moral qui est nul, ce qui pose le problème religieux : c'est la crise religieuse. Car, enfin, si nous regardons autour de nous et en nous-mêmes, au fond, nous avons de moins en moins besoin de Dieu, besoin de prier dans l'ordre matériel. Nos aïeux étaient cernés par les difficultés de la vie, par les rigueurs d'une nature dont on ignorait en grande partie les mécanismes, les hommes s'adressaient aux dieux, s'ils étaient païens ou à Dieu, s'ils étaient chrétiens, dans toutes les circonstances de la vie : famines, maladies, sécheresse... Je me rappelle dans mon enfance avoir entendu des prières pour qu'il pleuve.

    L'homme de plus en plus attend tout de l'homme et attend de moins en moins de Dieu. Et la crainte de Dieu qui, paraît-il, était le commencement de la sagesse, est en train de s'évaporer car nous vivons dans une société de plus en plus sécurisée devant tout sauf devant la mort. La mort qu'on escamote de plus en plus car c'est un des signes de notre siècle que cette disparition de l'idée de la mort dont on ne parle pas. Il m'arrive très souvent d'évoquer ma fin prochaine - ce qui à l'âge que j'ai, me paraît très normal. Même si je vis encore quelques années, elle n'est pas lointaine. Mais quand je parle de cela, on se demande si je ne suis pas un peu neurasthénique, si ce ne sont pas des idées noires ! Ce sont des idées très claires au contraire, c'est même la seule chose claire dont on soit certain. Mais cela paraît presque impudique ou tout au moins un signe de dépression marquée. Quelquefois, cependant, la crainte revient dans les pires circonstances : je connais un personnage qui m'a dit : "Quand j'ai la trouille, je redeviens catholique". J'avoue que cela me paraît un genre de conversion peu souhaitable ! Bossuet le disait déjà en parlant de certains incroyants qui, attachés au monde, se rattachent à Dieu quand le monde leur manque : "ô pénitences impénitentes ! ô pénitences toutes criminelles et toutes infestées de l'amour du monde !" Quand Dieu reste le dernier recours, on y va. Cela ne va pas très loin mais me fait penser au mot de Talleyrand, Talleyrand, évêque apostat. Comme il était près de la mort, sa nièce essaya de lui parler humblement de Dieu, car on ne savait pas trop ce qu'il pensait. Il lui répondit : "Soyez tranquille, ma nièce, j'ai toujours été du côté du plus fort".

    Si on prend Dieu uniquement comme puissant, cette adoration me paraît extrêmement impure. 

    Et cela me fait souvenir de la prophétie de Mistral, puisque nous sommes aux Baux. Parlant de l'humanité future, il y a 120 ans, il écrivait : 

    "Canton l'umanita futuro 

    Que mestresejo la naturo, 

    E davans l'ome soubeiran 

    Dieu a siau pas se retiran... 

    Je traduis deux vers avant :         

    "Ils chantent les peuples sevrés

    Que l'on entend hurler au loin, 

    Ils chantent l'humanité future 

    Qui maîtrise à son gré le monde naturel 

    Et, devant l'homme souverain, 

    Dieu pas à pas se retirant."  

    Il se passe - je le dis sans faire d'hérésie mais psychologiquement c'est ainsi - comme si Dieu avait délégué une partie de son pouvoir aux hommes, une partie de sa toute puissance. Seulement, ce qu'il n'a pas délégué, c'est sa pureté, sa perfection, son amour. En apparence, nous sommes puissants mais dans l'ordre de la perfection, dans l'ordre de la pureté, dans l'ordre de l'amour, nous sommes aussi impotents que nos aïeux car l'époque des guerres apocalyptiques, des camps de concentration, des révolutions qui aggravent les maux qu'elles prétendent guérir, tout cela montre qu'en fait de misère et d'horreurs, nous sommes très près des pires périodes de l'histoire. Et dans l'ordre moral précisément et spirituel, le recours à Dieu est plus nécessaire que jamais, ne serait-ce que pour ne pas être les victimes de nos propres conquêtes. On en revient au mot célèbre de Rabelais qui prend une extraordinaire actualité : "Science sans conscience n'est que ruine de l'âme.'' La science s'est développée niais non pas la conscience, d'où le déséquilibre. Et l'on arrive à ceci : un retour à l'esprit ou la mort. "Changez d'âme, dit l'Évangéliste, changez d'esprit ou vous mourrez". Il s'agit d'élargir la conscience à la mesure des pouvoirs de l'homme.                       

    Je dois conclure. Je n'ai jamais caché mon angoisse devant la crise du monde actuel, devant tout ce qui nous menace. Mais angoisse ne veut pas dire désespoir. C'est dans le suprême risque que naît, que s'affermit la suprême espérance. 

    Simone Veil, que j'ai eu l'honneur d'abriter et de connaître pendant la guerre, a un mot magnifique à ce sujet "Que pourrais-je souhaiter de meilleur que de vivre à une époque où l'on a tout perdu !" Certainement, on n'a pas tout perdu dans notre époque mais nous sommes vraiment menacés de tout perdre. Et, c'est dans une pareille époque que l'on peut tout retrouver, à condition de dominer son siècle de toute la hauteur de l'éternité, de toute la hauteur de l'esprit ; ce qui me rappelle un proverbe hindou "Le parfum des fleurs va avec le vent, le parfum de la vertu va contre le vent". Maintenant, nous sommes bien obligés d'aller contre le vent ; et jamais, je crois, dans l'histoire, le choix entre l'erreur et la vérité, entre la vie et la mort ne s'est posé d'une manière aussi abrupte, aussi absolue. Et, en disant cela, je pense aux jeunes en particulier. Ces valeurs humaines et divines, autrefois étaient impliquées dans l'éducation de tous les jours, dans la famille. Elles s'imposaient par la pression sociale, par les mœurs. Ces valeurs ne s'imposent plus de la même manière, aujourd'hui. Il appartient aux jeunes de les retrouver, maintenant, librement, de les reconstruire contre les influx de la mode, de l'opinion ambiante, contre tout le courant du siècle. Nous n'avons plus de cocon protecteur. Les jeunes sont confrontés à des opinions, à des mœurs très différentes de celles de la famille, du milieu naturel, même ceux qui sont élevés dans les meilleurs milieux. Ils devront choisir, s'opposer, recréer les valeurs. Il y faudra beaucoup de courage. Il y a une devise d'une famille française - je crois qu'il s'agit des Clermont-Tonnerre "Si omnes, ego non" - "Si tous, moi pas". C'est une très belle devise. Savoir dire non à la foule, c'est le premier et c'est le suprême degré de la sagesse.  

    Il s'agit de réagir, à la fois, contre le goulag violent de l'Orient et le goulag insidieux de l'Occident. Il n'y a plus tellement de cocons, il n'y a plus tellement de nids. Nous avons besoin, je le répète, d'hommes de plein vent et d'hommes qui luttent contre le vent. Ce sera là ma conclusion. Ce qui est capital et qui va tout à fait avec notre foi monarchique, c'est de veiller sur son âme. Les biens invisibles, les biens intérieurs, ne l'oublions

  • Bioéthique : La France confrontée à une culture de mort (18), par François Schwerer

    Le sénat va connaître dans les jours à venir le projet de loi de bioéthique. Notre ami François Schwerer nous a adressé - avec un message de sympathie - l'ensemble des textes qu'il été amené à écrire sur cette question.

    Cet ensemble constitue une véritable somme, aussi bien par son importance que par son intérêt.

    Nous en avons commencé la publication le vendredi 10 janvier, et nous la poursuivrons du lundi au vendredi inclus, comme nous l'avons fait, par exemple, pour l'étude de Pierre Debray, Une politique pour l'an 2000.

    Et, pour suivre et retrouver ces textes plus commodément, nous regrouperons la totalité de cette étude, vu son importance, dans une nouvelle Catégorie : François Schwerer - Bioéthique : culture de mort : vous pourrez donc retrouver donc l'ensemble de cette chronique en cliquant sur le lien suivant :

    François Schwerer - Bioéthique : culture de mort...

