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Rechercher : Rémi Hugues. histoire

  • Ballon rouge, par Marie-Hélène Verdier.

    Marche pour le climat du 21 septembre 2019 à Paris

    Source : https://lincorrect.org/

    Alors que les élections municipales ont donné une large victoire aux Verts dans les grandes villes de France, Marie-Hélène Verdier revient sur les dérives de l'idéologie écologiste qui n'a rien à voir avec la saine écologie intégrale naguère prônée par le pape Benoît XVI.

    Durant le confinement, les seules enseignes lumineuses des rues étaient, avec celles des bureaux de tabac, les croix vertes des pharmacies. La vague des municipales aurait-elle un rapport avec cette couleur ambivalente, anxiogène et rassurante, qu’est le vert ? Depuis un demi-siècle le vert est monté en puissance et jamais l’expression « conversion écologique » n’a si bien convenu à la nouvelle religion à laquelle communie l’Europe entière.

    À la Start up nation en panne, les Français ont donc opposé, via une gauche plurielle, une Green attitude. Mais à quoi bon, un vote écolo ? Qui n’est pour l’air pur, les plages sans plastique ? Les enjeux environnementaux ne sont pas l’apanage du parti vert. Hulot a quitté le gouvernement. On dira qu’il n’y a pas eu de Greenwashing et que les leçons de ces élections sont l’abstention et le retour de la gauche plurielle. Certes, mais le parti vert est faiseur de rois. Et l’idéologie qui le sous-tend, une menace.

    Une idéologie s’inscrit dans le temps long et se nourrit de l’air du temps. Elle a une philosophie, ses slogans, ses emblèmes ses Useful idiots. Toute couleur, de son côté, a une valeur symbolique. Jusqu’au XXe siècle, le vert, couleur froide, des sorcières et des corps en décomposition, portait malheur. Fin du XIXème siècle, il entre dans les villes, via l’Angleterre, ses parcs et ses peintres. Au XXème siècle, avec la révolution écologique—squares, ceintures vertes, fontaines Wallace — il devient la grande couleur hygiénique et médicale, morale et politique. Avec Greenpeace, il entre au Parlement européen. Depuis 1970, on voit et vit la vie en vert : on mange de l’herbe, on boit du thé vert, on trie, on aime en vert. On privilégie des produits aux labels bio ou organic. Plantez un arbre sur votre balcon : la vue du vert fait baisser la pression artérielle.

    Jusqu’au XXe siècle, le vert, couleur froide, des sorcières et des corps en décomposition, portait malheur. Avec Greenpeace, il entre au Parlement européen.

     L’écologie politique est une nébuleuse philosophique ( « le passage de l’histoire subie à l’histoire conçue ») , sentimentale et romantique (l’amour de la nature et des animaux), progressiste, qui recycle toutes les idées : la biodiversité, la défense des minorités, les phobies, la pensée décoloniale, l’immigration, et soutient une forme d’islamisme politique au nom du vivre ensemble. Dans les faits, c’est un parti mondialiste reposant sur « un capitalisme vert » qui inaugure un cycle nouveau de croissance, avec le développement renouvelable.

    Mais c’est dans le domaine sociétal, moral, religieux qu’on voit le mieux l’intégrisme vert de la deep ecology qui lui est congénital. La deep écology fait table rase de la nature humaine : au nom de l’égalité des hommes et des femmes, des espèces, des règnes, le droit des animaux est mis à égalité avec « les droits humains » ; l’avortement tend à devenir un droit fondamental, et la migration, un droit. Elle prône le déracinement, la libre circulation de tout sous les vents éoliens du désir et du marché. Les visions prophétiques de Jacques Attali sont révélatrices de cette philosophie erratique.

    Cette idéologie a une complicité avérée avec le libéralisme le plus brutal dont on voit l’application avec le marché de la PMA-GPA.

    En réalité, cette idéologie a une complicité avérée avec le libéralisme le plus brutal dont on voit l’application avec le marché de la PMA-GPA. La propagande de cette idéologie se fait via les lobbys gays qui tissent, sur l’Europe entière, une toile impressionnante dont les écolos bobos sont les Useful idiots en propageant, dans les esprits, l’idée que le don de sperme c’est comme le don du sang : c’est bon pour la planète. On l’aura compris : le transhumanisme puise une source vive dans  la deep ecology.

    Benoît XVI en employant les mots « écologie intégrale », et l’expression « décalogue de l’environnement » ne se doutait pas de l’exploitation qu’on en ferait. Par les termes « écologie intégrale », il croyait renforcer l’alliance entre l’être humain et l’environnement qui doit être le miroir de l’amour créateur. Sauf que Dieu n’est pas Baruch et la Nature n’est pas Dieu. De même, la protection « du plus faible » inclut un droit à la migration dénué de sens. Le Pape Benoît avait pointé les dérives de l’idéologie écologiste qui place la nature au-dessus de l’homme. Sauf que, tombée dans le langage commun, l’expression « écologie intégrale de l’homme » en arrive à faire oublier l’acte créateur de Dieu qui, dans la Genèse, sépare les éléments par sa Parole ordonnatrice et féconde qui se fait Logos puis Verbe incarné dans le Christ, lequel récapitule tout en une Création nouvelle. Au lieu de cela, la Révélation fait place à une religiosité de l’amour coupée de Dieu : le vivre ensemble. On revient au panthéisme. Au nom de l’amour pour tous, la PMA entre dans les esprits.

    Le Pape Benoît avait pointé les dérives de l’idéologie écologiste qui place la nature au-dessus de l’homme.

    Lors de la journée de l’écologie, en 2017, la façade de Saint Pierre a été illuminée non pas avec des figures de l’histoire Sainte mais par des images de zoo, de singes, de perroquets, de primates : l’illumination de cette chaîne du vivant fut financée par les banques américaines dont la Banque Mondiale. Notre Mère la Terre est mise à l’honneur par tout un courant catholique actuel.  La Pacha Mamma est entrée dans les jardins du Vatican avant de finir dans le Tibre d’où elle fut repêchée. Tout cela entre en résonance avec un air du temps écolo. Derrière sainte Greta, la planète s’agenouille. L’Assemblée l’a écoutée religieusement, le 23 janvier 2019. La CEDH remplace le Tribunal de la Grande Inquisition en condamnant les pays (encore aujourd’hui, la France)  qui ne respectent pas « le droit » des peuples à migrer.

    Tout le monde connaît Babar, ce personnage de BD né entre les deux guerres. Babar a un costume couleur de printemps, une chemise blanche et un nœud papillon. Il est honnête et placide. Un dessin de Jean de Brunhoff montre sa troupe joyeuse dont un éléphanteau porte une pancarte « Vive le bonheur ». Mais le bonheur —cette idée neuve en Europe au XVIIIème siècle— s’est dégradée et recyclée dans les désirs les plus marchands. Elle drague les bobos des villes, les paumés et les nantis. La vérité est que le parti écologiste est le produit d’une élite mondialisée,  matérialiste, de cadres sans frontières ni états d’âme.

    Ce n’est pas un hasard si les tapis de jeu et de foot sont verts : le vert est la couleur du destin. C’est surtout une couleur chimiquement instable sous des apparences de printemps du monde. Au musée d’Orsay, un beau tableau de Félix Vallotton, le Ballon, montre un enfant courant sur une étendue d’un vert sombre, après un ballon rouge, dans une atmosphère menaçante.

  • Série : Le legs d’Action française ; rubrique 7 : Boutang et Debray renouent avec la séduction intellectuelle du maurras

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

    Voici la septième rubrique de Gérard Leclerc sur «  Le legs de l’Action française  ». On y découvre ce que les adversaires de l’Action française cachent fort bien. C’est-à-dire que l’A.F. poursuit son combat royaliste depuis la mort de Maurras, au travers de ses «  héritiers  » dont les deux principaux sont les catholiques Pierre Boutang et Pierre Debray. Si proches, si ressemblants et pourtant si différents. Celui qui privilégiait la métaphysique et l’autre la méthode expérimentale.

    A la nouvelle génération du XXI° siècle il appartient d’exploiter au mieux leur puissance et leur complémentarité intellectuelles. (ndlr)

    gerard leclerc.jpgJe vais faire maintenant un bond en avant, et parler de la seconde période de l’histoire de l’Action française, déjà plus longue que la première : toute celle qui nous sépare de la mort de Charles Maurras. Son histoire reste encore à écrire. Là encore, renonçant à tout raconter, j’ai choisi de m’attarder sur deux figures emblématiques, celles de Pierre Debray et de Pierre Boutang.

    Pourquoi ces deux personnages ? C’est d’une certaine façon très injuste, car c’est laisser dans l’ombre des responsables qui ont joué un rôle majeur pour maintenir et animer le mouvement, et transmettre la pensée maurrassienne. Je pense à des gens comme Pierre Pujo et, avant lui, Georges Calzant. Et aussi Pierre Juhel, qui a joué un rôle considérable dans l’organisation du mouvement, sa maintenance et ses progrès. J’ai travaillé avec lui pendant plusieurs années, nous avons fait beaucoup de choses, et des choses formidables, notamment au moment de mai 68. C’est quelqu’un à qui je suis extrêmement redevable.

    Alors pourquoi privilégier Debray et Boutang  ? Pour cette raison, qui est déterminante  : ce sont eux qui, après la Libération, ont renoué avec la séduction intellectuelle de l’Action française. De l’un et l’autre, je dirai qu’ils sont des novateurs. A partir de la tradition maurrassienne, et dans la fidélité à celle-ci, ils ont fait acte de création. S’agissant de Pierre Debray, c’est en renouvelant son regard pour tenir compte des évolutions historiques et produire des analyses adaptées aux réalités contemporaines.

    Le cas de Pierre Boutang est différent. Il a bâti une œuvre considérable, un monument littéraire et philosophique qui contribue à l’enrichissement du patrimoine intellectuel français au XXe siècle. Mais qui contribue aussi, et c’est cela qui m’intéresse plus spécialement ici, à l’enrichissement du legs d’Action française. Son histoire personnelle, qui n’est pas banale, doit d’ailleurs être étudiée, car elle est porteuse de leçons. Par exemple, pourquoi Boutang, pendant la guerre, en 1941, choisit-il de quitter la France et d’aller enseigner au lycée de Rabat ? C’est sans doute qu’il a une certaine vision de la situation internationale et ne veut pas courir le risque de se trouver coincé en pays occupé. Il considère que c’est en Afrique du nord, non occupée, qu’une occasion historique peut surgir.

    Il ne rejoindra pas de Gaulle, ce qui lui coûtera très cher, mais choisira de suivre le général Giraud  : il sera chef de cabinet de son ministre de l’Intérieur. C’est quelqu’un qui a une vision très particulière. Quand il va en métropole, il va voir Maurras, à qui il reste lié d’une façon très privilégiée. Maurras, qui voit en lui un esprit de premier ordre, a dit un jour : “Ce jeune homme est trop intelligent pour moi !” Mais c’était un acte d’humilité…

    Boutang est par ailleurs un philosophe auteur d’une œuvre philosophique capitale. Vous connaissez, sans doute, les titres principaux  : Ontologie du secret, Apocalypse du désir, Reprendre le pouvoir et plusieurs autres livres quasiment aussi importants, comme La Fontaine politique que Fabrice Luchini, je pense, a dû lire… Je vous signale d’ailleurs un formidable article (facile à trouver sur Internet) sur la réédition de ce livre par Les Provinciales. Il est dû à Bérénice Levet, qui fait partie de cette nouvelle génération intellectuelle apparue dans le sillage de la Manif pour tous, qui est en train de renverser la donne sur le terrain intellectuel. Avec Eugénie Bastié et Charlotte d’Ornellas, les femmes sont aux avant-gardes pour porter un renouveau de la pensée avec une force qui me ravit  !

