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  • Notre vieil « ennemi héréditaire », l'Angleterre ...

     

    En deux mots.jpgSi l'on doutait que les journalistes - notamment de radio et de télévision - fussent attelés sans relâche et sans vergogne à une fonction de pure et classique propagande, l'affaire du Brexit, la façon très monolithique, très « formatée » dont elle n'a cessé d'être présentée, en donne une illustration tout à fait claire. Le bourrage de crâne parle chez nous un langage moins brutal, plus doucereux, que celui des régimes totalitaires d'autrefois ou même d'aujourd'hui, mais le résultat est le même. Sans qu'on soit sûr qu'il ne soit pis.

    Les médias n'ont pas désarmé avec le temps. France Inter annonçait encore samedi matin, sous une forme à peine hypothétique, la fonte à venir des effectifs de la City. Ces derniers n'ayant plus d'autre choix que de gagner Frankfort ou ... Paris.

    À ce que l'on dit dans les cercles éclairés, Paris, en effet, ambitionnerait même de ravir à la City sa place de premier rang. On ne demanderait pas mieux dans ces colonnes, si c'était sérieux. Il est permis, peut-être même normal, d'essayer. On ferait bien, toutefois, à notre avis, de ne pas trop y compter. La place et le potentiel de la City dans les opérations financières du monde lui est acquise depuis si longtemps, les liens qu'elle a tissés partout sont si étroits, les habitudes si ancrées, que le plus probable est qu'elle la conservera.

    On se plaît encore à Paris, Bruxelles, et ailleurs, à supputer que le Brexit pourrait bien ne pas aller à son terme, que les Anglais pourraient, en langage gaullien, « caler» , faire machine arrière ; que les négociations de sortie de l'U.E. pourraient ne pas aboutir avant longtemps ; que l'économie anglaise en supporterait de si funestes conséquences qu'elle s'en repentirait assez vite... Bref, toutes espèces de circonstances de nature catastrophique devant amener, en matière européenne, l'opinion britannique à s'inverser.

    Cela nous paraît méconnaître la situation, notamment économique, de l'Angleterre post-Brexit, en réalité nettement plus florissante que la nôtre en ce moment, tout autant que la psychologie du peuple anglais et de ses gouvernants.

    L'Histoire nous enseigne plutôt que les Anglais - peuple et Institutions - après avoir longtemps débattu, s'être affrontés âprement sur la ligne à suivre, une fois la décision prise, s'y tiennent jusqu'à avoir atteint leurs objectifs. De l'entêtement des Britanniques, l'Histoire nous donne maints exemples : la période napoléonienne qui ne s'achève qu'à Waterloo, comme la Seconde Guerre mondiale que l'Angleterre a menée seule, face aux puissances de l'Axe, après le défaut de la France en juin 40, et jusqu'à ce que Russes et Américains entrent dans le conflit. De Gaulle dira qu'elle fut l'âme de cette guerre, finalement gagnée, et c'est sans doute vrai.

    51dW11FzjZL._SX195_.jpgL'actuel ministre des Affaires Etrangères de Grande Bretagne, Boris Johnson, l'ancien maire de Londres, a écrit sur Winston Churchill un gros livre foisonnant, écrit à la va comme je te pousse, construit le plus anarchiquement du monde, mais bourré de faits, d'anecdotes, de mots d'esprit et surtout rempli d'admiration pour le courage, l'héroïsme même, le patriotisme et le profond loyalisme monarchique de son grand homme, dont il est patent qu'il est son modèle et son exemple. Son livre enseigne ces vertus.

    Typique du fonctionnement des institutions britanniques, auxquelles les Français entendent généralement fort peu de chose, une sorte de maturation en cours chez les tories et, probablement, chez l'intéressé lui-même, semble en ce moment devoir pousser Boris Johnson vers le 10 Downing street, où il pourrait bien un jour assez proche succéder â la pâle mais décidée Thérèsa May. Sans-doute est-elle aussi parfaite patriote anglaise que lui, mais sans son panache.

    Ainsi, les fonctionnaires de Bruxelles devraient avoir affaire dans les mois qui viennent â de redoutables et efficaces négociateurs, tandis que les acteurs réels de toutes les formes d'activité européenne, économique et autres, seront - sont déjà - pressés de mettre en place les accords - désormais bilatéraux - qui permettront de la poursuivre. Avec ou sans Brexit, l'Angleterre ne cesse pas d'exister, les réalités de transcender les bouts de papier et les idéologies.

    La France ne devra pas être en reste, n'aura pas avantage à s'enfermer dans son tête à tête de plus en plus inégal avec l'Allemagne. L'égoïsme anglais, quoique sous d'autres formes, n'est pas moindre que celui de notre grand voisin d'Outre-Rhin. Face à cet égoïsme, celui de notre vrai et vieil « ennemi héréditaire », nous aurons souvent à dresser le nôtre, à défendre nos intérêts bec et ongles. Mais, en la circonstance, nous devrions avoir, avec l'Angleterre - et en tirer quelque parti - ce point de convergence fondamental : son obstination à conserver sa souveraineté.  •

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    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Politique & Société • Intellectuels de gauche, intellectuels de droite

     

    Par  Mathieu Bock-Côté

    Dans cette tribune du Journal de Montréal [4.10], Mathieu Bock-Côté constate, au fond, la difficulté d'être de la droite, ou si l'on veut, son inexistence de fait, par soumission à la gauche. Serait-ce qu'elle n' a pas de fond qui lui soit propre ? Serait-ce qu'elle se refuse à reconnaître ces réalités historiques et charnelles, ces quelques vérités anthropologiques  essentielles et profondes dont Mathieu Bock-Côté parle si souvent par ailleurs ? Peut-être est-ce simplement qu'elles n'appartiennent à personne en particulier, ni à la droite, ni à la gauche, ces mauvais clivages nés de la Révolution française. Mais qu'elles appartiennent à tous. LFAR

     

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    Je ne raffole pas du clivage gauche-droite, qui globalement, déforme la pensée politique davantage qu'il ne met en scène ses controverses les plus fécondes. Il est néanmoins difficile à congédier tant ceux qui se veulent « de gauche » y tiennent, dans la mesure où il leur sert à départager le monde entre deux camps irréconciliables. Cela, en flânant sur les médias sociaux, je constate encore ce soir une chose qui depuis toujours, m'agace: les gens qui se disent « de gauche » aiment souvent se dire bouleversés, par ceux qui les critiquent « sur leur gauche ». Ils sont en débat, autrement dit, avec ceux qui les débordent sur leur gauche, comme s'ils craignaient de ne pas suivre le rythme du progressisme.

    Mais rarement, très rarement, on les entendra se dire « bouleversés » par un auteur classé « à droite » - je dis classé à droite car généralement, on se réclame moins de cette étiquette qu'on se fait ranger un peu malgré soi dans cette case. C'est un peu comme si la gauche discutait en famille tout en rejetant en bloc les auteurs de droite. On ne discute pas avec eux, on ne discute pas avec elle : on les disqualifie, on la combat. La droite n’est pas l’autre camp avec lequel débattre mais une menace qu’il faudrait toujours repousser. La droite ne porte pas une autre vision du monde avec sa part de légitimité : elle représente ce qu’il faut faire tomber pour qu’un monde meilleur émerge enfin. Fondamentalement, la droite est moins légitime que la gauche - elle y est moralement inférieure. La droite a si mauvaise réputation, d'ailleurs, que lorsqu'un intellectuel de gauche quitte son camp, il passe moins à droite qu'il ne condamne le clivage gauche-droite.

    Et contrairement à ce qu’on pourrait croire, la « droite » ne fonctionne pas selon les mêmes codes. Le grand rêve des intellectuels de droite, c’est d’être admis dans le débat des intellectuels de gauche, à la manière du « bon réac », du « conservateur respectable » - autrement dit, de l’homme de droite pas si à droite que ça d’abord et avant tout occupé à se dissocier de son propre camp. Le grand rêve de l’homme de droite, c’est de ne plus porter cette étiquette qui l’encombre. Encore une fois, on peut le comprendre puisqu’on lui accole davantage qu’il ne se l’approprie. Nationalistes, conservateurs, libéraux, réactionnaires, libertariens ont bien peu de choses en commun. On aurait beau leur chercher des points communs substantiels, on ne les trouvera pas.

    Souvent, l’intellectuel de droite, si cette formule a un sens (dans la mesure où, encore une fois, il faut le dire, la droite est une catégorie pêle-mêle qui rassemble tous ceux dont la gauche n’a pas voulu) s’empressera de citer l’intellectuel de gauche qui pense comme lui, comme si le fait qu’un homme de l’autre rive partage ses idées confirmait ses analyses. L’homme qu’on a enfermé contre son gré à droite espère une chose : transcender le clivage gauche-droite dans lequel il se sent à l’étroit et en mauvaise compagnie. Il citera avec beaucoup moins de zèle celui qui est associé à son propre camp, car alors, il aura l’impression de s’enfermer dans un ghetto intellectuel. La vie intellectuelle est aussi une affaire de clans.

    Tout cela pour dire que la vie intellectuelle ne met pas en scène un fameux débat entre la gauche et la droite, mais entre la gauche « radicale » et la gauche « modérée » et que certains intellectuels classés à droite parviennent de temps en temps à s’y faire une place, soit pour jouer le ronchon de service, soit pour servir de caution, en plus de les réduire au statut de polémistes ou de commentateurs. Et on ne voit pas trop dans quelles circonstances cette manière de débattre de la cité pourrait changer, tant la philosophie politique et les sciences sociales évoluent dans un consensus progressiste qui est globalement celui des institutions intellectuelles et qui impose aussi ses codes dans une part non-négligeable du système médiatique.    

    Mathieu Bock-Côté

    Mathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (VLB éditeur, 2013), de Fin de cycle : aux origines du malaise politique québécois (Boréal, 2012) de La dénationalisation tranquille (Boréal, 2007), de Le multiculturalisme comme religion politique (éd. du Cerf, 2016) et de Le Nouveau Régime (Boréal, 2017).

  • Duel d'anthologie Zemmour - Cohn-Bendit : c'est avec Zemmour qu'on n'est pas couché !

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    Le retour d'Eric Zemmour dans l'émission de Laurent Ruquier a donné lieu a un extraodinaire dialogue entre lui-même et Cohn-Bendit. Un grand moment à regarder, à revivre, à ne pas manquer ! On y retrouve la vivacité de certains débats des grandes années d'On n'est pas couché. Mais surtout la perspicacité, désormais largement reconnue et appréciée, des analyses de Zemmour.

    Théophane Le Méné a donné de cette émission, pour Figaro Vox, un récit fidèle, vivant, aux remarques et commentaires d'un ton toujours juste. Vous pourrez le lire ici.

