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Face au coronavirus, Didier Raoult, seul à proposer une stratégie contre la maladie.

Source : https://www.valeursactuelles.com/

Plutôt que de lutter contre le virus, les autorités sanitaires préfèrent tirer dans les pattes de l’un des leurs. Une stratégie regrettable, dénonce Benoît Rittaud, d’autant que la réalité semble bien donner raison au chercheur marseillais.

 

Didier Raoult va vite. Très vite. Il fonce, l'intendance statistique suivra. En temps normal ses méthodes hétérodoxes mériteraient mille reproches : court-circuitage des canaux ordinaires de la science, communication fracassante sur les réseaux sociaux, annonces spectaculaires lancées sans précautions oratoires ni méthodologiques… Sauf que le franc-tireur marseillais n'est pas là pour faire de la science mais pour mener une guerre. Une guerre dont en tant qu'infectiologue mondialement réputé il a tout pour être le chef d'État-Major. Comme dans toute guerre, le cadrage initial devrait être binaire : SARS-CoV-2 contre Homo sapiens. Malheureusement, cette clarté de principe s'est vue compliquée par la propension de la sous-espèce Homo sapiens gallus, peut-être inspirée par les rivalités gauloises de jadis, à tirer au moins aussi volontiers sur son propre camp que sur celui de l'ennemi. Nos plus hauts gradés nationaux ont ainsi affirmé carrément que les masques de protection ne servaient à rien (un mensonge aujourd'hui avoué), retardé la politique de tests massifs (qui pourtant s'impose selon l'OMS), méprisé les dispositifs de caméras infrarouges mis en place en Asie, et regardé avec condescendance les premiers jours de malheur chez nos frères Italiens.

À cela on peut offrir l'excuse d'une tactique politique certes pas très jolie mais qui semblait seule disponible : feindre d'être les organisateurs d'une catastrophe qu'on ne peut éviter. Voilà qui est désolant, mais faire semblant de maîtriser la situation peut en effet constituer la première étape d'une reconquête. En revanche, nul pragmatisme, si machiavélien fût-il, ne justifie l'affrontement interne persistant entre les troupes marseillaises de Didier Raoult et les autres, notamment parisiennes, qui les prennent de haut tel un Martin Hirsch affirmant sur Europe 1 que « la chloroquine n’a jamais marché sur un être vivant » ou un Axel Kahn raillant dans un tweet tel résultat de l'IHU de Marseille.

La vaste étude européenne Discovery qui devait nous dire le fin mot de l’histoire n’a certes toujours pas délivré ses résultats préliminaires. Mais un peu de patience, que diable…

Au lieu de mener la guerre contre SARS-CoV-2 comme le font ses congénères, la branche gallus d'Homo sapiens s'offre donc le luxe d'une guéguerre intestine entre deux de ses groupes. Selon le premier, parisius, il est urgent d'attendre. Jugeant sans doute que l'effondrement économique, les difficultés psychologiques du confinement ou encore le déclassement de la France et de l'Europe, voire de l'Occident, sont des craintes un peu surfaites, parisius estime que rien ne saurait remplacer une bonne grosse étude scientifique internationale avec tests en double aveugle, échantillons randomisés et autres plans d'expérience qui, dans quelques mois à peine, nous offriront sûrement toutes les certitudes nécessaires. Celles-ci devraient, n'en doutons pas, permettre de lever le confinement en toute sécurité avant Noël. La vaste étude européenne Discovery qui devait nous dire le fin mot de l'histoire n'a certes toujours pas délivré ses résultats préliminaires, mais un peu de patience, que diable…

De son côté, Homo sapiens massalioticus, sans doute mû par quelque folklorique bon sens méridional, estime au contraire qu'il convient d'agir au plus vite face à une situation qui, il faut en convenir, présente divers inconforts parmi lesquels des hôpitaux saturés, une récession inévitable, et accessoirement quelques décès. Fort de cette logique qui fleure sans doute un peu trop la province, l'IHU Méditerranée-Infection de Marseille s'est donc lancé dans une grande campagne de dépistage et de soins, tenant quotidiennement les comptes des résultats — flatteurs — de sa politique sur une page facétieusement intitulée "Southern France Morning Post" (allusion aux données fournies quotidiennement par le South China Morning Post — qui les tire en fait de la collecte menée par l'université Johns Hopkins).

Laissons là l'ironie : depuis le début de l'épisode, la proposition de Didier Raoult constitue la seule vision stratégique véritable a avoir été proposée en France. Jamais chacun de nous n'avait eu autant intérêt à être Marseillais. La stratégie tient en deux aspects indissociables : le dépistage précoce (avec, dans l'idéal, un confinement des seuls malades), et le traitement, là aussi précoce, à l'aide de 600 mg quotidiens d'hydroxychloroquine (administrés en trois fois 200 mg) et d'un complément d'azithromycine (un antibiotique), sous contrôle médical. Primum non nocere dit l'adage hippocratique : « d'abord ne pas nuire ». L'hydroxychloroquine, en plus d'être extrêmement bon marché, n'a que des effets secondaires parfaitement connus, elle n'est à proscrire que dans des cas bien documentés et faciles à identifier en amont.