    Pierre Boutang a fait œuvre de métaphysicien. Vous vous demanderez peut-être  : qu’est-ce que la métaphysique peut bien venir faire en politique  ? Eh bien, voilà. L’Action française a été bâtie, par des gens aux convictions philosophiques et religieuses diverses, sur un compromis politique excluant d’aborder les questions religieuses. Les choses vont cependant se moduler, et je peux en dire un mot : dans son Maurras, Pierre Boutang raconte qu’à la fin de la Grande Guerre, en 1919, Maurras a envisagé de reprendre la Revue grise qui avait été à l’origine de l’Action française, parce qu’il pensait que le quotidien ne suffisait plus et qu’il fallait prolonger le travail intellectuel dans une revue de fond. Mais il en a très vite abandonné l’idée, au profit d’un autre projet de revue, qui donnait une place importante à la pensée catholique  : la Revue universelle, avec comme cofondateur une éminente personnalité catholique, Jacques Maritain, et dirigée par Jacques Bainville, assisté d’un autre catholique, Henri Massis. Bainville l’agnostique assurait en quelque sorte la continuité avec la Revue grise, mais à côté de Maritain et Massis, il y avait d’autres intellectuels catholiques, tels Jean Guitton.

    Cela manifestait clairement une inflexion intellectuelle de Maurras. On était passé d’une revue – disons le franchement – “positiviste”, à une revue très ouverte aux questions religieuses. Et c’est dans la Revue universelle que Maritain a publié les chapitres de ses premiers ouvrages, notamment Trois réformateurs, un livre essentiel contre Luther, Descartes et Rousseau. Pendant quelques années Maritain a même pu passer pour le philosophe de l’Action française  ! Cela n’a pas duré, puisque, sur injonction du pape Pie XI, Maritain est devenu l’adversaire premier de l’Action française et a été chargé d’alimenter le débat philosophico-théologique contre le maurrassisme.

    Gérard Leclerc ( à suivre)

    Retrouvez les rubriques de l’été militant 2020, du site de l’Action française  :

    Par Christian Franchet d’Esperey

    1 – Est-il opportun de s’accrocher à un homme aussi décrié ?

    2 – Les positions les plus contestées de Maurras ne doivent plus faire écran à ses découvertes majeures

    3 – maurrassisme intra-muros et maurrassisme hors les murs

    4 – Une demarche d’aggiornamento cest-a-dire de mise au jour

    Par Philippe Lallement

    Le maurrassisme est-il devenu un simple objet d etude historique

    Par Gérard Leclerc

    1. Le legs d’Action française
    2. Maurras humaniste et poete
    3. L homme de la cite le republicain
    4. Un mouvement dote dune singuliere force d attraction
    5. Lla crise de 1926 un nouveau Port-royal
  • Le legs d'Action française (VII/X) : Boutang et Debray renouent avec la séduction intellectuelle du maurrassisme

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    (Conférence de Gérard Leclerc, donnée au Camp Maxime Réal Del Sarte - 2019)

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    Je vais faire maintenant un bond en avant, et parler de la seconde période de l’histoire de l’Action française, déjà plus longue que la première : toute celle qui nous sépare de la mort de Charles Maurras. Son histoire reste encore à écrire. Là encore, renonçant à tout raconter, j’ai choisi de m’attarder sur deux figures emblématiques, celles de Pierre Debray et de Pierre Boutang.

    Pourquoi ces deux personnages ? C’est d’une certaine façon très injuste, car c’est laisser dans l’ombre des responsables qui ont joué un rôle majeur pour maintenir et animer le mouvement, et transmettre la pensée maurrassienne. Je pense à des gens comme Pierre Pujo et, avant lui, Georges Calzant. Et aussi Pierre Juhel, qui a joué un rôle considérable dans l’organisation du mouvement, sa maintenance et ses progrès. J’ai travaillé avec lui pendant plusieurs années, nous avons fait beaucoup de choses, et des choses formidables, notamment au moment de mai 68. C’est quelqu’un à qui je suis extrêmement redevable.

    Alors pourquoi privilégier Debray et Boutang ? Pour cette raison, qui est déterminante : ce sont eux qui, après la Libération, ont renoué avec la séduction intellectuelle de l’Action française. De l’un et l’autre, je dirai qu’ils sont des novateurs. A partir de la tradition maurrassienne, et dans la fidélité à celle-ci, ils ont fait acte de création. S’agissant de Pierre Debray, c’est en renouvelant son regard pour tenir compte des évolutions historiques et produire des analyses adaptées aux réalités contemporaines.

    Le cas de Pierre Boutang est différent. Il a bâti une œuvre considérable, un monument littéraire et philosophique qui contribue à l’enrichissement du patrimoine intellectuel français au XXe siècle. Mais qui contribue aussi, et c’est cela qui m’intéresse plus spécialement ici, à l’enrichissement du legs d’Action française. Son histoire personnelle, qui n’est pas banale, doit d’ailleurs être étudiée, car elle est porteuse de leçons. Par exemple, pourquoi Boutang, pendant la guerre, en 1941, choisit-il de quitter la France et d’aller enseigner au lycée de Rabat ? C’est sans doute qu’il a une certaine vision de la situation internationale et ne veut pas courir le risque de se trouver coincé en pays occupé. Il considère que c’est en Afrique du nord, non occupée, qu’une occasion historique peut surgir.

    Il ne rejoindra pas de Gaulle, ce qui lui coûtera très cher, mais choisira de suivre le général Giraud : il sera chef de cabinet de son ministre de l’Intérieur. C’est quelqu’un qui a une vision très particulière. Quand il va en métropole, il va voir Maurras, à qui il reste lié d’une façon très privilégiée. Maurras, qui voit en lui un esprit de premier ordre, a dit un jour : « Ce jeune homme est trop intelligent pour moi ! » Mais c’était un acte d’humilité…

    Boutang est par ailleurs un philosophe auteur d’une œuvre philosophique capitale. Vous connaissez, sans doute, les titres principaux : Ontologie du secret, Apocalypse du désirReprendre le pouvoir et plusieurs autres livres quasiment aussi importants, comme La Fontaine politique que Fabrice Luchini, je pense, a dû lire… Je vous signale d’ailleurs un formidable article (facile à trouver sur Internet) sur la réédition de ce livre par Les Provinciales. Il est dû à Bérénice Levet, qui fait partie de cette nouvelle génération intellectuelle apparue dans le sillage de la Manif pour tous, qui est en train de renverser la donne sur le terrain intellectuel. Avec Eugénie Bastié et Charlotte d’Ornellas, les femmes sont aux avant-gardes pour porter un renouveau de la pensée avec une force qui me ravit !

    Pierre Boutang a fait œuvre de métaphysicien. Vous vous demanderez peut-être : qu’est-ce que la métaphysique peut bien venir faire en politique ? Eh bien, voilà. L’Action française a été bâtie, par des gens aux convictions philosophiques et religieuses diverses, sur un compromis politique excluant d’aborder les questions religieuses. Les choses vont cependant se moduler, et je peux en dire un mot : dans son Maurras, Pierre Boutang raconte qu’à la fin de la Grande Guerre, en 1919, Maurras a envisagé de reprendre la Revue grise qui avait été à l’origine de l’Action française, parce qu’il pensait que le quotidien ne suffisait plus et qu’il fallait prolonger le travail intellectuel dans une revue de fond. Mais il en a très vite abandonné l’idée, au profit d’un autre projet de revue, qui donnait une place importante à la pensée catholique : la Revue universelle, avec comme cofondateur une éminente personnalité catholique, Jacques Maritain, et dirigée par Jacques Bainville, assisté d’un autre catholique, Henri Massis. Bainville l’agnostique assurait en quelque sorte la continuité avec la Revue grise, mais à côté de Maritain et Massis, il y avait d’autres intellectuels catholiques, tels Jean Guitton.

    Cela manifestait clairement une inflexion intellectuelle de Maurras. On était passé d’une revue – disons le franchement – « positiviste », à une revue très ouverte aux questions religieuses. Et c’est dans la Revue universelle que Maritain a publié les chapitres de ses premiers ouvrages, notamment Trois réformateurs, un livre essentiel contre Luther, Descartes et Rousseau. Pendant quelques années Maritain a même pu passer pour le philosophe de l’Action française ! Cela n’a pas duré, puisque, sur injonction du pape Pie XI, Maritain est devenu l’adversaire premier de l’Action française et a été chargé d’alimenter le débat philosophico-théologique contre le maurrassisme.

  • Le legs d'Action française (V/X) : La crise de 1926, un « nouveau Port Royal » ?

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    (Conférence de Gérard Leclerc, donnée au Camp Maxime Réal Del Sarte - 2019)

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    Se place maintenant ici ce que fut l’histoire de l’Action française entre les deux guerres mondiales. Là encore, faute de temps, je vais me limiter à quelques remarques critiques mais très significatives de cette période.

    L’Action française a réussi dans les deux domaines dont je viens de parler, la lucidité politique et la séduction culturelle. Elle n’a malheureusement pas encore atteint son objectif final essentiel, le rétablissement de la monarchie. Par ailleurs, elle a été entraînée dans un certain nombre de crises graves qui ont affecté son essor. La principale a été celle de 1926 – 1927, la condamnation religieuse du mouvement par le pape Pie XI, dont je veux maintenant dire un mot.

    J’ai choisi de rebondir sur une formule de Philippe Ariès, grand historien et ami proche de Pierre Boutang. Il parlait de l’Action française condamnée par le pape comme d’un autre Port-Royal. Vous avez peut-être en mémoire la formidable crise politico-religieuse de Port-Royal, qui a terriblement marqué l’histoire religieuse, politique et littéraire de la France au XVIIe siècle, avec Pascal, Racine, et bien d’autres. Philippe Ariès rapprochait donc ces deux crises. Vous avez des milliers de militants d’Action française, par ailleurs excellents catholiques, qui ont été à ce moment-là durement brimés, et même moralement martyrisés, interdits de sacrements, ne pouvant pas se confesser ni recevoir l’Eucharistie, ne pouvant se marier qu’en catimini, comme Maurice Pujo, paroissien de l’église Saint-Augustin, qui dut se marier à la sacristie ! Il a fallu attendre treize ans pour que le pape Pie XII, en 1939, lève les sanctions.

    Je ne reprendrai pas le procès – pourtant, Dieu sait s’il m’a occupé dans mon existence, avec toutes ses pièces, les ouvrages de Maritain, etc. – pour ne me centrer que sur la remarque de Philippe Ariès. Oui, ce fut un nouveau Port Royal, en ce sens que l’Action française, mouvement fondé loin de toute appartenance religieuse, dirigée par un maître agnostique rejoint par des agnostiques, des athées et des positivistes – comme l’étaient presque tous les rédacteurs de la Revue grise des origines –, va tenir une place inattendue dans l’histoire religieuse de la France du XXe siècle : elle va se trouver au cœur même de la grande querelle théologique du siècle. Si on l’attaque, ce n’est pas pour son positivisme très relatif ou son prétendu paganisme, mais parce qu’elle a pris position dans cette vaste querelle dont nous vivons encore les suites. Une querelle directement en rapport avec le Ralliement dont je parlais tout à l’heure.

    Maurras, un curieux agnostique, tout de même, qui, de son adolescence à sa mort, a porté sur lui le scapulaire de N.D. du Mont-Carmel ! De cet agnosticisme, j’ai une interprétation (qui m’est tout à fait personnelle) : je pense que, pour lui, c’est une arme lui permettant de parler en toute indépendance des questions religieuses, sans engager le religieux lui-même. Laissant intégralement à l’Église, au clergé et aux laïcs catholiques le domaine théologique, il traite des questions religieuses, certes, mais uniquement en ce qui concerne leurs conséquences dans le domaine de la civilisation, de la culture et, bien sûr, de la politique.