    Eric Zemmour est, depuis la sortie du Suicide français, sur tous les plateaux de télévision, sur toutes les radios, il est de tous les débats, sur toutes les chaînes, sur tous les sites et blogs de la toile, il fait la une des quotidiens, la couverture des hebdomaires, la matière de quantité d'articles. En vérité, il est devenu incontournable. Il est partout invité parce qu'il assure l'audience des émissions auxquelles il participe. Et de ce succès, largement mérité et, sans-doute, pour lui, libérateur, il fait, partout, sans concession, l'usage que l'on sait. Il est en train de devenir une réfrence intellectuelle et d'acquérir une autorité politique indéniables. Et sa politique consiste, en tous points, dans la défense de l'héritage français. On ne peut que lui en savoir gré. Lafautearousseau   u

     

    Tout avait pourtant si bien commencé. Laurent Ruquier arbitrait joyeusement, Léa Salamé et Aymeric Caron s'aimaient, Cécile Duflot performait et Bernard Kouchner s'enthousiasmait sur lui-même en même temps qu'il jouait sa scène de colère habituelle. Ainsi repartait l'émission «On n'est pas couchés» pour une nouvelle saison, dans la joie et la bonne humeur. Elle annonçait une année paisible, loin des tracas quotidiens. Et puis il a fallu qu'Eric Zemmour s'invite samedi dernier et nous ressasse ses vieilles rengaines: le monde, ce vieux rafiot à la dérive, la société postmoderne et ses déclinaisons multiculturelles, multisexuelles. En somme qu'il nous raconte à nouveau que la France se meurt et qu'avant c'était mieux. Une complainte qu'il avait même osé poser sur le papier dans un ouvrage au titre saisissant: «Le suicide français».

    Cette intervention cathodique en aurait laissé plus d'un coi si l'on n'avait pu compter sur la présence salvatrice d'invités de marque, précisément soucieux de se démarquer d'un journaliste coupable de s'obstiner à nommer les choses, surtout quand elles sont déplaisantes. Car c'est bien de ce crime dont on juge Eric Zemmour coupable: ne pas voir dans l'embrasement des banlieues une manifestation festive de la diversité, ne pas voir dans la mort symbolique du père la fin d'une oppression séculaire, ne pas voir dans l'avènement du féminisme et des revendications des minorités la désinfection d'une France moisie.  

    Il fallait du dur pour porter l'estocade. Bien loin de la noblesse du duel à fleuret moucheté, ce fut l'ensemble des invités, sans exception, qui eurent droit à leur petit morceau de Zemmour. Daniel Cohn-Bendit joua de son capital sympathie et gueulard pour acculer dans les cordes celui qui représente son exact contraire: on n'en retint rien. La comédienne québécoise Anne Dorval essaya d'arracher quelques larmes en évoquant l'amour, la condition des femmes et tutti quanti: une engeance qui règne un peu partout comme une mélodie trop écoutée dont on n'arrive plus à se défaire. Même Michel Denisot, dont on connait la propension à ne pas mettre les mains dans le cambouis par une platitude légendaire, hasarda quelques piques en même temps qu'il racontait ses histoires à Avoriaz ou dans la poissonnerie de Gérard Depardieu qui borde la rue des Saint-Père. Puis vint le tour d'Aymeric Caron. Le plus célèbre des végétariens allait enfin pouvoir montrer qu'il avait des crocs et plastronnait, fier comme Artaban de montrer à son prédécesseur qu'il pouvait donner la réplique, malgré une inculture assumée et une hargne qui la mettait en exergue. Alors il attaqua sur les chiffres, les sources, s'attachant bien sûr à ce qu'Eric Zemmour ne puisse répondre. On a beau multiplier quelque chose par zéro, le résultat est toujours nul. Il eut mieux fait de lire le livre. Léa Salamé ne fut pas en reste. Sûrement, celle qui arbitra un temps le débat hebdomadaire entre Domenach et Zemmour, voulait-elle montrer qu'elle entrait dans la cour des grands. En parfaite réductrice, elle en vint à réduire Zemmour à sa judéité non acceptée ; en cause, sa vision de l'histoire de Vichy. Une étudiante en première année de psychologie aurait sûrement fait mieux. Un étudiant d'histoire en première année l'aurait volontiers corrigée.

    La fin de l'émission arriva. Les arbitres de l'élégance retourneraient bientôt à leurs quartiers du boulevard Saint-Germain, rassurés d'avoir pu, ce soir, redonné un coup de rose à la sombre réalité qu'avait osé peindre Eric Zemmour.

    Le sourire bright, le teint bronzé et la verve éloquente, on peut railler ce que dit Eric Zemmour sur les plateaux et s'imaginer que si le peuple pense mal, il faut changer le peuple. Mais l'histoire grecque est là pour nous rappeler ce qu'il en coûte de ne pas écouter certains présages. Eric Zemmour, sans aucun doute, est la Cassandre de notre siècle. Et la guerre de France ne doit pas avoir lieu.

     

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     Par Théophane Le Méné

     

  • Le progressisme de Macron par Gérard Leclerc

    Le président de la République a relancé dans le débat public le mot de progressisme, en invitant lors de sa campagne présidentielle les progressistes de toutes tendances à le rejoindre. Il est possible que du point de vue du marketing et de l’efficacité de la communication, c’était judicieux. Est-il sûr pour autant que le contenu du concept de progressisme avait été travaillé avec tout le soin nécessaire ?

    13584804_1050497325039319_7100176010205014433_o.jpgL’histoire des idées met en évidence sa malléabilité et on n’est pas forcément convaincu par les débuts d’explication de certains proches du chef de l’État. Doit-on penser à une idéologie, c’est-à-dire un système organisé pouvant se réclamer de certains courants de la pensée ou à un simple mot d’ordre ayant l’avantage de ringardiser son opposition ou ses opposants ?

    Il est un domaine privilégié où le progressisme semble mieux marquer ses intentions émancipatrices, c’est celui des réformes dites sociétales. C’est d’ailleurs celui que la gauche s’est approprié depuis qu’elle a rompu avec son anticapitalisme marxisant. Faute de révolution économique, le changement décisif des modes de vie avec ce qu’ils supposent de rupture anthropologique est devenu un objectif essentiel. Que retiendra-t-on du quinquennat de François Hollande en dehors du mariage pour tous ? Emmanuel Macron a poursuivi dans le même sens avec des réformes que son prédécesseur n’avait pas osé mener à terme, comme la PMA élargie. Il semble, pour le moment, avoir exclu de son programme la légalisation de l’euthanasie, en faveur de laquelle milite pourtant un leader de la République en marche, le professeur Jean-Louis Touraine, le plus déterminé des partisans d’un tournant décisif en matière de transgression des limites.

    C’est peut-être que le progressisme bute sur certains interdits, même lorsqu’ils sont obsolètes pour les plus idéologues. Ces interdits sont d’ordre moral, et une figure aussi emblématique pour la gauche que celle de Philippe Meirieu peut exprimer ouvertement sa crainte « d’un changement radical du rapport anthropologique de l’humain à la procréation ». Oui on non, le pouvoir progressiste est-il déterminé à suivre l’exemple de la Belgique et des Pays-Bas en matière sociétale, avec le test décisif de l’euthanasie ? On ne pourra échapper à un débat là-dessus, au terme duquel le progressisme sera mis en demeure d’énoncer son véritable contenu idéologique.

    Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 23 janvier 2020.

     

    Emmanuel Macron se veut progressiste selon son mot d’ordre de la présidentielle. Mais quel est le contenu de ce progressisme ?
    © Rémi Jouan, CC-BY-SA, GFDL, Wikimedia Commons
     

    Le président de la République a relancé dans le débat public le mot de progressisme, en invitant lors de sa campagne présidentielle les progressistes de toutes tendances à le rejoindre. Il est possible que du point de vue du marketing et de l’efficacité de la communication, c’était judicieux. Est-il sûr pour autant que le contenu du concept de progressisme avait été travaillé avec tout le soin nécessaire ? L’histoire des idées met en évidence sa malléabilité et on n’est pas forcément convaincu par les débuts d’explication de certains proches du chef de l’État. Doit-on penser à une idéologie, c’est-à-dire un système organisé pouvant se réclamer de certains courants de la pensée ou à un simple mot d’ordre ayant l’avantage de ringardiser son opposition ou ses opposants ?

    Il est un domaine privilégié où le progressisme semble mieux marquer ses intentions émancipatrices, c’est celui des réformes dites sociétales. C’est d’ailleurs celui que la gauche s’est approprié depuis qu’elle a rompu avec son anticapitalisme marxisant. Faute de révolution économique, le changement décisif des modes de vie avec ce qu’ils supposent de rupture anthropologique est devenu un objectif essentiel. Que retiendra-t-on du quinquennat de François Hollande en dehors du mariage pour tous ? Emmanuel Macron a poursuivi dans le même sens avec des réformes que son prédécesseur n’avait pas osé mener à terme, comme la PMA élargie. Il semble, pour le moment, avoir exclu de son programme la légalisation de l’euthanasie, en faveur de laquelle milite pourtant un leader de la République en marche, le professeur Jean-Louis Touraine, le plus déterminé des partisans d’un tournant décisif en matière de transgression des limites.

    C’est peut-être que le progressisme bute sur certains interdits, même lorsqu’ils sont obsolètes pour les plus idéologues. Ces interdits sont d’ordre moral, et une figure aussi emblématique pour la gauche que celle de Philippe Meirieu peut exprimer ouvertement sa crainte « d’un changement radical du rapport anthropologique de l’humain à la procréation ». Oui on non, le pouvoir progressiste est-il déterminé à suivre l’exemple de la Belgique et des Pays-Bas en matière sociétale, avec le test décisif de l’euthanasie ? On ne pourra échapper à un débat là-dessus, au terme duquel le progressisme sera mis en demeure d’énoncer son véritable contenu idéologique.

     

  • SOUTENEZ, PARTICIPEZ ! ACTIVITES DES ROYALISTES ET/OU DU PAYS REEL DANS TOUTE LA FRANCE...

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    Cette page est ouverte à tous, lafautearousseau se voulant "la maison commune" de tous les royalistes, de toute obédience (RN/CRAF, NAR, GAR, DEXTRA, indépendants/"électrons libres"...)

    Aux deux seules conditions que l'on soit dans la double fidélité à l'école de pensée de l'Action française et à notre Famille de France, à laquelle nous sommes particulièrement attachés...

    Envoyez-nous les annonces et/ou les visuels de réunions de rentrée, Cercles d'études et de formation, Cafés politique/actualité/histoire, manifestations diverses etc...

    Après avoir appuyé la grande manif du 6 octobre, lafautearousseau appuie les suivantes : Manifestations contre la PMA les 1er décembre 2019, 19 janvier, 8 mars, 17 mai et 14 juin 2020...

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    Colloque de l'Action Française : Au service de l’Ecologie intégrale.

    Samedi 9 Mai 2020, de 14h à 22h 

    Colloque organisé par Le bien commun, L’Incorrect et Politique magazine.

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    https://www.actionfrancaise.net/evenement/colloque-au-service-de-lecologie-integrale/

     

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    Y aurait-il, même venant de loin, pour l'occasion, des personnes désireuses de venir se faire "expliquer", même de dehors, dans la rue et devant le portail fermé, l'ensemble "maison/jardin/l'homme Maurras" : lafautearousseau peut vous recevoir et vous fournir toutes les explications nécessaires...