Depuis le début de l’épisode, la proposition de Didier Raoult constitue la seule vision stratégique à avoir été proposée en France

On parle surtout du traitement, mais le dépistage est lui aussi un pilier stratégique pour limiter la propagation du virus. Le dépistage massif mené à Marseille permet d'accumuler quantité de données, ainsi que de permettre aux cas asymptomatiques (porteurs mais sans symptômes manifestes) de redoubler de vigilance pour ne pas contaminer leur entourage. Rien à voir, donc, avec la stratégie actuelle de confinement, qui consiste plus ou moins à faire de chaque famille un mini-foyer de la maladie. La stratégie Raoult tient donc toute entière en deux paragraphes de quelques lignes. Les avez-vous comprises ? Si oui, alors vous venez de passer un test d'intelligence auquel bien des personnes haut placées s'ingénient à échouer, car à peu près tous ceux qui ont critiqué le traitement de Didier Raoult l'ont fait à l'aide de sophismes. (On passera charitablement sur les critiques ad personam, notamment sur le fait que Didier Raoult a affiché par ailleurs son scepticisme sur l'alarmisme climatique.)

Parmi ces sophismes, les détracteurs ont voulu monter en épingle ce couple d'Américains morts brutalement après avoir ingéré « préventivement » de la chloroquine. Les malheureux ont fait tout ce qu'il ne fallait pas : l'automédication, ainsi que l'ingestion d'un produit non destiné à la consommation — en l'occurrence du phosphate de chloroquine destiné à l'entretien des aquariums, à une dose sans rapport avec la dose médicale. Le vocabulaire de la guerre dispose d'un terme pour désigner ce genre de drame. Il s'agit d'un dommage collatéral, qui a tous les risques de se reproduire à chaque prochaine annonce de traitement potentiel, quel qu'il soit.

Sur la méthode : aux habituelles publications scientifiques sur un ton feutré, Didier Raoult a préféré les vidéos YouTube. Certes. Sauf qu'il lui avait été jusque-là impossible de faire connaître son message, et que ce n'est que grâce à son tapage qu'il a pu être entendu des responsables politiques comme du reste de la profession, réussissant finalement à faire inclure l'hydroxychloroquine à l'essai européen Discovery.

On ne peut que s'étonner d'une organisation d'un système de santé qui conduit à ce que le lauréat 2010 du grand prix de l'INSERM doive se résoudre à employer une tactique qu'on imaginerait réservée aux seuls guérisseurs et rebouteux. Serait-ce que le traitement n'est qu'une poudre de perlimpinpin de plus à ajouter à l'interminable liste des « remèdes miracles » des marchands ambulants de nos westerns de jadis ? Il semble de plus en plus que, fort heureusement, ce soit le contraire qui soit vrai.

Le traitement doit se faire au début de la maladie, ce qui explique que le traitement “compassionnel” tenté sur des patients en réanimation ne fonctionne pas

Les détracteurs ont contesté la première étude faite par Didier Raoult, arguant du fait qu'elle portait sur trop peu de patients (24) et sans groupe témoin. La seconde, (80 patients), a subi les mêmes foudres. Là encore, il faut comprendre que nous ne sommes pas dans des temps ordinaires, où la science peut prendre le temps de suivre tranquillement des protocoles : il faut faire vite, quitte à revenir sur ce qui aura été tenté sans succès — autant il est aujourd'hui de bon sens de vouloir étendre le traitement à l'hydroxychloroquine au vu des premiers résultats, autant il faudra savoir revenir en arrière sans hésiter si les résultats venaient à se dégrader. Une étude chinoise avec groupe témoin suggérant des résultats contraires à ceux de l'IHU de Marseille a été elle aussi brandie contre l'hydroxychloroquine, mais là encore l'argument était spécieux : non seulement le test n'incluait pas d'azithromycine, mais l'hydroxychloroquine était administrée en une seule dose quotidienne de 400 mg, là où Didier Raoult préconise 600 mg en trois prises. Preuve que ces détails ont de l'importance : une autre étude, chinoise elle aussi, s'est ensuite révélée bien plus favorable lorsque la posologie se rapprochait de celle de Marseille.

Enfin, le traitement à l'hydroxychloroquine et à l'azithromycine doit se faire au début de la maladie et non lorsque celle-ci devient grave. C'est la raison pour laquelle le traitement « compassionnel » qui a été tenté sur des patients en réanimation ne fonctionne pas et que Didier Raoult prévoit d'ores et déjà que l'essai « Discovery », tel qu'il est conçu, sera un échec qui ne signifiera rien. Il est donc possible que le salut vienne de la base plutôt que du sommet. D'ailleurs, face aux atermoiements la fronde s'étend désormais à des niveaux de plus en plus élevés, comme cette tribune publiée dans Le Figaro, mais aussi cette pétition lancée par plusieurs spécialistes ainsi que deux anciens ministres de la Santé. Cette pétition a atteint les 375 000 signatures à l'heure où ces lignes sont écrites, un chiffre qui est probablement obsolète à l'heure où vous les lisez.

Les pays victimes du paludisme, où la chloroquine est administrée depuis des années, sont moins victimes que les autres du coronavirus

Des remontées de terrain de plus en plus nombreuses semblent confirmer l'efficacité du traitement. Le fait que la mortalité à Marseille soit nettement plus faible qu'ailleurs commence à crever les yeux. Les « conversions » au traitement Raoult se multiplient, les services de certains hôpitaux commencent à le pratiquer, sous le manteau ou au grand jour. Des pays étrangers s'y lancent, ayant compris que c'était la meilleure chose à faire faute de meilleure option. Il apparaît aussi que les pays victimes du paludisme sont moins victimes que les autres du coronavirus, c'est-à-dire les pays dans lesquels la chloroquine est administrée depuis des années préventivement au paludisme. Ce n'est pas une preuve, mais dans le cadre d'une médecine de guerre, voilà un important élément d'appréciation.

Notre pays sera-t-il donc le plus frileux à se lancer pour de bon dans un traitement pourtant issu d'un scientifique de nos rangs ? Il est plus que temps de retrouver l'esprit pionnier d'un Pasteur. L'échec n'aurait que des inconvénients limités, alors que le succès nous permettrait fièrement d'entonner La Marseillaise.

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