    Mais, ce faisant, Maurras n’est pas extérieur à la question religieuse. Il est même, sur un point, un des rares esprits rigoureusement orthodoxes : sa doctrine est conforme à celle du concile Vatican I, qui a officiellement affirmé qu’il fallait tenir pour une cause de la crédibilité de l’Église les bienfaits qu’elle a rendus à l’humanité dans l’ordre civilisationnel et temporel. Maurras défend en effet l’idée d’un catholicisme qui n’est pas seulement à l’origine de la civilisation et de la culture françaises, mais à qui l’humanité entière est redevable d’immenses bienfaits. Dans ce qu’il appelle l’Église de l’ordre, il loue moins l’Église qui a façonné la France que l’Église qui a apporté à l’homme sa définition suprême.

    L’agnostique Maurras a donc trouvé, d’une manière surprenante, il est vrai, une place bien à lui au cœur même du débat religieux. Je n’irai pas plus loin là-dessus aujourd’hui. Mais si j’insiste sur ce rapprochement avec Port-Royal, ce n’est pas, bien évidemment, pour faire le moindre rapprochement entre la doctrine janséniste et le nationalisme intégral qui n’ont rien de commun. C’est uniquement pour souligner que l’importance prise par l’Action française dépasse de loin le plan étroitement politique auquel on tend souvent à la cantonner. Loin d’être un mouvement politique parmi d’autres, l’Action française se situe au cœur même de la défense de la civilisation. Dans la crise majeure que nous vivons, dans les grands débats actuels, elle a quelque chose d’essentiel à dire, et elle a une expertise qui lui est propre.

  • Le legs d'Action française (VIII/X) : Boutang : la « légitimité » revisitée et l’antisémitisme abandonné

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    (Conférence de Gérard Leclerc, donnée au Camp Maxime Réal Del Sarte - 2019)

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    Même s’il y a lieu de mettre des nuances, Pierre Boutang, après la Libération, va apporter quelque chose de nouveau. Tout en demeurant responsable politique, il va être un philosophe à plein temps, un philosophe de métier, au sens fort du terme, même si son œuvre ne s’est pas élaborée dans un environnement militant mais dans un cadre enseignant (en lycée ou à la Sorbonne) et dans son bureau de Saint-Germain-en-Laye, que certains d’entre nous connaissent bien).

    L’œuvre philosophique de Boutang n’est cependant pas sans lien avec son combat politique. En quel sens ? C’est l’évolution des questions de société qui nous rendent à même de le comprendre. Le débat politique a acquis, à notre époque, une dimension philosophique et anthropologique qu’il n’avait pas auparavant. Pensez au « mariage pour tous », pensez à la PMA, à la GPA, pensez à la fin de vie, au transhumanisme et à toutes ces lois nouvelles qui ont une portée anthropologique considérable. Le politique se voit désormais défié sur le terrain philosophique et anthropologique, il nous faut recourir à des œuvres de maîtres capables de nous éclairer dans ce domaine.

    J’ajoute que Boutang n’est quand même pas seulement un philosophe et un métaphysicien, c’est aussi un philosophe politique qui renouvelle et, d’une certaine façon, reproblématise la pensée politique d’Action française. Notamment dans un de ses ouvrages, le premier que Maurras avait lu d’ailleurs, La politique comme souci, et surtout dans Reprendre le pouvoir, un ouvrage absolument fondamental. Boutang y repense la question de la légitimité, en associant l’autorité et le consentement – aspect que Maurras avait peu traité de son côté. Ce livre nous donne une doctrine de la légitimité qui fait sa place au consentement populaire, mais dans une perspective très éloignée du libéralisme politique.

    Les choses doivent cependant être dans l’ordre : il n’y a pas de consentement s’il n’y a pas d’autorité. L’autorité est donc première. Ce qui a des conséquences pratiques, qui donnèrent lieu à de rudes débats et même à des querelles à l’intérieur de l’Action française. Par exemple, je parlais tout à l’heure du général de Gaulle. C’est quand même un énorme problème pour l’Action française, le général de Gaulle ! Pourquoi ? Parce que l’on sait aujourd’hui, de mieux en mieux, et Eric Zemmour ne se fait pas faute de le dire et le répéter, que de Gaulle a, de toute évidence, dès l’adolescence, été marqué par la pensée maurrassiennes. En atteste sa sœur aînée Marie-Agnès qui en faisait confidence à Paul Reynaud et quelques autres, dans leur prison au Tyrol en 1945 : au moment de la condamnation de l’Action française par Pie XI, en famille, le jeune Charles, les larmes aux yeux, défendait Maurras ! J’ai aussi reçu le témoignage du comte de Paris – le grand-père de l’actuel comte de Paris – qui connaissait bien de Gaulle et avait multiplié les rencontres avec lui : il le définissait comme un officier maurrassien tout à fait classique… Or il se trouve que de Gaulle a quand même très sérieusement envisagé un projet de rétablissement de la monarchie dans le cadre des institutions de la Vème République. J’en veux pour preuve son dialogue avec le comte de Paris et la correspondance échangée entre les deux hommes. Avec l’extraordinaire lettre d’adieu du général dont vous connaissez sans doute la phrase finale : « Monseigneur, en ce qui me concerne, le terme est venu, vous seul restez permanent et légitime, comme doit l’être ce que vous représentez de suprême dans l’histoire. » C’était son testament politique. En quelque sorte, il transmettait au détenteur de la légitimité historique celle qu’il estimait tenir de son appel du 18 juin et du combat de la France libre. Cela posait quand même un certain nombre de problèmes à l’Action française qui s’était violemment opposée au gaullisme pendant la guerre et à la Libération, puis au moment du drame algérien. Les années passant, et de nouvelles menaces pesant sur le pays, quelle attitude le mouvement pouvait-il prendre à l’égard de de Gaulle ? Pierre Boutang, qui avait fondé son propre journal, La Nation française, en a choisi une très différente et même parfois à l’opposé de celle d’Aspects de la France.

    Autre caractéristique de Boutang, son réexamen de la question juive. L’antisémitisme, qui a marqué l’histoire de l’Action française à partir de l’Affaire Dreyfus, sera encore présent pendant la période de la guerre, ce qui aura des conséquences tragiques sur l’image de Maurras. Mais Boutang, sans rien altérer de l’essentiel des acquis maurrassiens, va en revanche complètement remettre en cause cet antisémitisme. Il va le faire à partir des sources religieuses du judaïsme, et aussi de la pensée juive la plus contemporaine. Il a été très marqué par le grand penseur juif contemporain Martin Buber. A ses élèves, il fait découvrir son personnalisme et son grand livre Gog et Magog (qui évoque les controverses au sein du hassidisme, le mysticisme juif, en Pologne). Boutang a anticipé Vatican II en prônant une sorte de réconciliation judéo-chrétienne, non par opportunité politique mais pour des raisons de fond, à partir d’une connaissance profonde de la pensée juive. Quand Alain Peyrefitte, alors ministre de l’Education nationale, le réintègre dans l’Université en 1967, les petits malins de l’administration de la rue de Grenelle imaginent de le nommer au lycée Turgot, le lycée le plus juif de Paris, dans le quartier du Marais, sûrs qu’il ne tiendrait pas quinze jours avant de se faire expulser. Surprise, il consacre sa première heure de cours à l’analyse d’un grand texte biblique, le Livre de Jonas ! Les élèves sont sortis en se demandant : « Mais qui est ce type ? » Et cette classe composée à 90 % de jeunes juifs va avoir une sorte de coup de foudre pour cet extraordinaire professeur. Boutang m’a expliqué plus tard : « Vous comprenez, ils m’avaient mis dans une classe de jeunes juifs complètement déjudaïsés ! Mon travail a consisté à les re-judaïser, en leur redonnant une véritable culture biblique qu’ils n’avaient pas. » C’est de manière apparemment paradoxale que Boutang a constitué une nouvelle étape dans l’histoire de l’Action française.

  • L'hommage de Frédéric de Natal à Jean Raspail : «La révolution !? A mes yeux, elle a été un désastre !».

    Source : http://www.monarchiesetdynastiesdumonde.com/

    7.jpg«La révolution !? A mes yeux, elle a été un désastre !». A 93 ans, l’écrivain  Jean Raspail n’a rien perdu de sa verve. L’auteur de « Moi, Antoine de Tounens, roi de Patagonie » ou de «Sire» assume son monarchisme décomplexé. Dans un récent entretien accordé au magazine Valeurs actuelles, l’ancien président du Comité national pour la commémoration de la mort de Louis XVI nous explique pourquoi il est royaliste.

    «Une décision très logique ». Il ne vient pas d’un milieu qui se prête à la nostalgie monarchique et pourtant, Jean Raspail est venu au royalisme, fruit de ses multiples réflexions. Il a ses détracteurs, ses admirateurs, mais lui n’en a cure. Comme cet avoué de Périgueux dont il va retracer la vie, éphémère roi de Patagonie, Jean Raspail respire la liberté de penser.

    « Le roi est la manière la plus simple de gouverner un pays. Car un roi n’est pas seul, il est issu d’ancêtre présents en France depuis des milliers d’années et est façonné par cette histoire familiale intimement liée à son pays », citant la « fameuse phrase qu’adressaient les royalistes au comte de Paris, héritier des quarante rois qui en mille ans ont fait la France ».

    L’homme oppose naturellement monarchie et république. « Le roi est l’incarnation de la nation, ce que n’arrive pas à faire un président de la république élu pour un court terme, à la courte vision et aux intérêts égoïstes ». L’oeil percé de mysticisme, il rappelle l’importance du sacre et de ce lien sacré avec Dieu, la religion qui a été l’appui sans faille des monarques et qui a participé à la construction de la France. Le pouvoir royal (…) acquiert toute sa grandeur et sa plénitude » à travers l’onction donnée au roi, à Reims. La révolution française a brisé ce lien entre le peuple et le roi. « En rejetant son Dieu et son roi au profit d’un individualisme dont nous payons le prix désormais », la république, la révolution  a créé « au peuple le sentiment qu’il était républicain » déplore t-il. « La façon dont elle s’est déroulée est d’ailleurs d’une sanglante vulgarité avec la tuerie à la Bastille, les arrestations des nobles, les assassinats et déportations des prêtres, les exterminations en Vendée » rappelle-t-il en guise de mémoire aux générations futures.

    8.jpgD’ailleurs, lui qui a été à la tête du Comité national pour la commémoration de la mort de Louis XVI, un événement qui avait rassemblé en janvier 1993, plus de 5000 personnes et personalités sur la place de la Concorde, entend remettre Louis XVI à la place d’honneur qu’il mérite. Quand même, il a dû batailler pour imposer son comité dans une république peu enclin à fêter ce parricide dont elle est l’héritière. Faisant fi des caricatures en vigueur et toujours distillée contre le « Capet », il rappelle-à juste titre- que le roi était « extrêmement populaire au moment du déclenchement de la Révolution ». « C’était un personnage empli de bonté » affirme-t-il, un brin compatissant. Et de nous raconter une de ces anecdotes amusante dont il a le secret. Convoqué à la veille du rassemblement, le préfet avait interdit la manifestation, craignant un débordement. Et de demander au comité de changer la date du rassemblement. «Louis XVI ayant été assassiné le 21, c’était évidemment impossible », encore moins le lieu. Invité sur les ondes de RTL, quelque heures avant, Jean Raspail décrit la situation incongrue qu’il vit, à la Radio. Avant subitement d’apprendre qu’elle peut avoir lieu. Le responsable de ce changement inattendu ? François Mitterrand, alors Président de la république, qui avait entendu la conversation, était intervenu immédiatement. « Le seul de nos présidents à avoir eu le sens de l’histoire de France » ajoute t-il en guise d’ultime hommage à un homme qui a marqué de son sceau les années 1980 et qui fut proche du comte de Paris. Il est vrai qu’à cette époque, le président de la République recevait régulièrement le prétendant au trône et qu’il ouvrait son bureau à Bertrand Renouvin, dirigeant de la Nouvelle action royaliste.