    Ces rencontres calmes, pacifiques, seraient l'occasion de manifester, sereinement mais publiquement, devant le portail de la maison de Maurras :

    1. Pour demander la ré-ouverture de la maison et la possibilité de la visiter, ou alors que la Mairie donne publiquement la raison de la fermeture du site, et un calendrier pour les travaux et sa réouverture à la visite...

    2. Pour demander le libre accès au jardin, en permanence...

    3. Et pour demander l'inscription de la très belle "maison de Maurras" au réseau des Maisons des Illustres, afin qu'elle devienne un grand centre intellectuel - national et international - de recherches sur Maurras, sa vie, sa personnalité, son oeuvre...

    Il vous suffit de nous contacter, et nous organiserons la chose ensemble, aussi souvent que des groupes se manifesteront...

     

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    • Conférences, Réunions, Cercles de formation, Manifestations diverses... dans la France entière...

     

    L'Action française Limoges vous invite pour une conférence dont le thème sera "La Monarchie et la classe ouvrière" le Samedi 15 Février à 16h00. 

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    Le Samedi 15 février à Rouen, à 16h00, se tiendra une réunion d'information destinée à l'ensemble de nos sympathisants Normands, Picards et Oisiens. Enzo Sandré sera présent pour prendre des contacts en vue d'ouvrir des sections. Renseignement : rouen.etudiants@actionfrancaise.net

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    Cette réunion sera suivie d'une conférence dont le thème sera "Etre un militant efficace" animée par Enzo Sandré, à 17h00.

    Ce sera l'occasion pour les militants des jeunes sections de partir sur de bonnes bases !

    PAF : 2€ adhérents / 4€

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    La conférence sera précédée de l'assemblée générale du centre Lesdiguières à 18h30. Vous pouvez y assister.

     

    L'Action française Bourg en Bresse vous invite à son 1er cercle de formation dont le thème sera "Bases de la doctrine maurrassienne" animé par Stéphane Blanchonnet le Jeudi 27 Février à 19h30.

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    • PARIS CERCLE DE FLORE (10, rue Croix-de-Petits-Champs, 75001) :

    à 20h,

    10 rue Croix des Petits Champs, 75001 Paris, Metro 1 et 7 : Palais Royal - Musée du Louvre.

    PAF : 5€ (conférence) 10  (conférence + buffet)

     

    Le Cercle de Flore recevra Gérard Leclerc Vendredi 28 Février à 20h00 pour une conférence hommage à Pierre Debray dont le thème sera "Une politique pour le XXIe siècle".

    Une séance de dédicace ainsi qu'un buffet suivront la conférence.

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    • Les Mardis de Politique magazine :

     

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    GROUPE D'ACTION ROYALISTE (GAR)

     

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    DEXTRA

    Page  FB : https://www.facebook.com/dextra.franceenracinnee/

     

     

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    • Le Café Actualité d'Aix-en-Provence

     

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    • Le Café Histoire de Toulon

     

    1) Le Café Histoire de Toulon  vous informe de la causerie de Yohan Picot : " De la Loge au confessionnal ".  Cette causerie aura lieu le dernier mercredi du mois, le 26 février 2020 au pub des Missionnaires de la Miséricorde Divine, Le Graal (377 avenue de la République , 83000 Toulon - entrée gratuite).

    La causerie de Yohan Picot se construira autour du témoignage d'un parcours en société initiatique, la Franc-Maçonnerie . 
    Il abordera le principe des cultes à mystère, la prétendue compatibilité entre la maçonnerie traditionnelle et le christianisme catholique, la théorie du symbolisme, l'ésotérisme et l'occultisme.  Le débat de fin de causerie sera animé par le professeur Alain Vignal. Sur place il sera possible de se procurer auprès de nos amis de La Librairie de l'Enfant Jésus, l'ouvrage de Monseigneur Rey « Peut-on être chrétien et franc-maçon ? ».
     
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    2) Le Café Histoire de Toulon vous informe d'une causerie exceptionnelle le 27 mars 2020 pour le centenaire de la béatification de Sainte Jeanne d'Arc. 
     
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    • Sur Radio Courtoisie :

  • La technocrature, maladie sénile de la démocratie La technocrature, maladie sénile de la démocratie, par Germain Philipp

    Oligarchie-Nomenklatura-Pays légal

    En 2017 la «  technocrature  » à pris le pouvoir politique pour sauver le Système disqualifié par l’élite politique. La pertinente dénonciation de ce coup de force technocratique a  été réalisée par l’ultra-gauche mais dans l’approche complotiste des «  gros contre les petits  ». S’étant également intéressé au schéma explicatif proposé par le populisme, les maurrassiens préfèrent pourtant analyser la technocrature comme un phénomène de physique sociale au travers la distinction Pays légal/pays réel.

    philippe germain.jpgPour cela ils doivent traiter de l’oligarchie, ce concept  mis en avant depuis 2010, par le monarcho-gaulliste Bertrand Renouvin  : «  Il faut lire Alain Minc. Non pour apprendre quelque chose sur l’économie et la finance. Mais pour savoir comment ça pense, un oligarque. Ou plutôt, comment ça regarde le monde et la société française. Ecoutons Alain Minc comme on écoute une radio ennemie, pour savoir ce qui se trame dans l’élite au pouvoir.  » Ce même  Alain Minc sera en 2017 un soutien farouche au technocrate Macron et à l’oligarchie.

    L’oligarchie « de fait  » est la forme de gouvernement démocratiquement ouvert à tous les citoyens mais où le pouvoir est confisqué par une petite partie de ceux-ci. Par précision disons l’ «  oligarchie démocratique  ». Ce système est complexe, avec plusieurs cercles de pouvoirs de plus en plus concentrés. L’ exercice du pouvoir discret et collégial de sa classe dirigeante repose sur des familles dominantes, dont la position politique vient du patrimoine transmis aux enfants avec une l’éducation organisée dans cette perspective. Pour gagner en clarté, nommons les  :  «  familles républicaine  ».

    Le terme d’oligarchie mis en avant par Renouvin était apparu dans l’Action françaisequotidienne dès 1908 en reprenant une citation d’ Hyppolite Taine, l’historien de la Révolution française. Il y fut modestement employé chaque année une quinzaine de fois, avec une pointe dans les années 1930 ou Charles Benoist introduisit la distinction entre « pays réel » et « pays légal », largement popularisée par Charles Maurras. Cette distinction, Maurras ne l’a pas « théorisée »  mais son observation des mécanismes concrets du pouvoir de la III° république lui a permis de mettre en évidence sa fonction décisive. Jamais l’idée ne lui serait venue d’en tirer une théorie immuable. C’est pourquoi, juste avant l’élection présidentielle de 1980, Pierre Debray jugea nécessaire de s’interroger – dans l’excellent mensuel marseillais d’Action française  Je suis Français –  sur la pertinence de maintenir ou non cette distinction dans le cas ou les socialistes prendraient le pouvoir de la V° république.

    A la façon de Jacques Bainville, en observant dans l’histoire les répétitions d’une même causalité de l’antiquité jusqu’a Hitler et Staline, Debray  dégagea une nouvelle loi de physique sociale qu’il nomma  «  du développement d’oligarchies nouvelles  ». Son expression était simple  : «  toute révolution produit une «  nouvelle classe  » soudée à la longue par l’intérêt.  » Par la prise en compte de la notion d’interet dans le temps, cette loi se differencie du schéma complotiste de gauche (les Gros contre les petits) et de celui ultra-droitiste (le mondialisme) mais aussi du référentiel marxiste de lutte des classes (Bourgeois contre prolétaires).

    Pour utiliser cette nouvelle loi, Debray induisit une hypothèse suite à l’intérêt politique de cette période pour le phénomène communiste de la «  Nomenklatura  ». A savoir «  N’y aurait-il pas, dans le passé de la France, une tendance au nomenclaturisme, cette classe de privilégié dominant la société soviétique  ?  »  Après l’étude de la mise en place de l’Administration, comme service de l’Etat, par Richelieu et Louis XIV,  il constata qu’après l’ébranlement de la Révolution française, Bonaparte du reconstruire une classe dirigeante. Debray découvrit que Napoléon Bonaparte l’avait fait sur une autre base que celle de l’Ancien régime (ni la noblesse ni la bourgeoisie n’avait résisté à 1789) car il forgea de toute pièce une nouvelle classe dirigeante. Le principe de Bonaparte  était simple  :  Ces gens venu de tous les milieux seraient soudés par l’intérêt, celui de l’enrichissement obtenu par la confiscation du pouvoir économique et politique. Cette nouvelle classe dirigeante a été forgé  à partir du Directoire (1794), grâce à l’enrichissement résultant de la spéculation sur les biens nationaux (confisqués au clergé et aux émigrés et achetés à bas prix) ;  la spéculation sur les Assignats, la suppression des agents de change à la Bourse, la corruption, les fournitures aux armées, mais aussi le pillage des pays conquis. C’était «  la nomenklatura du citoyen-général Bonaparte  »  en déduisit Debray. En 1980 la plus belle illustration de sa continuité dans le temps était le président de la république Valéry Giscard d’Estaing et certains chefs socialistes comme Rocard et Chevenement.

    Cette nouvelle classe – désignée «  Nomenklatura  »  ou «  Oligarchie démocratique  » ou «  Pays légal  » – est devenue héréditaire. Elle gouverne, opprime et exploite la France depuis le Directoire. C’est ce vieux monde que la technocrature se vante d’avoir balayé en 2017. En fait, elle l’a surtout sauvé mais pour comprendre cette opération, menée par le coup de force médiatico-policier de  «  l’Affaire Fillon  »,  nous allons devoir chercher a savoir qui compose le Pays légal ? Qu’elles sont ses fonctions  ? Quel est son mode de renouvellement nous permettant de comprendre la conquête de tous les pouvoirs par la technocrature  ?  

    Pour lire l’intégrale de la série « La technocrature, maladie sénile de la démocratie », cliquez  sur :

    2017 le coup de force de la Technocrature

    Le complotisme d’extreme-gauche

    Comment analyser les élites du pays légal

    Interet du référentiel populiste

  • Un pays cul par-dessus tête ! par Christian Vanneste

    La France fut le pays de Descartes, et celui de Voltaire, c’est-à-dire celui d’une raison parfois un peu sèche cultivant toujours le doute, souvent l’ironie et parfois le renversement des idoles qu’elle avait adorées. Cela ne l’empêchait pas d’être cohérente à sa manière, toujours plus ou moins en guerre civile, avec une république qui se voulait davantage une anti-monarchie qu’un Bien Commun, et une laïcité plus bouffeuse de curés que neutralité tolérante.

