L'hommage de Frédéric de Natal à Jean Raspail : «La révolution !? A mes yeux, elle a été un désastre !».
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«La révolution !? A mes yeux, elle a été un désastre !». A 93 ans, l’écrivain Jean Raspail n’a rien perdu de sa verve. L’auteur de « Moi, Antoine de Tounens, roi de Patagonie » ou de «Sire» assume son monarchisme décomplexé. Dans un récent entretien accordé au magazine Valeurs actuelles, l’ancien président du Comité national pour la commémoration de la mort de Louis XVI nous explique pourquoi il est royaliste.
«Une décision très logique ». Il ne vient pas d’un milieu qui se prête à la nostalgie monarchique et pourtant, Jean Raspail est venu au royalisme, fruit de ses multiples réflexions. Il a ses détracteurs, ses admirateurs, mais lui n’en a cure. Comme cet avoué de Périgueux dont il va retracer la vie, éphémère roi de Patagonie, Jean Raspail respire la liberté de penser.
« Le roi est la manière la plus simple de gouverner un pays. Car un roi n’est pas seul, il est issu d’ancêtre présents en France depuis des milliers d’années et est façonné par cette histoire familiale intimement liée à son pays », citant la « fameuse phrase qu’adressaient les royalistes au comte de Paris, héritier des quarante rois qui en mille ans ont fait la France ».
L’homme oppose naturellement monarchie et république. « Le roi est l’incarnation de la nation, ce que n’arrive pas à faire un président de la république élu pour un court terme, à la courte vision et aux intérêts égoïstes ». L’oeil percé de mysticisme, il rappelle l’importance du sacre et de ce lien sacré avec Dieu, la religion qui a été l’appui sans faille des monarques et qui a participé à la construction de la France. Le pouvoir royal (…) acquiert toute sa grandeur et sa plénitude » à travers l’onction donnée au roi, à Reims. La révolution française a brisé ce lien entre le peuple et le roi. « En rejetant son Dieu et son roi au profit d’un individualisme dont nous payons le prix désormais », la république, la révolution a créé « au peuple le sentiment qu’il était républicain » déplore t-il. « La façon dont elle s’est déroulée est d’ailleurs d’une sanglante vulgarité avec la tuerie à la Bastille, les arrestations des nobles, les assassinats et déportations des prêtres, les exterminations en Vendée » rappelle-t-il en guise de mémoire aux générations futures.
D’ailleurs, lui qui a été à la tête du Comité national pour la commémoration de la mort de Louis XVI, un événement qui avait rassemblé en janvier 1993, plus de 5000 personnes et personalités sur la place de la Concorde, entend remettre Louis XVI à la place d’honneur qu’il mérite. Quand même, il a dû batailler pour imposer son comité dans une république peu enclin à fêter ce parricide dont elle est l’héritière. Faisant fi des caricatures en vigueur et toujours distillée contre le « Capet », il rappelle-à juste titre- que le roi était « extrêmement populaire au moment du déclenchement de la Révolution ». « C’était un personnage empli de bonté » affirme-t-il, un brin compatissant. Et de nous raconter une de ces anecdotes amusante dont il a le secret. Convoqué à la veille du rassemblement, le préfet avait interdit la manifestation, craignant un débordement. Et de demander au comité de changer la date du rassemblement. «Louis XVI ayant été assassiné le 21, c’était évidemment impossible », encore moins le lieu. Invité sur les ondes de RTL, quelque heures avant, Jean Raspail décrit la situation incongrue qu’il vit, à la Radio. Avant subitement d’apprendre qu’elle peut avoir lieu. Le responsable de ce changement inattendu ? François Mitterrand, alors Président de la république, qui avait entendu la conversation, était intervenu immédiatement. « Le seul de nos présidents à avoir eu le sens de l’histoire de France » ajoute t-il en guise d’ultime hommage à un homme qui a marqué de son sceau les années 1980 et qui fut proche du comte de Paris. Il est vrai qu’à cette époque, le président de la République recevait régulièrement le prétendant au trône et qu’il ouvrait son bureau à Bertrand Renouvin, dirigeant de la Nouvelle action royaliste.
Que pense-t-il de la querelle dynastique est des chances de restauration de la monarchie ? Un système qui n’est pas exsangue de critiques néanmoins, citant certaines erreurs commises par des rois ou des régentes. « Un roi ne reviendra que si l’un des deux prétendants actuels accepte de faire hommage à l’autre » déclare ce traditionaliste convaincu et anti Anne Hidalgo au journaliste qui l’interroge. Avant de surenchérir : « J’ai été très impressionné par Alphonse de Bourbon, décédé en 1989, et père de l’actuel prétendant Louis. Lorsqu’il est venu se présenter au « mouvement royaliste », on a vu arriver un personnage réunissant toutes les qualités (…). Moi qui croyais la partie perdue, j’ai rejoint le royalisme grâce à lui. Il est malheureusement mort dans un accident de ski. Et son fils n’a pas du tout la même prestance. ». Et si il se trompe dans l’interview en affirmant que le prince Jean d’Orléans n’aurait pas participé à « La Manif’ pour tous » (l’actuel comte de Paris a bien défilé en 2013, photos à l’appui-ndlr), il regrette que celui-ci « ne se soit pas levé » pour prendre la tête du mouvement. Pour l’écrivain, Jean aurait dû s’imposer naturellement : «Je suis le roi et ne je peux admettre dans mon pays des choses comme ça ! » aurait dû dire le prétendant, selon Jean Raspail. « Imaginez les conséquences d’un tel communiqué ! » se met à rêver le royaliste. « Je regrette que le courant n’ait pas, ou plus, d’idées » conclu-t-il amèrement, dans une forme de nostalgie qui le mène vers le dernier chapitre d’une vie bien remplie et un nom qui restera à jamais dans les annales de l’histoire et de la littérature.
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article paru le 14 avril 2019 . Source @Valeurs Actuelles.