    Voici le plan de l'étude (hors Annexes et textes divers, qui viendront ensuite); nous le redonnons chaque jour, afin que le lecteur puisse correctement "situer" sa lecture dans cet ensemble :

     

    1. Les étapes de la décadence
    • Un processus téléologique

    1/. « Qui n’avance pas recule »

    2/. De la pilule à la GPA : l’asservissement des femmes

    3/. La révolte des femmes et les mouvements féministes

    4/. Le transhumanisme, stade ultime de la destruction

    • La stratégie progressiste

    1/. La campagne médiatique préalable

    2/. La modification de la loi

    3/. Le recours à une novlangue

    4/. Le discrédit de l’adversaire

    5/. La politique des petits pas

    6/. Le viol de la conscience des enfants

    1. « Pour une nouvelle croisade »

    A - Une faible résistance

    1/. Des hommes politiques sans conviction

    2/. Des manifestations apparemment inefficaces

    3/. Un refus de mettre en danger son propre confort

    4/. Un faux respect de l’apparente liberté d’autrui

    5/. Si le Seigneur ne bâtit pas, c’est en vain que s’agitent les bâtisseurs

    B – Un combat dont l’enjeu dépasse le fonctionnement de la vie sociale

    1/. Il est plus facile de descendre une pente que de la remonter

    2/. Un combat ayant une dimension eschatologique

    Schwerer.jpg2/. Un combat ayant une dimension eschatologique

     

    Les progrès des sciences – et non de la science – et les succès techniques ont conduit l’homme à une sorte d’ivresse. Il se croit désormais tout-puissant. S’il ne maîtrise pas encore la totalité de la vie, ce n’est, pense-t-il, qu’une question de temps. Un jour viendra où les connaissances accumulées, comme par hasard, lui permettront de satisfaire tous ses désirs. Parce qu’il croit pouvoir être en mesure de tout maîtriser, l’homme technicien en arrive à refuser toute vulnérabilité, pour lui comme pour les autres. Il est devenu lui-même le centre de tout, le but final de son propre développement et, de ce fait, il a oublié tous les autres hommes.

    En devenant lui-même le centre de ses préoccupations, l’homme porte atteinte à la vie en société, surtout en système démocratique, libéral et individualiste. En effet, dans la mesure où il est devenu pour soi la référence unique, tout débat politique dégénère inéluctablement en combat pour « sa » vérité. Chacun finit par penser qu’il lutte pour le bien et contre le mal. Or, comme l’a confié Natacha Polony à Figarovox, « le mal, on ne transige pas avec, on l’éradique ». Dans ce système, le gouvernement n’est que celui des partis et non celui du pays. La poursuite de l’intérêt partisan s’est substituée à la recherche du bien commun.

    Dans un système libéral, individualiste et matérialiste, l’homme a perdu le sens profond du spirituel et confond tous les plans car, en particulier, l’individualisme conduit à faire triompher le subjectivisme sur l’objectivité. Le père Stalla-Bourdillon en faisait le constat pour Figarovox : « Le pouvoir spirituel n’est pas un « pouvoir », c’est un conseil chargé d’éclairer les personnes, en vue de choix de conscience, libre et raisonnable.  Le pouvoir temporel doit seulement administrer les choses ». Hélas, depuis quelques décennies, il s’est produit une inquiétante confusion : « l’autorité temporelle se prend pour l’autorité spirituelle, un « sacré séculier ». Ainsi ce qui devrait rester conseil devient une injonction et l’administration masque son impuissance en faisant la morale au peuple ». Or, ajoute-t-il avec raison, « Rien n’est plus dangereux que de vouloir sacraliser le pouvoir ».

    L’homme qui se veut tout-puissant ne regarde plus que lui-même. Toutes ses facultés sont asservies à cette fin suprême. La parole n’est plus le moyen d’entrer en relation les uns avec les autres ; elle est devenue un simple outil permettant d’asseoir sa puissance et d’asservir les autres à des tâches matérielles grandioses (une tour qui pénètre les cieux et une unique ville aux dimensions planétaires) comme au temps de Babel. Les outils modernes de communication ne sont d’ailleurs pas vendus pour aider à servir les autres mais pour parler de soi et se mettre en valeur… et les « selfies » permettent aux Narcisses d’aujourd’hui de se contempler en tout temps et tout lieu.

    Hélas, cette toute-puissance ne permet pas d’étancher la soif d’infini et le besoin de relation qui gisent au fond du cœur de tout homme. Le triomphe de la culture technocratique s’accompagne inéluctablement d’une insatisfaction permanente. C’est ainsi que, dans les écoles et les universités le chahut bon enfant de potaches heureux a laissé la place à la contestation agressive d’une masses aux composantes esseulées ; dans la rue le monôme joyeux a été supplanté par la manifestation de véritables troupeaux angoissés et bêlants. Dans le même temps, le « conservatisme démocratique » qu’avait analysé Maurras a été remplacé par l’« alternance démocratique » vantée par tous les « partis de gouvernement ».

    En fait, cette connaissance autocentrée est venue brouiller la pensée. Si tout homme est devenu en soi le centre de tout, tous les hommes se valent ; et s’il n’existe aucune autre valeur que celle qu’il se donne à lui-même alors chaque homme se trouve ravalé au rang de simple individu matériel et égoïste dont les idées ne sont ni plus ni moins pertinentes que celles de l’individu voisin, ce qui engendre un relativisme désespérant. Les notions de bien et de mal sont devenues relatives. Comme le dénonçait saint Jean-Paul II en 1995, « C'est au plus intime de la conscience morale que s'accomplit l'éclipse du sens de Dieu et du sens de l'homme, avec toutes ses nombreuses et funestes conséquences sur la vie. C'est avant tout la conscience de chaque personne qui est en cause, car dans son unité intérieure et avec son caractère unique, elle se trouve seule face à Dieu. Mais, en un sens, la « conscience morale » de la société est également en cause: elle est en quelque sorte responsable, non seulement parce qu'elle tolère ou favorise des comportements contraires à la vie, mais aussi parce qu'elle alimente la « culture de mort », allant jusqu'à créer et affermir de véritables « structures de péché » contre la vie. La conscience morale, individuelle et sociale, est aujourd'hui exposée, ne serait-ce qu'à cause de l'influence envahissante de nombreux moyens de communication sociale, à un danger très grave et mortel, celui de la confusion entre le bien et le mal en ce qui concerne justement le droit fondamental à la vie. Une grande partie de la société actuelle se montre tristement semblable à l'humanité que Paul décrit dans la Lettre aux Romains. Elle est faite d'« hommes qui tiennent la vérité captive dans l'injustice » (Ro I, 18) : ayant renié Dieu et croyant pouvoir construire sans lui la cité terrestre, « ils ont perdu le sens dans leurs raisonnements », de sorte que « leur cœur inintelligent s'est enténébré » (Ro I, 21) ; « dans leur prétention à la sagesse, ils sont devenus fous » (Ro I, 22), ils sont devenus les auteurs d'actions dignes de mort et, « non seulement ils les font, mais ils approuvent encore ceux qui les commettent » (Ro I, 32). Quand la conscience, cet œil lumineux de l'âme (cf. Mt VI, 22-23), appelle « bien le mal et mal le bien » (Is V, 20), elle prend le chemin de la dégénérescence la plus inquiétante et de la cécité morale la plus ténébreuse » (1). La forte saveur du fruit de l’arbre de la connaissance du Bien et du Mal a fait perdre jusqu’au goût de la solidarité entre tous, ce qui a contribué à faire pourrir le fruit de l’arbre de la Vie.

    (1) : Evangelium vitae n° 24. 