    3309368304.jpgLa France, cinquième puissance mondiale, avait encore de l’allure, même si le décalage entre ses discours officiels, sa prétendue exemplarité rayonnant sur la planète, et la réalité crue de sa présence au monde s’élargissait d’heure en heure. Lorsque les Japonais ou les Chinois visitent la France, ils se rendent à Versailles plus qu’au Panthéon, s’extasier devant le palais de Louis XIV plutôt que dans l’Eglise convertie au culte du progressisme républicain.

    Lorsque les Français ont porté Macron à l’Elysée pour tout changer, alors qu’il y était déjà dans un bureau depuis cinq ans, ils auraient du penser qu’ils appliquaient inconsciemment la célèbre sentence du « Guépard » : « Pour que tout reste comme avant, il faut que tout change ». Rien n’a donc changé, sauf que cette formule n’indique nullement une situation immobile, mais la continuation d’une descente, la poursuite d’une décadence française qui paraît irréversible, la prolongation qui semble sans fin d’un « voyage en Absurdie ».

    Il ne se passe pas de jour sans que l’on n’ait les signes de cette dérive zigzagante, de ces pitoyables tête-à-queue. Ainsi apprend-on que l’assassin de sa compagne, condamné à 30 ans de prison par la Cour d’Assises des Pyrénées Orientales en 2017, a été libéré en raison du retard mis par la Cour d’Assises de Montpellier pour le juger à nouveau après son appel. Les lois favorables aux justiciables, davantage penchées sur le sort des malheureux condamnés que sur celui des victimes, qui ont le tort d’être mortes, font que l’appel est devenu possible après un jugement en Cour d’Assises, et que la prison, désormais considérée comme une épouvantable torture, voire comme un école du crime, doit être évitée au maximum, et suspendue dès que possible. Au moment même où le gouvernement fait de la lutte contre les violences conjugales, bien sûr uniquement celles venant des « mâles blancs », voilà que l’un d’eux est remis en liberté ! Pourquoi ? Mais, parce que la Justice manque de moyens et que cette pauvreté en arrive à mettre en panne la plus haute juridiction pénale, celle qui donne la parole au peuple, encore, la Cour d’Assises ! Pendant ce temps, au pays de Voltaire, et des « droits de l’homme », au premier rang desquels figure la liberté d’expression, la noria des dénonciations brandies par les inquisitions lobbyistes mobilise les magistrats et les avocats pour juger indéfiniment Eric Zemmour et Renaud Camus…. qui ne font qu’exprimer ce que beaucoup de Français pensent.

    Peut-être les juges auront-ils aussi à longuement s’intéresser au sort des djihadistes prétendument français, que la loi actuelle pouvait parfaitement priver de leur nationalité pour trahison et laisser entre les mains de la justice du pays dans lequel ils ont accompli leurs méfaits ? Mais non : il faut qu’ils reviennent en France, comme il a fallu que le djihadiste Flavien Moreau, puis Mohamed Achamlane, chef de Forsam Alizza, soient libérés après quelques années d’incarcération, ou, cerise sur le gâteau, que le terroriste Oualid Boudissa quitte la prison par erreur… Pour la sémillante Garde des sceaux, tout cela n’est que normal : il y a 1100 radicalisés et 500 terroristes en prison. Il faudra bien qu’ils sortent…. Gestion hôtelière oblige dans un pays qu’un mélange hypocrite de mauvaise gestion et d’idéologie amène à ne pas construire le nombre de cellules nécessaires pour ensuite faire de la surpopulation carcérale le marronnier préféré des journalistes aux heures creuses de l’été.

    Peut-être les juges devront-ils se pencher sur les plaintes qui seront déposées à l’encontre de ce « chanteur » qui, sur « la radio du service public », a cru devoir fredonner que Jésus-Christ était pédé…. On remarquera en passant que nos héroïques gratteurs de guitare ou humoristes sont plus respectueux à l’égard du Prophète. N’allez pas croire que c’est l’effet de la « jurisprudence » Charlie et du risque mortel encouru par celui qui oserait. Non, c’est par respect de l’Autre, vous savez celui qui est victime du racisme… D’ailleurs Belattar a montré son indépendance d’esprit en s’en prenant à Zineb El Rhazaoui, une survivante de Charlie. Dans ce sens là c’est moins dangereux, et l’humour ou le rap permettent d’être raciste, sexiste, de clamer que l’on « baise la France jusqu’à l’agonie » ou qu’on va pendre les Blancs… Sursis, classement sans suite : la France a pris l’habitude de marcher sur la tête !

  • Destins Croisés et Liberté d’Expression, par Christian Vanneste.

    L’hypothèse d’un dieu se moquant des hommes et s’amusant dans son éternel ennui avec les péripéties de leur existence se présente parfois à l’esprit avec un air de vraisemblance. Renaud Camus, non sans humour, souligne ainsi qu’à deux pas du Palais de Justice où il était condamné en première instance, à la même heure, son ami Alain Finkielkraut était élu à l’Académie Française. Sa condamnation sous prétexte d’islamophobie et ma relaxe d’une prétendue homophobie paraissent nous séparer en tous points. Cependant les audiences de nos deux affaires avaient lieu le même jour devant la fameuse XVIIe Chambre qui veille sur ce que les lois laissent subsister en France de la Liberté de la Presse.

    christian vanneste.jpgEt Renaud Camus, dont j’apprécie le style et le souci permanent de ciseler notre langue, avait fait preuve d’une honnêteté intellectuelle indissociable, elle-aussi du personnage. En « témoin de moralité », il m’avait fourni une attestation de non-homophobie. Je n’ai malheureusement aucune qualité requise pour lui attribuer un certificat de non-islamophobie. Mais nos deux démarches revêtent malgré les apparences une étonnante similitude. Nous sommes l’un et l’autre passionnément attachés à la conservation de notre civilisation. J’y inclus la religion chrétienne, sa conception de la famille, et les conséquences démographiques heureuses de celle-ci. Sur ce point, nous divergeons. Mais nous avons l’un et l’autre osé affronter la pensée unique imposée par les médias. Nous l’avons fait avec honnêteté et parfois avec un style qui a prêté le flanc à la critique. On me reproche toujours mon hyperbole d’il y a dix ans : « la menace pour la survie de l’humanité », comme si elle n’était pas la figure d’un raisonnement d’un bon sens tel qu’on retrouve la même idée chez Voltaire et chez… Oscar Wilde. De la même façon, interrogé sournoisement par un journaliste de Canal+, Renaud Camus avait filé une métaphore guerrière à propos de l’expansion de l’islamisme dans notre pays. L’hyperbole ou la métaphore peuvent être au discours ce que la caricature est au dessin. Celle-ci témoigne de la bonne santé de la liberté de la presse. On a vu récemment qu’elle était menacée. Mais, ce qui est plus grave, c’est que certains journalistes, certains organes de presse se fassent les complices de son assassinat.

    Lorsqu’en Février 2012, j’étais interviewé par un site catholique à propos de ma Proposition de Loi contre l’accès des mineurs aux contenus pornographiques sur internet (dont personne ne parle jamais), j’ai cru utile de répondre à une question qui n’était pas prévue sur les raisons pour lesquelles le « mariage » unisexe était accepté par 63% de Français. Cet entretien était destiné à un public catholique. C’est une grande chaîne de radio qui lui a donné un retentissement inattendu. On a d’abord orchestré un harcèlement médiatique sur le thème du négationnisme, puis ne pouvant me poursuivre sur ce terrain où je disais la vérité, on a ensuite tenté de me faire condamner pour avoir dénoncé le poids du lobby et souligné le narcissisme à l’oeuvre dans notre société. Pendant toute cette affaire qui m’a fait perdre mon mandat parlementaire, j’ai manifestement été la victime d’une chasse aux sorcières de la part de journalistes qui trahissent leur profession, et de politiciens vindicatifs, ignorants et paresseux. Renaud Camus qui connaissait bien la question de la déportation homosexuelle pour avoir défendu la mémoire de Pierre Seel m’a soutenu, tout simplement parce qu’il savait que je disais la vérité. J’aurais aimé bénéficier du même soutien de la part des milieux catholiques et notamment des organisateurs de la Manif pour Tous… Les juges, avec mesure, ont considéré qu’il n’y avait aucun appel à la haine dans mes propos et que ceux-ci étaient trop peu sérieux pour revêtir un réel danger. L’opportunité commandait en effet de ne pas condamner les idées de celui à qui la Cour de Cassation avait déjà donné raison en s’appuyant sur la jurisprudence de la CEDH. Mais reconnaître la solidité du discours aurait en revanche affaibli la portée de la loi et créé un trouble dans l’opinion dominante. Le problème n’est pas celui de la Justice, mais celui de la Loi et de ceux qui la font si mal pour des raisons idéologiques ou parfois bassement électorales.

    Et voilà que Christine Boutin nous rejoint, Camus et moi. LGBT porte plainte contre elle pour avoir employé le mot d’abomination à propos de l’homosexualité. Elle est chrétienne affichée. Elle utilise le mot du Lévitique pour exprimer un jugement moral sur un comportement. Que ce mot soit désagréable est évident, mais précisément, il n’est pas interdit d’être désagréable lorsqu’on exprime une opinion. Sur ce point, la loi française est excessive et confuse. Juger une personne pour ce qu’elle est, pour sa couleur de peau, par exemple, n’est pas une opinion, mais juger ce qu’elle fait ou ce qu’elle pense devrait appartenir au libre débat. L’interdire est une atteinte à un Droit de l’Homme fondamental : la liberté de penser et d’exprimer cette pensée. Qui plus est, comme le reconnaît avec sincérité Renaud Camus, le déséquilibre des forces en présence, une ou plusieurs associations largement soutenues par des fonds publics ou privés, d’un côté, et une personne dénuée de moyens importants de l’autre, peut décourager la « sorcière ». Le battage médiatique, avec ou sans condamnation, affaiblit de toute manière sa position. Il y a là un procédé pervers qui conduit à l’autocensure. Je souhaite pour ma part que Renaud Camus fasse appel et que Christine Boutin dépose à l’occasion de son « affaire » une Question Prioritaire de Constitutionnalité pour qu’on revienne sur ces lois liberticides, contraires aux principes fondamentaux de notre droit, et qui sont une honte pour le pays de Voltaire.

  • Société • Bock-Côté : « La cité est périssable, mais c'est la grandeur de l'homme de vouloir faire durer le monde qui

    Par Mathieu Bock-Côté 

    blue-wallpaper-continuing-background-wallpapers-bigest-images - Copie.jpgLe « conservatisme » ainsi défini, nous l'acceptons. Il est nôtre, même si nous n'avons jamais beaucoup aimé le mot s'il signifie « conservation molle de l'existant ». C'est à dire de la modernité y compris en ce qu'elle a de plus détestable. Si on lit cet article, qui est important, on verra que ce n'est pas du tout le sens que Mathieu Bock-Côté donne à conservatisme et encore moins le fond de sa riche pensée. Lafautearousseau reprend ces réflexions parce qu'elles comptent et qu'elles doivent être connues des royalistes. Notamment de nos lecteurs. [Le Figaro, 29.12]LFAR

     

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    On a beaucoup glosé ces dernières années sur le conservatisme, dont la renaissance intellectuelle est indéniable.