    9.jpgQue pense-t-il de la querelle dynastique est des chances de restauration de la monarchie ?  Un système qui n’est pas exsangue de critiques néanmoins, citant certaines erreurs commises par des rois ou des régentes. « Un roi ne reviendra que si l’un des deux prétendants actuels accepte de faire hommage à l’autre » déclare ce traditionaliste convaincu et anti Anne Hidalgo au journaliste qui l’interroge.  Avant de surenchérir : « J’ai été très impressionné par Alphonse de Bourbon, décédé en 1989, et père de l’actuel prétendant Louis. Lorsqu’il est venu se présenter au « mouvement royaliste », on a vu arriver un personnage réunissant toutes les qualités (…). Moi qui croyais la partie perdue, j’ai rejoint le royalisme grâce à lui. Il est malheureusement mort dans un accident de ski. Et son fils n’a pas du tout la même prestance. ». Et si il se trompe dans l’interview en affirmant que le prince Jean d’Orléans n’aurait pas participé à « La Manif’ pour tous » (l’actuel comte de Paris a bien défilé en 2013, photos à l’appui-ndlr), il regrette que celui-ci « ne se soit pas levé » pour prendre la tête du mouvement. Pour l’écrivain, Jean aurait dû s’imposer naturellement : «Je suis le roi et ne je peux admettre dans mon pays des choses comme ça ! » aurait dû dire le prétendant, selon Jean Raspail. « Imaginez les conséquences d’un tel communiqué ! » se met à rêver le royaliste. « Je regrette que le courant n’ait pas, ou plus, d’idées » conclu-t-il amèrement, dans une forme de nostalgie qui le mène vers le dernier chapitre d’une vie bien remplie et un nom qui restera à jamais dans les annales de l’histoire et de la littérature.

    Copyright@Frederic de Natal

    article paru le 14 avril 2019 . Source @Valeurs Actuelles.

  • Sommes-nous à la veille d’une révolution ?, par Christian Vanneste.

    Selon les gauchistes, la révolution doit faire tomber le régime, la société même, comme des fruits mûrs. Rares sont cependant les fruits de cette espèce qui tombent sans qu’on les pousse un peu tant l’inertie du conformisme l’emporte sur l’ardeur du changement. Cette résistance à la chute est due à ce que Richard Nixon avait appelé la « Majorité silencieuse ». Cette formule est très significative. Elle implique que dans une société donnée, ce sont les minorités qui parlent et qui agissent. Une démocratie n’est donc qu’une apparence dans la plupart des cas puisque la majorité du peuple ne s’exprime que périodiquement.

    christian vanneste.jpgDans l’intervalle, ce sont des minorités qui gouvernent, ou s’opposent au gouvernement avec l’espoir de le remplacer à l’occasion d’une élection, ou de manière plus radicale, en désirant renverser le régime, voire bouleverser la société. Certains pays, comme la Suisse, s’approchent de l’idéal démocratique, qui permettent à la majorité de s’exprimer très souvent à travers des référendums, d’autres s’en éloignent par l’organisation de scrutins, plus ou moins espacés, destinés à élire des responsables politiques, plus ou moins « représentatifs », cette notion elle-même étant discutable. Dans tous les cas, l’opinion publique est conditionnée par des moyens de formation et d’information détenus par des minorités. Lorsqu’il y a adéquation entre la minorité qui tient le gouvernement ou plus largement domine le système et celle qui détient les leviers de la pensée par la censure ou par la propriété, il faut des circonstances exceptionnelles, comme une guerre calamiteuse ou une crise économique considérable, pour faire tomber le régime et transformer la société. Ainsi en a-t-il été de la Russie tsariste en 1917, passée en quelques mois entre les mains des bolcheviques qui n’étaient nullement majoritaires dans le pays, ni même parmi les révolutionnaires malgré leur dénomination trompeuse.

    Bien d’autres révolutions eurent lieu effectivement parce que l’inertie de la majorité silencieuse a été bousculée par la réunion de trois facteurs : d’une part, la minorité au pouvoir était affaiblie de l’intérieur par la corruption, par les contradictions entre l’idéologie proclamée et les comportements des gouvernants, en second lieu, les moyens de diffusion de la pensée étaient détenus par des opposants de telle sorte que des idées nouvelles favorables à un changement l’emportaient jusque dans la sphère dirigeante, et enfin une minorité de rupture existait qui saisirait l’occasion, celle d’une guerre ou d’un mouvement de foule, par exemple, pour s’emparer du pouvoir. Il a fallu trois ans pour que les Jacobins instaurent la République en France. La monarchie est tombée comme un fruit mûr. Quelle qu’ait été pendant un siècle encore l’opinion majoritaire qui permit à des majorités monarchistes de l’emporter lors d’élections, et à des régimes monarchiques de se succéder, on n’est jamais parvenu à accrocher à nouveau le fruit à son arbre. 1792 a toujours fini par s’imposer jusqu’à faire croire que la République était le stade ultime de l’histoire de France, une République assagie par rapport à la Terreur, certes, mais bourgeoise et brandissant toujours ses vieux idéaux concoctés dans des cénacles étroits.

    La France connaît-elle à nouveau une période révolutionnaire ? Les éléments en sont réunis : La caste dirigeante n’inspire plus aucune confiance et ne s’appuie plus sur aucune conviction. Elle passe d’une mode idéologique à une autre et croit faire preuve d’ouverture quand elle révèle sa vacuité. Peu à peu ses « valeurs » explosent et se transforment en leurs contraires sans même que ceux qui s’y réfèrent paraissent s’en apercevoir. La liberté n’est plus l’autonomie rationnelle du citoyen qui lui permet de choisir la loi à laquelle il obéira, mais la libération des désirs, l’émancipation des individus, des communautés. L’égalité n’est plus celle des droits entre les citoyens, l’égalité des chances, mais celle des individus sans considération pour leurs mérites. La laïcité n’est plus la neutralité de l’Etat face aux croyances spirituelles, mais la négation active de celle qui est liée à l’identité même du pays. Au nom de l’urgence climatique ou sanitaire, de la lutte contre le racisme, on multiplie les interdits. La liberté recule tandis que l’égalité ne se limite plus à l’effacement des hiérarchies même indispensables mais à leur inversion selon le principe de la discrimination positive. La formation et l’information sont les vecteurs de ce renversement. La censure a changé de camp. Les groupes minoritaires réclamaient leur droit à la parole face au courant majoritaire, conservateur du socle de valeurs sur lequel repose notre société. Désormais ce sont ces groupes qui ont envahi les plateaux des chaînes d’information, les salles de conférence des universités, et les livres d’histoire qui interdisent aux conservateurs de s’exprimer. C’est ainsi que Sylviane Agacinski a été censurée à l’université Bordeaux Montaigne (UBM) parce qu' » il serait dangereux d’offrir une tribune à une personne digne de la manif pour tous ». De procès perdu en procès gagné, Zemmour a offert un bel exemple de résistance à ce renversement grâce au soutien d’un large public, mais il ressemble terriblement à une exception qui confirme la règle quand on voit la quantité de nullités qui ont le droit de s’exprimer sous prétexte par exemple que la couleur de leur peau n’est pas majoritaire en France. Le désir d’abattre les statues qui jalonnent l’histoire de notre pays atteint le paroxysme de ce mouvement suicidaire : la Voix du Nord retranscrit sans réserve la volonté d’une poignée d’excités de faire tomber la statue du Général Faidherbe à Lille en oubliant que celui-ci a évité par ses combats l’occupation du Nord par les Prussiens en 1870, après avoir été Gouverneur du Sénégal et avoir à ce titre développé cette région de l’Afrique. Quand bien même le second point serait discutable, le premier ne l’est pas.

    L’addition des minorités ne constitue pas une majorité de gouvernement : on n’imagine pas une alliance entre les LGBT, les islamistes, les antiracistes, et les antifas dont les revendications sont souvent contradictoires. Il y a quand même une convergence de fait pour affaiblir notre société, son unité, son identité, démoraliser sa population. C’est là un terreau révolutionnaire dont un jour ou l’autre une minorité organisée pourrait profiter, car le fruit trop mûr, pourri sur sa branche, sera prêt à tomber.

  • Un jeu très dangereux, par Jean Monneret (Historien).

    Des soutiens de Louisa Hanoune, dirigeante du Parti des travailleurs, devant le tribunal militaire de Blida, en Algérie, le 9 février 2020. PHOTO / RYAD KRAMDI / AFP.

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

    Et si, en nommant Benjamin Stora , historien contestable, le président français venait au secours du pouvoir corrompu d’Alger, à la recherche d’une cause extérieure à l’échec du FLN  ?

    En Algérie, aujourd’hui est encore pire qu’hier

    8.jpg«  Alors que les arrestations de militants se multiplient, cet éditorialiste algérien s’émeut des dérives du nouveau régime algérien. Et appelle à la poursuite du combat pour la démocratie, un an après la chute d’Abdelaziz Bouteflika.  »

    On sait que le FLN, à chaque crise intérieure, incrimine la «  colonisation français  » pour détourner les regards, Macron a-t-il l’intention de tomber dans le piège  ? (NDLR, Olivier Perceval)

    Il y a quelque temps, je vous ai invités à réfléchir à la personnalité et à l’activité de M. Benjamin Stora choisi par Emmanuel Macron pour «  favoriser la réconciliation entre les peuples français et algérien  ». Dont on ignorait d’ailleurs qu’ils fussent si fâchés. Considérons aujourd’hui ce que pourraient être les conséquences d’une «  réconciliation  », qui serait en fait un nouvel abaissement expiatoire de la France devant les actuels maîtres de l’Algérie.

    D’abord, elle se situerait en pleine crise identitaire française. On s’en prend actuellement, tous les jours, aux signes visibles de notre Histoire et d’aucuns militent pour leur mise au placard. Je suis d’accord avec Finkelkraut et Onfray pour dire que ce genre de processus pénitentiel, issu de la haine de soi, n’aura plus de fin, une fois engagé. Une «  réconciliation  » bâclée, consistant à se prosterner une nouvelle fois*devant les revendications schizophréniques du FLN, ajouterait à la crise française et pourrait la porter au paroxysme.

    Macron et Stora jouent avec des données très enflammables. Les convictions européistes du Président sont connues  : il croit à cette Europe née des rêves de Jean Monnet et reposant sur l’effacement des états-nations. Je ne pense pas qu’il comprenne en profondeur ce qu’est une Nation. Voit-il ce qu’une démarche expiatoire imposée par Alger aurait de catastrophique  ?

    En choisissant Stora pour cette mission, il est à craindre qu’il ait déjà engagé une évolution sans retour. Stora est un anticolonialiste patenté. Le choisir c’est annoncer la suite car, J.Sevillia n’a pas tort de lui imputer une vision partiale de la Guerre d’Algérie.

    Essayons d’imaginer ce que pourrait être les suites d’une démarche pénitentielle en direction d’Alger. Beaucoup de nos concitoyens ont du mal à l’imaginer. Nombre d’entre eux voient en tout cela un fatras de vieilleries dont il serait bon de faire table rase. Erreur  ! Et pour plusieurs raisons. Les conséquences s’empileraient sans limites.

    1°) La France se placerait dans une position de débitrice envers l’Algérie.**

    2°) Il serait toujours plus difficile de réguler l’immigration algérienne. Le gouvernement français renoncerait peut-être même à le faire, à titre de compensation pour les dommages passés.

