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  • Puisque l'inculture règne aux plus hauts niveaux de l'Etat, apprenons à notre président de l'Assemblée nationale - qui l

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    Il est bien triste pour la France de Montaigne et de Guillaume Budé, de Voltaire et de Verlaine, de Molière, Racine, Pascal et tant et tant d'autres... de constater l'inculture proprement effrayante de celles et ceux qui nous gouvernent.

    Lors de la remise des derniers Prix Nobel, on apprenait que la Ministre de la Culture (!) Fleur Pellerin... n'avait pas le temps de lire !
    Puis, plus grave, on eut droit à l'énormité de Manuel Valls, promu premier ministre, et remerciant la République d'avoir nommé un "venu d'ailleurs" à un si haut poste : on ne l'avait pas loupé, et on lui avait rappelé - ou, plutôt, appris... - que plusieurs siècles avant lui un certain Giulio Mazarini avait été durant de très longues années le premier ministre de la France (c'est lui qui signa les Traités de Westphalie, "chef d'oeuvre absolu" pour Jacques Bainviile, mais Valls connaît-il Bainville ? C'est, au moins, douteux...); ou qu'un certain Maurice de Saxe avait été le maître des armées françaises, par la volonté de Louis XV; ou, encore plus fort, que la royauté avait donné la totalité du pouvoir, sur la totalité du territoire national, à six femmes, dont quatre d'origine étrangères : chose que, bien évidemment, la république idéologique, le Système, n'a jamais fait... : qui est champion du "féminisme" et de la promotion de la femme, de la parité, du "non sexisme", de la "non discrimination" et tant d'autres choses dont se gargarisent les ignares qui nous gouvernent ? Ceux qui veulent retrouver tout ceci, et tout ce que nous disions encore à ce Manuel Valls si ignorant et si prétentieux peuvent se reporter, dans notre Catégorie Actualité Europe, à notre du 27 mai 2014 : Retour sur son passage à Barcelone : erreurs en série et ignorance crasse pour super Manu.
    Mais, aujourd'hui, ce n'est ni la ministre de l'inculture, ni le premier ministre ignorant qui se font remarquer : c'est - tout de même !... - le président de l'Assemblée nationale. Eh, oui, à lui aussi il faudra offrir pour la saint Claude (horresco referens, ô sainte laïcité !...) un exemplaire de l'Histoire pour les nuls.
    Si, au moins, il s'était contenté d'être nul, comme ça, presque en cachette, pourrait-on dire : ce ne serait pas brillant, pour un personnage occupant un si haut poste, mais bon...
    Mais non ! Claude Bartolone ressemble au personnage du sketche de Raymond Devos : "quand je n'ai rien à dire, je veux que cela se sache... je n'ai rien à dire, donc parlons-en..." Bartolone ignore, mais il veut que tout le monde le sache, qu'il ignore; il veut que tout le monde soit au courant : eh bien, c'est fait. Il vient de se couvrir de ridicule en cherchant à placer le buste d'Olympe de Gouges dans la salle des Quatre colonnes de l'Assemblée, au motif qu'elle était "militante féministe de la Révolution française" !
    Alors, là, plus nul que ça, tu meurs !
    Allez, un peu de retour au réel, et à l'Histoire vraie : nos ministres et gouvernants en ont un urgentissime besoin...

     

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              "Olympe de Gouges", qui illustre le naufrage des Lumières dans la Terreur, n'a jamais existé, du moins pour l'état civil...

     

    ...Son vrai nom est Marie Gouzes. Royaliste, comme tout le monde (il n'y avait pas dix républicains en France, selon le mot de Saint Just, mais bien plutôt "vingt-six millions de royalistes", selon l'heureuse expression d'Alain Decaux), elle adopta l'enthousiasme des idées nouvelles au moment où, pour tout le monde, cette révolution semblait n'être que l'évolution nécessaire dont avait rêvé, par exemple, un Mirabeau.

    Mais assez vite, par la suite, révoltée et effrayée par les horreurs dont Marat, Danton, Robespierre et consorts se rendirent coupables, et lucide sur les conséquences de ce qui ne pouvait plus que déboucher sur le Totalitarisme, Marie/Olympe redevint la royaliste qu'elle avait été.

    Elle eut le courage, la noblesse de coeur et la grandeur d'âme de défendre Louis XVI et de rédiger des pamphlets contre Marat et Robespierre. Elle demanda à défendre Louis XVI et à être son avocate lors de son pseudo-procès stalinien, joué d'avance. Mais les conventionnels lui interdirent d'aider concrètement Malesherbes à défendre le Roi, au cours de ce "procès" bidon.

    Un tel courage ne pouvait bien sûr pas rester impuni : Robespierre la fit guillotiner le 3 novembre 1793, trois semaines après Marie Antoinette, à qui elle avait crânement adressé le préambule de sa "Déclaration des Droits de la Femme et de la Citoyenne".

     

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    Gravure d'époque

                  

    Il est attesté qu'elle monta à l'échafaud en faisant preuve d'un grand courage et d'une grande sérénité, illustrant le naufrage des Lumières dans la Terreur...

    Joli, non, de considérer "notre" Marie Gouzes/Olympe de Gouges comme une "militante de la révolution française" ?

    Même avec un taux de près de 90% de réussite au bac, il n'est pas sûr que, s'il le passait, Bartolone l'aurait, aujourd'hui !...

     

    TERREUR 6.jpgGravure royaliste de l'époque contre Robespierre : "Ci-gît toute la France". Comme il n'est pas sûr que nos gouvernants ignares la connaissent, dédions-leur la fameuse épitaphe apocryphe sur Robespierre  : "Passant, ne pleure pas sur mon sort / Si je vivais tu serais mort !"
     
  • Société • Julien Sanchez, un maire FN face à la « résistance »

     

    par Yves Morel

    Des commerçants musulmans assignent leur maire en justice : les enseignements politiques d’une procédure.

    Julien Sanchez, jeune maire FN de Beaucaire (Gard) connaît, avec la communauté musulmane, des problèmes judiciaires révélateurs de l’incapacité de nos pouvoirs publics à défendre efficacement leurs administrés dans leurs droits et leurs intérêts les plus fondamentaux.

    M. Sanchez avait pris deux arrêtés municipaux datés des 16 et 17 juin derniers interdisant l’ouverture des commerces durant la nuit. Le premier fixait cette interdiction de 23h à 8h du matin à l’intérieur d’un secteur délimité du centre-ville de Beaucaire. Le second réduisait la portée de cette interdiction, la limitant à deux rues du centre-ville (les rues Nationale et Ledru-Rollin) et en faisait cesser l’application à 5h du matin. Ces arrêtés n’étaient d’ailleurs applicables que jusqu’au 31 octobre.

    Le jeune maire motivait sa décision par les plaintes de nombreux riverains (dont certains musulmans, ce que l’on se garde bien de préciser) victimes des nuisances sonores engendrées par cette activité commerciale nocturne. Ces riverains ne pouvaient pas dormir, agressés qu’ils étaient par le tumulte résultant du bavardage et des cris et autres braillements de clients agités et en grande conversation, attroupés à proximité des magasins, les vrombissements et pétarades de véhicules motorisés, le bruit des coups de klaxons et autres agréments de cette joyeuse convivialité. Certains renonçaient à dormir dans leur chambre et s’installaient sur leur canapé situé dans une pièce moins exposée (sans pour autant trouver le calme indispensable à l’ensommeillement), d’autres, exaspérés se disaient sur le point de s’abandonner à des réactions violentes. La décision du premier magistrat de la petite cité du Gard semblait donc bien compréhensible.

    Pas du tout !, ont estimé les commerçants des rues visées par ces interdictions.

    Sous la conduite d’Abdallah Zekri, président de l’Observatoire « national » (défense de rire) contre l’islamophobie au sein du Conseil Français du Culte Musulman (Diantre ! Voilà un homme de poids), six d’entre eux déposèrent une plainte devant le Tribunal administratif de Nîmes pour obtenir l’annulation des arrêtés incriminés, et 3 000 euros d’indemnité (chacun) au titre des préjudices engendrés par leur application. Le Conseil Français du Culte Musulman, lui, se portait partie civile, dans cette procédure. En effet, ces commerçants s’estimaient particulièrement lésés dans la mesure où la période d’application des deux arrêtés couvrait celle du ramadan, qui expliquait la recrudescence des nuisances sonores dont se plaignaient les riverains. A leurs yeux, « les mesures prises par ce maire visent à asphyxier l’activité économique de ces commerçants en raison de leur appartenance à la religion musulmane », pas moins.

    Se prévalant de l’alibi de la tranquillité de ses administrés, le maire poursuivrait donc une politique de « discrimination » à l’égard des musulmans de sa cité. « Force est de reconnaître que ces arrêtés visent substantiellement les commerçants musulmans », est-il spécifié dans la citation à comparaître. Ces commerçants, le maire viserait à les acculer à la faillite ; comme si leur bonne santé économique et financière dépendait uniquement de leur surcroît d’activité au moment du ramadan ; et comme si les Beaucairois justement mécontents (dont certains musulmans, répétons-le) n’avaient qu’à souffrir en silence au nom de la « tolérance », de l’égalité, du refus de toute discrimination ethnique ou religieuse, valeurs essentielles de notre république.

    A la suite du dépôt de plainte des commerçants, Julien Sanchez rapporta ses deux arrêtés. Si bien que, lors de l’audience du 26 août dernier, le Tribunal administratif de Nîmes rendait un verdict de non-lieu sur ce sujet, et, de surcroît, déboutait les plaignants de leur demande d’indemnisation.

    Mais le maire ne renonça pas à faire prévaloir ses décisions. A peine eut-il abrogé les arrêtés en cause que, le 19 août, il en prit deux autres, qui reconduisaient les mesures qu’ils contenaient. Les commerçants et le CFCM déposèrent alors une nouvelle plainte devant le Tribunal correctionnel de Nîmes, cette fois.

    Ces tous derniers jours, jeudi 7 janvier, à l’issue de l’audience, le président du Tribunal correctionnel a mis la décision en délibéré au 10 mars prochain. Nul ne peut préjuger du verdict qui sera rendu.

    Quel que soit le verdict qui sera vendu, cette affaire montre à quel degré d’impuissance est vouée la défense des droits les plus élémentaires de nos compatriotes en nos temps d’aliénation morale et culturelle et de déliquescence politique. Un édile ne peut même plus assurer la simple tranquillité de ses concitoyens sans se voir aussitôt vilipendé, médiatiquement lynché et traduit devant un tribunal par les représentants de telle communauté ethnoreligieuse. Si le tribunal nîmois donne tort à M. Sanchez, les beaucairois des quartiers en lesquels sont implantés des commerces arabes n’auront qu’à se résigner à supporter le supplice du tintamarre provoqué par les attroupements bruyants des clients musulmans de ces échoppes pendant au moins un mois, quitte à être privé de sommeil ; et, bien entendu, ils n’auront pas le droit de se plaindre sous peine de se voir taxer de racisme. De la même façon, les habitants de banlieues populaires des grandes villes doivent se résoudre, la mort dans l’âme, à voir leurs communes ou leurs quartiers hérissés de minarets et émaillés de boucheries halal, de restaurants arabes, de pizzerias turques et autres kebab, de magasins spécialisés dans l’organisation de mariages musulmans et la vente de matériel religieux, et de sièges locaux d’associations d’aides aux immigrés ou de jeunes maghrébins.