    Si tous les intellectuels qu'on y associe ne revendiquent pas nécessairement cette étiquette, ils s'inscrivent néanmoins dans la perspective d'une modernité sceptique, que ce soit en critiquant l'immigration massive, le féminisme pudibond, le bougisme qui arrache l'homme à sa demeure ou le manichéisme historique qui réduit l'aventure des nations à un affrontement bête et stérile entre les gentils et les méchants.

    Ces dernières années, le système médiatique en est même venu à parler, devant ce mouvement, d'un renversement d'hégémonie, en s'alarmant de la montée en puissance des « réacs » qu'il ne serait plus possible de ne pas entendre, ce qui serait apparemment embêtant. La formule était pourtant exagérée et reposait sur une double illusion. La gauche a été si longtemps dominante qu'il lui suffit d'être critiquée pour se croire assiégée. Inversement, la droite a été si longtemps silencieuse, et même humiliée, qu'il lui suffit d'être entendue pour se croire dominante. Dans la réalité, la mouvance conservatrice demeure médiatiquement et intellectuellement très minoritaire, et chacune de ses audaces se paie normalement du prix d'un scandale.

    Qu'est-ce que les conservateurs veulent conserver ? Ce n'est pas d'hier qu'on se le demande, souvent avec un brin de moquerie. Ne sont-ils pas que les héritiers mélancoliques d'un monde déjà perdu, qu'ils enchantent rétrospectivement par la magie du souvenir ? Ce procès est injuste, d'autant qu'il y a une grandeur certaine dans le fait de défendre après la défaite le souvenir de ce qui n'aurait pas dû tomber. Dans Rue Corneille, un beau livre de 2009, Denis Tillinac présentait avec tendresse Régis Debray comme un « gardien des ruines de la civilisation occidentale », un titre qu'il pourrait revendiquer aussi et qui n'a rien de déshonorant.

    Le sentiment de la fin d'un monde hante notre temps et il inspire souvent une posture résignée ou apocalyptique. Les adeptes de la première pleurent un monde perdu mais se font une raison en méditant sur l'œuvre du temps qui use toutes les civilisations, et contre lequel il serait vain de combattre. Les adeptes de la seconde maudissent cette décomposition qui les transforme en exilés de l'intérieur. Mais s'ils ne s'interdisent pas de rompre des lances contre l'époque qui vient, c'est généralement sur le mode du baroud d'honneur, à la manière de la dernière charge héroïque des vaincus.

    Ce sont là les deux pièges psychologiques qui guettent les conservateurs qui ont intériorisé trop intimement le mythe du progrès et qui poussent les hommes à la démission mentale. La modernité tend à dissoudre les sociétés dans le culte du mouvement perpétuel : elle fait déchoir tous les héritages en arrangements temporaires qu'il devient nécessaire de dépasser. Tout ce qui semblait devoir durer sera un jour périmé. Dès lors, quiconque refuse de suivre le rythme de la modernité sera un jour décrété conservateur, puis réactionnaire. Pour éviter la mauvaise réputation, plusieurs préfèrent alors la soumission. Car la modernité ne veut pas seulement qu'on l'accepte mais qu'on l'encense.

    Une nouvelle tentation totalitaire traverse l'Occident: celle d'un monde absolument transparent délivré de ses contradictions, purement malléable et soumis à toutes les formes d'ingénierie sociale, culturelle ou biotechnologique. Elle se réclame de l'émancipation totale du genre humain. C'est en son nom qu'on décrète que les peuples sont des constructions artificielles à dissoudre dans une diversité rédemptrice ou qu'on veut conjuguer la pédagogie avec l'esprit de table rase, pour immuniser l'enfant contre l'héritage au nom de sa supposée pureté virginale. C'est en son nom aussi qu'on décrète que la filiation est une fiction archaïque qu'on doit liquider pour redéfinir la famille dans une perspective exclusivement contractualiste. On pourrait multiplier les exemples.

    Mais l'âme humaine n'est pas d'une plasticité infinie. L'homme nouveau des progressistes ne sera jamais rien d'autre qu'une version mutilée de l'homme éternel. C'est une chose d'accepter la modernité, c'en est une autre de se définir intégralement à l'aune de ses catégories. À travers le conservatisme, l'homme moderne redécouvre les permanences anthropologiques qui structurent intimement la nature humaine et dans lesquelles il peut toujours puiser pour revitaliser ses libertés. De là la nécessité de les reconstruire politiquement. La cité est périssable, mais c'est la grandeur de l'homme de vouloir faire durer le monde qui est le sien. Ce que l'on nomme conservatisme n'est peut-être rien d'autre que la traduction intellectuelle de l'instinct de survie d'une civilisation qui ne voit pas pourquoi elle s'enthousiasmerait à l'idée de sa disparition.   

    Mathieu Bock-Côté 

    Le-nouveau-regime.jpgMathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (éd. VLB, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (éd. Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille (éd. Boréal, 2007). Ses derniers livres : Le multiculturalisme comme religion politiqueaux éditions du Cerf [2016] et le Le Nouveau Régime (Boréal, 2017). 
  • D'accord avec Mathieu Bock-Côté : « Le nationalisme n'est pas un péché »

     

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    Une réflexion qui n'a rien à voir avec le libéralisme mondialisé que prêche partout Emmanuel Macron en parfait décalage avec les réalités et les évolutions du monde actuel. Comme nous, Mathieu Bock-Côté prône limites, frontières et enracinement qui n'entraînent nullement un esprit de fermeture aux autres et au monde. mais qui, simplement, répondent au besoin de l'homme « d'habiter un pays qui ne soit pas qu'une page blanche ». [Le Figaro, 16.11].  LFAR

     

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    Il n'y avait rien de surprenant à entendre Emmanuel Macron, dans le cadre de la commémoration du centenaire de l'Armistice, dénoncer le « nationalisme ».

    Tous y ont vu, sans se tromper, une réponse à Donald Trump, qui s'en est récemment réclamé. Mais Emmanuel Macron faisait aussi tout simplement écho à la définition courante du nationalisme en France, qui l'assimile à l'extrême droite. On se souvient de la formule de François Mitterrand, qui se voulait définitive : « Le nationalisme, c'est la guerre ! »

    Mais il suffit de se dégager du contexte français pour constater que le terme « nationalisme » n'a pas partout la même connotation, ce qu'a noté Gil Delannoi dans La Nation contre le nationalisme. Même dans l'espace francophone, sa signification varie, comme on le voit au Québec, où il désigne essentiellement le combat mené au fil des siècles par les Québécois francophones pour conserver leur identité collective dans une Amérique où le fait français est minoritaire. Le nationalisme y est non seulement normalisé, mais valorisé, au-delà de la seule option indépendantiste. On pourrait dire la même chose du nationalisme irlandais, polonais ou de celui des pays Baltes - ces peuples ont dû conquérir leur indépendance. Les petites nations savent très bien qu'elles ne peuvent compter que sur elles-mêmes pour défendre leur droit d'exister.

    Il se pourrait toutefois que la condamnation du nationalisme, chez Emmanuel Macron, aille bien plus loin que sa dénonciation habituelle. Car ce n'est pas la première fois que celui-ci, croyant s'en prendre au nationalisme et ses excès, prend en fait pour cible la nation en elle-même. On se souvient de sa déclaration quelque peu contre-intuitive au moment de la présidentielle, lorsqu'il avait affirmé que la culture française n'existait pas ou plus récemment, de sa caricature de la psychologie française qui serait celle de « Gaulois réfractaires ». Même les pages glorieuses de l'histoire nationale sont gommées, avec l'effacement symbolique de la victoire française lors de la Grande Guerre au profit d'un mythique siècle d'amitié franco-allemande.

    Ce zèle antinationiste, pour emprunter le néologisme de Pierre-André Taguieff, se confirme, par effet de contraste, dans l'enthousiasme européen du président. L'appel lancé à la constitution d'une souveraineté européenne, parachevant la désincarnation politique des nations, se complète maintenant avec celui pour une armée européenne. On pourrait voir là un appel à l'Europe puissance, mais l'Europe macronienne semble terriblement décharnée. Elle a moins l'allure d'une civilisation se constituant politiquement que du stade intermédiaire dans la construction d'une cité universelle, où pourrait s'épanouir une « overclass » enfin délivrée de ses obligations envers une communauté politique particulière et se percevant elle-même comme une aristocratie planétaire.

    « Si le nationalisme lui-même ne cesse de se recomposer (...), c'est qu'il permet à l'homme d'habiter un pays qui ne soit pas qu'une page blanche »

    C'est probablement là que se confirme le caractère radical d'un certain progressisme. On y retrouve une conception de la modernité qui présente la diversité humaine, celle des peuples, des religions et des civilisations, comme un moment transitoire dans une longue histoire censée aboutir à une humanité réconciliée sous le signe de la cité universelle. L'homme n'aurait cessé d'élargir au fil des siècles et des époques ses cercles d'appartenances. Viendra un jour où il saura se passer de frontières et de demeure - tel est le pari du progressisme. L'homme trouverait sa rédemption dans une adhésion militante au parti du mouvement, qui le purgerait d'un enracinement qu'on fait rimer avec encrassement.

    Mais cette histoire a surtout les traits d'un fantasme destructeur. Gabriel Marcel l'a déjà dit de manière lumineuse : « À la base de l'activité des révolutionnaires […] gît cette conviction monstrueuse : ce que nous détruisons peut se remplacer, nous avons quelque chose à mettre à la place. » Si le conservatisme renaît en notre temps, c'est d'abord à la manière d'une prise de conscience de l'intime fragilité du monde. On ne saurait présenter nos patries comme des constructions sociales purement artificielles, bêtement transitoires, toujours déjà périmées, qu'on pourrait démonter à loisir. L'homme a besoin de croire au monde qu'il habite.

    Et si le nationalisme lui-même ne cesse de se recomposer, au-delà des définitions polémiques qu'en donnent ceux qui veulent en finir avec lui, c'est qu'il permet à l'homme d'habiter un pays qui ne soit pas qu'une page blanche - un pays s'inscrivant sous le signe de la continuité historique. Et sachant que l'histoire n'accouchera ni demain ni après-demain d'un monde homogène, les peuples sont en droit de demander à leurs dirigeants de défendre leurs intérêts sans basculer dans une forme de messianisme sacrificiel les poussant à s'abolir pour une idole idéologique déracinée qui n'est qu'une contrefaçon de l'humanité.  

    Mathieu Bock-Côté        

    Le-nouveau-regime.jpgMathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (éd. VLB, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (éd. Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille (éd. Boréal, 2007). Ses derniers livres : Le multiculturalisme comme religion politiqueaux éditions du Cerf [2016] et le Le Nouveau Régime (Boréal, 2017). 
  • D'accord avec Mathieu Bock-Côté : Soljenitsyne n'était pas un libéral !