    L’individu voit ainsi son horizon se réduire à la poursuite d’un « accomplissement » qu’il ne recherche plus que dans la singularité, la matérialité et l’immédiateté et qui, de ce fait, conservera toujours un goût d’inachevé. Placé au centre et au-dessus de tout, l’homme se veut maître ; maître de lui-même comme de l’univers. Mais sans but, il n’est en fait que l’esclave de ses désirs. Et, dans cette soif d’un pouvoir toujours plus absolu, l’homme en vient à ne plus vouloir ni servir ni obéir.

    Ayant commencé à maîtriser les biens matériels à sa disposition comme les mouvements de sa pensée, l’homme en vient à vouloir maîtriser la vie, de son commencement (manipulations génétiques) à sa fin (euthanasie) et passant par le droit même de faire vivre (avortement) et celui de procréer (PMA/GPA). La technique est reine. Tout semble possible ; mais, en même temps, l’homme a perdu le sens de son action et ne sait même plus qu’il est un être.

    Si les chrétiens de France ne veulent pas perdre leur âme, il leur faut réagir, sachant que plus ils attendront plus cela sera douloureux. La question est de savoir comment ils doivent s’y prendre alors que les hommes (et femmes !) politiques, les journalistes et les « financier-e-s » s’accordent pour promouvoir cette société autant libertaire que liberticide… irriguée par l’argent.

    Parmi les moyens à employer, le pape Léon XIII avait imaginé que les catholiques de France se rallient à la République afin d’avoir des chances d’être élus et de participer ainsi au pouvoir de législation. Il s’agissait de faire voter des lois qui respectent les droits de Dieu.

    Dans son encyclique « Au milieu des sollicitudes » du 20 février 1892, il commençait par ce diagnostic qui est, plus que jamais, d’actualité : « En pénétrant à fond, à l’heure présente encore, la portée du vaste complot que certains hommes ont formé d’anéantir en France le christianisme, et l’animosité qu’ils mettent à poursuivre la réalisation de leur dessein, foulant aux pieds les plus élémentaires notions de liberté et de justice pour le sentiment de la majorité de la nation, et de respect pour les droits inaliénables de l’Église catholique, comment ne serions-Nous pas saisi d’une vive douleur ? Et quand Nous voyons se révéler, l’une après l’autre, les conséquences funestes de ces coupables attaques qui conspirent à la ruine des mœurs, de la religion et même des intérêts politiques sagement compris, comment exprimer les amertumes qui Nous inondent et les appréhensions qui nous assiègent ? »

    Face à une telle situation, le pape ne désespérait pas car il avait une haute estime pour le peuple de France. « Nous Nous sentons grandement consolé, lorsque Nous voyons ce même peuple français redoubler, pour le Saint-Siège, d’affection et de zèle, à mesure qu’il le voit plus délaissé, Nous devrions dire plus combattu sur la terre ».

    Afin, ensuite, de préciser l’enjeu de ses conseils, avant de passer à la solution qu’il préconisait, il rappelait quelques points fondamentaux relatifs à toute société civile. « Avant tout, prenons comme point de départ une vérité notoire, souscrite par tout homme de bon sens et hautement proclamée par l’histoire de tous les peuples, à savoir que la religion, et la religion seule, peut créer le lien social (1); que seule elle suffit à maintenir sur de solides fondements la paix d’une nation. Quand diverses familles, sans renoncer aux droits et aux devoirs de la société domestique, s’unissent sous l’inspiration de la nature, pour se constituer membres d’une autre famille plus vaste, appelée la société civile, leur but n’est pas seulement d’y trouver le moyen de pourvoir à leur bien-être matériel, mais surtout d’y puiser le bienfait de leur perfectionnement moral. Autrement la société s’élèverait peu au-dessus d’une agrégation d’êtres sans raison, dont toute la vie est dans la satisfaction des instincts sensuels. Il y a plus : sans ce perfectionnement moral, difficilement on démontrerait que la société civile, loin de devenir pour l’homme, en tant qu’homme, un avantage, ne tournerait pas à son détriment ». Et, il insistait alors sur un point : devant le danger aussi grand que constitue ce refus de Dieu, tous les hommes doivent faire taire leurs différences.

    Il expliquait ensuite pour quelle raison, il proposait alors aux Français de ne pas remettre en cause la forme de gouvernement du moment. Ce qui compte ce n’est pas la forme de l’organisation sociale ni qui détient le pouvoir, mais l’usage qui est fait de ce pouvoir. Un bon gouvernement peut faire de mauvaises lois ; un mauvais gouvernement, disait-il, peut faire de bonnes lois. « La législation est l’œuvre des hommes investis du pouvoir et qui, de fait, gouvernent la nation. D’où il résulte qu’en pratique la qualité des lois dépend plus de la qualité de ces hommes que de la forme du pouvoir (2). Ces lois seront donc bonnes ou mauvaises, selon que les législateurs auront l’esprit imbu de bons ou de mauvais principes et se laisseront diriger, ou par la prudence politique, ou par la passion ».

    (1) : La religion, et non la religiosité. Autrement dit, si la religion seule peut créer le lien social, elle ne peut le faire qu’au sein d’une communauté dont les membres partagent la même foi. Une masse d’individus qui ne partagent pas la même foi finit par se disloquer à moins qu’un groupe (une communauté) n’en vienne à soumettre les autres.

    (2) : L’erreur fondamentale du pape fut de ne pas envisager que certaine forme du pouvoir peut pervertir les hommes qui l’exercent.

    Au cas où les chrétiens n’auraient pas compris le but proposé par le pape, celui-ci était conscient du fait qu’un jour il ne leur resterait plus d’autre solution que le martyre.

    Un examen des luttes passées permet d’entrevoir les sacrifices auxquels il faudra consentir si l’on veut sauver une France chrétienne. Avec l’engourdissement actuel, ces sacrifices seront à la fois épuisants et douloureux. Ils le seront d’autant plus que les chrétiens doivent toujours tenir compte du fait que tous les moyens ne sont pas bons. Ils ne peuvent donc pas être tous utilisés, même pour servir une bonne et juste cause.

    Si l’on veut avoir une chance d’être entendu, il faut que chacun ait la volonté d’aller jusqu’au bout et soit personnellement prêt à en payer le prix. Peut-on qualifier de résistant celui qui serait paralysé par l’idée d’être mal jugé par l’envahisseur ou ses thuriféraires, ou qui craindrait de recevoir un mauvais coup ? Si un gouvernement fait de mauvaises lois, il faut être prêt à assumer la responsabilité de le changer.

    Comme l’’explique Jean des Graviers dans son ouvrage sur le « Droit canonique », « l’Etat a pour fin d’assurer le bien commun de ses membres, en leur garantissant la jouissance pacifique de leurs droits et en leur procurant des moyens de réaliser leur bonheur terrestre ». Puis il ajoute très clairement : « la philosophie catholique n’est pas dualiste ; le corps n’est pas un étranger pour l’âme. L’Eglise ne se réserve pas l’âme pour laisser le corps à l’Etat. L’Etat aussi a charge d’âmes, et il doit protéger la pensée et la liberté de l’âme ; l’Etat s’occupe du composé humain tout entier, corps et âme. Mais au point de vue de la destinée terrestre de la personne ». Un Etat qui ferait donc de mauvaises lois au risque de tuer l’âme de ses citoyens, ne serait qu’une « structure de péché », comme l’expliquait saint Jean-Paul II.

    Le pape Léon XIII lui-même, toujours dans la même encyclique sur le Ralliement à la République, « Au milieu des sollicitudes », n’affirmait-il pas : «  Dès que l’État refuse de donner à Dieu ce qui est à Dieu, il refuse, par une conséquence nécessaire, de donner aux citoyens ce à quoi ils ont droit comme hommes ; car, qu’on le veuille ou non, les vrais droits de l’homme naissent précisément de ses devoirs envers Dieu. D’où il suit que l’État, en manquant, sous ce rapport, le but principal de son institution, aboutit en réalité à se renier lui-même et à démentir ce qui est la raison de sa propre existence » ? Dès lors un tel gouvernement perd toute légitimité ; il n’a même plus le droit de se prétendre tel. Il n’est plus qu’une « bande de brigands », pour reprendre l’expression de saint Augustin.

