Le bonnet phrygien, devenu l’emblème du mouvement révolutionnaire en 1790, s’impose fin 1792, son usage culminant jusqu’à la réaction thermidorienne de 1794. C’est-à-dire que ce couvre-chef incarne peu ou prou la Terreur et même la Grande Terreur, qui est sans doute un des moments les plus tragiques de notre histoire.
Quand je vois un bonnet phrygien, je pense donc à la princesse de Lamballe, assassinée pour crime d’amitié avec Marie-Antoinette, et dont le corps nu, décapité au couteau de boucher, a été promené dans Paris, la vue de son intimité soigneusement exposée suscitant des propos égrillards de la part de délicats militants de la Liberté.
Quand je vois un bonnet phrygien, je pense à ces prêtres et à ces religieuses que Carrier, à Nantes, déshabillait et liait nus, l’un à l’autre, l’un face contre l’autre pour être précis, sexe contre sexe, avant de les noyer dans la Loire. Ce charmant adepte de l’Egalité appelait cela un « mariage républicain ». Parenthèse : détourner la symbolique du mariage n’est donc pas nouveau…
Quand je vois un bonnet phrygien, je pense à ce curé vendéen à qui des soldats, sans doute partisans de la Fraternité, avaient tranché les deux mains avant de répandre dans l’auge à cochons le contenu du tabernacle de son église. Ce martyr a été retrouvé accroupi devant l’auge, les deux avant-bras collés contre terre afin de tenter d’arrêter l’hémorragie, et lapant dans l’auge, s’efforçant de disputer aux cochons les hosties consacrées.
Je ne cherche pas ici à ranimer de vieilles querelles idéologiques, et je sais que le succès de la Manif pour tous repose sur sa diversité, et l’acceptation de cette diversité. Mais quand même. Jolies jeunes filles de 2013 qui vous promenez avec un bonnet phrygien, pensez aux horreurs de 1793 : mettez-vous autre chose sur la tête. Je vous assure que vous n’en serez que plus belles.
Jean Sévillia
Sources : Boulevard Voltaire (Edition du lundi 22 avril 2013)
lafautearousseau