    Il est vrai que Yann Moix nous rappelle, sur le ton de l’objurgation, que « c’est le mouvement de l’histoire », que « demain, la France sera peut-être musulmane », et qu’il est aussi vain qu’ »indécent » de s’opposer à une telle évolution. Manifesterait-il la même inclination s’il diagnostiquait un retour de la tradition et de la morale catholique en France ? Non, à n’en pas douter.

    La mésaventure du jeune maire de Beaucaire dément les sombres prévisions de ceux que l’accès au pouvoir du Front national amènerait l’instauration d’une dictature de type pétainiste ou fasciste. En fait, ses opposants entreraient immédiatement « en résistance », suivant leur propre expression et mettraient tout en œuvre pour empêcher le pouvoir d’agir ou faire invalider ses décisions par le Conseil constitutionnel et les tribunaux de tous degrés et de toutes natures. Et on sait que notre constitution et nos divers codes juridiques contiennent quantité d’articles, de lois et de décrets qui concourent tous – tant par leur inspiration ou leur contenu effectif que par les interprétations qu’ils autorisent –à empêcher toute politique de défense de notre nation, de notre identité culturelle et des droits les plus élémentaires de nos compatriotes au nom des « droits de l’homme » et des « valeurs de la République », qui font » l’honneur de la France ». Notre classe politique et notre intelligentsia nous ont collé, durement inscrit dans les textes de loi, un véritable sida politique et moral qui nous prive de toute défense, de toute possibilité de saine réaction contre la décrépitude. Cette petite affaire beaucairoise en est une illustration entre mille. 

    Docteur ès-lettres, écrivain, spécialiste de l'histoire de l'enseignement en France, collaborateur de la Nouvelle Revue universelle

  • Exposition • Monarchie et beaux-arts

    Vaduz

    Par Péroncel-Hugoz

    Emballé par une exposition de haut vol à Aix-en-Provence, Péroncel-Hugoz en profite pour mettre en lumière les liens naturels existant entre la royauté et les arts.

     

    peroncel-hugoz 2.jpgEn ce moment, et jusqu’au 20 mars 2016, se tient à Aix, ancienne capitale de la Provence comtale puis royale, une exposition de peinture comme on en voit rarement par sa haute qualité, et qui permet aussi de se pencher sur les rapports étroits existant souvent, tant en Occident qu’en Orient, entre monarchie et beaux-arts. 

    La collection en question ici appartient aux princes souverains du Liechtenstein qui règnent depuis le XVIIe siècle sur ce petit (160 km², 36 000 âmes, capitale Vaduz) mais superbe pays, inséré entre Rhin et Alpes, entre Suisse et Autriche et où règne actuellement, depuis 1989, Son Altesse Hans-Adam II, quinzième monarque de cette dynastie germanique qui a résisté à tous les bouleversements et a affirmé son indépendance en écartant l’idée d’adhésion à l’Union européenne. 

    Les tableaux présentés à Aix-en-Provence sont tous hors concours et résument bien la grande peinture européenne d’hier, loin, très loin des «installations» de ferrailles et chiffons d’aujourd’hui qui font rugir d’admiration les chroniqueurs «dans le vent» de la presse euro-américaine … Une foule franco-étrangère se presse chaque jour depuis le 7 novembre, vers le grandiose hôtel (et nouveau musée) de Caumont, rendu récemment à ses décors XVIIIe siècle, pour y admirer des œuvres de Cranach, Raphaël, Rubens, Rembrandt, Franz Hals, Van Dyck, Claude-Joseph Vernet, Hubert Robert, Madame Vigée-Lebrun, etc. 

    Des sculptures de Breker au Maroc 

    En parcourant les hautes salles du musée, je pensais au patient travail de collectionneur des souverains français, de François 1er à Napoléon III, via Louis XIV et Louis-Philippe 1er, grâce à la perspicacité de qui Paris possède aujourd’hui, avec le Louvre, le plus vaste pôle artistique des cinq continents. Je pensais aussi à la collection de peintures marocaines et étrangères que l’actuel monarque chérifien a commencée et également aux œuvres d’art réunies par certains de ses prédécesseurs, tel son grand-père Mohamed V qui, comme le très connaisseur président Senghor du Sénégal, sut faire appel par trois fois à celui qui fut sans doute le plus novateur, le plus spectaculaire sculpteur européen du XXe siècle, Arno Breker (1) ; le sultan-roi dépassait ainsi avec panache les préventions politiques contre cet artiste qui avait travaillé … pour le Troisième Reich d’Hitler… L’Art, le vrai, se reconnaît au fait qu’il est toujours au-dessus des vicissitudes de l’Histoire. La dynastie de Vaduz offre aussi un modèle exemplaire, quoique peu connu, de lignée adonnée à la constitution raisonnée d’un patrimoine artistique cohérent et varié. Loin des artistes de pacotille… 

    On se moque facilement, dans les salons casablancais ou parisiens, des extravagances de nouveaux-riches des islamo-pétro-monarchies mais c’est oublier que plusieurs d’entre elles (Koweït, Abou-Dhabi, Doubaï, Oman, Bruneï) sont collectionneuses et on ouvert des musées. Si l’Arabie fait exception, avec son intransigeant wahabisme qui a même laissé détruire d’insignes monuments historiques dans les Villes saintes de l’Islam, l’autre Etat wahabite, Qatar, a su, lui, honorer les beaux-arts avec magnificence sans pour autant renier sa doctrine religieuse. En Iran, la dynastie hélas renversée des Pahlavi a laissé derrière elle de fabuleuses collections persanes et européennes qui, tôt ou tard, feront derechef les délices des Iraniens. 

    Par hasard, c’est à Aix que je tombais sur le livre, pas encore traduit en français, du philosophe allemand naturalisé états-unien, Hans-Herman Hoppe (né en 1949), ayant enseigné en Europe et en Amérique, et qui, dans un essai brillamment argumenté, «Democracy: the God that failed» (Démocratie : le dieu qui a échoué) démontre que les monarchies, ayant pour elles « la durée et le temps», peuvent réaliser ce dont sont incapables beaucoup de républiques, par exemple réunir dans la sérénité, augmenter et conserver des collections d’œuvres d’art. Hoppe, comme avant lui le penseur canadien Marshall McLuhan (1911-1980), est devenu un fervent royaliste par la simple observation de faits contemporains ou historiques. Tous deux ont pointé la bousculade permanente des présidences de quatre ou cinq ans, qui plus est mangées en partie par des campagnes tapageuses et coûteuses en vue d’éventuelles réélections… Hoppe associe à son éloge de la royauté celui du capitalisme familial, tellement plus humain que le « bizness » international, aveugle et anonyme. 

    Les princes du Liechtenstein se sont de tout temps tenus à distance des jeux politiciens et l’un des plus beaux résultats de leur comportement détaché se trouve dans ces collections, actuellement en partie exposées à Aix; collections figurant au premier rang des patrimoines artistiques royaux, avant même peut-être celui des Windsor, en Grande-Bretagne, si on en croit les experts en art occidental. 

    Si vous passez cet hiver par la Provence, ménagez-vous une halte à l’hôtel de Caumont et vous jugerez !              

     

    Le Musée Caumont est ouvert tous les jours de l’année de 10h à 18h. Librairie. Petite restauration. Parc-autos à proximité. 3, rue Joseph-Cabassol, à deux pas du cours Mirabeau, 13100-Aix-en-Provence. 

    1. Voir « Arno Breker à la cour chérifienne », par Péroncel-Hugoz, « La Nouvelle Revue d’Histoire », Paris, juillet-août 2009

    Peroncel-Hugoz

    Repris du journal en ligne marocain le 360 du 25.12.2015

  • Jérôme Leroy : Macron m’inquiète ... Le prendre au sérieux avant qu’il ne soit trop tard…

     

    Qui est vraiment Emmanuel Macron, que pense-t-il, au fond; que veut-il, quelle serait sa politique ? Telle est la question que Jérôme Leroy s'est posée dans Causeur et à laquelle il tente de répondre. Avec son talent habituel... Macron avait surpris et intrigué - notamment les royalistes - par ses déclarations de l'an dernier où il exposait, entre autres choses, qu'il manque un roi à la France, du fait de l'incomplétude de la démocratie ... Déclarations plus réfléchies qu'il n'y paraît si l'on veut bien les relire attentivement. Mais ses quelques prises de position politiques - peu nombreuses, il est vrai - semblent confirmer les hypothèses que Jérôme Leroy hasarde ici à propos d'Emmanuel Macron. Sans-doute est-il un acteur politique encore non-identifié. Restant à définir. On verra ce qu'en pense Jérôme Leroy, avec, malheureusement, d'assez bonnes chances de ne pas se tromper ... LFAR

     

    Pour tout dire, Emmanuel Macron m’inquiète. Je sais bien que l’ami Desgouilles a finement analysé le but de la manip quand le ministre de l’Economie a créé En marche !, à savoir qu’il s’agissait d’un moyen pour Hollande de griller Valls qui se retrouve triangulé sur son créneau social-libéral ou qu’Adrian Dambrine le réduit à une arnaque intelligente d’un ambitieux conscient du vide intersidéral de la politique française. Et pourtant il m’inquiète parce qu’il dispose de deux atouts dont sont dépourvus ses adversaires : il est sincère et il est désinhibé.

    Sa sincérité transparaît dans le moindre de ses discours, sans doute parce qu’il a un fonds idéologique très cohérent. Macron est le fils naturel de Jacques Attali et d’Alain Minc. Macron est sincèrement convaincu que non seulement la mondialisation est inévitable mais que de toute façon, elle est un bienfait, l’aboutissement d’un processus historique qui nous fera enfin sortir… de l’Histoire ! Cette sortie de l’Histoire, ce désir de sortie est d’abord manifeste chez lui dans ce ni droite ni gauche qu’il professe, ou plutôt dans ce et de droite et de gauche. Il n’est pas le premier à dire que ces catégories sont obsolètes, archaïques, que les Français n’y croient plus. Seulement, lui, il le pense vraiment.

    L’économie au-dessus de tout

    On lui a fait le mauvais procès de reprendre un vieux slogan du FN lui même repris de l’extrême droite doriotiste des années 30. Sauf que dans le cas du FN, il ne s’agit pas de nier l’existence de la droite et de la gauche, bien au contraire, mais de les dépasser de trouver une synthèse qui s’appellerait la patrie. On se souvient de Le Pen père en 2002 : « Je suis économiquement de droite, socialement de gauche, nationalement de France ». Macron, évidemment, lui ne songe même plus à dépasser la droite et la gauche, à unir les républicains des deux rives, voire à la façon de Giddens, le théoricien de Blair, à trouver une voie médiane entre le marché et le plan, et à réguler a minima le libéralisme.

    Pour lui, la droite et la gauche n’existent simplement plus parce que la politique n’existe plus. Le primat de l’économique est total, l’Etat est une survivance archaïque, la nation est la responsable des guerres et des crispations nationalistes. La communauté trouve grâce à ses yeux dans la mesure où elle est gérable et digérable par le marché, voire lui sert de débouchés et de moteur.

