UA-147560259-1

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

N’oubliez jamais

 

par Louis-Joseph Delanglade

 

M. Cameron vient de rappeler que la Grande-Bretagne, en fait l’Angleterre, reste pour l’essentiel ce qu’elle a toujours été : une île méfiante, dont le pragmatisme et la ténacité ne sont plus à démontrer. Se pose donc maintenant de façon explicite la question de son maintien dans l’Union européenne. Alternant bon sens (« L'Europe partout où c'est nécessaire, le national partout où c'est possible ») et humour (« L'Union européenne a l'habitude de résoudre des problèmes insolubles, elle pourra résoudre celui-là aussi »), M. Cameron n’exclut aucune possibilité. Bien sûr, on sait qu’il est motivé sur le plan politicien par la montée du parti europhobe Ukip et de l’aile eurosceptique de son propre parti conservateur. Bien sûr, on sait qu’il souhaite, en ce qui le concerne, ne pas être contraint d’aller au bout du « Brexit ». Mais, dans cette Union tractée par un improbable attelage fait d’idéalisme utopique et de rationalisme destructeur, ses propos sonnent parfois étrangement juste. Et on ne boude pas son plaisir à entendre le chef du gouvernement d’une des grandes puissances européennes affirmer ce qui aurait dû servir de pierre angulaire à tout projet européen : « N'oubliez jamais que l'Union européenne compte maintenant vingt-huit anciennes nations d'Europe, que la diversité est la plus grande force de l’Europe. » Même si la diversité, vue d’outre-Manche, se résume en un alignement inconditionnel sur les Etats-Unis d’Amérique et une foi indéfectible dans le libéralisme économique.  

En tout cas, voici nos européistes divisés. Certains, inquiets d’une possible victoire europhobe au prochain référendum, se consolent en y voyant une opportunité pour le fédéralisme qu’ils appellent de leurs voeux - preuve qu’ils n’ont rien compris à la démarche britannique, laquelle est d’abord justement le refus d’une disparition programmée au sein d’une fédération, refus de plus en plus manifeste dans l’ensemble des pays de l’Union. Cela n’empêche pas M. Guetta (France Inter) de se prendre pour un de ces cabris que moquait le général De Gaulle, en oubliant que la zone euro n’est rien qu’une union monétaire réversible : « Dans l’hypothèse malheureusement plausible où la Grande-Bretagne s’en irait, la zone euro doit être prête à engager sa transformation en union politique au sein de l’Union, en avant-garde d’une Europe puissance à même d’enfin s’affirmer en acteur de la scène internationale » ! D’autres, modérément optimistes, pensent comme Mme Merkel que, avec « la volonté d’aboutir », certaines « difficultés » sont surmontables. M. Thiériot (Le Figaro) voit même dans les exigences de M. Cameron une chance pour l’Union qui, en les satisfaisant, romprait avec « l'inflation normative bruxelloise », conforterait le « principe fondamental de libre circulation », faciliterait l’émergence d’une « Europe à plusieurs vitesses » et rétablirait le « primat du politique sur le juridique ». Sans doute trop beau pour être vrai. 

Nous verrons bien. De toute façon, les Britanniques auront le dernier mot. M. Cameron, par son initiative référendaire et les conditions posées à l’Union, constitue dès lors un bon exemple de l’importance de l’Etat dans la défense d’une nation. On peut penser ce qu’on veut de ses « valeurs » - un peu trop marchandes au goût de certains - mais la leçon qu’il nous donne est que rien de solide ne se fera en Europe si on ne construit pas sur les réalités premières que sont les peuples, les nations, les Etats. M. Hollande serait bien inspiré de suivre son exemple. N’oubliez jamais, M. Hollande, que nous sommes des Français et que c’est cette qualité qui fait de nous des Européens. 

 

Commentaires

  • Un grand merci LJD de débuter votre billet par la devise « Dieu et mon Droit ». Tout est dit. Blason en bonne place sur le quotidien The Times. Tous les Britanniques ne le lisent pas, mais la diffusion de ce grand journal est suffisante pour le rappeler. Et rend prétentieuses et fausses, les constructions françaises, dites républicaines telles que la laïcité, ou l’universalité clamées par les thuriféraires de 1789.
    Même si c’est rebattu répétons la devise de Palmerston, un de leur grand ministre des Affaires étrangères (avant d’être Premier Ministre): « l’Angleterre n’a pas d’amis éternels, l’Angleterre n’a pas d’ennemis éternels, l’Angleterre n’a que des intérêts éternels ».
    Fouinant chez un bouquiniste, je croise un volume des mémoires du Gal Weygand, 1957, ouvrant au hasard, page 71, Traité de Versailles: « … le désir d’être aimable ne fera jamais perdre de vue à un Anglais que l’Angleterre est le seul pays qui compte pour lui ; par là je veux dire qui jouisse à ses yeux de droits égaux aux siens …Lorsqu’un Français aura à traiter des grands intérêts de son pays, il se souviendra qu’il a devant lui des hommes (les Anglais) qui dans un pareil cas ne reculeraient devant rien. Il sera compris d’autant mieux qu’il tiendra plus ferme, parce qu’à sa place son partenaire en eut fait autant …». Magnifique pertinence d’un officier général qui s’est frotté aux autorités britanniques pendant les mois de rédaction de ce traité dont nous connaissons aujour’hui le contenu pervers.

  • Le Royaume-Uni est fait de cinq nations antagonistes.
    M. Cameron a bien du mérite à mener le train du référendum. Dans l'ordre de préséance les cinq sont : la City, l'Angleterre, l'Ecosse, les Galles et l'Irlande orangiste.
    A terme l'Irlande du Nord a vocation à entrer dans une République irlandaise adaptée, les Galles n'ont pas d'option, l'Ecosse se met à rêver d'un petit Commonwealth des brumes avec la Norvège, l'Islande, le Danemark (+ Groenland), l'Angleterre qui accumule des poches de pauvreté espère devenir un jour aussi riche que la City !
    Tout l'écheveau ne tient que par le "particularisme commun" que représente la couronne britannique. Sans elle...

  • Oui, mais il y a longtemps qu'il en est ainsi; longtemps que cela tient ... Cela ne manquera pas de mourir un jour, comme tout le reste. Mais, cela tient et, de toute façon aura beaucoup, longtemps et parfois glorieusement tenu. Sans-doute grâce à la couronne. Mais est-elle cause ou effet ? Les deux, peut-être. Alors à quoi sert de la menacer d'un noir "Sans elle ..." ?

Les commentaires sont fermés.