    3°) Un flot ininterrompu de requêtes d’indemnisation se déverserait, pour les essais nucléaires, pour les victimes des opérations de l’Armée et sur tout sujet.

    4°) En reconnaissant une «  culpabilité  » française, le gouvernement français consacrerait une vision historique erronée, biaisée. Ceci conforterait le sentiment antifrançais dans les banlieues sensibles. Les courants djihadistes en seraient stimulés.

    5°) La lutte contre le terrorisme et le travail de la police seraient affaiblis. Notre Armée, la seule digne de ce nom en Europe, serait affublée d’un passé en partie imaginaire et chargée de 1000 entraves destinées à empêcher le retour «   des jours sombres  ».

    6°) Une capitulation devant les revendications du FLN porterait un rude coup à la discipline historique. Une inversion de l’Histoire et l’instrumentalisation de cette discipline à des fins de basse politique mèneraient au chaos intellectuel et moral.

    7°) L’âme de la France, notre héritage spirituel, le rôle unique de notre pays dans l’Histoire, la Lumière qu’il apporte au monde seraient ébranlés, voire compromis.

    8°) La France est la clef de voûte de l’Europe. Notre abaissement serait celui du continent tout entier.

    Notes :

    *Une nouvelle fois, car, il y eut le précédent des Accords d’Evian, capitulation de type munichois devant le terrorisme, mais dissimulée sous un dispositif de type Potemkine, de principes et de garanties inapplicables et inappliqués.

    **A son arrivée au pouvoir, il y a 39 ans, F.Mitterand décida, de son propre chef et sans requête de la partie bénéficiaire, d ‘augmenter le prix payé pour le pétrole algérien.

  • Série : Le legs d’Action française ; rubrique 5 : La crise de 1926, un « nouveau Port Royal » ?, par Gérard Leclerc.

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

    Voici la cinquième rubrique de Gérard Leclerc sur «  Le legs de l’Action française  ». Cette fois-ci, l’initiateur de la réflexion anthropologique maurrassienne, nous donne sa vision de la crise religieuse, occasionnée par la condamnation par Rome en 1926.

    Son texte court est fondamental car il conclue que dans la crise majeure que nous vivons, dans les grands débats actuels, l’Action française a quelque chose d’essentiel à dire.

    gerard leclerc.jpgVoilà encore un beau thème d’aggiornamento que les nouveaux militants du XXI° siècle auront à travailler. Ils ne pourront le faire en ignorant leurs deux autres maitres de leur école de pensée  : les deux catholiques, les deux Pierre, Boutang et Debray. Pour cela ils pourront commencer par s’appuyer sur les deux numéros spéciaux que la Nouvelle Revue Universelle leur a consacrés (ndlr)

    Se place maintenant ici ce que fut l’histoire de l’Action française entre les deux guerres mondiales. Là encore, faute de temps, je vais me limiter à quelques remarques critiques mais très significatives de cette période.

    L’Action française a réussi dans les deux domaines dont je viens de parler, la lucidité politique et la séduction culturelle. Elle n’a malheureusement pas encore atteint son objectif final essentiel, le rétablissement de la monarchie. Par ailleurs, elle a été entraînée dans un certain nombre de crises graves qui ont affecté son essor. La principale a été celle de 1926-1927, la condamnation religieuse du mouvement par le pape Pie XI, dont je veux maintenant dire un mot.

    J’ai choisi de rebondir sur une formule de Philippe Ariès, grand historien et ami proche de Pierre Boutang. Il parlait de l’Action française condamnée par le pape comme d’un autre Port-Royal. Vous avez peut-être en mémoire la formidable crise politico-religieuse de Port-Royal, qui a terriblement marqué l’histoire religieuse, politique et littéraire de la France au XVIIe siècle, avec Pascal, Racine, et bien d’autres. Philippe Ariès rapprochait donc ces deux crises. Vous avez des milliers de militants d’Action française, par ailleurs excellents catholiques, qui ont été à ce moment-là durement brimés, et même moralement martyrisés, interdits de sacrements, ne pouvant pas se confesser ni recevoir l’Eucharistie, ne pouvant se marier qu’en catimini, comme Maurice Pujo, paroissien de l’église Saint-Augustin, qui dut se marier à la sacristie  ! Il a fallu attendre treize ans pour que le pape Pie XII, en 1939, lève les sanctions.

    Je ne reprendrai pas le procès – pourtant, Dieu sait s’il m’a occupé dans mon existence, avec toutes ses pièces, les ouvrages de Maritain, etc. – pour ne me centrer que sur la remarque de Philippe Ariès. Oui, ce fut un nouveau Port Royal, en ce sens que l’Action française, mouvement fondé loin de toute appartenance religieuse, dirigée par un maître agnostique rejoint par des agnostiques, des athées et des positivistes – comme l’étaient presque tous les rédacteurs de la Revue grise des origines –, va tenir une place inattendue dans l’histoire religieuse de la France du XXe siècle  : elle va se trouver au cœur même de la grande querelle théologique du siècle. Si on l’attaque, ce n’est pas pour son positivisme très relatif ou son prétendu paganisme, mais parce qu’elle a pris position dans cette vaste querelle dont nous vivons encore les suites. Une querelle directement en rapport avec le Ralliement dont je parlais tout à l’heure.

    Maurras, un curieux agnostique, tout de même, qui, de son adolescence à sa mort, a porté sur lui le scapulaire de N.D. du Mont-Carmel  ! De cet agnosticisme, j’ai une interprétation (qui m’est tout à fait personnelle) : je pense que, pour lui, c’est une arme lui permettant de parler en toute indépendance des questions religieuses, sans engager le religieux lui-même. Laissant intégralement à l’Église, au clergé et aux laïcs catholiques le domaine théologique, il traite des questions religieuses, certes, mais uniquement en ce qui concerne leurs conséquences dans le domaine de la civilisation, de la culture et, bien sûr, de la politique.

    Mais, ce faisant, Maurras n’est pas extérieur à la question religieuse. Il est même, sur un point, un des rares esprits rigoureusement orthodoxes : sa doctrine est conforme à celle du concile Vatican I, qui a officiellement affirmé qu’il fallait tenir pour une cause de la crédibilité de l’Église les bienfaits qu’elle a rendus à l’humanité dans l’ordre civilisationnel et temporel. Maurras défend en effet l’idée d’un catholicisme qui n’est pas seulement à l’origine de la civilisation et de la culture françaises, mais à qui l’humanité entière est redevable d’immenses bienfaits. Dans ce qu’il appelle l’Église de l’ordre, il loue moins l’Église qui a façonné la France que l’Église qui a apporté à l’homme sa définition suprême.

    L’agnostique Maurras a donc trouvé, d’une manière surprenante, il est vrai, une place bien à lui au cœur même du débat religieux. Je n’irai pas plus loin là-dessus aujourd’hui. Mais si j’insiste sur ce rapprochement avec Port-Royal, ce n’est pas, bien évidemment, pour faire le moindre rapprochement entre la doctrine janséniste et le nationalisme intégral qui n’ont rien de commun. C’est uniquement pour souligner que l’importance prise par l’Action française dépasse de loin le plan étroitement politique auquel on tend souvent à la cantonner. Loin d’être un mouvement politique parmi d’autres, l’Action française se situe au cœur même de la défense de la civilisation. Dans la crise majeure que nous vivons, dans les grands débats actuels, elle a quelque chose d’essentiel à dire, et elle a une expertise qui lui est propre.

    *

    Retrouvez les rubriques de l’été militant 2020 du site de l’Action française  :

    Par Christian Franchet d’Esperey

    1 – Est-il opportun de s’accrocher à un homme aussi décrié ?
    2 – Les positions les plus contestées de Maurras ne doivent plus faire écran à ses découvertes majeures
    3 – maurrassisme intra-muros et maurrassisme hors les murs
    4 – Une demarche d’aggiornamento cest-a-dire de mise au jour

    Par Philippe Lallement

    Le maurrassisme est-il devenu un simple objet d etude historique

    Par Gérard Leclerc

    1. Le legs d’Action française
    2. Maurras humaniste et poete
    3. L homme de la cite le republicain
  • La domination des machines, une domination capitaliste, par Jean-Philippe Chauvin.

    Source : https://jpchauvin.typepad.fr/

    Les manuels d’histoire sont étrangement discrets sur ce qui peut gêner l’idéologie dominante, et il est très rare de lire une évocation des lois d’Allarde et Le Chapelier de 1791, entre autres, comme il est encore plus rare de trouver une référence à cette autre date tragique de l’histoire sociale, celle de février 1812, inconnue de la plupart des enseignants d’histoire que j’ai rencontrés dans ma vie.

    jean philippe chauvin.jpgEt pourtant ! Elle mériterait des livres, des articles, voire des films, et elle passe totalement inaperçue alors qu’elle me semble l’une des plus significatives de l’ère industrielle européenne, et qu’elle ouvre ce règne dénoncé autant par le républicain Michelet que par le royaliste Bernanos, celui des Machines…

     

    En 1811, alors que l’empire napoléonien domine, pour un temps bref, toute l’Europe continentale, l’Angleterre reste la seule puissance tenant tête à celui qu’elle surnomme « l’Ogre », et cela sur mer comme par l’industrie. Or, c’est le moment durant lequel les patrons du textile anglais équipent leurs usines de métiers à tisser qui, tout en favorisant une production de masse, concurrencent directement les tisserands indépendants des campagnes, les acculant à des horaires fous avant de les ruiner, au profit même d’un patronat qui, en plus, recrute à vil prix une main-d’œuvre issue des populations laborieuses désormais désargentées et dépossédées de leur utilité productive. Cela entraîne alors une véritable révolte contre les machines, détruites par ceux qui se rangent derrière un mystérieux général Ludd et demandent à voir reconnu par la société et l’Etat leur droit à vivre dignement de leur travail. Pour seule réponse, l’Angleterre envoie la troupe et le Parlement va adopter un « Bill » (une loi) punissant de mort ceux qui attentent aux machines : oui, vous avez bien lu, une loi condamnant à la pendaison les « briseurs de machines » ! C’est-à-dire que, à suivre cette loi, une machine de bois et de ferraille vaut plus que la vie d’un homme, ce que dénonce, dans un discours retentissant mais incompris, Lord Byron.

    Or, malgré cet aspect que l’on peut humainement qualifier de « terrible » (au sens premier du terme), le règne des Machines ne sera pas entravé en ce XIXe siècle industrialiste, et se fera sous l’impulsion d’un patronat progressiste qui, en France, se fera républicain pour ne plus avoir à répondre de leurs responsabilités devant les corporations et l’État qui, pourtant, ne lui fera guère de remontrances sur ce point et cela quelle que soit sa forme institutionnelle. La « liberté » s’impose mais c’est la liberté de celui qui a les moyens d’acheter de coûteuses machines qui lui seront rentables par l’exploitation des ouvriers qu’il peut mettre derrière, au service exclusif de celles-ci : ce ne sont plus le Travail et l’intérêt des travailleurs qui priment désormais mais le profit que le Financier pourra en tirer, en plus de l’entrepreneur qui achète ces machines pour dégager de confortables bénéfices. Il ne s’agit pas, pour mon compte, de dénoncer les machines en tant que telles ou de méconnaître les progrès techniques et l’utilité qu’elles peuvent avoir, mais de regretter leur « sens » social dans le cadre d’un régime capitaliste qui, en lui-même, est et reste antisocial malgré tous les habillages dont l’on peut essayer de l’affubler : la machine de l’usine reste, encore et toujours, la propriété quasiment exclusive du patron, et l’ouvrier n’en est que le servant, toujours moins valorisé que le « monstre d’acier » qu’il sert…

     

    Nous ne reviendrons pas sur ce qui a été aux XIXe et XXe siècles, simplement parce que ce n’est pas possible : ce qui est fait est fait, et c’est ainsi, même s’il n’est pas interdit de le regretter ! Mais cela ne doit pas empêcher de penser le lendemain, et d’évoquer une autre forme de propriété et d’usage des machines que celle de la propriété privée exclusive. Une « propriété corporative » est-elle possible, au moins dans quelques branches d’activité ? Une propriété qui associerait les ouvriers aux schémas de production et aux bénéfices de l’outil de production ? L’idée mise en avant par le général de Gaulle sous le nom de « participation » n’en était-elle pas une ébauche, vite écartée par son successeur issu de la Banque ?