    A-t-on entendu Macron s’indigner sur les marques de prêt-à-porter converties, si je puis dire, à la mode islamique ? Et pourquoi donc le ferait-il ? Dans la logique d’un Macron et des libéraux pur jus dont il fait partie, la seule loi qui existe, c’est celle de l’offre et de la demande. Si H&M, Uniqlo ou encore Marks & Spencer griffent des hijabs, ce n’est pas parce qu’ils collaborent avec l’envahisseur, c’est juste parce qu’il y a de l’argent à se faire et ceux qui attendent de marques, quelles qu’elles soient, d’être le rempart de la civilisation chrétienne ou de la laïcité se font des illusions. Ce qui compte, c’est de vendre, y compris des armes à l’Arabie saoudite, notre allié et néanmoins berceau de l’Etat islamique.

     

    Le marché, son horizon indépassable

    Macron, lui, est « en marche ». En ne se prononçant pas sur ces vieilles questions (à peine une opposition discrète à la déchéance de la nationalité qui ne lui coûte rien puisque la nationalité est devenu quelque chose de très secondaire pour lui), il évite les hypocrisies et les incohérences de Valls qui s’oppose à la salafisation des esprits en France mais continue de dealer sur le plan international avec Riyad ou le Qatar.

    Elle est là, la cohérence dangereuse de Macron : le marché est un horizon indépassable qui n’a même pas vraiment besoin de la démocratie telle qu’on la connaissait. N’a-t-il pas déclaré à plusieurs reprises qu’être élu est « un cursus honorum d’un temps ancien » ? Ce qui signifie que le pouvoir est ailleurs désormais et que le seul poste qui vaudrait encore le coup, tant que la Vème République existe, c’est la présidence, un poste clé pour faire sauter les derniers tabous, forcer les derniers verrous.

    Et qu’a-t-il en face de lui ? Précisément une droite libérale qui ne veut pas aller jusqu’au bout de sa logique parce que son électorat reste conservateur sur les questions de société et qu’il devient très compliqué d’expliquer qu’il ne faut rien interdire en économie mais ne pas vouloir que les gays se marient, que les ventres des femmes se louent à l’année pour porter des bébés ou que le shit soit en vente libre. Et de l’autre côté, si l’on peut dire, une gauche radicale qui se radicalise sans jamais poser la question de l’immigration comme armée de réserve du capitalisme,  la question de l’Union européenne comme cadre indépassable des politiques austéritaires qui ne sera jamais cette union fraternelle et égalitaire dont continuent de rêver les internationalistes, contre toute évidence. On pourra lire à ce titre les analyses d’Aurélien Bernier dans le dernier numéro de Causeur.

    Macron lui n’a plus ces vieilles pudeurs, ces vieilles contradictions : il a déjà vu à quoi ressemblait le futur parce que, et je dis ça sans ironie, il est visionnaire : un monde pacifié, dématérialisé, où des nomades hyperconnectés échangeront à l’infini des données dans la grande paix bleue d’une utopie sans fin. Ca ne vous fait pas envie ? Vous avez tort, encore un effort et vous serez en marche…  

    Jérôme Leroy
    Ecrivain et rédacteur en chef culture de Causeur.

  • La Monarchie est-elle une grande chose morte ? Quand la République s'inspire de la Monarchie... [2]

     

    Par Jean-Philippe Chauvin

     

    4184008190.jpgLa France vit actuellement en République : cela paraît indéniable si l'on se réfère, non seulement au titre de l’État, à son affirmation d'être une République et de sa répétition rituelle, faite d'habitudes et de commémorations qui rappellent l'histoire du régime républicain ou qui lui sont rattachées, de façon parfois abusive d'ailleurs : le cas de 1789, par exemple, pourrait bien lui être disputé, comme le feront d'ailleurs les « monarchiens » (monarchistes constitutionnels et centristes) de ce temps et les partisans du roi Louis-Philippe ensuite, les uns et les autres se référant à la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen rédigée par les monarchistes Mounier et La Fayette (et dénoncée, en 1793, par les républicains Saint-Just et Robespierre...). En revanche, sa gêne (dans le meilleur des cas) à l'égard de certains événements historiques nationaux, comme la commémoration de Bouvines en 2014, est révélatrice d'une volonté de ne pas remettre en cause le mythe de Valmy, plus « républicainement correct »... 

    Tous les candidats à la prochaine présidentielle font aussi profession de foi républicaine, avec quelque ambiguïté parfois, et « les valeurs de la République » sont régulièrement et automatiquement évoquées dès qu'un problème surgit, véritable « mantra » gouvernemental et politicien : il n'est pas sûr que cela soit vraiment rassurant ou suffisant au regard des défis contemporains. 

    En somme, qui n'est pas républicain aujourd'hui ? Mais, en fait, il y a une confusion, voulue et entretenue depuis Jules Ferry, entre République et France, et certains qui parlent République pensent, d'abord, France, mais sans l'avouer explicitement, par peur d'être mis au ban des institutions et de toute espérance ministérielle ou présidentielle. 

    Et pourtant ! La Cinquième République garde (ou renouvelle ?) la marque de la Monarchie, dans ses institutions comme dans ses pratiques, et si l'on voulait pousser plus loin, elle reprend de la Monarchie, sans l'avouer, ce qui peut lui donner quelques racines, quelques évidences, voire quelque légitimité : cela était déjà vrai avec la Troisième République qui, dans ses livres d'histoire pourtant si peu neutres et véritablement « stato-républicains », valorisaient certains aspects de feue la Monarchie d'avant 1789. Ainsi, Saint Louis n'était pas renié, ni le « bon roi » Henri IV et sa « poule au pot », le qualificatif de « bon » étant sans doute le moyen de distinguer de ses prédécesseurs et successeurs (Henri III et Louis XV étant particulièrement dévalués dans les cours de la Troisième), ceux-ci servant de repoussoirs pour montrer les « dangers » de la Royauté. Le statut accordé à Louis XIV était ambigu : si la Troisième République voulait bien en recueillir la gloire et les territoires conquis (en particulier l'Alsace, sous le joug allemand de 1870 à 1918), elle en dénonçait le Pouvoir absolu avec des grimaces de dégoût, au risque de commettre un impair sur la nature même de la Monarchie louisquatorzienne... 

    La Cinquième République a été, souvent, longtemps et encore aujourd'hui si l'on écoute MM. Mélenchon et Devedjian, considérée comme une sorte de « monarchie » présidentielle ou républicaine, et son fondateur comparé au roi-soleil par le célèbre dessinateur Moisan (du Canard enchaîné). La Gauche, dans le même temps du paroissien de Colombey-les-deux-églises, manifestait pour la « défense de la République » avant que, à son tour, elle s'installe dans le trône élyséen sous les traits des deux François, MM. Mitterrand et Hollande, le premier sachant, comme le général de Gaulle, ce qu'il devait à la tradition monarchique, ce qui lui valut d'être surnommé « le dernier des capétiens », comme si, depuis, nous étions rentrés dans une sorte de « régence sans fin »... 

    Ainsi, la Monarchie a-t-elle inspiré la Cinquième République : quel destin pour une « grande chose morte » supposée ! Certes, ce rôle particulier et éminemment symbolique ne suffit pas pour faire de ce qui reste une République une Monarchie pleine et entière, « à la française », c'est-à-dire royale, héréditaire, politique. En paraphrasant Pierre Boutang, l'on pourrait dire que la Cinquième est une « Semble-Monarchie » tout comme l’État républicain n'est, surtout actuellement, qu'un « Semble-État » : n'est-ce pas mieux que rien, ou est-ce encore pire, il peut y avoir débat. 

    C'est d'ailleurs cette apparence de Monarchie qui fournit à l’État actuel une certaine aura et une place particulière dans le concert des nations et de leurs relations : à l'étranger, on sait (et on voit) qui dirige, au sens politique, la France et son État, et lorsque le Chef de l’État n'assume pas son rôle de « monarque », la France paraît absente de la scène mondiale, ou trop dépendante des grandes puissances contemporaines (États-Unis ou Allemagne, entre autres). Si le Président oublie son statut particulier et que son élection n'est rien d'autre, en définitive, qu'une « acclamation » (au sens médiéval du terme) chargée d'une confiance populaire (qui peut être aussi une menace), une sorte de pacte qui rappelle le sens du sacre royal, le « pays réel » lui coupe la tête (électoralement parlant, bien sûr), en se fondant le temps d'une élection dans le « pays légal ». Ce n'est pas d'être « trop monarque » qu'on lui reproche (même si c'est souvent le discours tenu par les politiques), mais de ne pas l'être assez : de ne pas être le garant de la justice (qu'elle soit politique ou sociale, ou simplement « morale ») comme l'était saint Louis sous le chêne de Vincennes ; de ne pas être l'arbitre suprême, ou d'oublier ses devoirs d’État à l'égard du pays comme de ses citoyens... 

    M. Hollande s'est voulu un « président normal », mais c'est quand il exerce (pour de bonnes ou mauvaises raisons, là n’est pas la question) son droit de grâce, d'essence royale et reliquat (selon quelques magistrats agacés) de l'Ancien régime, « survivance monarchique » selon les partisans de la République des juges, qu'il est écouté et compris, à tort ou à raison, des Français : n'est-ce pas la confirmation que la Monarchie, ou au moins son esprit, reste, d'une certaine manière, bien ancrée dans l'inconscient collectif national ?  •  (A suivre).

    Le blog de Jean-Philippe Chauvin

    A lire aussi dans Lafautearousseau ...

    La Monarchie est-elle une grande chose morte ? [1]

  • La dhimmitude au quotidien [4]

     

    PAR PÉRONCEL-HUGOZ

    Œuvrant en terre d'Islam depuis 1965 (administrateur civil, correspondant ou envoyé spécial du Monde, directeur de collection éditoriale et, à présent, chroniqueur au 360, un des principaux quotidiens marocains en ligne), Péroncel-Hugoz n'est sans doute pas le plus mal placé pour décrire le sort des chrétiens vivant sous autorité musulmane.

     

    IMG - JPEG - Copie.jpgLE CAS FARAG FODA 

    Je ne doute pas, j'en suis même convaincu car j'en connais, au Levant ou au Maghreb, qu'il existe des musulmans assumés et qui désapprouvent les traitements honteux ou criminels infligés un peu partout à travers l'Islam aux chrétiens vivant en son sein ; des musulmans qui, en privé, n'ont pas de mots assez durs pour les méfaits des djihadistes et autres Frère musulmans - mais ces esprits critiques, il est vrai, ne se manifestent prati­quement jamais en public. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'ils ont peur d'avoir à en payer chèrement le prix. Je me réfère au cas exemplaire de Farag Foda (1946­-1992) ; cet intellectuel musulman égyptien, modéré en tout et qui eut le courage et l’imprudence au Caire, en 1992, d'affirmer que la dhimmitude imposée aux chrétiens en Égypte et ailleurs était « contraire aux droits de l’homme », ce que tout le monde sait de longue date mais ne dit pas. Le lendemain, Foda était abattu en pleine ville et certaines mosquées justifièrent ce crime par l' « aposta­sie » de la victime, qui ne s'était pas convertie à une autre foi mais avait uniquement violé l'omerta qui lie de facto tous les musulmans du monde face aux méfaits de leurs. Feu le journaliste tiers-mondiste de gauche Guy Hennehelle disait : « la politique des musulmans c'est celle du banc de poissons. Celui qui le quitte est perdu ». La notion de personne, dérivée à notre époque en individualisme, est l'apanage du christianisme ; la spécialité de l'Islam est la solidarité communautaire, dérivée en communautarisme. Les dhimmis d'Orient en savent quelque chose... Pour ceux d'Occident, ça ne fait que commencer... 

