Hier soir, nous avons eu une veillée autour d’un feu qui nous a d’ailleurs fort agréablement réchauffés, aussi bien le corps que l’âme, nous avons eu une veillée de chansons. Ces chansons étaient dirigées par quelqu’un qui, lui aussi, a l’autorité dans le sang, forts bien chantées par des jeunes gens et des moins jeunes. Ces chansons, ce feu, cette grande fumée dissimulée, presque clandestine, dans la terre de Provence, m’ont appris des choses.
LES FANTÔMES
J’ai essayé de chanter, moi aussi, le moins faux possible, et je regardais autour de moi et je voyais presque des enfants, je voyais des jeunes gens, je voyais des personnes d’un âge mûr, je voyais des vieillards et je voyais des fantômes. Je voyais dans ces ombres qui bougeaient autour du feu les chefs de la révolution nationale russe, ces partisans blancs dont vous connaissez si bien le chant. Je voyais l’ombre de mon grand-père, qui a été l’un de ces chefs blancs, fusillé par les bolcheviks. Je voyais DENIKINE. J’en voyais quelques autres qui étaient, d’une certaine manière mystérieuse, parmi nous.
Anton Ivanovitch Dénikine (1872 - 1947). "Il prit, en octobre 1918, la tête d'une armée blanche d'environ 150.000 hommes, qui, appuyée par les alliés, reconquit sur les bolcheviks toute l'Ukraine et la Russie centrale, s'empara durant l'été 1919 de Kharkov, Kiev, Voronej, Orel, parvint jusqu'aux environs de Toula et menaça Moscou..." (Michel Mourre).
Je voyais les chouans décharnés et mourants dans les fossés, dans le cadre du génocide vendéen. Je voyais le plus magnifique d’entre eux, Monsieur de CHARETTE. Et je me disais que, si nous chantons encore “Monsieur de CHARETTE a dit”, cela veut dire que Monsieur de CHARETTE n’est pas mort. Il a, sans parler de l’immortalité chrétienne, une immortalité parmi nous. Il est présent. S’il revenait brusquement dans cette grotte de Provence, il se croirait en Vendée. Il se dirait: “je suis vivant, nous sommes vivants, mon idée est vivante, nous sommes toujours là, nous sommes toujours fidèles”.
Bien sûr, parmi ces fantômes, il en est un encore plus majestueux que les autres: il y avait le fantôme du roi, du Roi et de tous les rois. Ces fantômes étaient présents parce que le roi est l’éternelle solution et qu’il ne pouvait pas ne pas être là puisqu’il y avait une poignée de fidèles qui, contre toutes ces horreurs qui nous menacent, chantaient des chansons dans la nuit. Il y avait là un message d’espoir inextinguible.
Même si nous devons périr, même si nous devons être vaincus, ce sera un très grand honneur d’avoir été les derniers, non, les avant-derniers car j’ai entendu les jeunes orateurs de ce matin, et je sais que la relève est prête, d’avoir été au pire les avant-derniers porteurs de ce flambeau qui ne veut pas mourir. Ce flambeau brûle dans nos cœurs et il nous dit: le roi est l’éternelle solution.
Je veux tout de suite dire qu’il y a une objection: nous avons entendu surtout des messages tragiques et je n’ai malheureusement pas de bonne nouvelle à vous donner. Nous ne sommes pas cette année plus nombreux que nous ne l’étions les années passées. Nous sommes, il faut bien que nous en prenions conscience, une poignée de témoins.
QUE FAIRE ?
Tout à l’heure, j’ai été interviewé par une charmante journaliste de FR3 qui me disait: “Mais, Monsieur, n’avez-vous pas l’impression de prêcher dans le désert?”. Je lui dit: “Mademoiselle, je n’ai pas du tout le sentiment de prêcher. J’ai le sentiment de témoigner et on peut témoigner dans le désert. C’est toujours au moins une satisfaction personnelle et cela peut être une utilité”. L’objection, c’est: “oui, mais que va-t-on faire?”.
Je me souviens avoir parlé un jour dans une réunion fort brillante à Paris et j’essayais de montrer le caractère sacré de la royauté. Un monsieur en smoking, juste devant moi, s’agaçait beaucoup et, lorsque j’eus terminé, il me dit: “Bon, d’accord, mais le coup d’état, quand est-ce qu’on le fait ?”.
Je ne sais pas quand on fait le coup d’état. Je ne sais pas quand 95% des Français voteront pour le rétablissement de la royauté. De tout cela, je ne sais rien. Mais je sais aussi que, si la Belgique est encore une nation, c’est grâce au roi. Je crois aussi qu’en Espagne, si la guerre civile n’a pas éclaté de nouveau, c’est grâce au roi. Et je sais que, si nous avons encore un ami en Afrique du Nord et si cet ami conserve encore une paix précaire dans son pays, c’est parce que c’est un roi, le roi du Maroc.
23 février 1981 : lors de la tentative de Coup d'Etat du Lieutenant-colonel Tejero,
le Roi d'Espagne apparaît à la télévision pour enjoindre aux militaires de rester -ou de rentrer...- dans leurs casernes.
"Je crois aussi qu’en Espagne, si la guerre civile n’a pas éclaté de nouveau, c’est grâce au roi."
Donc, j’accepte tout à fait l’objection selon laquelle la monarchie n’est peut-être pas pour demain en France mais je récuse totalement l’objection selon laquelle la monarchie ne serait pas moderne. Au contraire, elle me paraît extrêmement moderne.
