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Vu du Burkina Faso. Au Sahel, les terroristes veulent frapper plus loin et plus fort, par Sam Chris.

La force Barkhane au Sahel, le 16 janvier. FRÉDÉRIC PÉTRY / HANS LUCAS / HANS LUCAS VIA AFP

Il est rarissime que le patron des services secrets français prenne la parole. Et c’est pour mettre en garde l’Afrique de l’Ouest que le chef de la DGSE, Bernard Émié, est sorti de sa réserve, le 2 février. Selon lui, après s’être enracinés au Sahel, les groupes djihadistes visent une expansion vers le Bénin et la Côte d’Ivoire. Une sortie qu’analyse Aujourd’hui au Faso.

La menace n’est ni nouvelle ni surprenante, mais la piqûre de rappel du patron du renseignement français n’est pas superfétatoire. Bernard Émié a le mérite de souligner que cette guerre oblique qui fait rage dans le Sahel et à laquelle les armées nationales – Barkhane [la force de l’armée française, qui intervient depuis 2012 au Sahel] et le G5 Sahel [nom donné à la force conjointe des pays de la région, la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad] – font face se fixe maintenant comme cibles la Côte d’Ivoire et le Bénin.

Ainsi selon Bernard Emié, le chef de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), Aqmi [Al-Qaida au Maghreb islamique, l’un des principaux groupes terroristes de la région] est sur le sentier de la guerre vers ces deux pays. Une réunion des caïds de ces organisations terroristes quelque part au Sahel filmée courant février 2020, et qui vient d’être diffusée par la sécurité extérieure française, est venue étayer cette assertion [ces images montrent le chef d’Al-Qaida au Sahel, Iyad Ag Ghali, son numéro deux, Amadou Koufa, et l’ancien chef d’Aqmi, tué par l’armée française en juin 2020, Abdelmalek Droukdel].

Le terrorisme “mouvant comme les dunes de sable”

À vrai dire, que les katibas qui ensanglantent le Burkina, le Mali et le Niger veuillent descendre vers la côte, cela n’a rien d’étonnant puisque des escarmouches mortelles indiquaient déjà que ces terroristes guignent cette partie de la façade atlantique de l’Afrique.

La tuerie de Grand-Bassam le 13 mars 2016, l’attaque de Kafolo, poste frontalier ivoiro-burkinabé, le 10 juin 2020, l’enlèvement de deux Français dans le parc de la Pendjari au Bénin en 2019 sont autant d’actes qui prouvent que les terroristes sont aux portes de ces pays du golfe de Guinée.

Alors qu’il survient à deux semaines du sommet de N’Djamena, réunissant la France et les pays du G5 Sahel, cet avertissement aura le mérite de camper davantage le terrorisme sahélien, un sujet aussi mouvant que les dunes de sable.

Si la DGSE tire la sonnette d’alarme, c’est peut-être aussi pour que l’allégement de l’effectif de Barkhane, qui est dans les tuyaux, soit reporté ou revu sous un autre format. En attendant la tardive et hypothétique arrivée de soldats européens et l’opérationnalisation optimale du G5 Sahel, les Français devraient rester au Sahel, l’arme en bandoulière.

“Une digue” a cédé

Tel est le message subliminal de Bernard Emié. Mais aussi un message assez clair à l’endroit du Bénin et de la Côte d’Ivoire. Avec ces ennemis de l’ombre, on n’est jamais trop bien préparé. Le Burkina, le Mali et le Niger sont régulièrement touchés : que le Bénin, le Côte d’Ivoire, le Togo et le Ghana soient sur le qui-vive. Un adage africain très prisé d’ailleurs en Côte d’Ivoire par certains jeunes dit que :

Quand on frappe le lézard, le margouillat doit se préparer !”

En plus du Covid-19, il semble que, dans les mois à venir, Sahéliens et Français d’abord, et Européens ensuite, doivent harmoniser leurs stratégies. Plus question de croire qu’on est à l’abri barricadé derrière ses frontières, ses herses, ses grilles et ses sécurocrates !

Une digue comme le Mali a sauté, la Libye est devenue un sanctuaire djihadiste et le Sahel malien grouille de katibas. Seules des forces mutualisées peuvent contenir ceux qui donnent la mort facilement et l’acceptent avec délectation.

Sam Chris
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Source : https://www.courrierinternational.com/

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