     

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    Également dans le Figaro, Soljenitsyne a été défini comme « conservateur libéral » (Chantal Delsol). Cette tribune de Mathieu Bock-Côté n'est certes pas une réponse à cette affirmation à tous les sens du mot hasardeuse. Mais sa réflexion au fil des lignes et des idées conduit à une tout autre compréhension de la pensée du grand Russe. Beaucoup plus profonde et plus juste selon nous. [Le Figaro, 23.11]. Nous faisons suivre cette tribune du discours intégral d'Alexandre Soljenitsyne aux Lucs-sur-Boulogne - en 1993, il y a 25 ans - où il dit le fond de sa pensée sur toute forme de révolution. LFAR

     

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    La commémoration des 100 ans de la naissance de Soljenitsyne permet de revenir sur une existence qui a incarné de la manière la plus exigeante qui soit la figure de la dissidence au XXe siècle.

    Elle permet aussi de revisiter l'œuvre d'un homme qui a théorisé la résistance au totalitarisme, en décryptant de quelle manière il pervertit l'âme humaine et déstructure les repères fondamentaux de la conscience. Soljenitsyne ne s'imaginait pas en lutte contre une forme radicalisée de la dictature mais contre un régime politique inédit, broyant la part la plus intime de l'être humain.

    On le sait, pour Soljenitsyne, l'institutionnalisation du mensonge est la marque distinctive du totalitarisme. Orwell l'avait noté, il veut forcer l'homme à dire que 2 + 2 = 5. À la manière d'un régime idéocratique, il pose une vérité officielle, à laquelle tous doivent souscrire, surtout lorsqu'elle est contraire à la vérité effective des choses. Le totalitarisme oblige l'homme à dire le contraire de ce qu'il pense, et même le contraire de ce qu'il voit. Plus encore, il doit le dire avec enthousiasme. Devant les savants officiels du régime,il doit répéter les «vérités» décrétées, même si, au fond de lui-même, il lui arrive encore de les savoir fausses. Milosz avait noté que ce dédoublement de l'être provoque une forme de schizophrénie.

    « La piété, qu'elle soit patriotique ou religieuse, n'est pas l'ennemie de la liberté : elle peut même l'alimenter »

    La première forme de résistance au totalitarisme consiste alors à oser dire la vérité, en appelant un chat un chat. Mais où trouver la force pour résister au totalitarisme? Comment tenir devant un dispositif qui prétend confisquer le sens de l'histoire et qui ne veut voir dans ses opposants que le bois mort de l'humanité ou des résidus historiques insignifiants? Pourquoi lutter quand on en vient à se croire vaincu d'avance? La dissidence n'est-elle qu'un témoignage moral sacrificiel à classer sous le signe du martyre? C'est ici que Soljenitsyne se distingue: l'écrivain n'a jamais douté de sa victoire. Même en exil, il était persuadé de pouvoir un jour revoir son pays libéré et ayant renoué avec ce qu'on appellerait aujourd'hui son identité.

    Plusieurs l'ont noté, la philosophie de Soljenitsyne était ancrée dans un patriotisme russe et une foi orthodoxe profondément enracinés - elle ne se réduisait pas à un libéralisme fade, étranger à la transcendance, enfermant l'homme dans une conception aussi matérialiste qu'horizontale de l'existence. Si on préfère,elle s'enracinait à la fois dans un ensemble de traditions nationales et religieuses, comme ce fut souvent le cas dans la dissidence des nations d'Europe de l'Est, qui conjugua le plus naturellement du monde identité et liberté. La piété, qu'elle soit patriotique ou religieuse, n'est pas l'ennemie de la liberté: elle peut même l'alimenter.

    Le totalitarisme entend soumettre l'homme intégralement, pour fabriquer ensuite l'homme nouveau à travers le contrôle complet de tous les mécanismes de socialisation. Mais l'homme n'est pas intégralement manipulable. Sa naissance dans une nation historique particulière qui demeure pour lui une source précieuse d'identité et sa quête spirituelle qui le pousse vers les fins dernières révèlent une nature humaine que le pire ordre social ne peut jamais complètement écraser et à partir de laquelle l'aspiration à la liberté peut rejaillir. La conscience de sa filiation comme celle de sa finitude fondent paradoxalement pour l'homme la possibilité de sa liberté. C'est parce qu'il était rattaché au monde par les racines les plus profondes et par ses aspirations les plus élevées que Soljenitsyne a su résister au communisme.

    « Soljenitsyne l'avait vu avant tout le monde : l'Occident n'est pas lui-même immunisé contre le totalitarisme »

    Soljenitsyne l'avait vu avant tout le monde: l'Occident n'est pas lui-même immunisé contre le totalitarisme. La démocratie contemporaine en reconduit certains schèmes à travers le fantasme d'une pleine maîtrise du vivant ou de l'existence sociale, où se laisse deviner encore une fois la figure de l'homme nouveau, qu'on voudrait aujourd'hui sans sexe, sans parents, sans patrie, sans religion et sans civilisation. Il est bien possible que nos traditions les plus profondes soient encore une fois celles qui nous permettront de résister à l'hubris d'une modernité qui assujettit l'homme en prétendant l'émanciper.

    Et comme on lisait hier la Pravda en apprenant à la décoder, on lit aujourd'hui entre les lignes de certains journaux pour décrypter la part du réel que le régime diversitaire ne peut dévoiler sans se fragiliser. Qu'il s'agisse de l'idéologie du genre, du multiculturalisme qui déracine les peuples et les expulse mentalement de chez eux en diabolisant le désir d'avoir un chez-soi ou de la névrose du politiquement correct qui enferme le monde de la pensée dans un monde parallèle, fondé sur la falsification du réel, il faudra aussi retrouver le courage de dire la vérité.  

    Mathieu Bock-Côté 

    À lire aussi dans Lafautearousseau ...    

    D'accord avec Arnaud Guyot-Jeannin : Soljenitsyne n’était pas un conservateur libéral, mais un antimoderne radical !   
    Le-nouveau-regime.jpgMathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (éd. VLB, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (éd. Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille (éd. Boréal, 2007). Ses derniers livres : Le multiculturalisme comme religion politiqueaux éditions du Cerf [2016] et le Le Nouveau Régime (Boréal, 2017). 
  • Rétrospective : 2018 année Maurras [3]

    Dédicace de Charles de Gaulle à Charles Marras pour son livre La discorde chez l'ennemi

    Par Rémi Hugues

    saint_augustin visuel.jpgAu moment où s'achève l'année du cent-cinquantenaire de Charles Maurras, Rémi Hugues nous propose une série de quatre articles - à venir les jours suivants, « Rétrospective : 2018 année Maurras »Notre collaborateur et confrère y évoque différents aspects ou moments importants de la vie et l'oeuvre de Charles Maurras à travers les écrits fort contestables de Michel Winock, l'un des historiens organiques de la République française du XXIe siècle, « une figure dʼautorité. » Bonne lecture !  LFAR    

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    In Winock veritas ?

    De la subtilité, Winock en manque cruellement lorsquʼil va jusquʼà défendre la position selon laquelle de Gaulle était lʼ « anti-Maurras », quʼil était « aux antipodes de Maurras ». Il est indiscutable que lʼidiosyncrasie gaullienne était imprégnée de lʼesprit de Maurras. Il faudrait que Winock réécoute sa conférence de presse du 27 novembre 1967, largement consacrée à lʼactualité internationale, aux États-Unis et à Israël notamment. Certes, de Gaulle était un maurrassien critique, de raison, pas un maurrassien béat. 

    En vérité lʼ « intelloʼ de Martigues » avait imprimé sa marque dans lʼâme jeune du natif de Lille. La socialisation politique primaire de De Gaulle sʼétait faite sous le signe de Maurras : son père, « Henri, lisait LʼAction française […]. Il était royaliste de cœur, et le jeune Charles a été éduqué dans un milieu habité par la nostalgie de la royauté. » 

    hqdefault.jpgEt pour preuve : de Gaulle a parfaitement retenu la leçon de son maître à penser à propos des quatre états confédérés quand il dit à Alain Peyrfefitte que la franc-maçonnerie fait office de quatrième colonne, un parti de lʼétranger, inféodé à la perfide Albion : « Sénat, Club Jean-Moulin, francs-maçons, tout se tient. Ces gens-là cherchent à me mettre des sabots aux pieds. On mʼassure que la moitié des sénateurs, de la gauche à la droite, sont franc-maçons. On mʼen dit autant des magistrats, quʼils soient du siège ou du parquet. Ça expliquerait bien des choses. Ces gens-là nʼaiment pas la France, ils préfèrent les Anglo-Saxons. »[1] On dirait du Maurras dans le texte. 

    Négateur du réel, Winock préfère voir en de Gaulle un épigone de Charles Péguy, un grand littérateur nʼayant en revanche jamais développé une doctrine politique cohérente sʼarticulant autour de concepts originaux, structurants et fondamentaux, à la différence de la pensée de Maurras, dont la dichotomie pays légal / pays réel, par exemple, est encore utilisée aujourdʼhui, notamment par les publicistes de la presse écrite ou même de la radio et de la télévision. Est-il quelquʼun qui a retenu une quelconque doctrine politique de Péguy, lui qui commença socialiste avant de se tourner vers le catholicisme ? Péguy ne s’est jamais voulu et nʼa jamais été à la tête dʼune organisation politique. 

    2784291594.jpgLʼanalyse de Winock révèle ici ses limites : il montre quʼil nʼa guère compris que le politique est dʼabord une somme dʼinteractions sociales, de relations humaines (quʼelles soient dʼamitié ou dʼinimitié[2]), soit quelque chose de bassement concret, avant dʼêtre des idées abstraites empilées dans des livres. Faire de De Gaulle lʼépigone de Péguy (photo) pour l’opposer à Maurras, quelle ineptie ! Plus énorme encore est celle dʼériger de Gaulle en anti-Maurras ; par ce truchement Winock réhabilite la formule maurrassienne très controversée dʼ « anti-France ». Sʼil est valide du point de vue épistémologique de se servir du préfixe « anti » pour exprimer une opposition radicale, pourquoi le serait-il pour Maurras et ne le serait-il pas pour la France ? 

    Ce manque de rigueur sémantique est le trait marquant de lʼarticle de Winock. Il utilise, si lʼon peut dire, des mots sans en mesurer le poids. Jetant aux orties Aristote qui signale que si « on ne posait de limite et quʼon prétendît quʼil y eût une infinité de significations, il est manifeste quʼil ne pourrait y avoir aucun logos. En effet, ne pas signifier une chose unique, cʼest ne rien signifier du tout », il sʼaffranchit du respect du sens strict des mots. 

    Prenons celui dʼantisémitisme. Maurras est victime de la présomption de culpabilité dʼen être un. Pour Winock, cʼest un fait avéré. On est dans lʼordre du préjugé : nul besoin de chercher à le démontrer. Lʼhistoire a tranché : Maurras est à bannir car il a rejoint le rang des antisémites notoires. 

    17639964-22082748.jpgOr cʼest mal connaître la généalogie de la question juive. Lʼantisémitisme présuppose lʼexistence de races distinctes, ce qui dans la modernité, comme le souligne Hannah Arendt (photo) dans le passage qui suit, a été introduit par des Juifs. 

