Feuilleton : "Qui n 'a pas lutté n'a pas vécu"... : Léon Daudet ! (243)
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Aujourd'hui : Jérôme Leroy a lu "Écrivains et artistes" (2017)...
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ndlr : ce sujet a été réalisé à partir d'extraits tirés des dix livres de souvenirs suivants de Léon Daudet : Paris vécu (rive droite), Paris vécu (rive gauche), Député de Paris, Fantômes et vivants, Devant la douleur, Au temps de Judas, l'Entre-deux guerres, Salons et Journaux, La pluie de sang, Vers le Roi...
Roland Jaccard présente ici le livre de Jérôme Leroy.
C'est une intéressante et brillante recension (parue dans Causeur, le 25 juin 2016), venant d'un homme qui avoue sa méconnaissance initiale de Léon Daudet.
C'est ainsi qu'il le qualifie de « collaborateur » de l'Action française, alors que Daudet en fut l'un des fondateurs, qu'il en a été le codirecteur, qu'il y donnait un article quotidien, qu'il en fut, par sa fougue, sa culture et son génie, un incomparable animateur.
Il était, en littérature, pour la plus grande liberté. De goût, de ton et de fond. Cela étant, cette lecture d'Écrivains et artistes est digne à son tour d'être lue, y compris par les plus orthodoxes des fidèles de l'Action française.
On en remerciera son auteur...
Un aveu d’abord : j’ai peu lu, pour ne pas dire rien, de Léon Daudet. Son nationalisme antisémite me rebutait. J’avais mieux à faire que de perdre mon temps avec un collaborateur de l’Action française.
Ce qui le sauvait néanmoins à mes yeux, c’est que Marcel Proust lui devait en 1919 le Goncourt pour À l’ombre des jeunes filles en fleurs. Léon Daudet disait merde à la patrie dès qu’il s’agissait de littérature et préférait le roman d’un juif dreyfusard mondain aux Croix de bois de Roland Dorgelès, pourtant ancien combattant.
On peut être réactionnaire jusqu’à la moelle et pourtant juger de la littérature sans œillère.
Ses articles réunis sous le titre Écrivains et Artistes, certes datés, m’amènent à regretter d’être passé à côté de cet admirateur d’Henri Massis et de Charles Maurras. Ses rencontres avec Oscar Wilde sont particulièrement savoureuses.
Le rôle de l’écrivain n’est plus d’être déplaisant mais anxiolytique
Et c’est Jérôme Leroy qui, dans une préface étincelante, donne la mesure du talent généreux de Léon Daudet critique, un homme qui refusait de faire de la littérature une assignation, une citation à comparaître, un homme qui n’aurait jamais signé, comme la plupart des auteurs de Gallimard, une pétition pour licencier un auteur, en l’occurrence Richard Millet, pour incorrection politique.
Nous sommes arrivés au point – et l’élection de Macron en est un symbole – où il ne s’agit plus que de purifier l’atmosphère.
Des flots de moraline coulent dans la presse et il est temps de procéder à un grand nettoyage de vos bibliothèques.
Le rôle de l’écrivain n’est plus d’être déplaisant mais anxiolytique, d’abord et avant tout. Chacun, ironise Leroy, a assez ce soucis comme ça pour ne pas, en plus, s’angoisser en lisant un roman :
« Le principal est de calmer, de distraire et surtout de filer droit dans les rails de la littérature calibrée au temps de l’économie spectaculaire-marchande. »
Léon Daudet ou la Corée du Nord
Cette forme de lâcheté et de cécité spirituelle m’excède autant qu’elle déprime Jérôme Leroy. Nous assistons, ébahis, à une forme de décérébration sans précédent qui finira par nous donner l’envie de nous installer en Corée du Nord pour juger des dégâts qui nous attendent.
J’exagère ? Certes. Le pire n’étant hélas jamais certain, ne nous privons pas des chroniques de Léon Daudet : c’est une bouffée de liberté. Et revoyons un des films préférés de Jérôme Leroy, Breezy avec William Holden et Kay Lenz.
De qui ? De Clint Eastwood, évidemment !
Roland Jaccard, Psychologue, écrivain, journaliste, critique littéraire, essayiste et éditeur - Écrivains et artistes, de Léon Daudet, éditions Séguier, 2017, 28€