    Il en résulte que, si ce sont les institutions qui génèrent nécessairement ces mauvaises lois au point de dénaturer jusqu’à leur fonction étatique, il faut avoir la force morale de les changer, sans provoquer pour autant cet autre mal absolu qu’est le désordre

  • Bioéthique : La France confrontée à une culture de mort (17, 1/2), par François Schwerer

    Le sénat va connaître dans les jours à venir le projet de loi de bioéthique. Notre ami François Schwerer nous a adressé - avec un message de sympathie - l'ensemble des textes qu'il été amené à écrire sur cette question.

    Cet ensemble constitue une véritable somme, aussi bien par son importance que par son intérêt.

    Nous en avons commencé la publication le vendredi 10 janvier, et nous la poursuivrons du lundi au vendredi inclus, comme nous l'avons fait, par exemple, pour l'étude de Pierre Debray, Une politique pour l'an 2000.

    Et, pour suivre et retrouver ces textes plus commodément, nous regrouperons la totalité de cette étude, vu son importance, dans une nouvelle Catégorie : François Schwerer - Bioéthique : culture de mort : vous pourrez donc retrouver donc l'ensemble de cette chronique en cliquant sur le lien suivant :

    François Schwerer - Bioéthique : culture de mort...

    Voici le plan de l'étude (hors Annexes et textes divers, qui viendront ensuite); nous le redonnons chaque jour, afin que le lecteur puisse correctement "situer" sa lecture dans cet ensemble :

     

    1. Les étapes de la décadence
    • Un processus téléologique

    1/. « Qui n’avance pas recule »

    2/. De la pilule à la GPA : l’asservissement des femmes

    3/. La révolte des femmes et les mouvements féministes

    4/. Le transhumanisme, stade ultime de la destruction

    • La stratégie progressiste

    1/. La campagne médiatique préalable

    2/. La modification de la loi

    3/. Le recours à une novlangue

    4/. Le discrédit de l’adversaire

    5/. La politique des petits pas

    6/. Le viol de la conscience des enfants

    1. « Pour une nouvelle croisade »

    A - Une faible résistance

    1/. Des hommes politiques sans conviction

    2/. Des manifestations apparemment inefficaces

    3/. Un refus de mettre en danger son propre confort

    4/. Un faux respect de l’apparente liberté d’autrui

    5/. Si le Seigneur ne bâtit pas, c’est en vain que s’agitent les bâtisseurs

    B – Un combat dont l’enjeu dépasse le fonctionnement de la vie sociale

    1/. Il est plus facile de descendre une pente que de la remonter

    2/. Un combat ayant une dimension eschatologique

    Schwerer.jpgB – Un combat dont l’enjeu dépasse le fonctionnement de la vie sociale

     

    1/. Il est plus facile de descendre une pente que de la remonter

     

    Un rapide examen de la situation permet de constater que la France n’est ni seule dans cette dérive, ni même à la pointe de ce naufrage. Pour ne citer qu’eux, le Royaume-Uni, en ce qui concerne la procréation artificielle ou la Belgique en ce qui concerne l’euthanasie, sont « en avance » sur la France. L’Union européenne, apporte son concours à l’affaire (1).

    Ce qu’il y a de pire c’est que ceux qui poussent à cette évolution sont tellement influencés par la dégénérescence générale qu’ils ne se rendent même plus compte que « tout est lié ». Ainsi, Jean-Louis Bourlanges, dans la tribune publiée par Le Figaro le 3 juillet 2019 pour s’inquiéter du projet de loi sur la PMA, rappelait qu’en 2004, alors qu’il était président de la Commission des Libertés au Parlement européen, il s’était opposé à la nomination au poste de Commissaire aux droits fondamentaux d’un « adversaire affiché du droit à l’orientation sexuelle ». Comme il n’y a aucune raison de croire que cet homme politique ne soit pas sincère, il est incohérent.

    Dès lors, comment expliquer, sans recourir à une quelconque théorie d’un complot, le fait que le combat pour une société humaine paraisse déséquilibré ? Plus précisément, comme l’a écrit le professeur Jacques Bichot, « qu’est-ce qui fait agir de manière si efficace un ensemble de personnes qui ne sont pas véritablement liées entre elles ? Il y a certes un facteur non négligeable : la sottise. […] Mais cela ne suffit pas. Il faut comprendre ce qui amène une masse de gens disparates à agir dans le même sens, sans qu’il y ait de coordination importante, et pourtant avec une efficacité qu’atteindrait difficilement une organisation bien structurée. En économie le marché donne de tels résultats ; aurions-nous quelque chose d’analogue dans le domaine [politique] ? Mais quoi exactement ? Pour combattre l’adversaire, il faut savoir de quel armement il dispose, de quelles alliances, de quelle capacité d’agir de façon coordonnée, stratégique ».

    Ne faut-il pas répondre oui à cette question ? Il existe un système qui assure cette cohérence, c'est la démocratie (2) libérale.

     

    (1 ) : Il est à noter que Mme Ursula von der Leyen qui vient d’être désignée pour devenir la prochaine présidente de la Commission européenne et qui avait voté en faveur du mariage homosexuel, contre la majorité des membres de son parti en Allemagne, avait alors argumenté au Bundestag : « Je ne connais aucune étude qui démontre qu’un enfant élevé dans un couple gay diffère de celui élevé dans un couple hétérosexuel ». Les divers projets de  Madame von der Leyen en matière de politique familiale ont toujours rencontré l’opposition de l’évêque d’Augsbourg, Monseigneur Mixa. Elle va donc prendre la tête de la Commission européenne alors que celle-ci a inscrit parmi ses priorités en mars 2019, la promotion de l’égalité LGBT.

    (2) : En fait, comme nous l’expliquons dans Politique Magazine (Janvier 2020), la démocratie n’est que la cause efficiente de cette évolution qui, comme dans d’autres domaines accentue la fracturation sociale.

     

    Les causes de la fracturation sociale

    Il y a quelques années, le président Chirac avait lancé comme slogan de campagne la lutte  contre la « fracture sociale » ; comme s’il n’y en avait qu’une seule, d’une seule sorte et que sa réduction puisse être l’affaire d’un quinquennat. En réalité les fractures sont multiples et touchent tous les domaines de la vie sociale. Une analyse de type aristotélicien montre que si chaque fracture a une cause matérielle spécifique, les causes formelles, efficientes et finales sont identiques. Cette analyse est indispensable à qui prétend vouloir éradiquer le mal.

    La cause matérielle : le phénomène d’exclusion

    Quand il parlait de la « fracture sociale », le candidat Chirac orientait le débat sur un plan essentiellement économique et faisait allusion à la fracture entre les bénéficiaires de la croissance et les exclus, entre les profiteurs du système et ceux qui en sont victimes et ne peuvent s’adapter. Mais une fracture existe aussi entre les Français imprégnés de la tradition judéo-chrétienne, ceux qui se réclament de l’islam et les tenants de la libre pensée. Une fracture est encore repérable entre les nationalistes, les européistes et les mondialistes, etc. Toutes ces fracturations de la société ont en commun de partager la population en diverses factions qui ne peuvent pas s’entendre sur un point fondamental, ce qui conduit chaque communauté à considérer les autres comme infréquentables. Chaque groupe, plutôt que d’essayer de comprendre les autres, jette sur eux l’anathème. Plutôt que de rechercher l’unité dans un dialogue plein de compréhension, il est plus facile de pratiquer l’exclusion. Mais la tentation est alors grande de vouloir réduire « la » fracture en faisant simplement disparaître du paysage visible celui qui est considéré comme un « déchet ».