    « Cʼest alors que, sans aucune intervention extérieure, les Juifs commencèrent à penser que ʽʽce qui séparait les Juifs des nations nʼétait pas fondamentalement une divergence en matière de croyance et de foi, mais une différence de nature profondeʼʼ, et que lʼancienne dichotomie entre Juifs et non-Juifs était ʽʽplus probablement dʼorigine raciale que doctrinaleʼʼ. Ce changement dʼoptique, cette vision nouvelle du caractère étranger du peuple juif, qui devait se généraliser chez les non-Juifs que beaucoup plus tard, à lʼépoque des Lumières, apparaît clairement comme la condition sine qua non de lʼapparition de lʼantisémitisme. Il est important de noter que cette notion sʼest formée dʼabord dans la réflexion des Juifs sur eux-mêmes, et à peu près au moment où la Chrétienté européenne éclata en groupes ethniques qui accéderont plus tard à lʼexistence politique dans le système des États-nations modernes. »[3] 

    Augustine_Confessiones.jpgSe situant à extrême distance de ces Juifs qui théorisèrent la diversité raciale du genre humain, du racialisme en somme qui, dʼaprès Hannah Arendt est une invention juive, Maurras, ce fidèle de lʼÉglise de Rome en vertu non de la foi mais de la raison, entendait rester fidèle à lʼesprit de lʼépître aux Galates de saint Paul qui continuait la parabole christique du Bon Samaritain. 

    Maurras n’entend pas remettre en cause lʼuniversalité, lʼunité radicale de lʼhumanité, telle quʼexprimée par saint Augustin de la manière suivante : « Quel que soit lʼendroit où naît un homme, cʼest-à-dire un être raisonnable et mortel, sʼil possède un corps étrange pour nos sens, par sa forme, sa couleur, ses mouvements, sa voix, quels que soient la force, les éléments et les qualités de sa nature, aucun fidèle ne doit douter quʼil tire son origine du seul premier homme[4] ». (A suivre)  

    [1]  Alain Peyrefitte, Cʼétait de Gaulle, II, Éditions de Fallois / Fayard, 1997, p. 111.
    [2]  Carl Schmitt, dans La notion de politique, avance que la syzygie, autrement dit lʼappariement du couple dʼopposés ami / ennemi est au politique ce que les dichotomies vrai / faux, bien / mal, beau / laid et utile / nuisible sont respectivement à la science, à la morale, à lʼart, et à lʼéconomie.
    [3]  Hannah Arendt, Sur lʼantisémitisme. Les origines du totalitarisme, Paris, Gallimard, 2002, p. 8-9.
    [4]  Saint Augustin, La Cité de Dieu,  II, Paris, Gallimard, 2000, p. 661. 
    A lire de Rémi Hugues Mai 68 contre lui-même ...
    (Cliquer sur l'image)

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  • Histoire & Actualité • Mathieu Bock-Côté : « Philippe de Villiers et l'histoire de France »

    Par Mathieu Bock-Côté 

    Dans Le Mystère Clovis, Philippe de Villiers renoue avec la question la plus fondamentale, celle des origines, et plus exactement, des origines de l'identité française, qu'on mutilerait si on en effaçait la marque chrétienne [Le Figaro, 7.12]. LFAR

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    Philippe de Villiers, l'homme du Puy-du-Fou, sait depuis longtemps qu'un peuple sans légendes est condamné à la sécheresse existentielle. Il avait aussi affirmé dans Les cloches sonneront-elles encore demain? que c'est la beauté qui sauvera une France hantée par la possibilité de sa dissolution, pour peu qu'elle sache renouer avec ses traditions les plus intimes. C'est peut-être pour cela qu'il a aussi entrepris, il y a quelques années, de raconter lui aussi l'histoire de la France en faisant le choix de s'y immerger, de l'habiter totalement, pour la faire revivre comme s'il nous chuchotait une épopée. D'un livre à l'autre, Philippe de Villiers s'identifie aux personnages historiques qu'il met de l'avant, au point d'écrire leur histoire à la première personne du singulier.

    C'était d'abord le cas avec Le Roman de Charette , le Vendéen abordant d'abord l'histoire de son pays à la lumière de sa petite patrie, qui incarne à la fois la dissidence la plus héroïque et la résistance au nom de l'enracinement contre une modernité qui peut être tentée d'éradiquer de la surface du globe les catégories sociales qui ne veulent pas s'y laisser dissoudre. Ce fut ensuite le cas avec Le Roman de Saint Louis , illustrant la part de la charité dans l'action des grands rois de France, ainsi qu'avec Le Roman de Jeanne d'Arc, illustrant à sa manière la figure du recours dans l'histoire de France, le désespoir ne devant jamais l'emporter même dans la pire situation, puisqu'une figure providentielle pouvant prendre le visage d'une improbable jeune fille peut toujours surgir du peuple pour renverser le cours des choses.

    Une nation est aussi un mystère

    3805053255.jpgIl était inévitable que Philippe de Villiers en arrive à Clovis, pour renouer avec la question la plus fondamentale, celle des origines, et plus exactement, des origines de l'identité française, qu'on mutilerait si on en effaçait la marque chrétienne. Ce retour est une authentique transgression dans une époque qui ne veut justement rien savoir des origines, sauf à la repousser dans des temps si lointains qu'elles en deviennent insaisissables, comme on l'a vu dans l'Histoire mondiale de la France de Patrick Boucheron, qui la reportait jusqu'à la grotte Chauvet, ce qui n'était qu'une manière de la neutraliser. Il faut dire que la théorie dominante en sciences sociales présente l'identité comme un flux insaisissable, qu'on ne saurait caractériser sous le signe de la continuité historique sans immédiatement la muséifier. Le désir qu'a un peuple de demeurer lui-même, on le nomme «rispation identitaire ».

    Une certaine pratique de l'histoire académique, qui se croit absolument scientifique, alors qu'elle n'est qu'inconsciente de ses préjugés idéologiques, a cru pour cela nécessaire de déconstruire l'histoire des nations, comme s'il fallait aboutir à leur désagrégation. Le progressisme médiatico-universitaire a la fâcheuse tendance de confondre l'émancipation humaine avec l'annihilation du déjà-là, comme si l'homme ne devait advenir à lui-même qu'en faisant table rase. Chaque réalité historique est présentée comme un système discriminatoire à faire tomber.

    Au terme de la déconstruction, il prétend fabriquer en suivant une maquette diversitaire un monde idéal. Mais c'est un monde en contre-plaqué idéologique, certifié par des sociologues patentés, certes, mais aussi aride qu'inhabitable. La modernité radicale artificialise l'existence et la rend glaciale. C'est une construction sociale déconstruite et reconstruite sans fin : un monde en toc. C'est peut-être ce que savent les gens simples et que ne savent plus les esprits sophistiqués : il est bon d'avoir une demeure et un chez-soi. Et pour cela, il faut y croire, et plus encore, croire qu'on doit poursuivre le monde qu'on nous a laissé.

    Retour à Philippe de Villiers. Ce n'est pas son moindre mérite d'avoir compris qu'une nation est aussi un mystère, qui ne se laisse jamais entièrement décrypter ou dévoiler. Un peuple n'est jamais absolument transparent à lui-même. Et c'est pour cela que Philippe de Villiers nous livre en fin de compte une histoire poétique de France, qui touche les cœurs et les âmes. Un pays peut traverser des années sombres mais si, à chaque génération, il trouve quelques hommes pour entendre son chant intérieur et réveiller ses légendes, pour ensuite le reprendre et le faire connaître, il pourra toujours renaître, résister aux plus grands périls ou reconquérir sa part perdue.

    En faisant revivre Clovis, Philippe de Villiers voulait rappeler à son peuple que ses origines demeurent une source de vie. Du Puy-du-Fou à son histoire poétique de France, il réveille en l'homme la disposition à l'émerveillement, qui n'est pas le privilège de l'enfance mais bien la capacité qu'a l'homme de poursuivre l'histoire du monde, et l'immense privilège qu'ont les Français de poursuivre l'histoire de la France.   

    Mathieu Bock-Côté 

    Le-nouveau-regime.jpgMathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (éd. VLB, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (éd. Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille (éd. Boréal, 2007). Ses derniers livres : Le multiculturalisme comme religion politiqueaux éditions du Cerf [2016] et le Le Nouveau Régime (Boréal, 2017). 
  • Société • Mathieu Bock-Côté : « Cachez ces agresseurs que l’on ne saurait voir »

    Par Mathieu Bock-Côté 

    thUKZO41O8.jpgCHRONIQUE - L’agression d’une jeune transsexuelle place de la République à Paris, le 31 mars dernier, a frappé. Étonnamment, la victime a décidé de relativiser son agression pour éviter de troubler l’ordre diversitaire. Un ordre que les médias entretiennent savamment. [Le Figaro, 6.04]. Quant à l'exhibitionnisme systématique des membres de la communauté LGBT dont Mathieu Bock-Côté ne traite pas ici, est-il si étonnant qu'il finisse par provoquer des réactions d'exaspération pouvant aller jusqu'à l'agression ? Et pas seulement venant de mâles arabes ou musulmans. LFAR 

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    « ... La dénonciation rituelle de l’homme blanc hétérosexuel est au cœur de l’imaginaire progressiste ... »

    La scène, captée par vidéo, était glaçante : à Paris, place de la République, Julia, une jeune transsexuelle, a été agressée dans la rue par une bande prenant manifestement plaisir à la persécuter.

    On pouvait y constater encore l’ensauvagement des rapports sociaux et le fond de barbarie que l’humanité porte en elle et qui peut toujours remonter à la surface. Comment ne pas se révolter devant la joie mauvaise de ceux qui se savent en situation de force et qui jouissent de l’humiliation des plus faibles ? Les grands médias, avec raison, ont rapporté l’événement en en soulignant l’extrême brutalité.

    Mais la description des faits était quelque peu laconique. Alors que les agresseurs arboraient à peu près tous le drapeau algérien, il semblait à peu près impossible de le mentionner médiatiquement, sauf pour dire que cela n’avait aucune importance. Mieux valait pérorer en général sur la situation de la tolérance en France. S’il était bien vu de se demander comment une telle violence était possible aujourd’hui, il semblait à peu près impossible de mentionner qui en était à l’origine. Ce qui était visible aux yeux de tous devait être censuré. On devine que si les agresseurs sortaient de la messe et appartenaient de près ou de loin à la droite catholique, on ne ferait pas preuve de la même pudeur dans la manière de rapporter les faits.

    51dcea5b799a7d352ebd1bdaf634b.pngDe manière assez triste, Julia, la victime, a elle-même participé à cette entreprise de voilement du réel. En empruntant la novlangue de l’époque, elle dit refuser de stigmatiser l’islam et les musulmans. Cela va de soi. On ne saurait rendre une communauté dans son ensemble coupable de cette agression. Mais on ne saurait non plus décréter que ce qui est arrivé n’est pas arrivé. Comment ne pas voir là une forme d’enfermement idéologique qui empêche Julia de comprendre ce qui lui arrive ? Le propre de l’idéologie est de se radicaliser au rythme où le réel la désavoue.

