Sur le blog de Michel Onfray : le virus reconnait (enfin) les frontières !
«N’en déplaise à certains, le virus ne connaît pas ces limites administratives»
Emmanuel Macron, Sommet franco-italien de Naples, le 27 février 2020
Pendant la pandémie, la politique continue! Et comment… On pourrait même proposer une lecture essentiellement politique de cet événement. Car c’est bien l’idéologie d’Emmanuel Macron, mais sûrement pas l’intelligence ou le bon sens, sinon le sens commun, voire même un sain usage de la raison, qui l’ont guidé dans les premières décisions ayant conduit le pays dans l’état où il se trouve.
Car, comment comprendre qu’il ait donné l’ordre d’affréter des avions pour aller chercher sur place les expatriés français dans une Chine ravagée par le virus? Qu’il ait ensuite envoyé les militaires à l’origine de ce rapatriement en permission et non pas en quarantaine – à laquelle étaient contraints les arrivants? Qu’il ait pendant des semaines laissé atterrir chaque jour en France une vingtaine d’avions gros porteurs venant de Chine, autrement dit des milliers de personnes lâchées dans la nature, sans qu’aucun contrôle ne soit fait dès leurs premiers pas sur le sol français? Qu’il ait annoncé que les écoles, bien sûr, ne seraient pas fermées? Que le masque n’avait aucune espèce d’utilité ni pour protéger ni pour se protéger? Qu’il ait pu, avec tambours et trompettes, le 6 mars, aller au théâtre voir son frotte-manche François Berléand et affirmer: «La vie continue. Il n’y a aucune raison, mis à part pour les populations fragilisées, de modifier nos habitudes de sortie», avant de décréter un confinement radical dix jours plus tard? On a su ensuite qu’il n’est pas allé voir une pièce du grand répertoire mais Par le bout du nez qui, ai-je lu, met en scène un psychiatre et un président de la République victime d’affreuses démangeaisons du nez juste avant son discours d’installation – où l’on voit que Brigitte Trogneux a éduqué son ancien élève à ce qui se fait de plus haut dans les lettres!
Comment comprendre en effet toutes ces impérities qui se sont avérées criminelles?
Je ne veux pas répondre en diagnostiquant un manque d’intelligence – l’intelligence étant la capacité à mettre en relations des éléments, apparemment sans relations pour le benêt, afin de voir ce qui les lie.
Encore que: dès qu’on apprend le confinement de Wuhan, une ville de quinze millions d’habitants, par le gouvernement d’un pays communiste totalitaire qui, habituellement, ne se soucie guère de mille, dix mille, voire cent mille sujets de plus ou de moins, on pouvait conclure qu’il y avait péril en la demeure planétaire! C’était en janvier…
Ecartons donc le défaut d’intelligence, sauf à y revenir plus précisément un jour car, l’homme qui préfère Par lebout du nez à Britannicus nous invite à ne pas classer sans suite cette affaire!
Je ne veux pas non plus expliquer la chose par une schizophrénie de l’homme qui, narcissique à souhait, appelle son mouvement En marche!, non sans veiller à ce que les premières lettres de son parti soient celles de ses initiales Cet homme qui porte deux alliances et a fait du En même temps sa marque de fabrique (ou son jingle…), semble avoir du mal à choisir, à décider, à trancher: or le président de la V° république ne saurait faire l’économie de la fonction qui consiste, justement, à choisir, décider, trancher vingt fois par jour, et ce pour des décisions majeures pour la France et sa place dans le monde.
