2014 ou le rêve socialiste, par Hilaire de Crémiers*
La réalité pourrait bien contredire les fausses assurances de ces politiciens dont la médiocrité d'esprit se couvre de la raison d'Etat. Le rêve socialiste ne dure jamais plus d'un an. Après, il faut payer.
* Analyse politique parue dans le n° 121 (septembre 2013) de Politique magazine.
Non, François Hollande n'a pas été très malin a en faisant croire au mois de juillet que, grâce à lui évidemment, la reprise économique était dorénavant l'actualité qu’il allait devoir gérer. Il était heureux de le dire et de le redire en toute simplicité avec ce sourire béat qui reflète si profondément sa vie intérieure. Il se donnait ainsi le beau rôle en insistant sur les résultats calamiteux du quinquennat précédent selon le jeu de cette alternance politicienne qui consiste essentiellement à éreinter le prédécesseur pour se faire valoir.
Mais un tel calcul est aujourd'hui risqué. Pendant tout l'été, il n'a été question dans les discours de Hollande, d’Ayrault, de Moscovici que de ce « frémissement » de 0,5 %, signe annonciateur pour eux des lendemains heureux promis par le socialisme éternel et singulièrement par le candidat Hollande, son messie d'aujourd'hui : le mariage pour tous déjà légalisé, la retraite pour tous sans effort et le plus tôt possible, la croissance pour tous, l'éducation démocratique pour tous, le succès pour tous, les loisirs pour tous, la drogue pour tous, le partage des richesses évidemment pour tous, la liberté pour tous, même et surtout pour les récidivistes, les violeurs et les assassins qui, du coup, seront très gentils et avec qui il faudra aussi être très gentils s'il leur vient l'idée de recommencer, en application de la prochaine loi pénale si finement et si fermement concoctée par celle qui garde les Sceaux et qui, assurément, n'a jamais connu cette chance, pas encore, d'être assassinée, volée ou violée.
Le rêve impossible
L'avènement de cette société radieuse n'est, bien sûr, possible que par l'exclusion préalable et méritée de ceux qui refusent cet univers nouveau, ce « renversement de civilisation », selon le terme approprié qui a été employé, conçu et prédit par les brillants cerveaux de notre gauche illuminée dont la prophétesse Taubira à la voix rauque et oraculaire, le grand-prêtre Peillon à la voix si liturgiquement religieuse sont les plus éclatants exemples. Comme dans le roman d'anticipation de George Orwell, il y aura le ministère de la Vérité, chargé de l'éducation, de l'information et des loisirs programmés, le ministère de l’Amour, chargé de la justice et de l'uniformisation des esprits, s'il le faut par la rééducation musclée des récalcitrants, le ministère de l'Abondance, chargé de gérer la pénurie en faisant croire que l'Etat-providence de Big Brother assure la juste satisfaction des besoins de tous, le ministère de la Paix, chargé, comme il se doit, de faire la guerre. Nous y sommes ou presque.
Mais comme toutes les expériences du passé l'ont prouvé, ce socialisme fumeux aboutira à des catastrophes. L'équation dont les termes sont ainsi posés, est radicalement impossible et, donc, le problème politique de François Hollande est insoluble. Tous les gens de bon sens le savent pertinemment. Son affaire est tissue de faussetés et de mensonges. À commencer par ce prétendu « frémissement », en fait circonstanciel, dû à des agrégations de chiffres sans signification, et que déjà dément la réalité industrielle et commerciale: non seulement il n'y a pas de reprise mais toutes les évaluations chiffrées de l'activité sont en train de se contracter. Chez nous. Pas chez les voisins, non : chez nous, dans le « bel aujourd'hui » hollandais
La fiscalité comme solution
Les procédés, archi-connus, de la vaine relance socialiste vont encore peser davantage sur les comptes publics et cette stupide annonce qui laisse entendre que tout est sauvé et qu'il n'y a plus qu'à continuer sur les mêmes lignes, va rendre encore plus irréalisables les tentatives éventuelles de redressement des comptes. Ainsi, à La Rochelle, la jeune garde socialiste a-t-elle fait savoir qu'il n'était pas question de revenir sur les acquis sociaux mais qu'il fallait au contraire les multiplier. Il suffisait de prendre la richesse là où elle était ; et de l’Aubry à la Taubira, ce n'était qu'un seul chœur d'exultation sur le fameux air du beau et du grand soir qui, enfin, se prépare.
Jean-Marc Ayrault, de sa voix terne et caverneuse, dans cette certitude inébranlable que tout allait mieux dans « le meilleur des mondes » dont il était le chef de gouvernement, annonçait des réformes qui ne remettraient rien en cause, sauf à accorder encore des avantages, et qui ne coûteraient qu'à ceux qui peuvent et, évaluer ! Tout est là. Il fait trembler jusqu'à la Commission de Bruxelles et jusqu'au FMI !
Le problème des retraites, sur lequel gouvernement, partenaires sociaux et parlementaires se penchent, est en passe, sous la présentation lénifiante du Premier ministre, d'être résolu. En apparence, bien sûr. Il n'est pas question d'aborder le sujet des déficits abyssaux et cumulés qui nécessitent de trouver 20 milliards, non ; jusqu'à 2020, sans toucher à rien, les ressources au jour le jour seront assurées par cette trouvaille dont il convient d'apprécier l'ingéniosité et le caractère franchement inouï: une augmentation des cotisations, surtout du côté patronal, mais si doucement insinuée avec une si gentille pommade de compensation, qu'elle ne peut que passer, n'est-ce pas ? L'augmentation de la CSG, un moment envisagée, est sans doute une réserve que le gouvernement se garde en cas de besoin. Ça ne saurait tarder.
Déclarer la guerre
Inverser la courbe du chômage ? Il ne s'agit sous la houlette de l'État que de créer des emplois en nombre et de toutes catégories. Les contribuables seront toujours là, entreprises et familles dont il suffit d'affirmer qu'elles sont favorisées pour se permettre de les taxer. Qu'importe pour des gouvernants dont pas un seul n'a travaillé dans le vrai monde économique et dont si peu savent ce qu'est une vie de famille.
Impôts et taxes se sont donc alourdis d'autant, la France étant désormais la championne du monde des prélèvements obligatoires qui, dans peu, franchiront la barre des 50% du PIB. Ras-le-bol fiscal, dit-on ? Ras-la-marmite, plutôt ! La fiscalité s'alourdira encore en 2014 comme l'examen de la loi de finances, malgré les dissimulations gouvernementales, ne le montrera que trop. C'est presque tous les jours que subrepticement les Français apprennent soit une augmentation d'impôts, de tarifs, de taux de TVA, soit une création de taxes nouvelles, telle cette contribution « climat-énergie » joli mot, n'est-ce pas ? - annoncée, pour réconcilier les Verts avec le gouvernement, par le ministre de l'Écologie Philippe Martin aux journées d'été d'EELV. Et une de plus ! A la suivante donc !
Ne reste plus dans ces conditions d'insécurité intérieure dramatique et chaque jour aggravée, d'épuisement financier, de langueur économique, de réduction concomitante du budget militaire, eh bien, qu'à déclarer la guerre. C'est une spécialité des socialistes. À la remorque du monde anglo-saxon. François Hollande joue la gravité. Certes, grâce aux soldats remarquables de la France, il a gagné une bataille au Mali, mais, aujourd'hui, peut-il encore quelque chose ? La prudence s'imposerait. Sait-il seulement où il va ?