Sortir du déni Il est temps d'apprendre à vivre avec le virus... et de faire des choix, par Natacha Polony.
"Nous nous apercevons que nous sommes en train de basculer dans une autre époque."
© Hannah Assouline.
Mutants incontrôlables, vagues à répétition, immunité illusoire… Nous avons basculé dans une autre époque. Plutôt que de nous figer régulièrement en espérant en finir, il va falloir désormais apprendre à vivre avec le virus.
C’est une inquiétude qui monte au fur et à mesure que s’égrènent les informations sur les variants, leur prolifération, les risques qu’ils font peser sur l’efficacité des vaccins… Et tout à coup, cette idée que nous nous berçons peut-être d’illusions en nous imaginant que nous allons tous finir par nous vacciner, que cette fameuse « immunité collective » sera atteinte (« au mois d’août » nous promet Olivier Véran) et qu’enfin la parenthèse cauchemardesque se refermera. Ne serait-il pas temps de sortir du déni ? Le risque est non négligeable que nous vivions, dans les deux ans, les trois ans, les cinq ans à venir, avec des résurgences de cette épidémie, des nouveaux variants incontrôlables. La stratégie des reconfinements à intervalle régulier est-elle tenable ?
Apprendre à vivre avec
Déjà, nous nous apercevons que nous sommes en train de basculer dans une autre époque. Celle où des démocraties décrètent la fermeture complète de leurs frontières pour se protéger des autres, celle qui voit s’effondrer la figure emblématique de la modernité : « l’homo touristicus ». Mais il faudra aller plus loin. Si cette épidémie doit durer, nous devons faire ce que nous n’avons aucunement fait depuis maintenant un an : apprendre à vivre avec, plutôt que de nous figer à intervalles réguliers en espérant en finir rapidement. Nous donner enfin les moyens de développer un système de santé qui ne risque pas la saturation. Penser la production de façon à bâtir petit à petit une véritable indépendance. Nous préserver de la concurrence déloyale d’une Chine qui n’a visiblement pas les mêmes difficultés que nous à concilier vie économique et contrainte sanitaire. Les choix qui sont devant nous sont forcément aléatoires, forcément risqués, potentiellement douloureux. Mais ne pas choisir, c’est en fait choisir la mort. Celle d’une civilisation occidentale incapable de gérer ses contradictions.
Source : https://www.marianne.net/