Les États-Unis à nouveau « prêts à guider le monde », dit Biden, qui n’en a plus les moyens, par Antoine de Lacoste.
Le futur président des États-Unis, élu dans des conditions douteuses mais qui seront sans doute validées, nage dans l’euphorie. Il se croit revenu au temps de la domination écrasante de son pays sur le monde, de « la destinée manifeste » que l’Amérique s’est auto-attribuée pour guider l’humanité et assurer son bonheur.
Sa déclaration, faite le 24 novembre à l’occasion de la présentation de sa future équipe, en dit long sur l’état d’esprit des démocrates, ivres de haine et de revanche après quatre ans d’humiliations trumpistes.
Mais la situation ne le permettra sans doute pas. Tout d’abord, le raz de marée électoral annoncé dans le cadre d’une désinformation de grande ampleur n’a pas eu lieu. Les républicains conserveront probablement la majorité au Sénat, et la majorité démocrate à la Chambre des représentants s’est rétrécie. Et puis il faudra bien tenir compte du nombre de voix très élevé obtenu par Trump, démontrant la solidité de son socle électoral qui n’a en rien diminué, au contraire.
Car si l’électeur américain a élu Trump en 2016 et a failli le réélire en 2020, c’est notamment parce qu’il veut que son pays s’occupe de lui sans chercher à « guider le monde ». Il l’a, en outre, fort mal guidé et, du bourbier afghan à 1.000 milliards de dollars aux mensonges sur l’Irak en passant par le désastre libyen (sans même remonter jusqu’à l’agression contre la Serbie), le bilan est accablant. À qui cela a-t-il rendu service, hormis à l’appareil militaro-industriel américain ? En tout cas pas à la classe moyenne des États-Unis qui s’appauvrit depuis plusieurs décennies.
En outre, le monde a changé. La Russie existe à nouveau (d’où la haine inégalée développée contre Poutine) et la Chine menace la suprématie économique américaine. L’Europe pourrait émerger dans ce contexte, mais elle a choisi la paralysie, la lâcheté et la subversion migratoire, la condamnant au néant. L’Angleterre l’a bien compris.
L’Histoire rendra justice à Trump de n’avoir déclaré aucune guerre en quatre ans. Cela faisait longtemps que ce n’était pas arrivé. Même Obama, le gentil prix Nobel de la paix (quand cessera cette grotesque mascarade ?), a participé à la destruction de la Libye, semant le chaos. Il est vrai qu’il était réticent et qu’il a cédé aux pressions de Sarkozy (qu’il insulte, aujourd’hui, dans son livre) et de Hillary Clinton. La défaite de cette dernière en 2016 fut une réelle bénédiction, car avec elle, les islamistes seraient au pouvoir en Syrie.
Bien sûr, il n’était pas nécessaire d’occuper le tiers de la Syrie pour lui voler son pétrole, de dénoncer l’accord nucléaire avec l’Iran, construisant ainsi un boulevard pour les mollahs les plus islamistes du régime, ou de désavouer la France face à Erdoğan. Mais on pouvait craindre tellement pire.
Le pire, avec Biden, n’arrivera sans doute pas en politique étrangère, faute de consensus. C’est à l’intérieur que « l’État profond », tant dénoncé par Trump, tentera de prendre sa revanche. Mais il trouvera en face de lui la moitié de l’Amérique.
Comme en Europe, les fractures identitaires vont s’élargir, pour le plus grand bonheur de la Chine, qui ne se pose pas tant de questions. C’est le corollaire du déclin de l’Occident.