À la découverte du fonds lafautearousseau (28) : Paris, "Ville ouverte" : aux origines des Grands Boulevards...
lafautearousseau, c'est plus de 28.000 Notes ou articles (et autant de "commentaires" !), 21 Albums, 49 Grands Textes, 33 PDF, 16 Pages, 366 Éphémérides...
Il est naturel que nos nouveaux lecteurs, et même certains plus anciens, se perdent un peu dans cette masse de documents, comme dans une grande bibliothèque, et passent ainsi à côté de choses qui pourraient les intéresser...
Aussi avons-nous résolu de "sortir", assez régulièrement, tel ou tel de ces documents, afin d'inciter chacun à se plonger, sans modération, dans ce riche Fonds, sans cesse augmenté depuis la création de lafautearousseau, le 28 février 2007...
Aujourd'hui : Paris, "Ville ouverte" : aux origines des Grands Boulevards...
(tiré de notre Éphéméride du 7 septembre)
(retrouvez l'ensemble de ces "incitations" dans notre Catégorie :
Á la découverte du "Fonds lafautearousseau")
1670 : Paris, "Ville ouverte" : aux origines des Grands Boulevards...
Entre les Guerres de religion et la Guerre de Trente Ans, l'impérieuse nécessité de protéger une capitale trop proche des frontières de l'est et du nord (150 kilomètres à peine...) avait poussé la monarchie à améliorer la défense de Paris en construisant une ligne de six bastions, un kilomètre en avant de l'enceinte de Charles V : cette nouvelle enceinte - dite "de Louis XIII" - était aussi appelée "enceinte des Fossés jaunes", d'après la couleur du limon des terrassements.
Mais ensuite, les conquêtes du début du règne de Louis XIV ayant repoussé les frontières du royaume, le roi adopta la proposition de Colbert de raser ces fortifications : les talus et fossés des remparts furent remplacés de 1668 à 1705 par un large boulevard de terre bordé d'ormes, que l'on appela Cours Royal ou Nouveau-Cours, construit par l'architecte Pierre Bullet.
Sur la chaussée nouvellement créée, quatre voitures pouvaient rouler de front et des contre-allées étaient plantées d’une double rangée d’arbres. La chaussée en sera pavée en 1778; l’éclairage au gaz y fera son apparition en 1817, et le premier omnibus à cheval "Madeleine-Bastille" se mit en place le 30 janvier 1828...
Les boulevards sur le plan de Turgot (1736, voir l'Éphéméride du 20 mars) quelques années après leur création sur l'emplacement des murailles arasées
Les Parisiens appelèrent tout de suite boulevard cette promenade, le mot boulevard étant un mot d'origine militaire, qui désigne, dans la fortification d'une ville, un ouvrage de protection avancé construit en madriers et en terre, souvent maçonné, ajouté en avant d'une fortification et destiné à supporter - ou transporter - de l'artillerie.
Les remparts arasés de Louis XIII sont donc nos actuels Grands Boulevards, dessinant un arc de cercle de la Concorde à la Bastille, en passant par la place de la République. Toutes les portes furent également rasées : quatre seulement furent remplacées par des arcs de triomphe à la gloire du Roi : deux ont malheureusement disparu (la Porte Saint-Antoine et la Porte Saint-Bernard), les deux restantes étant la Porte Saint-Martin (voir l'Éphéméride du 15 juillet) et la Porte Saint-Denis (voir l'Éphéméride du 15 juin)...
C'est un grandiose et magnifique message politique que le Roi-Soleil envoie aux Français, d'abord, à toute l'Europe, ensuite : "Nec pluribus impar" ("Non inégal à plusieurs", c'est-à-dire "Supérieur à tous"), sa royauté est maintenant si puissante qu'il n'est plus nécessaire d'en protéger la ville-capitale, il peut en raser les fortifications et, là où circulaient des canons, laisser les Parisiens flâner; là où marchaient les gens de guerre (les "gens d'arme") marcheront, désormais, libres de toute crainte, les habitants de la plus grande ville d'Europe. Comme aux temps heureux de la Pax Romana et de l'Empire romain à son apogée, ce n'est plus derrière leurs murs que les villes du royaume des lys seront protégées, mais aux extrémités des frontières :
• il y a presque 500 kilomètres par la route entre Paris et Strasbourg (396,68km à vol d'oiseau, 487,47km par la route) depuis que l'Alsace est française ("Gallia Germanis clausa", "La Gaule fermée aux Germains" (médaille frappée pour l'occasion ci-dessous, voir l'Éphéméride du 21 septembre);
• il y a presque 205km à vol d'oiseau, et 226,41km par la route entre Paris et Lille, "la reine des citadelles", édifiée par Vauban, verrou de notre frontière nord (voir l'Éphéméride du 2 mai);
• et, si la Lorraine n'est pas encore réunie au royaume (elle ne le sera que par Louis XV, voir l'Éphéméride du 23 février), elle est occupée par les troupes du Roi-Soleil, et - fortifiées par Vauban - les citadelles de Sarrelouis et Sarrebruck, à 341km à vol d'oiseau et 402,51km par la route protègent Paris... (elles seront malheureusement perdues pour la France au traité de 1815, sanctionnant la catastrophique période de la Révolution et des guerres de l'Empire, son continuateur...)
Le petit-fils (Louis XIV) réalise ainsi la prophétie faite au grand-père (Henri IV) par le poète François Malherbe, dans sa Prière pour le Roi Henri le Grand allant en Limousin :
On n'en gardera plus ni les murs ni les portes ;
Les veilles cesseront au sommet de nos tours ;
Le fer, mieux employé, cultivera la terre ;
Et le peuple, qui tremble aux frayeurs de la guerre,
Si ce n'est pour danser n'aura plus de tambours...
Nous ne reverrons plus ces fâcheuses années
Qui pour les plus heureux n'ont produit que des pleurs.
Toute sorte de biens comblera nos familles,
La moisson de nos champs lassera les faucilles,
Et les fruits passeront la promesse des fleurs..."
(Texte complet : http://www.poesie-francaise.fr/francois-de-malherbe/poeme-priere-pour-le-roi-henri-le-grand.php )
"La France fut faite à coups d'épée. La fleur de lys, symbole d'unité nationale n'est que l'image d'un javelot à trois lances." (Charles de Gaulle)