    Ce n’est toutefois pas la première fois qu’une victime décide de relativiser son agression pour éviter de troubler l’ordre diversitaire. Au printemps 2017, on apprenait qu’autour de la porte de la Chapelle, il était de plus en plus difficile pour les femmes de s’aventurer sans risque. Ce nouveau climat s’expliquait apparemment par la présence massive « d’hommes » récemment arrivés dans le quartier, occupant l’espace public en le rendant inhospitalier aux femmes. La diabolisation du mâle allait de soi. Il n’était toutefois pas possible de mentionner de quels hommes il s’agissait, alors qu’on savait pertinemment qu’il s’agissait de migrants témoignant manifestement d’une conception du rapport hommes-femmes étranger aux codes les plus élémentaires de notre civilisation. Le souvenir des agressions sexuelles massives de Cologne nous revient aussi en tête.

    Marlene-Schiappa-questions-lille-854x569.jpgNe soyons pas surpris : l’argument n’a rien de nouveau. Il y a quelques semaines à peine, Marlène Schiappa avait associé la vague récente d’agressions contre les homosexuels à l’influence souterraine de la Manif pour tous. Pour ne pas faire de lien entre insécurité et immigration, elle préférait accuser la droite versaillaise qu’elle assimilait aux islamistes. Le grand parti de l’intolérance transcenderait toutes les cultures ! La dénonciation rituelle de l’homme blanc hétérosexuel est au cœur de l’imaginaire progressiste, et qu’on ne risque rien à faire son procès.

    On trouve au cœur du système médiatique un logiciel traducteur qui fonctionne de la manière la plus simple qui soit : quand un événement vient confirmer le grand récit diversitaire, on le traite comme un fait politique, alors que s’il le compromet, on le rabat dans le domaine des faits divers. Le récit se dérègle toutefois quand ce sont les membres d’une minorité qui persécutent une représentante d’une autre minorité. S’enclenche alors presque automatiquement un processus de reconstruction du récit médiatique pour nous rappeler que la diversité, en plus d’être automatiquement une richesse, est nécessairement harmonieuse.

    L’agression de la jeune Julia nous rappelle une chose simple : le politiquement correct n’a aucune gêne à nier l’évidence la plus frappante. Ses gardiens iraient même jusqu’à nier que le soleil se lève le matin et se couche le soir s’il le fallait pour sauver le grand récit de la diversité rédemptrice. Ils le font même au nom de considérations morales supérieures : il ne faudrait pas alimenter les préjugés de ces ploucs qu’on appelait autrefois les citoyens. Mais à quel moment le mensonge par omission bascule-t-il dans le domaine des « fake news » ? Devant une telle manipulation du sens des événements, qui relève à bien des égards d’un déni de réel digne des standards soviétiques les plus exigeants, on serait peut-être en droit de parler d’une logique relevant de la désinformation. 

    Julia, une jeune transsexuelle, a été agressée dans la rue par une bande   

    Mathieu Bock-Côté 
    Le-nouveau-regime.jpgMathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (éd. VLB, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (éd. Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille (éd. Boréal, 2007). Ses derniers livres : Le multiculturalisme comme religion politiqueaux éditions du Cerf [2016] et le Le Nouveau Régime (Boréal, 2017).
  • Attentat de Christchurch : « Quand les tenants du ‘'pas d'amalgames'' pratiquent les pires des amalgames »

    Par  

    fond-degrade-bleu-fonce_1258-1364.jpgGilles-William Goldnadel écrit cela [Figarovox, 18.3] comme à son ordinaire : avec courage, lucidité, sans craindre de dire les choses. Il a raison. Saluons ! C'est rare.  LFAR

     

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    « J'aurais aimé que les multiples massacres de chrétiens reçoivent le même traitement que celui réservé à juste titre à l'ignoble tuerie néo-zélandaise. »

    Il eût été étonnant que l'idéologie névrotique et morbide qui accable notre pays depuis trop longtemps ne se soit pas emparée du drame des mosquées de Christchurch. 

    Commençons par un constat incontestable. L'ensemble, sans la moindre exception, de la classe politique, médiatique et intellectuelle française ont manifesté dans ces circonstances tragiques leur réprobation totale devant un acte inexcusable commis par un criminel exécrable et leur compassion à l'égard des 49 victimes musulmanes innocentes, dont un petit enfant de trois ans.

    Ceci fermement posé, certaines réactions constatées à l'occasion de ce carnage montrent la perversion intellectuelle d'une idéologie qui, ordinairement, blâme toute «instrumentalisation» d'un événement dramatique, selon le terme qu'elle utilise sans trop d'économie.

    Lorsqu'un attentat islamiste est commis, la réaction pavlovienne de cette idéologie que je ne peux nommer autrement qu'islamo-gauchiste, encore qu'elle soit différemment quantifiable à des degrés divers chez les individus observés, est immédiatement d'interdire tout amalgame avec l'ensemble de la communauté musulmane ou avec la religion coranique dont les assassins se réclament.

    Ce réflexe de bon aloi semble le plus souvent inutile, tant les sondages montrent qu'il ne vient pas à l'esprit des Français de reprocher à l'ensemble des musulmans des actes commis par les tenants les plus extrêmes de l'islamisme radical le plus extrémiste.

    Parallèlement, et par capillarité, une bonne partie de la classe médiatique est parfois tentée de suggérer une approche psychiatrique ou une explication-excuse sociale, quand elle ne classe pas le criminel dans la catégorie du loup solitaire et désespéré. 

    Or, dans le cadre de la tragédie néo-zélandaise on constate, au rebours, que certains tenants du « pas d'amalgame », ont pratiqué le pire de tous avec une jouissance infinie.

    La-ministre-Education-nationale-Najat-Vallaud-Belkacem-22-fevrier-2016-Havre_2_730_502.jpgL'exemple le plus grotesquement écœurant nous aura été servi par l'ancienne ministre Najat Vallaut-Belkacem. Dans un gazouillis sur Twitter, celle-ci instrumentalise ainsi le massacre: « Oui toutes nos pensées vont aux victimes de l'abject attentat de Christchurch, et oui cela devrait tous nous rassembler. Mais découvrir ici des messages d'indignation hypocrite y compris de ceux qui ont contribué, année après année, à promouvoir ça… Comment dire ? Nausée .»

    Après quoi, un doigt rageur pointe les hebdomadaires désignés à la vindicte publique, coupables d'avoir armé le bras de l'assassin antimusulman pour avoir mis en cause l'islamisme radical ou l'immigration massive: Courrier International, le Figaro Magazine, l'Express, Valeurs Actuelles, Marianne, le Point, sans oublier le magazine L'Histoire, coupable d'avoir consacré sa couverture aux Arabes de la Mecque et aux banlieues de l'islam…

    Très probablement, l'ancienne et inoubliable ministre de l'Éducation Nationale est-elle allée chercher sa liste des coupables sur la toile électronique, dans une islamismosphère innommée qui en est à dresser la liste nominative des complices de la tuerie.

    Sans doute encore Mme la ministre moraliste mais distraite, a-t-elle oublié qu'elle vit dans un pays où certains fanatiques massacrent des journalistes coupables d'avoir offensé l'islam et ont le coup de couteau facile. Ce pays qui, pourtant, Dieu merci, n'a pas dressé de listes de journaux ou d'intellectuels responsables des massacres qui l'ont ensanglanté et continuent de le faire.

    Certes, Mme la ministre n'est pas seule, chez les « pas d'amalgame », à cultiver l'amalgame névrotique et dangereux.

    Un journal du soir croit très intelligent d'insister lourdement sur le misérable pathos de l'assassin crétin qui fait sienne l'analyse du grand remplacement démographique en livrant en pâture le nom de son concepteur intellectuel Renaud Camus, en oubliant, petit détail sans doute sans importance, que celui-ci ne prône aucunement la violence, comme le rappelle opportunément Jean-Yves Camus (Le Figaro 16-17 mars). Étrangement, le vespéral n'incrimine pas Karl Marx et le président Mao alors que l'assassin indique apprécier beaucoup la Chine communiste. Curieusement encore, et en dépit de son approche, le Monde n'avait pas cru devoir reprocher à Emmanuel Todd d'être apprécié de Ben Laden, ce dont ce dernier n'avait pas eu tort de ne point se justifier.

    Pauvre Mozart, apprécié d'Adolf Hitler, et en passe d'être classé dans le parti nazi.

    Le même Monde, dans un autre article du 16 mars de son correspondant local, encore que l'exercice soit difficile, tente d'accrocher Donald Trump en rappelant le drame antisémite de Pittsburgh commis par un membre de l'ultradroite. Amalgame quand tu nous tiens. 

    À ce degré de finesse intellectuelle, on n'oubliera pas Aude Lancelin, nouvelle responsable de la chaîne cathodique et chaotique Le Média qui a finement tweeté : « le tueur de Christchurch, 49 morts, se revendique de Renaud Camus (2019). Anders Breivik, 77 morts, se revendique de son ami Alain Finkielkraut (2011) qui l'invite sur la radio publique. Les idéologies criminelles que la France exporte aujourd'hui sont d'extrême droite. »

    La même gracieuse dame, la semaine précédente, hurlait pourtant au charron, parce qu'une interview de son mentor Alain Badiou, qui, lui, assume superbement les millions de morts du totalitarisme communiste, n'était pas publiée dans le Monde

    À ce stade de décomposition de la pensée et de la morale publique, nul ne m'empêchera d'écrire, moins pour apaiser mon amertume, que pour expliquer les fondements de l'idéologie mortifère qui nous tue, combien j'aurais aimé que les multiples massacres de chrétiens en terres d'Orient, en Égypte, au Nigéria, aux Philippines ou ailleurs reçoivent le même traitement que celui réservé à juste titre à l'ignoble tuerie néo-zélandaise. Mais manifestement, les massacres quand ils ne sont pas commis par des Occidentaux et que l'on ne peut amalgamer à d'autres occidentaux n'intéressent aucunement l'Occident névrotique.

    Au-delà de la névrose intellectuelle et de la nécrose morale, il fait peu de doute que la tentative d'amalgamer un crime commis dans l'autre hémisphère avec des intellectuels innocents en tentant de faire son marché gourmand dans les obsessions d'un assassin relève également de la tentative d'intimidation et du désir inavoué de la gauche dite intellectuelle de se refaire une santé morale lourdement abîmée.

    Au risque de la décevoir, il est peu probable que le désir de lutter sans violence ni haine des innocents contre l'islamisme radical et l'immigrationnisme forcé s'en trouvera très affecté, tant ses excommunications ne troublent plus le sommeil des honnêtes gens.   

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    Gilles-William Goldnadel est avocat et écrivain.  Son dernier ouvrage, Névroses Médiatiques. Le monde est devenu une foule déchaînée, est paru chez Plon.