    La cause formelle : l’idéologie individualiste

    La société ne se sent plus une communauté de personnes unies par une culture commune, partageant une histoire liant les générations les unes aux autres et se reconnaissant dans des valeurs acceptées par tous. Elle n’est plus qu’une masse informe d’individus poursuivant chacun son intérêt égoïste et la satisfaction de ses désirs immédiats promus au rang de droits. Dès lors le territoire sur lequel l’individu est venu au monde n’a pas plus d’importance qu’un autre ; l’individu n’est pas enraciné dans une patrie, il se sent citoyen du monde. La libre circulation des personnes, la libre installation en n’importe quel point du globe sont des droits fondamentaux et quiconque voudrait les limiter ou simplement les organiser, doit être combattu. Si des personnes peuvent se sentir solidaires, les individus ne sont que des entités juxtaposées qui n’ont pas à se soucier des autres. Chacun est libre… jusqu’au moment où sa liberté vient heurter celle de l’individu voisin. Naissant enfant trouvé et mourant célibataire, comme le voyait Renan, l’individu n’a pas à se soucier de son frère puisqu’il n’a pas de frère. Il n’a ni plus ni moins de valeur que l’autre avec lequel il est, au regard de la masse, parfaitement interchangeable pour peu qu’il y apporte la même utilité. Sa dignité personnelle n’est plus intrinsèque car elle dépend uniquement de la valeur ajoutée qu’il apporte à l’ensemble. A l’inverse il est devenu un élément endogène dans un réseau auquel il appartient au même titre que les autres outils à travers lesquels circulent les flux de la puissance matérielle à l’aune de laquelle la masse est jugée.

    La cause efficiente : le système démocratique

    Comme cette masse est gouvernée par des « élites » élues sur un projet d’idées abstraites dont la cohérence est abandonnée au profit d’un souci de « ratisser large », le pays est peu à peu dominé par les sophistes disposant des moyens de persuasion les plus performants. Les citoyens ne sont plus représentés car les élections législatives, intervenant juste après les élections présidentielles et la durée des mandats coïncidant exactement, elles ont pour but de donner au président élu une majorité qui lui permettra de faire ce qu’il entend pendant les cinq ans de son mandat. Il en résulte deux conséquences majeurs : les députés ne sont plus les représentants du peuple auprès du pouvoir mais les fonctionnaires du pouvoir, adoubés par un parti et donnés par le peuple au chef du Gouvernement pour assurer le « service après-vente » de ce qu’il décide ; ensuite les lois ne sont plus la traduction de la nécessaire adaptation de la loi naturelle aux conditions du moment mais la mise en œuvre de l’opinion changeante d’une majorité de circonstance. Et, comme toute opinion majoritaire fluctue au gré des émotions, la loi devenue instable doit, pour s’imposer,  être contraignante et tatillonne. De plus, comme l’intérêt général est abusivement réputé être la somme des intérêts particuliers, ces lois sont toujours faites dans le but de favoriser les caprices de la majorité (d’ailleurs relative) du moment. Les minorités ne comptent pas ; elles n’ont que le droit de se soumettre ou de manifester leur mécontentement, au risque de nuire à tous.

    La cause finale : la déification de l’homme

    En fait, cet individu qui décide souverainement de ce qu’il doit faire, de la façon dont il veut vivre, de ce qu’il considère comme bien et de ce qu’il décrète mauvais, refuse de se reconnaître une créature de Dieu. Il se fait Dieu lui-même. Il s’idolâtre. Il est à soi la cause et le but de sa vie. Il se veut maître de lui, « comme de l’univers ». Il veut être et, pour lui, vivre se conjugue toujours au présent. Les exemples du passé ne comptent pas auprès de ses idées et de sa volonté ; quant au futur, il pense que c’est l’affaire de ceux qui viendront après lui. Seule la technique qui lui permet de satisfaire ses caprices est digne de considération. Dès qu’elle permet une nouvelle avancée, celle-ci doit aussitôt être mise en œuvre, peu importe les conséquences qui en découleront. L’individu qui se prend pour Dieu, veut tout, tout de suite et s’il ne peut s’approprier immédiatement ce qu’il convoite, il l’obtient à crédit (crédit, qu’il le sait, il ne remboursera jamais). La libre circulation des biens et des services, la liberté du commerce deviennent des éléments de la liturgie qu’il entretient pour encenser sa propre réussite. Etant ainsi devenu le centre de tous ses soins, sa relation à l’autre se mesure à son utilité immédiate : si l’autre lui est utile, il l’accepte ; s’il ne lui apporte rien et ne lui coûte pas non plus, il l’ignore ; s’il le gêne ou le concurrence, il le combat.

    Une société fracturée

    Il résulte de cette rapide présentation que la « fracture sociale » telle qu’elle est présentée par les technocrates qui se croient hommes politiques n’est que l’arbre qui cache la forêt. C’est la société tout entière qui est fracturée et les fractures sont multiples. Lorsqu’un candidat quelconque prétend lutter contre la « fracture sociale », il ne prétend en fait lutter que contre l’une des causes d’une seule de ces fractures. L’unique fracture qu’il vise est la fracture mise en exergue par des indicateurs économiques choisis (taux de chômage, croissance du PIB, âge de départ à la retraite et taux des cotisations…) sur lesquels il est facile de communiquer ; les autres sont ignorées voire aggravées. Quant à la cause sur laquelle il veut agir – ou qu’il veut masquer –, il ne s’agit que de la cause matérielle ; il n’envisage nullement de se pencher sur les autres causes : formelle ou efficiente et surtout pas finale. Il se fait élire pour lutter contre une fracture sociale et non pas contre la fracturation sociale. Il n’envisage donc pas de se conduire véritablement en politique au service du Bien commun, mais en simple défenseur de certains intérêts particuliers. Aux élections suivantes, il pourra toujours axer sa campagne sur la fracture qu’il aura laissé se creuser un peu plus entre temps.   

    Une fracture est repérable entre les Français imprégnés de la tradition judéo-chrétienne, ceux qui se réclament de l’islam et les tenants de la libre pensée. Une fracture est encore repérable entre les nationalistes, les européistes et les mondialistes, etc. Toutes ces fracturations de la société ont en commun de partager la population en diverses factions qui ne peuvent pas s’entendre sur un point fondamental, ce qui conduit chaque communauté à considérer les autres comme infréquentables. Chaque groupe, plutôt que d’essayer de comprendre les autres, jette sur eux l’anathème. Plutôt que de rechercher l’unité dans un dialogue plein de compréhension, il est plus facile de pratiquer l’exclusion. Mais la tentation est alors grande de vouloir réduire « la » fracture en faisant simplement disparaître du paysage visible celui qui est considéré comme un « déchet ».

    Celle-ci, telle qu’elle est conçue aujourd’hui – et qui n’a rien à voir avec ce que les Grecs de l’Antiquité nommaient ainsi – est fille de la philosophie des Lumières. Cette philosophie a substitué « à la conception stoïcienne des droits de l’homme une autre fondée sur le concept de citoyen. Le citoyen, devenant, du moins en principe, l’auteur des lois qui régissent la cité, n’a pas à se soumettre à la loi naturelle. Il peut, si c’est sa volonté, la contredire et devenir Créon. Il suffit pour cela de la manipuler, comme l’avait si bien compris le docteur Goebbels, mais lui ne disposait encore que de la radio et du cinéma, tout comme Staline. Depuis les progrès techniques ont mis à la disposition des maîtres de l’opinion des moyens beaucoup plus efficaces : la télévision et maintenant la possibilité de créer à volonté des images virtuelles. Platon avait déjà pressenti cette confiscation de la démocratie. Il dénonçait les sophistes, ces professeurs qui enseignaient, au prix fort d’ailleurs, l’art de persuader l’opinion. Ce n’est pas un hasard si en grec, le mot doxa signifie, entre autres, opinion et, bien avant Platon, un philosophe Parménide avait opposé l’opinion à la vérité, qu’il comparait à deux chemins : l’un droit, que l’on suit sans peine, l’autre abrupt, escarpé, pénible. Dès l’instant que le pouvoir est livré à l’opinion, il devient possible à l’art du sophiste de substituer à la quête de la vérité une opinion, celle de celui qui se montre le plus persuasif. Il suffit de savoir de quelle manière on peut manipuler une assemblée. C’est ainsi que les Athéniens furent amenés à condamner à mort Socrate à partir de fausses accusations mais habilement présentées. Les sophistes antiques ne disposaient que de mots. Leurs modernes successeurs possèdent les images. Ce qui renforce leurs moyens de manipuler l’opinion. Il reste que toute société où l’opinion prévaut sur la vérité se livre à des tyrans d’autant plus puissants qu’ils ont, de nos jours, appris à se rendre invisibles » (1).   