    QUID DU MAROC ?

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    Le roi du Maroc Mohamed VI. Le souverain chérifien, descendant du Prophète, paraît mieux armé que d'autres Etats musulmans pour faire face à la menace islamiste.

     

    Et quid de la dhimma au Royaume chéri­fien se demandera le lecteur sachant que j'y vis. Eh ! Bien, cet État musulman sunnite, gouverné depuis trois siècles et demi par une dynastie se rattachant à la lignée de Maho­met (comme les Hachémites de Jordanie, le sultan de Brunei et l'Aga-Khan), a en quelque sorte résolu l'épineuse question de La dhimmitude par le seul fait que sa natio­nalité ne peut appartenir qu'aux fils du sol, tous mahométans donc (à part quelque trois mille israélites indigènes, au reste invi­sibles parmi les 35 millions d'habitants). Les quelque 70000 chrétiens (ou réputés tels) établis à présent en Chérifie (sans compter les Espagnols de Ceuta et Mailla) ne sont pas traités en dhimmis mais avec déférence en « étrangers de passage », même si certains traits de la dhimmitude sont présents au Maroc, discrètement il est vrai, depuis la fin du Protectorat franco-hispanique (1912-­1956) ; les cloches de églises ne peuvent plus sonner; tout prosélytisme non-mahométan est interdit et tout non-musulman voulant épouser une Marocaine « vraie croyante » doit impérativement se convertir à l'islam. Cette situation « tranquille » ne durera peut-être pas éternellement en raison du nombre grandissant de Subsahariens - étu­diants, commerçants, trafiquants, clandes­tins, prostituées, etc. - s'installant depuis 10 ans au Maroc. Une part notable de ces migrants sont catholiques ou protestants, ce qui a déjà ressuscité plusieurs paroisses à travers le pays, avec des rassemblements de plus en plus voyants de fidèles, des com­merces informels, des trafics divers et quelques incidents « raciaux », bref une situation qui est loin de plaire à tous les Marocains. Allah jacta est ... 

    (Fin)

    PÉRONCEL-HUGOZ 

    Grand-reporter, essayiste, auteur d’une dizaine d’ouvrages sur les pays du Sud, Péroncel-Hugoz a été notamment correspondant du Monde en Égypte de 1973 à 1981. Connaisseur de la civilisation mahométane, il publia en 1983 Le Radeau de Mahomet (Ed. Lieu commun, réed. Champs-Flammarion), livre prémonitoire sur l’évolution du monde musulman. Il prépare pour cette année la réédition au Maroc d’un essai oublié de Balzac, Rois de France, indisponible depuis 70 ans.

    Lire ...
     
     
     


    Repris de La Nouvelle Revue d'Histoire avec l'aimable autorisation de l'auteur

    LA NOUVELLE REVUE D'HISTOIRE • 43 Hors-série n° 12 • Printemps 2016

  • Brexit : Il se pourrait que l'Europe de Bruxelles soit déjà morte sans le savoir ...

     

    Par Lafautearousseau

     

    logo lfar.jpgAinsi, les bourses avaient voté. Et l’ensemble des médias, la presque totalité des semble élites, et - jusqu’au ridicule - les peurs, les conformismes, les habitudes, les libéraux et les modernes, les idolâtres des marchés, bref les avertis, contre les peuples ignorants. Et, bien-sûr, les fonctionnaires de Bruxelles et leurs relais dispersés à travers l’Europe, bien décidés à défendre âprement leurs rentes, leurs situations, leurs privilèges et leurs retraites. Cela faisait beaucoup de monde, et de grandes forces, dressées contre cette sorte de liberté d’un jour que s’était donné le vieux Royaume britannique – que l’on fût Remain ou Brexit -  de choisir entre son identité et son histoire et sa fusion dans le magma mondialiste dont l’UE n’est qu’une étape, vers la gouvernance mondiale, façon Attali. Telle était aussi, d’ailleurs, la volonté affirmée – un quasi diktat - de Barak Obama, aussi président des Etats-Unis d’Amérique – et demain du Monde – que l’avaient été ses prédécesseurs blancs. Car, derrière le rideau de fumée de l’unité du monde – c'est-à-dire des marchés - se tient, de fait, cet élément moteur, cette ambition de fond, qu’est le nationalisme américain.    

    Avec 1,89% de plus que la barre des 50%, selon la règle démocratique de pure arithmétique, le peuple britannique a choisi non pas de ne plus être une nation européenne – rien ne fera qu’elle ne le soit, éminemment – mais de s’extraire d’une machinerie inefficace et tyrannique, en train d’échouer partout. Résultat que la doxa uniforme s’obstinait tellement à croire inenvisageable que les médias ont annoncé la victoire du Remain contre le Brexit à 52 / 48%, jusqu’à tard dans la nuit du vote. De sorte que le téléspectateur – fût-il tardif – s’est endormi dûment informé de la défaite du Brexit et s’est réveillé au son de sa victoire. Les bourses, les sondeurs, les bookmakers et l’ensemble des conformismes s’étaient trompés. Ni les peurs agitées éhontément, ni même le meurtre inopiné et finalement inutile de Jo Cox, n’auront suffi.

    XVMf0ab72b2-3a30-11e6-9245-4c55b4cb147c.jpgFaut-il croire à une opposition aussi radicale qu’on nous l’a seriné dans notre microcosme franco-français, entre les partisans du maintien et ceux du départ ? La violence de leurs débats ne nous empêche pas d’en douter. A vrai dire, la politique de Cameron et celle de Boris Johnson différaient par les moyens, non par l’objectif. De sorte que - l’extraordinaire force symbolique du retrait britannique mise à part, et elle n’a rien de négligeable - les suites du maintien et celles du départ, ne devaient pas être très différentes, même si les médias brossent tous les scénarios catastrophe les plus extravagants à la charge du Brexit. Cameron avait imposé à l’UE, en février 2016, les dérogations nécessaires et, sans-doute, suffisantes, pour la Grande Bretagne, de sorte que, selon son habitude, elle ait en toute hypothèse, comme nous l’avons écrit ici-même, un pied dedans, un pied dehors. Qu’elle détermine elle-même sa politique économique, sociale, migratoire et qu’il soit bien entendu qu’en aucun cas elle ne laisserait toucher à sa souveraineté. Dans de telles conditions, on était déjà sorti – n’étant d’ailleurs jamais vraiment entré – et l’on pouvait rester sans trop de gêne. Les partisans du Brexit vainqueur ont préféré la solution nette. Le prochain cabinet, dont il est très possible que Boris Johnson soit le Chef, fera en sorte que la Grande Bretagne conserve néanmoins, sur le continent européen, tous les liens qui lui seront utiles et que la nature des choses maintiendra ou rétablira assez vite. Les bourses, compulsives ces temps derniers, se calmeront, les marchés s’organiseront, la Grande Bretagne restera la puissance européenne et mondiale qu’elle est - avec ou sans l’UE - depuis quelques siècles.

    Quant à l’Europe de Bruxelles, il se pourrait bien, comme on l’a dit ici et là qu’elle soit déjà morte sans le savoir, sans même qu’on s’en soit encore rendu compte. Il est possible, a contrario, que le départ britannique ravive quelques velléités fédéralistes. Mais l’opposition des peuples et de nombreux Etats membres de l’UE, est sans-doute devenue aujourd’hui trop forte pour leur laisser de réelles chances d’aboutir. Il est bien tard pour une telle offensive.

    Pour ouvrir la réflexion sur un champ plus large – mais sans y entrer ici – la victoire du Brexit nous paraît être, en un sens, celle du Sang sur l’Or. Celle de l’Histoire et des identités sur l’utopie postnationale, universaliste, consumériste, multiculturaliste, etc. Faute d’avoir voulu reconnaître ses racines, fixer ses frontières, affirmer son identité et son indépendance, cette Europe-là se condamnait par avance à une telle issue. Y aura-t-il encore des forces, des idées, des volontés, pour relever le projet sur de justes bases ? 

    Lire aussi ...

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    Qu'ils restent ou qu'ils partent, les Britaniques ont de toute façon un pied dedans, un pied dehors ...  

    [Lafautearousseau 22.06]

  • La dhimmitude au quotidien [2]

    Publié en 1983, Le Radeau de Mahomet annonçait dans une large mesure les problèmes à venir. Un ouvrage mal accueilli par la caste journalistique, largement acquise à une islamomanie acritique.

    PAR PÉRONCEL-HUGOZ

    Œuvrant en terre d'Islam depuis 1965 (administrateur civil, correspondant ou envoyé spécial du Monde, directeur de collection éditoriale et, à présent, chroniqueur au 360, un des principaux quotidiens marocains en ligne), Péroncel-Hugoz n'est sans doute pas le plus mal placé pour décrire le sort des chrétiens vivant sous autorité musulmane.

     

    IMG - JPEG - Copie.jpg« J'ai pu toucher du doigt la condition de demi-citoyens des coptes et autres chrétiens, les discriminations quotidiennes dans la rue, à l'école, dans l'administration... » 

    Je n'avais pas non plus encore examiné in vivo la dhimmitude au quotidien. En Égypte, je fus peu aidé en cela par le mutisme des coptes, sans doute par honte vis-à-vis d'un chrétien « libre », et par crainte de représailles de la part de musul­mans glosant haut et fort, eux, devant les Occidentaux, sur la « tolérance » de leur reli­gion, alors que nous, nous avions eu les Croi­sades, l'Inquisition, le Colonialisme, le Nazisme et tout le saint-frusquin... Aidés par une puissante cohorte d'intellos marxistes, huguenots, juifs, cathos de gauche, etc., ceux des mahométans son­geant déjà à une Reconquista à l'envers de l'Europe latine, avaient vite compris qu'en culpabilisant leurs adversaires potentiels, ils les affaibliraient d'autant. La « cohorte », elle, comptait secrètement sur le pouvoir électoral des « masses musulmanes » - et ça continue sous nos yeux en France, Espagne, Belgique, etc. - pour installer durablement au gouvernement la gauche socialiste... 

    ANAOUATI ET 8OUIROS-GHALI 

    Cc furent, au Caire, au milieu de la décen­nie 1970, le père Georges Anaouati, fameux érudit dominicain égypto-levantin, conseiller culturel de Jean-Paul II, et un autre érudit oriental, Mirrit Boutros-Ghali, fondateur de la Société d'archéologie copte, qui m'ouvrirent définitivement les yeux sur la terrible réalité de la dhimmitude. Désor­mais, en Orient, je passai une partie de mon temps à parcourir quartiers et villages mixtes où je touchai mille fois du doigt la condition de demi-citoyens des coptes et autres chrétiens, les discriminations quoti­diennes dans la rue, aux champs, à l'école, dans l'administration, etc. C'est en outre parmi les coptes que je trouvai les pauvres des pauvres, même si la misère frappait aussi de nombreux musulmans. Comme je rapportais mes tristes constats à Anaouati, il me donna une sorte d'ordre : « Écrivez tout ça ! ». Et ce fut, en 1983, Le Radeau de Mahomet, où je développais ce que j'avais déjà esquissé dans Le Monde sur la situation de la Chrétienté orientale. Si j'eus le soutien de mes supérieurs hiérarchiques, type André Fontaine ou Michel Tatu, nombre de mes confrères, au Monde et ailleurs, au nom d'un « Islamo-progressisme » imaginaire, nièrent les faits que je rapportais... 