     

    La difficulté est évidemment que la mondialisation (qui n’est pas la simple internationalisation des échanges, mais bien plutôt l’imposition d’un modèle « à vocation mondiale » né de Franklin et de Ford, comme l’avait pressenti Aldous Huxley dès le début des années 1930) semble être un véritable rouleau compresseur qui ne sait plus s’arrêter, lancée dans une véritable fuite en avant, de plus en plus artificialisante (comme l’intelligence qui, désormais, est appelée à se « déshumaniser » pour mieux se « transhumaniser »…) et conquérante, intrusive et « obligatoire », et apparemment « acceptée », comme une sorte de fatalité, par nos compatriotes (mais moins par ceux-ci que par les autres populations encore aveuglées par les promesses de la modernité et de la société de consommation…) et les plus jeunes générations dépendantes à une Technique dans laquelle elles sont nées.

     

    Là encore, il ne s’agit pas de jeter nos ordinateurs ou toutes ces machines du quotidien qui ont envahi nos maisons et nos écoles, nos rues et nos vies, mais de les maîtriser et de les ordonner, non au seul service des Féodalités financières et économiques contemporaines, mais au service de tous, et de manière mesurée, à la fois humainement et écologiquement : les machines doivent rester de simples moyens, et non nous imposer leur rythme franklinien au profit d’autres que nous et sans respect pour la nature humaine et les cadres nécessaires de la vie en société… Refuser la domination des machines, ce n’est pas refuser leur existence ni leur usage mais rester maîtres de nos propres vies et de nos propres réflexions, au-delà des machines et de leur univers… Il s’agit d’en finir avec la « technodépendance » pour retrouver le sens de notre humaine indépendance, celle qui nous permet de choisir l’honneur et le don de soi plutôt que la rentabilité et l’esclavage. Huxley, Tolkien et Bernanos, mais aussi Michelet à travers ce texte, « Le peuple », que ses propres thuriféraires semblent vouloir oublier et qu’il nous plaît de relire, nous rappellent ce devoir de liberté humaine qui ne se limite pas à « l’individu égal des autres » mais reconnaît l’éminente dignité des personnes à travers leurs particularités et leur pluralité sociale comme intellectuelle et culturelle.

  • Dédié à Assa Traoré et aux siens : parler du passé esclavagiste, oui; mais, aussi et surtout, du présent esclavagiste...

    Oui, il y a des pages sombres dans l'histoire de l'Europe en général, et de la France, en particulier. Nous savons les regarder en face, comme la cruelle Guerre des Camisards ou les Guerres de religion ou... la traite négrière.

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    Par contre, Assa Traoré, l'égérie du Gang, ou Christiane Taubira aiment bien parler de l'esclavagisme des blancs et tout et tout; mais elles ne parlent jamais de celui qui perdure encore aujourd'hui : c'est bizarre, non ?

    Nous n'avons évidemment aucune raison d'être fiers de ce que "le commerce triangulaire" ait existé; au moins y avons-nous mis fin depuis belle lurette et, depuis belle lurette aussi, aboli l'esclavage, ce que des pays d'Afrique et/ou musulmans n'ont pas fait, eux qui pratiquent encore couramment la traite négrière aujourd'hui.

    Eh, oui, dame Traoré, dame Taubira, l'abolition de l'esclavage, cela concerne l'Europe, et pas tant et tant de pays autres, dont vous ne parlez jamais : on peut savoir pourquoi ?

    Pour nourrir le débat, voici l'intégralité de notre feuilleton que vous pourrez lire la semaine prochaine (n° 125 de "L'aventure France racontée par les Cartes"...), mais que nous avons "détaché" aujourd'hui, afin de coller à une actualité brûlante et vociférante...

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    Le "commerce triangulaire" - également appelé la "traite atlantique" - et qui, de fait, est la traite négrière, est incontestablement une page sombre, et peu glorieuse, de l'histoire de France, en particulier, et de l'histoire du continent européen, en général.

    Au moins peut-on considérer que, d'une certaine manière, les peuples européens se sont rachetés en mettant fin à cette horreur, l'abolition de l'esclavage ne concernant qu'eux seuls, alors que l'esclavage et la traite négrière subsistent encore, de nos jours, ailleurs qu'en Europe...

    "L'infâme trafic" était particulièrement lucratif :

    les bateaux partaient depuis Nantes, Saint-Nazaire, Le Havre, Bordeaux... chargés de tissus, d'armes à feu, d'alcool, de verroterie...
     ils allaient échanger ces produits en Afrique, notamment du côté du Niger ou du Bénin, contre des esclaves noirs...
    puis ils repartaient en Amérique, pour vendre ces esclaves, et rapporter des produits tropicaux tels que le sucre, le café, le cacao, le coton...
    Ces produits étaient ensuite ramenés en Europe.
    C'est ce commerce, qui se déroulait en trois étapes (Europe, Afrique et Amérique), qui se nomme "commerce triangulaire".

    Quelques chiffres :


    Du XVIème au XIXème, on estime qu'environ 12,5 millions d'esclaves ont été embarqués de force d'Afrique pour l'Amérique par des Européens (environ 10-11 millions sont arrivés en Amérique).
    Les principaux pays européens ayant participé à la traite transatlantique sont le Portugal avec environ 5 millions d'esclaves, la Grande-Bretagne avec environ 3 millions d'esclaves et la France avec un peu moins de 1.500.000 esclaves déportés...

    Cette dure réalité ne doit évidemment pas être occultée.

    On se gardera, cependant, de tomber dans le travers de certaines bonnes âmes qui, si elles n'ont pas de mots assez durs pour condamner cette traite négrière - qui doit l'être, en effet - oublient deux choses importantes, dans leur critique à sens unique de la France et du monde européen.

    1. D'abord, ces bonnes âmes, généralement recrutées dans les milieux auto-proclamés "progressistes" et "éclairés" oublient que notre République idéologique honore, en conservant ses cendres au Panthéon ("Aux grands hommes, la Patrie reconnaissante"...) un certain Voltaire qui, antisémite furieux, était aussi joyeusement raciste. En témoigne, entre autres, ce propos :


    "Nous n'achetons des esclaves domestiques que chez les nègres. On nous reproche ce commerce. Un peuple qui trafique de ses enfants est encore plus condamnable que l'acheteur. Ce négoce démontre notre supériorité. Celui qui se donne un maître était né pour en avoir". (Voltaire, Essai sur les moeurs et l'esprit des nations, 1756).

    Et aussi :


     "Leurs yeux ronds, leur nez épaté, leurs lèvres toujours grosses, leurs oreilles différemment figurées, la laine de leur tête, la mesure même de leur intelligence, mettent entre eux et les autres espèces d'hommes des différences prodigieuses. Et ce qui démontre qu'ils ne doivent point cette différence à leur climat, c'est que des Nègres et des Négresses transportés dans les pays les plus froids y produisent toujours des animaux de leur espèce." (Voltaire, Essai sur les moeurs et l'esprit des nations, 1756).

    Ou encore :


     "Il n'est permis qu'à un aveugle de douter que les blancs, les nègres, les albinos, les Hottentots, les Lapons, les Chinois, les Amériques ne soient des races entièrement différentes..." (Essai sur les moeurs et l'esprit des nations, 1756).


    On notera juste - comme le fait remarquer avec pertinence le site Hérodote.net - qu'en croyant constater l'existence de "races entièrement différentes", Voltaire prend ici le contre-pied du christianisme qui, depuis Saint Paul, n'a de cessé de proclamer l'unité de la condition humaine.
    Il rompt avec ses prédécesseurs en pensée, généralement indifférents au concept de race.
    Il annonce aussi les théories scientistes du XIXe siècle qui, libérées du poids de la religion, assimilent les hommes à une espèce parmi d'autres...

    2. Ces mêmes bonnes âmes - telle une Christiane Taubira - se montrent d'un parti-pris vraiment étonnant. Christiane Taubira a cru, ainsi, pouvoir déclarer :


    "...Il ne faut pas trop évoquer la traite négrière arabo-musulmane, pour que les "jeunes Arabes" ne portent pas sur leur dos tout le poids de l’héritage des méfaits des Arabes..." (!).


    Il y a, maintenant, une "Loi Taubira" sur l'enseignement de l'esclavage, qui ne reconnaît que "...la traite négrière transatlantique ainsi que la traite dans l'océan Indien d'une part, et l'esclavage d'autre part, perpétrés à partir du XVème siècle, aux Amériques et aux Caraïbes, dans l'océan Indien et en Europe".


    Ce à quoi l’anthropologue et économiste Tidiane N’Diaye, spécialiste des civilisations négro-africaines et de leurs diaspora, répond dans "Le Génocide voilé" :

    "Les Arabes ont razzié l’Afrique subsaharienne pendant 13 siècles sans interruption.
    La plupart des millions d’hommes qu’ils ont déportés ont disparu du fait de traitements inhumains.
    La traite négrière a commencé lorsque l’émir arabe Abdallah ben Saïd a imposé aux Soudanais un accord en 652 les obligeant à livrer annuellement des centaines d’esclaves.
    Ce fut le point de départ d’une énorme ponction humaine qui devait s’arrêter officiellement au début du XX° siècle...
    Sous l’avancée arabe,… des millions d’Africains furent razziés, massacrés ou capturés, castrés et déportés vers le monde arabo-musulman.
    Cela dans des conditions inhumaines, par caravanes à travers le Sahara ou par mer, à partir des comptoirs à chair humaine de l’Afrique orientale..."

    lafautearousseau

  • Sur Figaro Vox, Éric Zemmour: «Encore un effort, Monsieur Védrine!».

    Source : https://www.lefigaro.fr/vox

    L’ancien ministre des Affaires étrangères s’efforce d’imaginer un monde d’après plus écologique, et une France plus forte dans une Europe moins ingénue.

    Le livre de confinement est très vite devenu un genre littéraire en soi. Le temps de l’enfermement fut propice à l’introspection, aux remises en question, aux projections. Chacun y va avec son style, avec son tempérament, avec ses marottes. Le monde d’après est dans toutes les têtes et sous toutes les plumes.

    C’est le propre de l’esprit humain que d’espérer un avenir meilleur ; et le propre de l’esprit français que de mettre une langue et une rationalité au service de cette espérance. Pourtant, il n’y a jamais de monde d’après. Les illusions sont toujours perdues et les espérances toujours trahies. Comme disait le grand historien Jacques Bainville «tout a toujours mal marché».

    Le monde d’après est le plus souvent le monde d’avant en pire. Tout progrès se paye au prix fort. Il n’y a jamais de coupure nette. Même les grandes guerres ne font qu’accélérer des évolutions qui précédaient. Tocqueville nous a appris que la Révolution avait fini le travail de l’Ancien Régime. Les «jours heureux» de la Libération, avec son cortège de lois sociales et de planification économique, avaient en vérité été préparés et conçues par les meilleurs esprits d’une génération, celle du Front populaire mais aussi de Vichy qui, pour beaucoup, se retrouvèrent dans les équipes du général de Gaulle pour rédiger le mythique programme du Conseil national de la Résistance.