En même temps est un slogan d’enfant qui veut tout et manifeste son intolérance à la frustration, pas une maxime de chef de guerre – un statut qu’il s’est offert de façon très immodeste avec le coronavirus, une mitraillette qui tue 2% des soldats qui sortent des tranchées! Pour raison garder, et honorer vraiment la mémoire des soldats de la Grande Guerre qui n’auraient probablement pas voulu de Macron comme chef d’état-major des armées, rappelons que le 22 août 1914, les combats ont fait 27.000 morts français, dans la journée, et 80.000 pour ce seul mois…
Ce faux chef d’une fausse guerre a décrété, goguenard à souhait, que le virus ignore les frontières! C’était bien sûr une réponse aux politiques qui avaient invité à fermer les frontières pour se protéger de l’épidémie. Il était facile de constater que ceux qui défendent l’Etat-Nation et les peuples étaient visés par Macron. Cette sortie digne d’un politicien, sinon d’un politicard, mais indigne d’un chef d’Etat, fut faite au sommet franco-Italien de Naples le 27 février: «N’en déplaise à certains, le virus ne connaît pas ces limites administratives» avait-il précisément dit…
Avant de se parjurer depuis…
Car: qu’est-ce que la fermeture de l’espace Schengen, si ce n’est faire le nécessaire pour que le virus, qui ne se déplace pas seul mais en parasitant une personne, soit arrêté en même temps que la personne qui le véhicule? Un recours à la frontière…
Car: qu’est-ce que le masque, ridiculisé et moqué d’abord, notamment par l’inénarrable Sibeth Ndiaye qui avouait ne même pas savoir comment s’en servir, et imposé ensuite, si ce n’est une interruption de la circulation entre ses postillons et le visage d’autrui, entreles postillons d’autrui et notre visage? Un recours à la frontière…
Car: qu’est-ce que l’utilisation du gel hydro alcoolique qui détruit microbes et virus sur les mains dont on sait qu’elles sont vecteur de contamination, via les milliers de gestes que chacun effectue sur son visage, notamment en direction desyeux, du nez et de la bouche? Un recours à la frontière…
Car: qu’est-ce que la distanciation sociale, formidable concept!, en vertu de laquelle, en présence d’autrui, on installe une démarcation, une ligne qui sépare et que l’on ne doit pas franchir si l’on veut éviter la contagion? Un recours à la frontière…
Car: qu’est ce que le confinement généralisé de tout le pays pour éviter que les gens se touchent, se contaminent et disséminent le virus ici, là, ailleurs, partout, puis, de ce fait, démultiplient son pouvoir maléfique? Un recours à la frontière…
Car: qu’est-ce que cette injonction à laisser les personnes âgées seules dans leurs mouroirs payés par les familles à prix d’or, avec interdiction de voir leurs proches, d’embrasser leurs enfants ou leurs petits-enfants, sinon, depuis les mesures d’assouplissement, de les rencontrer mais sans gestes affectueux, sans baisers et sans caresses, le tout dans un espace gardé par une milice de volontaires formés pour empêcher les manifestions d’affection qui contribueraient à la propagation du mal? Un recours à la frontière…
Car: qu’est-ce que cette interdiction pour les fidèles chrétiens d’assister à la messe, même en respectant les obligation sanitaires d’Etat («distanciation sociale», masque, renoncement aux gestes de proximité afférents à la célébration…), si ce n’est un confinement des personnes dans le même espace selon des règles plus strictes que celles qui régissent la fréquentation d’un supermarché? Un recours à la frontière…
Car: qu’est-ce que cette législation édictée en matière d’enterrements qui soustrait les morts aux dernières affections de ceux qui les ont aimés pour entreposer leurs cercueils dans des hangars réfrigérés (dont un à … Rungis, probablement entre un entrepôt de viandes froides et un autre de légumes en attente de mûrissement!), ou bien en les incinérant, même si ce n’était pas leurs dernières volontés, voire en les enterrant à la sauvette? Un recours à la frontière…
Car: qu’est-ce que l’arrêt de la circulation aérienne, la fermeture des aéroports, la mise au garage de toute la flotte, le dépérissement des avions qui s’abîment jour après jour, le tout pour éviter de disséminer (comme avec les avions chinois de janvier dernier …) le virus à grande échelle sur la totalité de la planète? Un recours à la frontière…
Car: qu’est-ce que la mise à l’arrêt de toute l’économie française, l’invitation officielle dans les spots télé du gouvernement à rester chez soi afin de ne pas répandre le virus en s’en faisant le vecteur dans le cas où l’on vivrait la vie d’avant? Un recours à la frontière…
Car: qu’est-ce que ce zèle des forces de police qui contrôlent les randonneurs seuls dans la montagne ou, à Chambois, dans mon village natal de cinq cents habitants, qui interpellent une femme seule se promenant derrière le cimetière du village, puis une autre, verbalisée parce qu’elle avait rempli son attestation de sortie avec un crayon à papier et qu’il fut jugé que cela cachait une probable fraudeuse – un zèle que l’Etat s’interdit dans les territoires perdus de la République? Un recours à la frontière…
Et puis voilà, sommet du ridicule pour le président Macron, qu’il met sur pied une France bicolore en trois couleurs! On nous avait annoncé vert et rouge, et, surprise, il y eut également orange! France verte: passez! France rouge: stop! France orange: passez sans passer tout en passant mais en prenant garde de ne pas passer – c’est la couleur emblématique du macronisme… En fonction du nombre des malades et de la quantité d’infrastructures sanitaires dans les départements, le pouvoir décidera chaque soir de la couleur du feu!