    DE MORSI A SISSI 

    En Égypte, bien sûr, mais là où me conduisaient aussi d'autres reportages : Libye, Soudan. Yémen Pakistan, Brunei, et même dans les soi-disant États « laïques » de Syrie, Irak ou Turquie, je découvrais, peu à peu, la condition dihimmie : pas de mariage ni même de flirt avec une « vraie croyante » alors que tout mâle musulman a le droit d'épouser juives ou chrétiennes dont les enfants seront obligatoirement islamisés ; pour celles de ces épouses ayant conservé leur foi native, en cas de veuvage, aucun héritage ni aucune garde des enfants; impossibilité pour les dhimmis d'accéder à certaines professions « délicates », comme la gynécologie ou bien à des postes poli­tiques réellement importants : le célèbre Boutros Boutros-Ghali, au rôle diploma­tique mondial, ne dépassa jamais chez lui le rang de « ministre d'État » qui, au Caire, équivaut à « secrétaire d'État ».

    Le « laïc » Nasser aggrava encore la dhimmitude en interdisant aux chrétiens d'enseigner l'arabe, « langue du Coran » ; en contrepartie, si on peut dire, il interdisit à ses coreligionnaires les manifestations festives trop bruyantes lors des conversions de coptes à l'Islam. Subsistèrent les mille mesquineries paperassières, légales ou non, imposées aux constructeurs de la moindre chapelle tandis que le gouver­nement continuait à encourager l'édification de nouvelles mosquées.

    Sous Sadate les attentats antichrétiens se multiplièrent tandis que le pape copte qui avait eu le toupet de se plaindre était assigné à résidence...

    Lors du renversement du président islamiste élu, Morsi, en 2013, par le maréchal Sissi, des musulmans passèrent leurs nerfs en détrui­sant en deux jours plus de cent édifices chrétiens dans la vallée du Nil, soit plus que durant toute la conquête arabe de cette région en 639... J'avais un jour demandé à un jeune prêtre cairote comment tant de ses coreligionnaires avaient pu résister depuis plus de 1000 ans à l'islamisation, laquelle, d'un coup, simplifie la vie. Il me répondit sans hésiter : « Nous prions ! ».

    (A suivre)

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    Repris de La Nouvelle Revue d'Histoire avec l'aimable autorisation de l'auteur

    LA NOUVELLE REVUE D'HISTOIRE • 43 Hors-série n° 12 • Printemps 2016

     

  • Brexit : Il se pourrait que l'Europe de Bruxelles soit déjà morte sans le savoir ...

     

    Par Lafautearousseau

    [Publié le 27.06, actualisé ce jour]

    logo lfar.jpgAinsi, les bourses avaient voté. Et l’ensemble des médias, la presque totalité des semble élites, et - jusqu’au ridicule - les peurs, les conformismes, les habitudes, les libéraux et les modernes, les idolâtres des marchés, bref les avertis, contre les peuples ignorants. Et, bien-sûr, les fonctionnaires de Bruxelles et leurs relais dispersés à travers l’Europe, bien décidés à défendre âprement leurs rentes, leurs situations, leurs privilèges et leurs retraites. Cela faisait beaucoup de monde, et de grandes forces, dressées contre cette sorte de liberté d’un jour que s’était donné le vieux Royaume britannique – que l’on fût Remain ou Brexit -  de choisir entre son identité et son histoire et sa fusion dans le magma mondialiste dont l’UE n’est qu’une étape, vers la gouvernance mondiale, façon Attali. Telle était aussi, d’ailleurs, la volonté affirmée – un quasi diktat - de Barak Obama, aussi président des Etats-Unis d’Amérique – et demain du Monde – que l’avaient été ses prédécesseurs blancs. Car, derrière le rideau de fumée de l’unité du monde – c'est-à-dire des marchés - se tient, de fait, cet élément moteur, cette ambition de fond, qu’est le nationalisme américain.    

    Avec 1,89% de plus que la barre des 50%, selon la règle démocratique de pure arithmétique, le peuple britannique a choisi non pas de ne plus être une nation européenne – rien ne fera qu’elle ne le soit, éminemment – mais de s’extraire d’une machinerie inefficace et tyrannique, en train d’échouer partout. Résultat que la doxa uniforme s’obstinait tellement à croire inenvisageable que les médias ont annoncé la victoire du Remain contre le Brexit à 52 / 48%, jusqu’à tard dans la nuit du vote. De sorte que le téléspectateur – fût-il tardif – s’est endormi dûment informé de la défaite du Brexit et s’est réveillé au son de sa victoire. Les bourses, les sondeurs, les bookmakers et l’ensemble des conformismes s’étaient trompés. Ni les peurs agitées éhontément, ni même le meurtre inopiné et finalement inutile de Jo Cox, n’auront suffi.

    XVMf0ab72b2-3a30-11e6-9245-4c55b4cb147c.jpgFaut-il croire à une opposition aussi radicale qu’on nous l’a seriné dans notre microcosme franco-français, entre les partisans du maintien et ceux du départ ? La violence de leurs débats ne nous empêche pas d’en douter. A vrai dire, la politique de Cameron et celle de Boris Johnson différaient par les moyens, non par l’objectif. De sorte que - l’extraordinaire force symbolique du retrait britannique mise à part, et elle n’a rien de négligeable - les suites du maintien et celles du départ, ne devaient pas être très différentes, même si les médias brossent tous les scénarios catastrophe les plus extravagants à la charge du Brexit. Cameron avait imposé à l’UE, en février 2016, les dérogations nécessaires et, sans-doute, suffisantes, pour la Grande Bretagne, de sorte que, selon son habitude, elle ait en toute hypothèse, comme nous l’avons écrit ici-même, un pied dedans, un pied dehors. Qu’elle détermine elle-même sa politique économique, sociale, migratoire et qu’il soit bien entendu qu’en aucun cas elle ne laisserait toucher à sa souveraineté. Dans de telles conditions, on était déjà sorti – n’étant d’ailleurs jamais vraiment entré – et l’on pouvait rester sans trop de gêne. Les partisans du Brexit vainqueur ont préféré la solution nette. Le prochain cabinet, dont il est très possible que Boris Johnson soit le Chef, fera en sorte que la Grande Bretagne conserve néanmoins, sur le continent européen, tous les liens qui lui seront utiles et que la nature des choses maintiendra ou rétablira assez vite. Les bourses, compulsives ces temps derniers, se calmeront, les marchés s’organiseront, la Grande Bretagne restera la puissance européenne et mondiale qu’elle est - avec ou sans l’UE - depuis quelques siècles.

    Quant à l’Europe de Bruxelles, il se pourrait bien, comme on l’a dit ici et là qu’elle soit déjà morte sans le savoir, sans même qu’on s’en soit encore rendu compte. Il est possible, a contrario, que le départ britannique ravive quelques velléités fédéralistes. Mais l’opposition des peuples et de nombreux Etats membres de l’UE, est sans-doute devenue aujourd’hui trop forte pour leur laisser de réelles chances d’aboutir. Il est bien tard pour une telle offensive.

    Pour ouvrir la réflexion sur un champ plus large – mais sans y entrer ici – la victoire du Brexit nous paraît être, en un sens, celle du Sang sur l’Or. Celle de l’Histoire et des identités sur l’utopie postnationale, universaliste, consumériste, multiculturaliste, etc. Faute d’avoir voulu reconnaître ses racines, fixer ses frontières, affirmer son identité et son indépendance, cette Europe-là se condamnait par avance à une telle issue. Y aura-t-il encore des forces, des idées, des volontés, pour relever le projet sur de justes bases ? 

  • Livre & Immigration • Philippe de Villiers : « Comment la France s'islamise »

     

    Par Charles Jaigu

    Les cloches sonneront-elles encore demain ? : dans un ouvrage au titre explicite, Philippe de Villiers tire le signal d'alarme. Il y montre comment la France est tout bonnement en train de s'islamiser et de perdre son identité. Il met en cause l'islamisme, bien sûr, mais aussi l'islam de France, accusé de jouer un double jeu, sans oublier nos élites intellectuelles et politiques, de gauche comme… de droite. C'est ce que Charles Jaigu analyse ici dans Figarovox [7.10]. Assurément, Philippe de Villiers n'est pas le seul à dire ces choses. Mais, hors des jeux politiciens, il est bon qu'il les dise. Avec force et talent. Comme il le fait au Puy du Fou, sans-doute, avec ses livres d'Histoire, ce qu'il aura réalisé de mieux.  Lafautearousseau

     

    « Non, ce n'est pas, jure-t-il, un livre pour la présidentielle, dont il se “ fiche complètement ! ” » A regarder les candidats affûter leurs slogans et asséner leurs formules, il est pris « de nausée, de dégoût ». Philippe de Villiers n'est pas un Vendéen de façade. Il a la tripe et la gouaille d'un chouan exalté par son discours d'apocalypse. « Je les vois faire une partie de poker menteur sur le Titanic. L'orchestre joue, le champagne coule à flots. La France coule, et on nous parle des chiffres de la TVA » assène-t-il, sincèrement consterné. Une chose est sûre : Philippe de Villiers a retrouvé la foi en lui-même. Pendant plusieurs années, il a traversé un long désert fait de démêlés familiaux, de difficultés de santé et aussi d'une crise de son message politique. Le souverainisme avait été une grande avenue de la politique française. Il n'était plus qu'une impasse, recouverte d'herbes folles. Mais la crise de l'Europe et des marchés a redoré le blason des « nationaux ». Comme à chaque fois, le créneau a vite été saisi par Marine Le Pen. Mais il restait à Villiers ce qu'il sait le mieux faire : camper des décors crépusculaires et nous parler de la fin du monde.

    A 67 ans, le créateur du Puy du Fou entame donc le quatrième acte de sa vie publique hexagonale. Il y aura eu le « combat pour les valeurs » et la candidature malheureuse à l'élection présidentielle en 1995; l'alliance avec Charles Pasqua pour créer le Rassemblement pour la France, en 1999; la campagne contre le référendum de 2005. Cette fois-ci, le condottiere vendéen revient avec un livre au chalumeau contre l'islam et le danger de « colonisation » de la France.

    Villiers ne fait pas dans la dentelle. Il nous prépare à l'ensevelissement, à la disparition. Ce quatrième acte, il le jure, sera celui d'un auteur et d'un bretteur, pas d'un candidat. Est-ce sous l'influence de Patrick Buisson, qui fut longtemps un ami et un conseiller?  Philippe de Villiers, en tout cas, s'est pleinement converti au « Kulturkampf ». Il a repris, lui aussi, les analyses du marxiste italien Antonio Gramsci (1891-1937), pour qui l'hégémonie culturelle précède les victoires politiques.