    Mais rien ne peut entamer l’appétence pour la question rituelle: et après? Quand c’est Hubert Védrine qui s’y colle, on peut être sûr au moins que la réponse sera fine et mesurée, pesée et pensée, celle d’un tempérament froid et raisonnable qui craint comme la peste les passions et les utopies. Mais on a aussi appris, à le lire et à l’entendre, que l’ancien conseiller du président Mitterrand avait souvent l’audace encadrée et était lui aussi un adepte du «en même temps» parfois agaçant.

    Cet ouvrage de Védrine est bref, mais tout Védrine y est. Et d’abord, le Védrine écolo. Pour notre auteur, le monde d’après sera vert ou ne sera pas. L’axe du livre est résolument écologique. Mais une écologie qui n’est pas d’extrême gauche. Une écologie favorable au nucléaire car c’est l’énergie la moins carbonée. Pourtant, les écologistes ont été pris à revers par le coronavirus. Depuis des années, ils nous rebattaient les oreilles avec le réchauffement climatique et les émissions de CO2. Et voilà que ce virus se moque des imprécations de Greta Thurnberg. Mais un bon écolo retombe toujours sur ses pieds verts. Le virus est le produit de la déforestation, de l’arrivée des animaux sauvages dans le monde des hommes, de la réduction de la biodiversité, de l’accroissement des flux de marchandises et d’hommes dans la mondialisation. Le tout aggravé par une démographie devenue folle.

    Védrine reprend à son compte cette antienne («75 % des maladies qui affectent les humains sont des zoonoses») même s’il nous épargne les accents apocalyptiques d’un Nicolas Hulot qui ressemblent aux anciennes imprécations des prédicateurs du Moyen Âge qui affirmaient que les épidémies étaient une punition d’un Dieu que les hommes avaient offensé. Dans la bataille qui s’annonce entre ceux qui veulent remettre en marche l’appareil productif à tout prix, et ceux qui veulent profiter de l’occasion pour accélérer la «verdisation» de l’économie, Védrine a choisi son camp: «Pas de retour à l’anormal».

    Mais au-delà du slogan, comment faire que sa formule «l’agriculture française doit être écologique et compétitive» ne relève pas de l’oxymore? Comment alléger les normes administratives qui entravent la réindustrialisation de notre pays, alors même que la plupart de ces normes, dont se plaint à juste titre Védrine, sont environnementales? Comment prôner un nouvel élan de décentralisation de régionalisation alors que les collectivités locales sont bien plus faibles par rapport au chantage à l’emploi ou au logement, quel que soit le prix écologique à payer? Comment réclamer la poursuite des grands-messes mondiales à la gloire de l’écologie, les fameuses COP, alors que ces gros «machins» inutiles entretiennent grassement des armadas de parasites associatifs et technocratiques du monde entier qui vivent le contraire de ce qu’ils prônent ?

    Comment l’ancien ministre des affaires étrangères de Lionel Jospin croit-il encore à la célèbre formule de l’ancien premier ministre socialiste, «oui à l’économie de marché, non à la société de marché», alors que Christopher Lasch et Jean-Claude Michéa nous ont amplement démontré que le libéralisme économique et le libéralisme sociétal étaient frères siamois pour le meilleur et pour le pire?

    Quand il quitte les rives de sa foi écologique, Védrine revient sur la terre ferme de la diplomatie et de la géostratégie. On sait qu’il y excelle. Mais là aussi, on a du mal à suivre les subtilités de son esprit qui nous dit que ce fut une «faute grave de ringardiser, au nom de l’intégration européenne et du sens de l’histoire, l’attachement à la souveraineté nationale» avant d’ajouter «qu’on ne reverra pas pour autant des nations totalement indépendantes, voire autarciques, n’ayant besoin de personne, ne décidant que par elles-mêmes de l’ensemble de leurs choix, sans avoir jamais à tenir compte des interférences extérieures». Mais quand Hubert Védrine a-t-il vu que la France fut, même au temps des monarques absolus, ou d’un Empereur génial et impérieux, «autarcique et ne tenant jamais compte des interférences extérieures»?

    Hubert Védrine nous exhorte à juste titre de retrouver les chemins délaissés de la nation : « C’est d’abord et avant tout à la France de se reprendre en main. Pas de s’en remettre à un niveau européen qui se substituerait à nous ». Mais alors, pourquoi poursuivre, en un « en même temps » macronien, avec cette recommandation : « L’Europe doit accepter de se métamorphoser en une puissance » ? Védrine sait mieux que personne que cette idée d’Europe-puissance est un concept exclusivement français, une sorte de fantasme hugolien d’une France qui rêve de l’Europe comme d’une «France en plus grand», tandis que l’ADN de l’Union européenne est aux antipodes de la force et de la puissance, bref aux antipodes de l’Histoire, que cette Europe s’est forgée avec tous les vaincus de l’histoire du XXe siècle qui se sont réfugiés sous la protection américaine pour pouvoir à loisir disserter sur les vertus du droit et du commerce. Le livre refermé, on se met à rêver d’un Védrine aussi déterminé sur la France que sur l’écologie. 

    «Et après?», de Hubert Védrine, Fayard, 137 p., 12 €.À voir aussi - Zemmour: «Clivage entre une fausse droite et une fausse gauche»
    Et après ?, de Hubert Védrine, Fayard, 137 p., 12 €.
  • Les rassemblements royalistes de Provence ... 35 ans d'action politique

     

    Retour, ce dimanche, sur cette frange de 35 ans d'histoire du royalisme français et d'histoire de l'Action française, qui a laissé des traces et des souvenirs durables dans le Midi et au delà. 

    L'aventure des Rassemblements Royalistes de Provence commence, sous la présidence de Pierre Chauvet, le 8 juin 1969, entre les deux tours de l'élection présidentielle, à l'abbaye de Montmajour, dans la plaine d'Arles.

    L’Union Royaliste Provençale osait organiser une réunion populaire ! Elle reprenait la tradition des rassemblements d’avant-guerre et faisait revivre le midi royaliste.  

    Le pari fut réussi. L'expérience pouvait se renouveler. Le Rassemblement avait désormais un retentissement national. L’aventure s’est prolongée pendant plus de 35 ans [1969-2005]. 

    Les Rassemblements royalistes de Montmajour, Saint Martin de Crau, les Baux, donnaient lieu à une action de communication dans tout le Sud-est, grâce à une mobilisation militante importante. Certaines années, 25.000 affiches sont collées; 100.000 tracts sont distribués; des disques, des manifestes, des brochures, des journaux  sont édités. La presse écrite, la radio, la télévision sont présentes.

    Les présidents du comité d'honneur : En 1969, ce fut   Jacques MAURRAS; en 1970, le duc de LEVIS-MIREPOIX, en 1971, Thierry MAULNIER qui envoyait un message à la foule, en 1972, le duc de Castries, trois académiciens français …  

    Le  « Manifeste de Montmajour » analyse  royaliste de la société contemporaine, fut publié en 1971.  

    Saint Martin de Crau accueillit le Rassemblement en 1972, l'État ayant pris entièrement possession de Montmajour. Malgré la pluie, ce fut une grande foule qui s'y rassembla.  

    Le Rassemblement s’est tenu aux Baux de Provence, à partir de 1973. Cette année-là, pendant quinze numéros, « L'Ordre Provençal » devint quotidien (avec prises de position sur l'actualité, échos de la campagne des Baux, enquêtes). 

    Les Rassemblements à thème débutèrent en 1974. Cette année-là, ce fut : « Pour une contre-révolution globale ». En 1975, les royalistes s’attachèrent à défendre l'armée, alors vivement attaquée. Le thème de l'année suivante fut : « ni libéralisme, ni collectivisme, réaction populaire ». Jean   DUTOURD adressa aux participants une lettre où il s'affirmait pour la première  fois royaliste.                                                       

    En 1979, le Comte de Paris publia ses « Mémoires d'exil et de combat ». Les Baux prirent pour thème : « instaurons la Monarchie ». Le thème du Rassemblement de 1981 fut : « Résister », première réaction à l’arrivée de la gauche au pouvoir. 1983 et 1984 contribuèrent à la défense de l'école libre. En 1985, Gabriel Domenech, rédacteur en chef du grand quotidien régional Le Méridional, vint dire son accord avec les idées royalistes. 1987 commémora avec ampleur le Millénaire Capétien. Une étude de deux militants marseillais, fut alors publiée : « Pour la monarchie de demain ».

    Les Rassemblements de 1989 & 93 ont été ceux du bicentenaire de la Révolution, du martyre de LOUIS XVI, de la Vendée, des années de Terreur. Malgré les mythes officiels, ce furent, en réalité, les premières manifestations du totalitarisme moderne. Ce thème fut brillamment traité aux Baux.          

    En 1995, les royalistes des BAUX manifestèrent leur scepticisme après la toute récente élection de Jacques Chirac à la tête de l'État. En 1996, le thème fut : « Pour   défendre l’identité chrétienne et royale de la France ». La   réunion de 1997 (« demain sauver la France ») manifestait  l’opposition des royalistes à l’Europe de Maastricht. 

    Les Rassemblements Royalistes de Provence devenus une tradition ont souvent eu un grand écho médiatique. Ils ont été une tribune pour les idées royalistes en même temps qu’un moyen de discuter, de prendre des contacts, de s'informer des activités royalistes en Provence et dans toute la France. Ce fut aussi une fête amicale (stands de livres, d'objets d'art, de jeux, bar, buffet, animations) et le point de départ des actions militantes de l'année qui suit. 

    Un changement important s’annonçait lors du Rassemblement de 1999 qui développait l’idée d’un nouveau « projet   national royal ». Ce projet s’incarne en effet dans un prince qui est annoncé en 2000 : “Un rendez-vous de l’Histoire qui se prépare”. Et en 2002, le Prince Jean de France, duc de Vendôme, accompagné de son frère, le prince Eudes, duc d’Angoulême, et de son épouse, choisit Les Baux comme lieu de la première rencontre publique entre la famille de France et les royalistes depuis des dizaines d’années.  

    Une « métamorphose » des Rassemblements prend forme en 2005 avec la création d’une journée de « débat royaliste » où des intellectuels de haut niveau analysent les problèmes contemporains, présentent nos positions et où l’on travaille, ensemble, aux progrès du projet national royal.

    Ce sont trente-cinq ans d'Action française, d'engagements politiques, que résume ce bref rappel historique. Après 2005, nos activités ont pris des orientations nouvelles, adaptées aux situations et aux techniques d'aujourd'hui. Rien n'empêche toutefois qu'en temps opportun l'aventure des rassemblements royalistes de Provence soit reprise, sous une forme ou sous une autre. La plus propre à servir l'idée nationale et royale. 

     

    Ils ont pris la parole dans ces rassemblements, parmi beaucoup d'autres ... 

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    [Dans l’ordre des photographies] 

    Pierre BOUTANG  - Pierre DEBRAY - Gérard de GUBERNATIS - Marcel JULLIAN - Gérard LECLERC - Jean RASPAIL - Michel de SAINT-PIERRE - Jean SEVILLIA - Gustave THIBON - Jacques TREMOLET de VILLERS - Jean Marc VARAUT - Vladimir VOLKOFF


    1798463737.jpg« 
    L'aventure des rassemblements royalistes de Provence » : pour visiter l'album, cliquez sur l'image ci-contre. 

     

     

  • Colonisation de l’Algérie: «De quoi la France devrait-elle s’excuser?», par Jean Sévilla.

    Source : https://www.lefigaro.fr/vox/

    En réclamant de nouvelles excuses à la France, le président algérien Abdelmadjid Tebboune entretient un ressentiment qui fait obstacle à un travail mémoriel apaisé sur la présence française en Algérie, estime l’historien Jean Sévillia.