«N’en déplaise à certains, le virus ne connaît pas ces limites administratives» disait donc Emmanuel Macron quand il s’agissait de la France. Mais, comme par miracle, quand il s’agit de l’espace Schengen, alors là, oui, le virus connaît la limite administrative – une preuve probable que le virus a voté «oui» à Maastricht!
De même, quand il s’agit des départements (que je défends depuis toujours et qui sont dans la ligne de mire des maastrichtiens de droite et de gauche…), le virus sait reconnaître les cent-une limites administratives de la France que sont les départements! Malin le virus…
Où l’on comprend que ce qui anime Emmanuel Macron n’est ni l’intelligence, ni le bon sens, ni la raison, mais l’idéologie… Il hait les frontières nationales parce qu’il a le projet de diluer la France dans l’acide européiste qui vise le grand gouvernement planétaire des sachants qui écarteront les peuples, mais il aime l’Europe et les frontières européennes qu’il protège – et qu’il protège avant la France, ce qui, pour un président de la République élu au suffrage universel direct, se nomme forfaiture et haute-trahison.
Autrement dit, Emmanuel Macron, président de la République française, chef de l’Etat français, donc chef des armées françaises, ne veut pas protéger Pau en contrôlant la frontière espagnole, Strasbourg en contrôlant la frontière allemande, Dunkerque en contrôlant la frontière belge, Nice en contrôlant la frontière italienne, ce qui serait pur bon sens issu d’une géographie élémentaire – il est vrai que, parmi les perles présidentielles, Macron a parlé de la Guyane comme d’une île…
En revanche, il entend protéger Pau, Strasbourg, Dunkerque et Nice en contrôlant les frontières de l’espace Schengen: protéger Pau en contrôlant les frontières russes, protéger Strasbourg en contrôlant les frontières ukrainiennes, protéger Dunkerque en contrôlant les frontières biélorusses, protéger Nice en contrôlant les frontières bosniaques! Ce qui suppose, en même temps, exposer Strasbourg à l’Allemagne, Dunkerque à la Belgique, Nice à l’Italie et Pau à l’Espagne, alors que ces trois derniers pays frontaliers se trouvent dans le peloton de tête des nations les plus touchées d’Europe!
Où l’on voit que, d’un point de vue sanitaire, la décision macronienne est loufoque, ubuesque, saugrenue, mais que, d’un point de vue politicien, elle est raccord: cette décision procède non pas d’un désir de protéger la France et les français, mais de les exposer à l’avantage de l’Europe de Schengen…Que périsse le peuple français pourvu que l’espace Schengen s’en sorte – voilà l’impératif catégorique des maastrichtiens et du premier d’entre eux en France… Avec cette logique, et le peuple français et l’espace Schengen paieront le prix fort – ce qu’un respect des frontières nationales aurait probablement pu mieux contenir. Car le recours aux frontières via les masques, le gel et la distanciation sociale, les fermetures des écoles et des magasins, des restaurants et des lieux de culte, des stades et des jardins publics, la pétrification de la vie, les confinements des morts et de vivants, les mises à l’arrêt des trains et des avions, des voitures aussi, les départements rouges et verts mais aussi orange, voilà qui montre aux tenants de la ligne européiste (qui hait les frontières des nations de l’espace Schengen) qu’ils avaient donc bien tort de rire hier de toutes ces frontières qu’ils instaurent aujourd’hui avec force zèle…
Michel Onfray