    Car Philippe de Villiers a bel et bien quitté la politique. Il a démissionné de la présidence du Mouvement pour la France, en 2010. Et il ne s'est pas représenté aux élections européennes de 2014. Au début de l'année, il a publié un livre de Mémoires dans lequel il disait tout, ou presque - et parfois inventait, comme le lui reprochent certains de ses lecteurs, à l'image d'Alain Duhamel. Avec ses anecdotes bien troussées, Le moment est venu de dire ce que j'ai vu l'a remis en selle. Il a retrouvé goût aux tours de France, aux réunions publiques, enchaîné les séances de dédicace, et vendu 240.000 exemplaires.

    « Je suis passé de la politique à la métapolitique, d'une circonscription électorale à une circonscription de lecteurs, et ma parole est plus écoutée qu'à l'époque », nous assure-t-il. Il a pourtant fait l'objet, ces derniers mois, de supplications diverses pour reprendre le combat politique. De la part des membres de son parti, de ses lecteurs ou du maire de Béziers, Robert Ménard, qui l'avait invité fin mai au colloque de la droite « hors les murs ». Mais il n'a jamais fait le voyage, et il n'a pas franchi le pas. Car devant lui, encore et toujours, se trouve l'obstacle Le Pen.

    Dans le livre qu'il publie, Philippe de Villiers annonce donc le « grand remplacement ». Il nous parle de « submersion, d'envahissement et de colonisation ». Longtemps, il laissa l'immigration à Jean-Marie Le Pen. Son combat, c'étaient les valeurs et le refus d'une Europe « prison des peuples ». Désormais, Philippe de Villiers reprend à son compte les interpellations du vieux meneur de l'extrême droite française. L'heure n'est plus aux finasseries politiciennes, estime-t-il. Mais, quand on lui demande s'il se sent proche, rétrospectivement, du « Menhir », il se récrie: « Mon électorat n'était pas celui de Le Pen. Je suis de la droite résistante, pas celle de ces bourgeois qui ont dit, en voyant arriver les boches, “ah, ils vont remettre un peu d'ordre!” »

    En attendant, Philippe de Villiers semble toujours croire qu'il existe un espace à prendre entre Marine Le Pen et Alain Juppé, si ce dernier devait être le vainqueur de la primaire. « Celui qui va faire un carton, c'est celui qui osera dire les choses mais, pour l'instant, je n'en vois aucun », dit-il. Pour le moment, Villiers estime, avec Les cloches sonneront-elles encore demain ?, qu'il est le seul à dire les choses. 

    Les Rencontres du Figaro avec Philippe de Villiers, le 30 novembre 2016 à 20h00.

    Le fondateur du Puy du Fou a quitté la scène politique pour se consacrer à l'écriture. Après Le moment est venu de dire ce que j'ai vu (Albin Michel) recueil de souvenirs politiques au succès phénoménal, il publie une puissante méditation sur la France, son histoire, sa beauté, et les défis existentiels auxquels l'islamisme et la mondialisation la confrontent.

    Une dédicace de son livre aura lieu à la suite de cette conférence. Pour réserver rendez-vous sur cette page.

    Philippe de Villiers a bel et bien quitté la politique

    Le moment est venu de dire ce que j'ai vu

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    Charles Jaigu

    Grand reporter au service politique du Figaro        

  • La défense, une volonté politique

     

    par Jean-Marie Faugère 

    Dans un monde en mutation où les foyers de tensions se multiplient, les armées européennes se trouvent dans une situation de grande fragilité, comme elles le furent rarement dans leur histoire. à la France appartient le rôle historique de prendre l’initiative d’une restauration effective de nos capacités opérationnelles.

     

    Jean-Marie-Faugère-600x339.jpgL’actualité des engagements de nos armées, qu’elles soient déployées sur des théâtres extérieurs ou en intervention sur le sol métropolitain (opération Sentinelle), les soumet à une pression croissante dans l’exécution de missions toutes aussi différentes les unes que les autres. Pression qui ne saurait diminuer, sauf à considérer que la lutte contre l’état islamique trouverait un terme heureux auquel nul ne croit. Ou que le désordre mondial en expansion s’évanouirait miraculeusement !

    Nos forces militaires sont ainsi engagées dans un quotidien que les gouvernements successifs n’ont pas su, ou pas voulu, envisager. Pas plus qu’ils n’ont su, ou voulu, anticiper les crises à venir. Mais l’un était prévisible et les autres auraient dû faire l’objet d’une analyse prospective sans tabous. Car nos armées sont aujourd’hui contraintes de se préparer pour des crises, des guerres ou des affrontements jusque sur le sol national, qui leur demandent une adaptation permanente à un environnement de plus en plus hostile.

    Or, depuis vingt-cinq ans, un vent continu de réformes a affaibli, dans des proportions déraisonnables, non seulement leurs capacités opérationnelles et leur effectif, mais aussi leur fonctionnement quotidien – aussi bien dans la vie en garnison que dans la préparation opérationnelle.

    Restaurer nos capacités

    L’urgence est donc maintenant à la restauration de leurs capacités. Cette initiative, politique, sera-t-elle prise sous la pression des événements dramatiques qui nous ont touchés jusqu’au cœur de la cité ? Les quelques décisions présidentielles de 2015 pourraient le laisser penser. Il manque cependant ce véritable sursaut qui demanderait des efforts importants dans la durée, notamment budgétaires. Mais ce n’est visiblement pas encore une priorité gouvernementale.

    Car l’état islamique ne saurait représenter l’horizon indépassable des menaces à venir. Certes, il est aujourd’hui le principal défi lancé à nos armées. Mais, il serait irresponsable de ne pas envisager la question militaire à plus long terme, avec des échéances qui nous verraient contraints d’intervenir à l’extérieur de nos frontières. Sur celles de l’Union européenne par exemple, mais en Afrique plus sûrement et, pourquoi pas, au Proche-Orient si l’on veut traiter à la source les racines des conflits en gestation.

    Répétons-le : depuis vingt-cinq ans, les armées vivent au jour le jour. Elles naviguent à vue. Soumises aux pressions budgétaires, fruit de l’irénisme des « dividendes de la paix » et de la nécessité de réduire en partie sur leur dos les déficits publics, elles n’ont jamais été en mesure de stabiliser un modèle qui réponde aux nécessités du moment et qui n’obère pas le futur. Les Livres blancs sur la Défense se succèdent au rythme des changements de majorité. Mais les lois de programmation militaire ne sont jamais entièrement exécutées.

    La faute à des lois de finances toujours estropiées dans leur exécution : la Défense offre en effet de faciles variables d’ajustement au budget de l’état. Dans de telles conditions, il lui est impossible de mettre en œuvre une politique cohérente de ressources humaines et une planification stable de réalisation et de renouvellement d’équipements. Manquent, enfin, des procédures adaptées au besoin croissant de réactivité et de disponibilité dû à l’évolution rapide des nouvelles formes de combat et aux natures changeantes des missions.

    Le rôle de la France… et de son gouvernement

    A l’exception des Etats-Unis qui, contrairement aux discours convenus, peuvent se satisfaire de cette faiblesse européenne endémique, le monde occidental ne sait plus quoi défendre. Et encore moins pourquoi il faudrait qu’il réponde à cette obligation. à cet égard, l’état de nos armées n’est pas une singularité au sein d’une Europe qui néglige sa protection en s’en remettant à l’Alliance atlantique. Autrement dit, à un hypothétique retour américain en cas de nécessité.

    C’est bien pourquoi la prise de conscience doit être collective en Europe. Notre avenir commun, notre histoire et notre civilisation la réclament impérieusement. Mais il serait hasardeux d’attendre cette prise de conscience sans la provoquer. à condition que ses responsables cessent de n’avoir pour horizon que le court terme des échéances électorales, cela pourrait être le rôle – historique – de la France. Elle en possède les capacités. Par chance, plus que toutes autres en Europe, nos armées ont conservé, en dépit de leur dégradation, un large spectre de capacités opérationnelles, comme le prouvent la qualité de la tenue de nos troupes en opérations, leurs facultés d’adaptation aux modes d’action d’adversaires variés et leur aptitude à combattre sous toutes les latitudes.

    Les bases saines d’une restauration de capacités opérationnelles sont là. Mais, il ne faut pas méconnaitre qu’un appareil militaire se construit dans la durée : plus de vingt ans pour former des chefs, dix ans pour développer un programme d’armement et au moins autant pour le produire. Ces cycles longs ont besoin de stabilité. Stabilité des ressources financières, stabilité des hommes et des femmes qui encadrent les flux de soldats, marins et aviateurs qu’impose l’impératif de jeunesse des unités combattantes.

    Les mesures arrêtées en 2015 – arrêt de la déflation d’effectif, abondement budgétaire pour modeste qu’il soit, renforcement des capacités de renseignement et de lutte cybernétique – ne s’apparenteront à une politique de restauration de forces et de moyens pour les armées que si elles sont poursuivies – et amplifiées – dans les années qui viennent. Actuellement, le taux d’engagement sur les théâtres extérieurs et leur implication sur le sol national dans des tâches de sécurité – à contre-emploi, il faut le souligner – asphyxient chaque jour davantage les armées, et plus spécialement l’armée de terre, la plus sollicitée, au détriment de leur entraînement et de l’exécution de leurs vraies missions militaires.

    Ces questions de défense et de sécurité seront-elles sérieusement débattues lors de la campagne pour l’élection présidentielle de 2017 ? Nous serons bientôt fixés. Les candidats devront montrer à nos concitoyens que ces domaines, régaliens par essence, sont au cœur de la raison d’état. Il en va de l’avenir de notre Défense. Et on sait que la Constitution française confie pour cet exercice un rôle éminent au président de la République. 

    A noter que le général Faugère donne ce soir, à Paris,  une conférence sur ce même sujet dans le cadre des mardis de Politique magazine  [Voir plus loin] 

    Général d'armée (2s), ancien inspecteur général des armées, spécialiste de défense et de sécurité.

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  • Culture • Alexandre Devecchio : Autant en emporte le vieux monde

     

    Par Alexandre Devecchio

    Accusé de racisme, Autant en emporte le vent a été déprogrammé par un cinéma de Memphis. Alexandre Devecchio a revu ce classique de l'âge d'or [Figarovox, 2.09] qui dit beaucoup de son époque et de la nôtre. Cette remarquable chronique intéressera les lecteurs de Lafautearousseau. 

     

    1630167502.jpgUne fois n'est pas coutume, il faut remercier les petits soldats du multiculturalisme pour leur fureur iconoclaste. En empêchant la projection d'Autant en emporte le vent dans l'Orpheum Theater de Memphis (Tennessee), qui diffusait le film chaque année depuis 34 ans, il donne un bon prétexte à tous les cinéphiles pour s'offrir 3h58 de bonheur en se replongeant dans le chef d'œuvre de David Selznick. Pour peu qu'ils soient munis d'un simple lecteur de DVD, ces derniers pourront éprouver le frisson de la subversion et surtout constater que 78 ans après sa sortie, le film n'a pas pris une ride. Le technicolor, témoin d'une période bénie ou le cinéma n'était pas encore colonisé par le numérique, reste envoûtant. Scarlett O'Hara, incarnée par la sublime Vivien Leigh, la plus belle et irrésistible garce de l'Histoire du cinéma. Et Clark Gable/Rhett Butler, l'acteur le plus élégant et viril de tous les temps, loin devant George Nespresso Clooney.