    La démocratie est d’abord une idée qui, comme le disait Charles Maurras, soumet « au nombre la qualité, c’est-à-dire la compétence et l’aptitude ». Il aurait pu ajouter qu’elle soumet toujours à la facilité la complexité. En effet, les hommes de marketing le savent bien, plus on s’adresse à une foule nombreuse plus il faut être simple – voire simpliste –. C’est pourquoi dans tout processus démocratique, le slogan l’emporte toujours sur le raisonnement ; le résultat immédiat sur les conséquences à terme. Ainsi, les promoteurs des avancées sociétales, au nom du progrès, de l’égalité et de la liberté, ont beau jeu de répondre à ceux qui leur opposent les conséquences inéluctables de leurs décisions : vous nous faites un procès d’intention. Ils savent que l’argument suffira à emporter l’adhésion immédiate de la majorité et qu’ils ne doivent surtout pas se risquer à discuter le fond car ils risqueraient de perdre alors une partie des adhésions spontanées.

     

    (1) : Pierre Debray, « Lettre à un jeune Européen sur le suicide de l’Occident », Cahiers de Pierre Debray, n° 1,

  • La gestion autoritaire de la crise sanitaire ou l'effondrement de l'Occident, par Thomas Dilan.

    OPINION. Pour notre abonné, le message d’Emmanuel Macron du 12 juillet fracture le pays et le plonge dans une parenthèse autoritaire qui ébranle les fondements du vivre-ensemble républicain. Au-delà de la question sanitaire, c’est le mode même de développement de l’Occident qui semble être en cause. Comment en est-on arrivé là ? Que faire ?

    5.pngL’allocution d’Emmanuel Macron marque le passage en force et l’incapacité à répondre aux questions complètement légitimes que des millions de Français se posent. Comment faire confiance à un vaccin utilisant une nouvelle technologie en phase de test, dont les effets secondaires ne seront pleinement connus qu’à échéance de deux ans ? Un sérum proposé, de surcroît, par une industrie condamnée par la justice à des centaines de reprises (71 condamnations et 4,684 milliards d’amendes rien que pour Pfizer en 20 ans) et qui, en l’occurrence, s’est déchargée de toute responsabilité sur l’État ? Qui semble, elle-même, n’avoir pas confiance dans son produit ? Emmanuel Macron demande de faire confiance à des multirécidivistes qui, dans le cas présent, ont obtenu l’assurance qu’ils ne pourraient pas être condamnés. Des entreprises qui n’assument pas la responsabilité de leurs produits et de leurs actes.

    Y a-t-il besoin d’aller plus loin ? Allons-y. Comment se fait-il que les gouvernements donnent leur feu vert à un vaccin encore en phase de test alors que l’hydroxychloroquine, médicament aux effets secondaires archi connus et en vente libre depuis 50 ans, a été soudain — et avec quelle férocité — interdite de prescription, faute « d’essais randomisés en double aveugle » ? Comment accepter ce deux poids deux mesures ? Comment faire confiance à des personnes qui ont fait et continuent de faire interdire les traitements bon marché disponibles (hydroxychloroquine, ivermectine…) ? Les mêmes personnes qui, d’ailleurs, ont aussi déclaré à deux mois d’intervalle avec la même docte assurance, d’abord que les masques ne servaient à rien, puis qu’ils étaient indispensables, sans faire le moindre mea-culpa ?

    Comment faire confiance à des dirigeants qui maintiennent au dit Conseil scientifique des personnes à l’incompétence avérée et en liens d’intérêt avec l’industrie pharmaceutique, et donc en conflit d’intérêts avec leur mission de service public ? Comment faire confiance, encore, à une industrie qui est à l’origine des variants britannique et indien (Delta) ? D’après l’Institut hospitalo-universitaire de Marseille (IHUM), c’est en effet bien le Remdesivir qui est en grande partie à l’origine de ces deux variants, dont le premier a causé la troisième vague et le second porte la quatrième. Merci Gilead ! Et pourtant ce dernier est parvenu à vendre ce produit à la Commission européenne juste avant que son inefficacité puis sa nocivité soient démontrées. Et persistant — Errare humanum est, perseverare diabolicum —, il est parvenu à le fourguer à l’Inde, où ledit médicament est à l’origine des ravages que l’on sait.

    La prémisse des huit vaccins supplémentaires pour les nouveau-nés en 2018. Comment faire confiance à cette industrie qui, en France en 2018, a rendu obligatoires huit vaccins supplémentaires pour les nouveau-nés, alors que la mortalité infantile était stabilisée depuis des décennies et que rien ne justifiait pareille mesure ? Pour mémoire, l’interdiction du caractère obligatoire du vaccin fut contournée, dans un cynisme là encore absolu, en conditionnant l’accès aux crèches et aux écoles à la vaccination… Un gros coup de Big Pharma. En particulier asséné aux nouveau-nés, dont elle casse d’emblée les ressorts naturels de l’immunité et injecte dans le corps toutes sortes de métaux nocifs. Clients à vie garantis pour cette industrie. Un scandale passé comme une lettre à la poste grâce au relationnel — en l’occurrence, les liens anciens et notoires entre Emmanuel Macron et Sanofi —, à la stratégie du doute — La fabrique de l’ignorance, F. Cuveillier et P. Vasselin, 2020 —, qui consiste, via des études scientifiques à la commande, à semer le doute : dans telle circonstance, il y a eu un cas de ceci… et le principe de précaution fait le reste. C’est ainsi que Big Pharma est parvenue à imposer ces huit nouveaux vaccins valant Graal économique : une situation de rente massive renouvelée chaque année par les centaines de milliers de nouvelles naissances.

    Un vaccin qui protège à 95 % des formes graves alors que le virus épargne 99,94 % des personnes ? Pourquoi me vacciner alors que la létalité pour les personnes de moins de 65 ans et sans comorbidité avoisine les 0,06 % ? D’après l’IHUM toujours, avec traitement précoce, la létalité du Covid se situe à environ 0,5 %, soit déjà deux fois moins que la moyenne nationale. Surtout, elle touche pour 88 % des personnes ayant moins d’un an d’espérance de vie. Ainsi, pour les personnes ayant plus d’un an d’espérance de vie, et avec prise en charge, la létalité s’établit à environ 12 % de 0,5 %, soit 0,06 %. Qui affirme que c’est supérieur à la grippe ? Et pourquoi donc prendre un vaccin qui protège à 95 % des formes graves alors que j’en suis déjà protégé à 99,94 % ? Le principe du vaccin ne vaut-il pas qu’en l’absence de traitement ? N’est-ce pas une condition de l’Autorisation de mise sur le marché (AMM) ? Les très nombreux positifs asymptomatiques ne sont-ils pas la preuve qu’un bon terrain est décisif et constitue un très bon vaccin ? Autres limites du vaccin : il ne protège que partiellement (60 à 80 % d’après l’IHUM) et le vacciné demeure contagieux ; ce qui contraint ainsi à atteindre un haut nombre de vaccinés (90 %) pour arriver à l’immunité collective. L’embuscade de Big Pharma depuis le début de la « pandémie » est manifeste. Il faut être aveugle pour ne pas le voir.