    Depuis 1962, l’Algérie a organisé de manière systématique l’écriture de son passé sur la base d’une propagande destinée à confirmer la légitimité de l’État-FLN, notamment avec le chiffre mythique de 1,5 million d’Algériens morts pendant la guerre d’indépendance (le chiffre réel, déjà bien assez lourd, est de 250.000 à 300.000 victimes, tous camps confondus).

    Avec le temps, ce récit à sens unique s’est étendu à la conquête de l’Algérie au XIXe siècle, ce qui permet aux hiérarques du système d’englober la totalité de la présence française en Algérie, de 1830 à 1962, dans un même discours réprobateur. Nul n’a oublié comment Abdelaziz Bouteflika, en visite d’État à Paris en 2000, avait pris la parole depuis la tribune de l’Assemblée nationale pour semoncer la France et l’inviter à reconnaître «la lourde dette morale des anciennes métropoles envers leurs administrés de jadis». En 2005, à Sétif, il montait d’un cran dans l’accusation: «L’occupation (française, NDLR) a adopté la voie de l’extermination et du génocide qui s’est inlassablement répétée durant son règne funeste.» Et en 2018, pour son dernier discours présidentiel, il reprenait le refrain habituel en saluant «le combat d’un peuple contre lequel le colonisateur a porté sa barbarie répressive à ses ultimes extrémités».

    Que l’actuel président algérien, Abdelmadjid Tebboune, élu en décembre dernier, ait déclaré, le 4 juillet, attendre des excuses de la France pour la colonisation de l’Algérie n’a par conséquent rien d’étonnant: comme dans un jeu de rôle, l’homme jouait sa partition consistant à répéter comme un mantra que tous les torts, de 1830 à 1962, ont été du côté de la France. Comme son prédécesseur, le président Tebboune n’a pas manqué de présenter ses exigences («On a déjà reçu des demi-excuses. Il faut faire un autre pas.»), en rappelant au passage que l’Algérie possède un moyen de pression sur Paris: les 6 millions d’Algériens ou de Franco-Algériens établis en France.

    C’est donc un rituel du pouvoir, à Alger, que de vilipender la colonisation, alors même que près de 9 Algériens sur 10 sont nés depuis l’indépendance. C’était d’autant plus facile, pour Abdelmadjid Tebboune, que le Covid-19 lui a donné carte blanche, renvoyant chez eux les centaines de milliers de manifestants du Hirak, le mouvement de contestation qui avait montré que le peuple algérien attend autre chose que le sempiternel discours du FLN.

    La vraie question est de savoir si la France va répondre docilement aux injonctions d’Alger. Et c’est là que commencent les inquiétudes si l’on se souvient qu’Emmanuel Macron, en février 2017, alors qu’il n’était que candidat à l’Élysée, avait qualifié la colonisation de «crime contre l’humanité», ajoutant que cette séquence «fait partie de ce passé que nous devons regarder en face en présentant nos excuses à l’égard de celles et ceux vers lesquels nous avons commis ces gestes», et que, devenu président de la République, il déclarait souhaiter, en janvier dernier, que le travail sur la mémoire de la guerre d’Algérie obtienne, sous sa présidence, «à peu près le même statut que celui qu’avait la Shoah pour Chirac en 1995». Cette formule semblait annoncer une reconnaissance de culpabilité de la France dans la guerre d’Algérie, ce à quoi se sont opposés tous les prédécesseurs du chef de l’État, même François Hollande.

    Avoir restitué à Alger, comme cela a eu lieu le 3 juillet, les crânes de plus de vingt guerriers arabes et kabylesqui s’étaient révoltés contre la présence française après la fin de la guerre de conquête, et dont les restes étaient conservés au Musée de l’homme à Paris, n’était pas en soi scandaleux: ces combattants ont eu droit, environ cent cinquante ans après leur mort, à un hommage digne, et la France avait déjà eu des gestes symboliques analogues envers d’autres pays afin de marquer une amitié défiant les traces de conflits très anciens. Mais la République algérienne démocratique et populaire est-elle réellement l’héritière des tribus qui affrontaient l’armée française vers 1850, ces tribus n’ayant nulle conscience d’appartenir à une nation algérienne qui n’était même pas en gestation à l’époque, puisque la France venait de conquérir un territoire où se juxtaposaient des peuples hétérogènes? L’interrogation porte aussi sur l’esprit d’un tel geste mémoriel. Généreuse amitié entre deux peuples sous le signe de l’oubli et du pardon, ou acte de repentance qui ne fera que susciter de nouvelles exigences ?

    De quoi la France devrait-elle s’excuser? D’avoir colonisé l’Algérie? Mais peut-on refaire l’histoire? Et n’y aurait donc rien à sauver de cent trente-deux ans de présence française outre-Méditerranée? La France doit-elle s’excuser d’avoir éradiqué des épidémies, construit des hôpitaux, des routes, des barrages et des ponts, d’avoir scolarisé des enfants, d’avoir introduit une agriculture moderne et d’avoir découvert le pétrole et le gaz du Sahara qui restent la richesse principale de l’Algérie d’aujourd’hui? On dira – avec raison – que la colonisation ne fut pas que cela. Elle eut certes aussi ses échecs, sa part d’ombre, ses contradictions, notamment le fait que ce territoire, partie intégrante de la République française, représenta en réalité une société duale où, sans apartheid légal, mais avec un clivage inscrit dans les faits, deux types de population – Européens et musulmans – coexistèrent sans se mêler totalement.

    Il faut dire la vérité sur le passé, toute la vérité. Le bien, le mal. Sans rien cacher, mais sans manichéisme et sans anachronisme. La colonisation n’a pas été un crime en soi: elle a été un moment de l’histoire. Dans sa phase de conquête, cette colonisation a été rude pour les colonisés, mais il en a toujours été ainsi depuis la nuit des temps. Quant à la guerre d’indépendance, elle a été violente des deux côtés: quelle guerre n’est pas violente? La souveraineté française sur l’Algérie, de 1830 à 1962, représente cependant une expérience commune aux Français et aux Algériens. Cette expérience, il faut la regarder en face, sans l’embellir, ni la noircir. Pour les Algériens, cette vision apaisée serait le préalable à une relation enfin adulte avec la France. 

     

    Fabien Clairefond Jean Sévillia est également chroniqueur au Figaro Magazine et membre du comité scientifique du Figaro Histoire. Il est aussi l’auteur de nombreux essais historiques, dont notamment Les Vérités cachées de la guerre d’Algérie (Fayard, 2018).

    www.jeansevillia.com

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  • Sur Le Figaro, Notre-Dame vers une reconstruction à l'identique.

    Source : https://www.lefigaro.fr/

    Tandis que l’immense échafaudage est en train d’être démonté, au cœur de la cathédrale, il faut pourtant prendre une décision politique rapidement. Et annoncer, officiellement, si on restaure la cathédrale dans son épure; ou si l’on s’autorise une touche contemporaine. Refaire une toiture en plomb? Une charpente en bois? En béton? Une flèche moderne? Et avec quelles contraintes pour le bâtiment? Ces partis pris de restauration restent en suspens, et avec eux, l’avenir d’un des monuments qui a fait l’histoire de Paris.

    Quant à l’idée d’un concours, elle s’est, lentement mais sûrement, enlisée dans les sables du réalisme et de la faisabilité. Les meilleurs experts l’admettent désormais, en privé: il est presque trop tard, si on veut tenir la date de 2024, pour organiser un concours en bonne et due forme.

    Tandis que l’immense échafaudage est en train d’être démonté, au cœur de la cathédrale, il faut pourtant prendre une décision politique rapidement. Et annoncer, officiellement, si on restaure la cathédrale dans son épure; ou si l’on s’autorise une touche contemporaine. Refaire une toiture en plomb? Une charpente en bois? En béton? Une flèche moderne? Et avec quelles contraintes pour le bâtiment? Ces partis pris de restauration restent en suspens, et avec eux, l’avenir d’un des monuments qui a fait l’histoire de Paris.

    Ce jeudi après-midi, les experts de la Commission nationale de l’architecture et du patrimoine se réunissent en grand conclave, dans un auditorium du ministère de la Culture. Instance savante dont les avis sont consultatifs, la commission commencera par écouter longuement Philippe Villeneuve, l’architecte en chef en charge de Notre-Dame. Pendant des mois, il a rédigé une étude d’évaluation, et fixé des éléments de réflexion, pour alimenter les débats. Personne n’ignore qu’il a toujours plaidé pour une restauration à l’identique.

    Son argumentaire fait plus de 3.000 pages, ce qui laisse augurer de la complexité de l’affaire. Après son exposé, Villeneuve sera prié de quitter les lieux, et les discussions s’ouvriront. Pour qui connaît cette commission, peuplée d’ardents défenseurs du patrimoine, elles devraient pencher du côté d’une restauration de la flèche «dans son dernier état connu», c’est-à-dire, celui de Viollet-le-Duc. «Il est possible que l’on ferraille sur le cas de la charpente: pourquoi, en effet, remettre un matériau hautement inflammable, alors que l’on a fait mieux depuis?», glisse toutefois un des membres.

    Déjà, fin juin, les 14 personnalités du conseil scientifique de l’établissement public pour la restauration de Notre-Dame, étaient tombées d’accord pour que Paris retrouve la silhouette iconique de la cathédrale. Il faut dire que dans ce conseil siègent non seulement Benjamin Mouton, ancien architecte de Notre-Dame, mais encore Jean-Michel Léniaud, un des meilleurs spécialistes d’Eugène Viollet-le-Duc. C’est lui qui avait réussi ce tour de force de réunir 1170 conservateurs, architectes et historiens, pour rédiger une tribune appelant le président de la République à «la prudence» et «au sens des responsabilités», face à un enjeu dépassant «tout le monde».

    Publié dans Le Figaro, le texte avait déchaîné les passions et confirmé que l’opinion souhaitait retrouver «sa» cathédrale. «Cette histoire n’est pas une nouvelle manifestation de la querelle entre les anciens et les modernes», affirme aujourd’hui un des membres du conseil scientifique, «restaurer la cathédrale comme avant serait cohérent et consensuel». Sondés par le général Georgelin, président de l’établissement public pour la reconstruction de Notre-Dame, les grands donateurs et mécènes ne disent pas autre chose. «La maison Pinault s’interdit de se prononcer sur les choix de restauration du monument: ce n’est pas son rôle et cela serait très mal interprété. Mais ce chantier doit réunir les gens, et ne peut pas devenir un point de discorde, surtout en ce moment», remarque Jean-Jacques Aillagon, conseiller auprès de François Pinault.

    Il reste donc à convaincre le président de la République, lequel avait promis, alors que les flammes léchaient encore l’édifice, «une cathédrale plus belle encore». Englué par cette promesse présidentielle, l’ancien ministre de la Culture Franck Riester avait fait glisser la formule quelques mois plus tard. Exit les rêves de toits végétalisés ou de flèche en titane: le concours, avait-il indiqué, ne concernera que les abords de la cathédrale. Pour le reste et le plus important, c’est-à-dire la flèche, une grande consultation des Français devait être organisée. Elle ne l’a jamais été, faute de temps, d’énergie et de volonté. Le confinement a définitivement enterré l’affaire. Et le général Georgelin d’enfoncer le clou: «Quand on construit sa maison, on ne demande pas leur avis aux passants» a-t-il raillé il y a quelques jours devant l’Assemblée.

    Si l’avis de la commission nationale est bien celui que tout le monde attend, ce jeudi soir, il reviendra à la toute nouvelle ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, de monter au créneau. Et de convaincre le président de la République que le style néogothique vaut celui de Norman Foster ou de Jean-Michel Wilmotte. Lors de la remise du prix Pritzker, en mai 2019, Emmanuel Macron avait plaidé pour «une audace respectueuse», preuve qu’il avait déjà intégré la difficulté à toucher à ce symbole de Paris. 

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