    Impossible, cependant, de regarder le film avec le même œil que par le passé? Une question hante désormais le spectateur: « Autant en emporte le vent est-il raciste? ». Juger cette œuvre au regard des critères moraux de 2017 apparaît absurde et anachronique. Autant en emporte le vent est sorti en salle en 1939. A l'époque, Martin Luther King chantait avec le chœur de son église à Atlanta pour la première du film ! La lutte pour les droits civiques n'était encore qu'un rêve lointain et l'idéologie diversitaire de la science-fiction. A ce compte, il faudrait interdire la moitié de la production cinématographique américaine de l'époque. En premier lieu, les westerns et leur vision mythifiée de l'Ouest où les Indiens, présentés comme des sauvages, ont bien mérité d'être génocidés par les gentils cow-boys. En France, si l'on poursuit selon cette logique, la nouvelle inquisition antiraciste pourrait faire un gigantesque autodafé avec bon nombre de génies de la littérature. L'œuvre de Voltaire brûlée pour « islamophobie », celle de Céline pour antisémitisme. Molière excommunié de nouveau, mais cette fois pour misogynie. Balzac, défenseur autoproclamé du « trône et de l'autel » prohibé pour conservatisme. Pour autant, tenter d'analyser l'idéologie véhiculée par Autant emporte le vent, ce que dit le film le plus vu de tous les temps de son époque et de la nôtre, demeure un exercice passionnant.

    Le long métrage apparaît bien plus complexe et subtil que nos caricatures actuelles. Même avec un regard contemporain, sourcilleux et vigilant, les accusations de « racisme », d' « apologie de l'esclavage » ou encore d' « ultraconservatisme » se révèlent excessive. S'il faut absolument lui coller une étiquette, le film pourrait être qualifié d'anarchiste-conservateur. A l'origine d'Autant en emporte le vent, il y a le roman culte de Margaret Mitchell, enfant du Sud, fille d'un riche avocat conservateur et d'une militante féministe suffragette. Le véritable auteur du film, dirigé par plusieurs réalisateurs, dont Georges Cukor et Victor Flemming, est David O. Selznick, producteur juif hollywoodien. A l'image de Scarlett O'Hara, écartelée entre l'insipide Ashley Wilkes et le charismatique Rhett Butler, Autant emporte le vent est tout entier tiraillé entre le passé et l'avenir, la Réaction et le Modernité, la terre ocre de Tara et l'Amérique nouvelle de la côté Est. Le couple mythique du film puise sa force dans les valeurs traditionnelles du Sud, mais profondément anticonformiste et avant-gardiste, il brise toutes les conventions de son époque. La distance ironique de Rhett Butler à l'égard de la guerre n'est pas seulement due a son cynisme, elle exprime son scepticisme vis-à-vis d'un conflit meurtrier qu'il juge inutile et perdu d'avance. Quant à Scarlett O'Hara, son personnage mériterait à lui seul une ou plusieurs thèses sur le féminisme. Femme indépendante et aventurière, elle fascine aussi bien les personnages masculins du film que les spectateurs par sa liberté, son tempérament fougueux, sa fameuse « passion de la vie ». Son personnage dessine, malgré tout, un portrait peu flatteur de la femme moderne, monstre d'égoïsme et de narcissisme. Son rapport à l'homme est trouble et violent. Violée par Rhett Butler dans le lit conjugal, Scarlette O'hara, éternelle insatisfaite, apparaît le lendemain matin comblée comme jamais. Une scène sulfureuse qui serait jugée moralement inacceptable aujourd'hui.

    De l'esclavage, Autant en emporte le vent donne une vision non pas raciste, mais paternaliste. Ici, les esclaves sont satisfaits de leur sort et attachés à leurs maîtres. A l'image de Mamma, interprétée par Hattie McDaniel, première actrice noire récompensée par l'Oscar pour ce rôle, qui développe une relation quasi filiale avec Scarlett O'Hara. Dans le film, le fouet et l'asservissement total sont éludés. Mais Autant en emporte le vent n'est pas un documentaire. C'est une fresque romanesque avant d'être un film historique ou politique. Il ne s'agit pas tant ici de refaire l'Histoire que d'exalter un imaginaire puissant, celui d'un Sud romantique et disparu. Le film s'ouvre sur ces quelques mots évocateurs : « Il était une fois un pays de coton qu'on appelait le Sud. On y trouvait le meilleur de la galanterie, des chevaliers et des dames, des maîtres et des esclaves. Mais tout ceci n'existe plus qu'en rêve. Le vent a emporté cette civilisation ». Autant en emporte le vent, tourné juste après la crise des années 30 et juste avant le début de la Seconde Guerre mondiale décrit avec nostalgie la fin d'un monde fantasmé, et le début d'une ère nouvelle, celle de l'Amérique moderne et industrielle. A sa sortie, il faisait écho aux tourments du XXe siècle. Aujourd'hui, dans une période elle aussi marquée par l'épuisement d'une civilisation et l'aube d'un nouveau monde, il trouve une nouvelle résonance. Entre les anciens et les modernes, le débat fait rage. Les premiers veulent s'appuyer sur un passé, parfois idéalisé, pour construire le présent et préparer le futur. Les seconds font table rase et se débarrassent du monde ancien. Pour eux, les statues et les mythes, comme les classiques de l'âge d'or et les rêves seront, c'est inéluctable, emportés par le vent.  

     

    Alexandre Devecchio est journaliste au Figaro, en charge du FigaroVox. Il vient de publier Les Nouveaux enfants du siècle, enquête sur une génération fracturée (éd. du Cerf, 2016) et est coauteur de Bienvenue dans le pire des mondes (éd. Plon, 2016).

    Alexandre Devecchio

     

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  • Le droit de grâce, ce droit royal...

     

    par Jean-Philippe Chauvin 

     

    arton8470-7b8cd.jpgLe président de la République a la fibre républicaine (ce n’est pas forcément un compliment dans ma bouche), dit-on avec une certaine raison, et la dernière preuve en date (mais non l’ultime) est cette mesure de « remise gracieuse » de la peine de Mme Sauvage, mesure « mi-chèvre mi-chou » qui n’est pas exactement une grâce en tant que telle, et qui, à bien y regarder, dépend encore de la bonne volonté d’une Justice qui en a souvent le nom sans en avoir le sens véritable. 

    Pourquoi cette réticence à user du droit de grâce de la part de M. Hollande ? C’est encore et toujours ce vieux réflexe républicain de dénoncer tout ce qui peut paraître trop royal, ce droit étant un héritage de la Monarchie d’Ancien régime qui faisait que le roi, porteur de la main de justice depuis le sacre de Reims, pouvait ainsi gracier qui lui plaisait de sauver de la pendaison ou de la roue, mais aussi du bannissement ou de la prison. Droit peu démocratique opposé à la décision d’un jury populaire d’assises, considérée, elle, comme éminemment démocratique, avec tous les avantages et travers de la Vox populi : « le peuple a tranché ! », pourrait-on dire au soir du jugement, et l’expérience prouve que celui-ci est souvent moins conciliant que les souverains, en particulier en France, au regard de l’histoire.

    Je ne me prononce pas, ici, sur le bien-fondé ou non de la condamnation de cette femme, et je reste persuadé que le droit de tuer ne peut être attribué aux particuliers, quelles que soient les (bonnes ou mauvaises) raisons de l’acte fatal. Au-delà de la légitime défense (qui n’est pas un droit en tant que tel, mais plutôt un devoir ultime, en des circonstances particulières, heureusement rares), je ne ferai qu’une exception, mais là encore avec beaucoup de précautions, c’est celle d’une résistance à une occupation étrangère ou à une tyrannie avérée (même s’il faut, là aussi, rester prudent sur l’usage de ces notions, trop souvent galvaudées…), et cela tout en insistant sur le fait que tout n’est pas acceptable, même pour les meilleures raisons du monde. Ainsi, je suis plus proche d’un Monsieur de Bonchamps qui, en pleine panique vendéenne, ordonne, contre l’avis de ses hommes affolés devant la violence républicaine, la grâce pour les prisonniers « bleus » que d’un Thiers qui, au moment de la Commune, fait abattre tous les insurgés, souvent eux-mêmes incendiaires de Paris et fusilleurs d’otages, sur la seule présence de quelques poussières sur les mains… Et je n’oublie pas que ce massacre parisien, de par sa violence même, sera le véritable argument des républicains pour assurer ensuite leur République, désormais présentée comme la seule capable de garantir l’ordre, ou plutôt sa sinistre caricature… 

    Oui, le droit de grâce est éminemment royal, ce que l’on traduit par « régalien » en République, comme un hommage du vice à la vertu. Oui, ce n’est pas un acte démocratique mais j’oserai dire qu’il est, pratiqué, un acte profondément salvateur (et pas seulement pour la personne graciée…) pour toute société digne de ce nom car il inscrit la possibilité du pardon (une logique toute catholique, diraient certains) dans l’exercice de l’Etat, contre la seule logique de la légalité, d’une Loi qui, parfois, s’autojustifie en oubliant les particularités des situations humaines. La grâce n’est pas l’oubli en tant que tel, elle est le dépassement du passé et la possibilité de rompre avec une fatalité parfois malheureuse, elle montre la capacité de l’homme-souverain à « en finir avec de vieilles querelles », et le roi Henri IV, qui pourtant avait eu à souffrir des pires insultes et menaces, en usa de la façon la plus royale qui soit envers ses ennemis, rappelant en cela qu’il était bien le roi, celui qui décide, non pour le seul instant présent, mais pour les suivants… 

    Que nos républicains sourcilleux n’aiment guère ce droit de grâce se comprend mieux au regard même des histoires comparées de la Monarchie et de la République, et de leur conception d’un Peuple qui serait « un et indivisible », seule source de la Loi et seul souverain reconnu. Mais que le président n’ose assumer ni la grâce monarchique ni le vote populaire des jurés, dans une sorte de compromis étrange et assez lâche en définitive, montre à l’envi que, décidément, la République n’a plus à sa tête que des marchands de sable et non des hommes d’Etat susceptible de comprendre la nature propre de l’Etat et de sa légitimité indispensable, parfois même au-delà de la seule légalité… 

    Dans cette question de la grâce du Chef de l’Etat (président ou roi, selon les époques), je n’oublie pas les victimes de ceux qui sont (ou peuvent être) graciées, et je sais qu’il est des souffrances qui ne s’apaisent jamais, des questions sans réponse, des doutes affreux… Je ne les néglige pas, et je ne les écarte pas d’un revers de main. Je sais que le droit de grâce du souverain, qui lui aussi est faillible (ne commet-il pas une injustice, si le gracié est coupable ?), peut choquer et que les débats seront encore nombreux sur cette question : mais j’aime aussi à me souvenir de ce qui est rappelé à chaque messe de l’Eglise catholique : « pardonnez-nous nos péchés comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés »… Si le Chef de l’Etat lui-même ne sait pas pardonner, même la pire des offenses faites à la vie, qui osera le faire ? 

    Dans ses hésitations de dimanche, M. Hollande était bien le symbole d’une République qui rechigne toujours à dépasser ses principes d’une légalité « une et indivisible » et à assumer l’autorité légitime qui n’hésite pas, parfois, à être « au-delà » de la seule démocratie d’opinion : c’est l’éternel conflit entre Créon le légaliste et Antigone, qui se réfère à des lois plus hautes et, somme toute, plus humanistes... Il ne me semble pas inutile de le rappeler. 