    Le refus du débat et la négation de l’altérité, prémisse de l’effondrement

    Enfin, pourquoi refuser le débat avec des scientifiques et professionnels de santé de premier plan qui proposent des analyses étayées, mais qui sont exclus des médias pourtant financés par le contribuable et même censurés de YouTube, comme les Pr Christian Perronne, Alexandra Henrion-Caude, le Dr Louis Fouché et autres membres du Conseil scientifique indépendant ? De quoi le gouvernement a-t-il peur ? À part de la vérité ? Comment faire confiance dans un tel contexte de déni de démocratie ? Ce dernier aspect témoigne de la gravité d’une crise qui touche notre démocratie dans son fondement, à savoir : le respect de l’altérité et son corollaire, le respect du débat. Nier l’altérité et le débat, c’est nier la démocratie et le vivre-ensemble républicain. Au nom de quoi… ? De la toute-puissance économique et sanitaire d’un tout petit nombre ? Cela ne tiendra pas. Aucun passage en force ne tient. L’Histoire l’a montré. Et encore plus aujourd’hui où tout se sait. Cette tentative de passage en force, aboutissement de la négation de l’altérité à l’œuvre depuis le début de la crise, signe l’amorce de l’effondrement de ce système.

    Un modèle économique nauséabond

    Une troisième dose de vaccin est d’ores et déjà à l’ordre du jour dès l’automne. On ne change pas un modèle qui rapporte ! Même aux personnes ayant été malades et ayant développé les anticorps, une injection est quasi requise, par « précaution ». Au mépris des lois fondamentales de l’immunité. Toujours cette non-confiance au corps humain, ce désinvestissement du pouvoir intérieur, et la seule validité et toute-puissance de la solution extérieure (sonnante et trébuchante). Big Pharma ne saurait souffrir qu’une possibilité naturelle puisse lui faire quelque ombrage, quelque concurrence. Avec toujours la stratégie du doute, le levier de la peur et le principe de précaution instrumentalisés à outrance. Un horizon économique se dévoile : 90 % de la population mondiale qui passe à la casserole de Big Pharma tous les 6 mois. Hallucinant et inédit dans l’histoire de l’humanité. Jamais aucun business n’est parvenu à une telle prédation.

    On ne peut pas comprendre cette pandémie sans comprendre le modèle économique nauséabond à l’œuvre dans l’industrie pharmaceutique ces dernières décennies (Peter Gotzsche, Remèdes mortels et crime organisé — comment l’industrie pharmaceutique a corrompu les services de santé, Pu Laval, 2015). Les milliards rendent fous. Et nourrissent une hubris et une volonté de toute-puissance planétaire, grisante. Ceux-ci sont patents dans l’allocution d’Emmanuel Macron : « Nous allons vacciner le monde entier ! » Et avec quel ton péremptoire. Nous, les puissants, les tout-puissants, nous avons le pouvoir sur le monde entier. Nous avons les moyens de vous faire vacciner, et de faire vacciner le monde entier. Le tout symboliquement scandé entre les deux jambes de la tour Eiffel : suprématie du phallus, de la force. Suprême arrogance de « l’homme maître et possesseur de la nature », parfaitement incarnée dans ce symptôme de l’inconscient collectif qu’est un chef d’État.

    L’effondrement du modèle occidental : toute-puissance de la solution extérieure contre le pouvoir personnel

    La civilisation occidentale s’est construite dans un rapport de dualité avec la nature, et avec la technocratie comme remède. Le modèle de santé occidental en est la parfaite illustration, avec cette exacerbation des remèdes extérieurs, jusqu’à en devenir des poisons. Mais c’est tout le système économique qui est fondé sur cet abandon de pouvoir personnel et sur la valorisation de solutions extérieures. Dans lesquelles s’est engouffrée la machine commerciale, au profit de quelques personnes exploitant le filon à outrance ? Telle est la racine de la crise que nous traversons. « Vous voulez de l’extérieur ? OK, vous allez boire le calice jusqu’à la lie… jusqu’à que vous compreniez. » Toute entreprise qui veut accroître son profit cherche à accroître la dépendance vis-à-vis de son produit, ce qui se fait toujours au détriment de mon propre pouvoir. C’est tout particulièrement vrai s’agissant de la santé : l’industrie pharmaceutique a un (puissant) intérêt économique à ce que les gens consomment du produit pharmaceutique, et pour cela, se sentent faibles et en danger. C’est un fait. La médecine chinoise traditionnelle avait trouvé la parade à ce hiatus en ne rémunérant le médecin qu’en cas de non-consultation. Donc ce dernier avait intérêt à ce que ses patients soient en bonne santé et indépendants ! Génial. Or, ceci rejoint précisément le fondement de la santé posé par Claude Bernard, qui proclamait que « le microbe n’est rien, le terrain est tout », invitant ainsi à renforcer ledit terrain, aux plans physique (vitalité, exercice physique, alimentation…), émotionnel (gestion du stress et des émotions), et mental, en veillant à ce que j’ingère comme information et aux histoires que mon esprit se raconte.

    Le pouvoir n’est alors plus donné à l’extérieur, à tel ou tel virus ou à tel ou tel remède. Au contraire, je nourris mon propre pouvoir, mon niveau de vitalité en vue de « faire avec », digérer, transmuter. L’immunité exceptionnelle acquise, par exemple, par Wim Hof via des procédés naturels est notoire. S’agissant du Covid-19, tout est donc parti de l’inversion de cette équation de base de la santé, devenue « Le microbe est tout, le terrain n’est rien », et pour ce faire, de la terrification des gouvernements avec les modélisations délirantes de Neil Ferguson (500 000 morts prévus en 2 mois, pour la seule première vague, pour le Royaume-Uni ou la France). À partir du moment où Big Pharma est parvenue à implanter cette peur collective — débilitante et immunodéficiente — et cette équation erronée dans le mental des dirigeants et dans l’inconscient collectif, via les médias, tout en privant des moyens de se ressourcer, un grand pas vers la vaccination de masse était fait. À cela s’est ajoutée l’interdiction du seul traitement disponible, un médicament pourtant archi connu en vente libre depuis 50 ans — mais dans le domaine public et bon marché… oups ; puis les attaques et dénigrements des autres traitements identifiés sur le terrain, notamment l’ivermectine. Eh oui, car il en allait là d’un prérequis pour le vaccin : l’absence de traitement. Un deuxième pas était fait. Dernier acte : le confinement et le pass sanitaire qui conditionnent le recouvrement de la liberté et du lien social à la vaccination.

    Quelles alternatives ?

    Cesser cette psychose collective et ce culte de la peur, extrêmement immunodéficients, très probablement à l’origine des « orages de cytokines » responsables des formes graves du Covid — cf la lumineuse conférence intitulée La médecine et la santé publique à l’épreuve du Covid donnée par l’anthropologue de la santé Jean-Dominique Michel, le 21 mai 2021 à l’IHUM. Indispensable et méritant la plus large des diffusions ; renouveler complètement ledit Conseil scientifique et accepter le débat ; laisser les médecins prescrire les traitements qu’ils veulent et promouvoir les différentes mesures porteuses d’un bon terrain, sur les plans physique, émotionnel et mental. Mais un tel aveu d’erreurs commises et d’incompétence condamnerait l’ensemble de l’exécutif à la démission et à des poursuites pénales. Ils le savent, et n’ont donc d’autre issue que de poursuivre dans la même logique : continuer à nourrir la peur immunodéficiente et imposer la vaccination.

    Ceux qui adhèrent à la doxa bénéficient indéniablement d’une belle tranquillité d’esprit : ils sont en harmonie avec les autorités, des bons citoyens, disciplinés et solidaires. En face, se dresser face à ce rouleau compresseur, poser ces questions légitimes relève désormais de l’acte de résistance. Rude. Pas facile de choisir Londres en 1940. Pas facile, la non-servitude de La Boétie, la désobéissance civile de Thoreau et Gandhi. On en prend la mesure. La tranquillité des vaccinés fait envie. Mais le modèle est absolument trop vicié pour pouvoir céder à la tentation. Un biais cognitif profond se dégage de cette crise comme une sidération planétaire. Une hystérisation du modèle occidental d’abandon du pouvoir personnel à la toute-puissante machine techno mercantile et ses solutions extérieures.

