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Thérèse Hargot : « Ni le voile ni le crop top ne sont des signes de liberté de la femme ».

Avec toute l’admiration de Marlène Schiappa qui les encourageait, des collégiennes et lycéennes ont défié le règlement de leur établissement en arrivant, lundi, en cours, vêtues de mini-jupes, mini-shorts ou décolletés vertigineux. Elles répondaient à cet appel du ou #liberationdu14 lancé sur les réseaux sociaux pour « lutter contre le sexisme ». La philosophe et sexologue Thérèse Hargot décrypte ce mouvement et met en garde contre de fausses apparences de liberté.

Les femmes peuvent-elles encore s’habiller comme elles le souhaitent, aujourd’hui ?

Oui, bien sûr ! Mais c’est intéressant d’interroger leur liberté. Nous avons vu, dans ce mouvement #14septembre, des collégiennes et lycéennes affirmer qu’elles s’habillent comme elles le veulent. Elles portent donc délibérément des tenues provocantes, puisque interdites au règlement. Mais ce faisant, elles encouragent à s’habiller exactement comme les influenceuses sur les réseaux sociaux, comme Tik Tok, par exemple, un réseau social ultra-consommé par les adolescentes. Finalement, leur façon de s’habiller est extrêmement codifiée par ces plates-formes qui jouent les codes d’une . D’une part, il n’y a aucune liberté, puisque ce n’est en rien l’expression de leur personnalité. Et d’autre part, des femmes musulmanes revendiquent cette liberté pour pouvoir porter le voile. On peut également s’interroger sur la liberté de ces femmes de porter le voile dès lors que, comme dit Zineb El Rhazoui, « si tu ne portes pas le voile tu risques de cramer en enfer ». En réalité, pourquoi voile-t-on les petites filles et les femmes ? Car le corps, même d’une petite fille, peut provoquer de l’excitation sexuelle chez les adultes. Deux mouvements contradictoires cohabitent donc : le dévoilement et le voilement. C’est le paradoxe de notre société. Les féministes, vont prendre parti pour ce mouvement #14septembre et cela pose problème dans la mesure où l’on tombe dans ces deux écueils.

D’où vient le problème, selon vous ?

Il y a à la fois une culture religieuse – la femme est responsable de la chasteté masculine et, derrière, cette vision que l’homme est un être faible sexuellement – mais aussi le cocktail totalement explosif de l’industrie du porno qui vient véhiculer une certaine image des femmes. Les pays musulmans sont parmi les grands consommateurs de porno. La représentation de la femme occidentale, c’est la prostituée qu’on voit dans les films pour adultes, en contraste avec la femme voilée. Donc, une femme qui n’est pas voilée est rangée dans cette catégorie. Ou elle est associée à une « pute », et je me permets ce mot car c’est celui qui est utilisé, et, dans ce cas, on peut se permettre de la siffler, la harceler sexuellement, car c’est comme si elle avait envoyé des codes, ou alors elle est une femme respectable, une future mère, une épouse. Mais l’entre-deux n’existe pas. Et ce clivage est un peu le même partout. Les hommes font la différence entre la femme que l’on va épouser et celle avec qui on peut s’amuser.

Entre ces deux écueils que sont l’hypersexualisation et le puritanisme, existe-t-il, finalement, une troisième voie ?

Ce qui me semble fondamental, c’est l’éducation auprès de nos enfants. Mon corps, c’est moi, ce n’est pas une chose avec laquelle on peut faire ce que l’on veut. La façon dont je me tiens et je me vêts va envoyer une série de messages. Donc, il faut sortir nos enfants de leur narcissisme et les éduquer à la conscience de l’influence de leur comportement sur les autres, en comprenant qu’ils sont des êtres de relation, et que leur corps envoie des signaux aux autres. À l’adolescence, on se trompe souvent, c’est normal et ce n’est pas grave. Mais c’est à nous, adultes, de faire un vrai travail d’éducation pour leur permettre d’entrer dans des relations ajustées. Au final, est-on libre de s’habiller comme on veut ? Ce n’est pas une liberté « je fais ce que je veux comme je veux » sous influence en mettant un crop top à 14 ans. C’est apprendre à être libre de s’habiller comme il convient, c’est-à-dire être capable de savoir quel est le message que je veux envoyer et d’arriver à être le plus en cohérence avec ma personnalité.

Entretien réalisé par Iris Bridier

 

Thérèse Hargot

Sexologue
Diplômée en philosophie et en sciences de la famille et de la sexualité.
 

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