    Le blog de Jean-Philippe Chauvin

  • Religions & Cultures • Adonis apostrophe l'Islam

     

    Par Péroncel-Hugoz

    En lisant l'essai ultra-percutant du plus fameux poète arabophone vivant, paru à Paris fin 2015, Péroncel-Hugoz a hésité entre « coup de dent » et « coup de chapeau » …

     

    peroncel-hugoz 2.jpgÉtabli en France de longue date, le Syrien Ali-Ahmed Saïd-Esber, alias Adonis, patriarche des lettres arabes (il est né en 1930), observait depuis quelque temps un silence accablé devant les malheurs de son Levant originel, auquel il doit le pseudonyme d'Adonis, symbole de Nature et Beauté dans le monde païen d'avant l'Islam. 

    Or voilà que cette auguste plume arabe vient de publier, en France, en français, un provocant livre de dialogues avec la psychanalyste maghrébine Houria Abdelouahed, maître de conférences à l'Université Paris-Diderot et auteur de « Figures du féminin en Islam » (PUF, Paris, 2012). Et ces entretiens, novateurs mais d'une rare brutalité, et toujours très crus, jettent le lecteur entre admiration pour l'époustouflante énergie du vieux poète et indignation ou stupéfaction devant ce qui, en définitive, est surtout une démolition en règle de l'Islam d'hier et d'aujourd'hui. 

    Certains lecteurs se sont demandés si n'avait pas joué, dans les motivations de l'auteur, son appartenance native au noçaïrisme ou alaouitisme, filière religieuse issue du chiisme, à laquelle appartient également le clan Assad au pouvoir à Damas depuis le putsch de 1970. Cependant, Lalla Houria, qui joue un rôle très actif au fil des 200 pages de ce volume est, elle, née sunnite et a été éduquée au Maroc. 

    Finalement, j'ai opéré un choix, forcément arbitraire, des citations d'Adonis qui m'ont paru les plus significatives de cet ouvrage, laissant le lecteur, surtout s'il est musulman, juger par lui même. 

    *

    ARABES

    - « Il n'y a pas aujourd'hui de culture arabe »

    - « Il n'existe pas de problématiques arabes parce que l'Islam a dominé la vision du monde arabe»

     

    CHIISME

    - « Lorsque j'ai écrit « Le fixe et le mouvant » [en arabe, Beyrouth, 1973], les universitaires m'ont accusé d'être un chiite déformant l'Histoire. Ils se sont attaqués à mon lieu de naissance [Cassabine, près de Lattaquié, en pays chiite-alaouite] (…) Depuis 15 siècles, la guerre arabo-arabe n'a pas cessé »

     

    DAECH

    - « Daech répète seulement le côté obscur de l'Histoire »

    - « Daech ne répète pas Averroés, Ibn-Arabi ni l'audace spéculative des moutazilites [qui disaient que le Coran est créé et non pas incréé] »

    - « Je vois en Daech la fin de l'Islam »

     

    DEMOCRATIE

    - « La démocratie vient de la sphère occidentale. La liberté n'existe pas dans le Texte [coranique], ni dans le contexte islamique »

     

    FEMMES

    - « Les Fémens ? Je ne suis pas contre ! »

    - « Le premier ennemi de la femme ce n'est pas l'homme. C'est la religion. »

    - « Les Algériennes ont été victimes de la mentalité archaïque qui continue à régner »

    - « L’État wahabite a détruit la maison de Fatima, fille de Mahomet, en 2006, à La Mecque, comme vestige de la rébellion féminine »

    - La femme est réduite à un champ de labour pour l'homme »

     

    HOMMES

    - « L'homme de l'Islam est un libertin »

    - « L'Islam a déformé la sexualité »

    - « L'homme tunisien préfère épouser une Algérienne ou une autre Arabe, car la Tunisienne est trop exigeante [suite aux lois féministes de Bourguiba] »

     

    ISLAM

    - « La culture arabe est une décadence si on considère ce qui lui était antérieur »

    - « L'Islam, puisqu'il est né parfait, combat tout ce qui lui était antérieur et tout ce qui est venu après »

    - « L'Islam, dès le début, a adopté les violences des guerres et conquêtes »

    - « L'Islam a tué la poésie »

    - « Les grands poètes comme Abou-Nouwas, El Moutanabi et El Maâri étaient contre la religion officielle »

    - « La mystique a toujours été marginalisée au sein de la culture musulmane »

     

    OCCIDENT

    - « L'Occident a œuvré pour empêcher l'éclosion d'une véritable gauche arabe »

    - « L'Occident politique soutient les fondamentalistes »

    - « L'Occident traite les Arabes comme des poupées ou des marionnettes »

    - « L'Occident ne cherche plus la culture, la lumière, l'avenir, le progrès. Il cherche l'argent »

    - « L'Islam est dans son essence anti-Occident »

     

    PRINTEMPS ARABE de 2011

    - « Ce n'est pas une révolution mais une guerre, devenue elle-même une autre tyrannie. Une guerre confessionnelle, tribale et non civique, musulmane et non arabe »

    - « Le recours à la religion a transformé ce Printemps en enfer. C'est une régression totale » 

     

    EN GUISE DE CONCLUSION…

    La psychanalyste Houria Abdelouahed, partenaire d'Adonis pour construire l'essai « Violence et Islam », cite une réflexion peu connue du penseur français gaulliste André Malraux, qui fut ministre des Affaires culturelles au début de la Ve République : « C'est le grand phénomène de notre époque que la violence de la poussée islamique. Sous-estimée par la plupart de nos contemporains. Aujourd'hui, le monde occidental ne semble guère préparé à affronter le problème de l'Islam » (3 juin 1956). 

    Bibliographie

    - Adonis. « Violence et Islam », entretiens avec Houria Abdelouahed, Seuil, Paris, 2015

    - Adonis. « El Kitab », œuvres poétiques en français, Seuil, 3 volumes

    - Haouès Seniguer. « Petit précis d'islamisme : hommes, textes, idées », l'Harmattan, Paris, 2013

    Peroncel-Hugoz

    Repris du journal en ligne marocain le 360 du 15.01.2016

  • Notre vieil « ennemi héréditaire », l'Angleterre ...

     

    En deux mots.jpgSi l'on doutait que les journalistes - notamment de radio et de télévision - fussent attelés sans relâche et sans vergogne à une fonction de pure et classique propagande, l'affaire du Brexit, la façon très monolithique, très « formatée » dont elle n'a cessé d'être présentée, en donne une illustration tout à fait claire. Le bourrage de crâne parle chez nous un langage moins brutal, plus doucereux, que celui des régimes totalitaires d'autrefois ou même d'aujourd'hui, mais le résultat est le même. Sans qu'on soit sûr qu'il ne soit pis.

    Les médias n'ont pas désarmé avec le temps. France Inter annonçait encore samedi matin, sous une forme à peine hypothétique, la fonte à venir des effectifs de la City. Ces derniers n'ayant plus d'autre choix que de gagner Frankfort ou ... Paris.

    À ce que l'on dit dans les cercles éclairés, Paris, en effet, ambitionnerait même de ravir à la City sa place de premier rang. On ne demanderait pas mieux dans ces colonnes, si c'était sérieux. Il est permis, peut-être même normal, d'essayer. On ferait bien, toutefois, à notre avis, de ne pas trop y compter. La place et le potentiel de la City dans les opérations financières du monde lui est acquise depuis si longtemps, les liens qu'elle a tissés partout sont si étroits, les habitudes si ancrées, que le plus probable est qu'elle la conservera.

    On se plaît encore à Paris, Bruxelles, et ailleurs, à supputer que le Brexit pourrait bien ne pas aller à son terme, que les Anglais pourraient, en langage gaullien, « caler» , faire machine arrière ; que les négociations de sortie de l'U.E. pourraient ne pas aboutir avant longtemps ; que l'économie anglaise en supporterait de si funestes conséquences qu'elle s'en repentirait assez vite... Bref, toutes espèces de circonstances de nature catastrophique devant amener, en matière européenne, l'opinion britannique à s'inverser.

    Cela nous paraît méconnaître la situation, notamment économique, de l'Angleterre post-Brexit, en réalité nettement plus florissante que la nôtre en ce moment, tout autant que la psychologie du peuple anglais et de ses gouvernants.

    L'Histoire nous enseigne plutôt que les Anglais - peuple et Institutions - après avoir longtemps débattu, s'être affrontés âprement sur la ligne à suivre, une fois la décision prise, s'y tiennent jusqu'à avoir atteint leurs objectifs. De l'entêtement des Britanniques, l'Histoire nous donne maints exemples : la période napoléonienne qui ne s'achève qu'à Waterloo, comme la Seconde Guerre mondiale que l'Angleterre a menée seule, face aux puissances de l'Axe, après le défaut de la France en juin 40, et jusqu'à ce que Russes et Américains entrent dans le conflit. De Gaulle dira qu'elle fut l'âme de cette guerre, finalement gagnée, et c'est sans doute vrai.

    51dW11FzjZL._SX195_.jpgL'actuel ministre des Affaires Etrangères de Grande Bretagne, Boris Johnson, l'ancien maire de Londres, a écrit sur Winston Churchill un gros livre foisonnant, écrit à la va comme je te pousse, construit le plus anarchiquement du monde, mais bourré de faits, d'anecdotes, de mots d'esprit et surtout rempli d'admiration pour le courage, l'héroïsme même, le patriotisme et le profond loyalisme monarchique de son grand homme, dont il est patent qu'il est son modèle et son exemple. Son livre enseigne ces vertus.

    Typique du fonctionnement des institutions britanniques, auxquelles les Français entendent généralement fort peu de chose, une sorte de maturation en cours chez les tories et, probablement, chez l'intéressé lui-même, semble en ce moment devoir pousser Boris Johnson vers le 10 Downing street, où il pourrait bien un jour assez proche succéder â la pâle mais décidée Thérèsa May. Sans-doute est-elle aussi parfaite patriote anglaise que lui, mais sans son panache.

    Ainsi, les fonctionnaires de Bruxelles devraient avoir affaire dans les mois qui viennent â de redoutables et efficaces négociateurs, tandis que les acteurs réels de toutes les formes d'activité européenne, économique et autres, seront - sont déjà - pressés de mettre en place les accords - désormais bilatéraux - qui permettront de la poursuivre. Avec ou sans Brexit, l'Angleterre ne cesse pas d'exister, les réalités de transcender les bouts de papier et les idéologies.

    La France ne devra pas être en reste, n'aura pas avantage à s'enfermer dans son tête à tête de plus en plus inégal avec l'Allemagne. L'égoïsme anglais, quoique sous d'autres formes, n'est pas moindre que celui de notre grand voisin d'Outre-Rhin. Face à cet égoïsme, celui de notre vrai et vieil « ennemi héréditaire », nous aurons souvent à dresser le nôtre, à défendre nos intérêts bec et ongles. Mais, en la circonstance, nous devrions avoir, avec l'Angleterre - et en tirer quelque parti - ce point de convergence fondamental : son obstination à conserver sa souveraineté.  •

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    En deux mots, réflexion sur l'actualité