    Nombre de dirigeants et promoteurs de la doxa sont probablement de bonne foi et se font vacciner. Très bien, mais cela ne leur donne en rien le droit de l’imposer aux autres. Leur aveuglement paraît relever d’un biais cognitif profond, structurel. Un biais qui est dans la structure même de la société actuelle (la dualité avec le monde extérieur), et dont ces personnes sont la quintessence, le symptôme, la partie visible. Comme enferrés dans une matrice qui les englobe, ils sont incapables d’en sortir. D’où cette fuite en avant.

    Ainsi, alors que les collapsologues étaient polarisés sur les aspects climatiques et évoquaient 2030 comme échéance, c’est en fait par la santé que l’effondrement de l’Occident est en train de se produire, et c’est maintenant, en 2021. Interdit de guerre pour cause de menace atomique, l’hubris de l’homme s’est reporté sur la finance, la technique, le pouvoir et… la santé. Sensation, aussi, d’une humanité qui, sentant la « vraie vie » lui échapper, piégée devant son smartphone et ses séries, dans une zone de confort techno mercantile et déshumanisante et sans avenir, joue à se faire peur, et provoque d’elle-même l’effondrement de ce système.

    Quelles ressources ?

    Au plan individuel, la non-identification, déjà. Ne pas être identifié comme l’acteur qui joue sa scène, la vit, mais conserve son identité séparée de ce qu’il se joue. Alors il est possible de voir cet évènement collectif en posture de témoin. Et de lâcher l’âpreté de la posture de dualité. Un conflit demeure, certes. Mais la non-identification permet d’accéder à un espace plus profond, où je peux rester profondément relié au monde, au vivant, à la Totalité. Et la non-identification n’empêche en rien le combat. Au contraire. Car si, comme intimé au guerrier Arjuna dans la Bhagavad Gîtâ, je ne suis pas identifié, alors je peux accéder à l’Aïkido de Morihei Ueshiba : ne pas être dans une opposition frontale avec la force extérieure, mais « faire avec », « utiliser les creux », et « la laisser tomber là où elle voudra tomber » le moment venu. La haine est inutile et contre-productive. Convoquons aussi le « satyagraha » de Gandhi : littéralement « s’accrocher à la vérité » et laisser celle-ci faire son œuvre. Joint à l’inébranlable « résolution » de Lao Tseu, « résolu pa

  • Une fois encore, la Suisse montre l'exemple.....

                Bien loin de la pétaudière-foutoir qu'est devenue une bonne part du territoire national, ici en France, les autorités Suisses, elles, font respecter leurs loix.

             Qui les en blâmerait ?

             SUISSE IMMIGRATION.jpg

  • Jean-François Mattéi au Café politique de Marseille, samedi prochain....

    http://portail.unice.fr/jahia/page3475.html 

    http://www.puf.com/wiki/Auteur:Jean-Fran%C3%A7ois_Matt%C3%A9i

    mattéi, 

    et, comme première prise de contact, 2'30" avec lui pour répondre à la question Qu'est-ce que l'esprit français ?


    3 QUESTIONS A Jean François MATTEI par LESRENCONTRESDECANNES

  • Sur le cercle Henri Lagrange, l’urbanisme : de Romulus à Le Corbusier (entretien avec Pierre Le Vigan).


    Entretien du Cercle Henri Lagrange avec Pierre Le Vigan (urbaniste et essayiste)
     
    00:00:23 - Différences entre "maçonnerie", "architecture" et "urbanisme"
    00:06:11 - Qu'est qu'une "cité"?
    00:09:01 - Qu’est-ce que le "synœcisme" ?
    00:10:11- La "Cité idéale" de Platon
    00:11:52 - Aristote
    00:13:12 - Qu'est-ce que le "pomerium"
    00:14:39 - Les murailles
    00:17:38 - Les utopies urbanistiques de la Renaissances
    00:20:35 - Impact de la révolution industrielle sur la ville
    00:24:26 - Le Paris d'Hausmann
    00:30:12 - Les utopies urbanistiques du XIXeme siècle
    00:32:43 - Les mouvements "culturaliste", "progressiste" et "naturaliste"
    00:39:08 - Le Corbusier
    00:45:08 - Le "Plan Voisin"
    00:49:30 - Bauhaus et l’avant-garde soviétique
    00:56:51 - Les "grands ensembles" en France
    01:04:59 - Le regard d'un urbaniste sur la banlieue
    01:11:18 - la conception contemporaine de la rue
    01:15:15 - Les mouvements "modernes" et "post-modernes"
    01:20:33 - Le mode de contrôle contemporain de la ville
    01:22:32 - Qu'est ce que la "smart city"?
    01:23:32 - La ville de demain
  • Il n’y a plus de Justice !, par Nicolas Dupont-Aignan.

    "Un étranger faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français a agressé un policier au couteau à Bordeaux... il a écopé d'un simple "rappel à la loi" ! Mais qu'est-ce qu'on attend pour l'expulser : qu'il récidive !?
    Expulsons les délinquants étrangers !"

  • Sur Valeurs Actuelles, Whatsapp vole ses données ? (DBKG #3).

    La messagerie #WhatsApp est-elle aussi fiable qu'elle le prétend ?

    Le changement des conditions générales de l'application a amené de nombreuses personnes à installer les messageries chiffrées #Telegram ou #Signal.

    Qu'est-ce qu'une messagerie chiffrée ? Comment savoir si mes données sont en sécurité ? Quelle application choisir ? On démêle pour vous le vrai du faux.

  • Sur la page facebook de Guy Adain...

    Ils veulent tous redresser la France, sauver la France !
    La France disent-ils est moribonde, en grand danger de disparition, elle pourrait être remplacée bien qu’insoumise !
    La France se meurt, d’aucuns disent qu’elle est morte et pas loin d’être enterrée...
    Ne les croyez pas ! La France va bien, elle est là !
    Et qu’est-ce qu’elle est belle !

    1A.jpg

  • Sur Marianne, Michel Fau : « Je n’ai jamais compris la différence entre le bon et le mauvais goût ».

    Quelques heures avant la première de "Qu’est-il arrivé à Bette Davis et Joan Crawford ?" , Natacha Polony a retrouvé Michel Fau au théâtre parisien de la Porte-Saint-Martin . L’excentrique comédien et metteur en scène y fait sa rentrée en compagnie d’Amanda Lear. Lui en Bette Davis, elle en Joan Crawford...

  • Sur Le Média Pour Tous, Nietzsche contre le progressisme ?, avec Julien Rochedy.


    Et si la philosophie nietzschéenne était un outil majeur pour affronter les aberrations de notre modernité ? C'est en tout cas l'analyse que fait Julien Rochedy de ce philosophe populaire mais souvent mal compris qu'est Friedrich Nietzsche. Accusé d'être le philosophe des régimes totalitaires par certains, encensé comme le philosophe des « surhommes » par d'autres, plongeons-nous aujourd'hui dans cette pensée originale et peut-être très...actuelle.

  • Sur la page FB de nos amis du GAR : quelques affiches royalistes pour ouvrir le débat.

    Pourquoi être royaliste aujourd’hui ? Quelles propositions institutionnelles ? Qu’est-ce que la Monarchie sociale et corporative ? Et vous, amis lecteurs, quelles questions sur le royalisme ou la Monarchie vous posez-vous ? Faîtes-nous en part, en prévision de nos prochaines publications qui tenteront d’y répondre !

    Sources : https://www.actionroyaliste.fr/

    https://www.facebook.com/GroupeDActionRoyaliste