Je voudrais vous dire que le rétablissement de la monarchie n’est pas du tout exclu en Russie où je vais souvent et je pense que je connais assez bien le problème . C’est une possibilité, ce n’est pas une promesse que je vous fais. Un autre pays, dont je parle souvent en ce moment, est la Bosnie serbe où la restauration de la dynastie des KARAGEORGES n’est pas exclue non plus, sans parler de la Roumanie, sans parler de l’Albanie, sans parler de la Bulgarie. Tout est possible d’une certaine manière.
Nous vivons une période où la monarchie sera peut-être récusée mais peut-être prouverons-nous qu’elle est le seul obstacle possible à cette mondialisation, après l’européanisation dont nous avons tant entendu parler.
Le roi, l’éternelle solution. Les mots sont très bien choisis et je me suis dit que je vais faire un exposé en trois points: le roi - éternelle - solution. Ca va très bien avec mon éducation secondaire: avec trois points, on réussit toujours. Puis, je me suis dit: qui dit solution, dit problème, et peut-être que, plutôt que de faire un exposé un peu bateau, il vaut mieux commencer par les problèmes.
LES HOMMES ONT BESOIN D’ETRE GOUVERNÉS
Le premier problème qui se pose à toutes les sociétés des hommes, c’est que ce que les chrétiens expliquent par le récit de la chute a eu lieu et que par conséquent les hommes ne sont pas parfaits, qu’ils ne sont pas tous très gentils et qu’ils ont besoin d’être gouvernés. C’est le premier problème politique: les hommes ont besoin d’être gouvernés.
S’ils ne sont pas gouvernés, ils s’entre-mangent et celui qui a mangé le plus des autres commence à gouverner ceux qu’il n’a pas eu le temps de manger, ce qui est la loi de la jungle, ce qui est une façon de régler le problème, mais il y en a peut-être d’un peu plus civilisées et la monarchie nous apporte une de ces solutions pour régler la seule nécessité que les hommes ont besoin d’être gouvernés. Je ne dit pas que c’est la meilleure mais c’est une des solutions. Le roi est une des solutions à la nécessité qu’ont les hommes d’être gouvernés. Il y a fondamentalement deux sortes de gouvernements :
* les gouvernements paternels où la personne qui a l’autorité est donnée a priori c’est le père, ce sont les parents qui gouvernent la famille, qui gouvernent leurs enfants. C’est la structure royale, bien entendu. C’est une structure absolument fondamentale.
* les structures par contrat social.
J’ai entendu un excellent orateur, Yves-Marie GADELINE, qui exprime la même chose de manière différente. Il dit qu’il n’y a que des gouvernements par institution et des gouvernements par constitution. Une constitution, c’est quand, par exemple, nous nous mettons tous d’accord pour dire que Monsieur X va nous gouverner. Il y a une institution lorsque nous recevons les tables de la loi au sommet du Mont Sinaï ou telle autre manifestation d’une autre autorité qui nous dit: “C’est Monsieur X qui va nous gouverner”. Ce sont deux structures totalement différentes, une structure paternelle héritée d’en haut et une structure d’accord entre nous. Il est bien évident que l’une et l’autre règlent plus ou moins bien ce premier problème auquel je faisais allusion qui est que les hommes ont besoin d’être gouvernés. Je pense que les structures paternelles sont mieux adaptées à la nature humaine déchue que les structures constitutionnelles mais, bien entendu, on peut en discuter.
Un autre problème, c’est que, la nature humaine est ainsi faite: il y a des forts et des faibles. Cette force et cette faiblesse, à l’époque de l’homme des cavernes, c’était simplement les costauds et les gringalets. Ce sont ensuite les féodaux et leurs serfs. Ce sont les capitalistes et les ouvriers. A notre époque, ce sont les multinationales et leurs employés. Les puissants, ce sont quelquefois les psychocrates, c’est-à-dire ceux qui manipulent tous les mass médias qui nous manipulent à leur tour,. Il y aura toujours et il y a toujours eu une opposition entre les puissants et les moins puissants, les forts et les faibles. Le rôle de tout gouvernement des hommes est nécessairement de limiter quelque peu la puissance des puissants et de protéger les moins puissants contre les plus puissants.
LE ROI CONTRE LES FÉODAUX
A Bouvines, Philippe Auguste - qui a soutenu partout le mouvement communal, contre les féodaux - s'adresse ainsi à ses troupes, avant la bataille : "Je porte la couronne mais je suis un homme comme vous... Tous vous devez être rois et vous l'êtes, par le fait, car sans vous je ne puis gouverner"...
C’est l’un des domaines où la monarchie doit vraiment recevoir de bonnes notes dans tous les pays du monde parce que les monarques ont toujours essayé de limiter les droits des féodaux, les droits des forts, les droits des riches, parce que c’était leur intérêt même, sans parler d’altruisme ou de générosité. C’était l’intérêt des monarques de s’appuyer sur la masse des faibles (les faibles sont toujours plus nombreux que les puissants).
Les rois de France ont assis leur puissance sur la petite bourgeoisie et le peuple contre les grands féodaux. Voyez RICHELIEU. Je pense aussi à l’histoire de Russie où IVAN le Terrible a assis son pouvoir sur le peuple contre les boyards. Je pourrais bien penser aussi à JULES CÉSAR, à AUGUSTE et on peut remonter dans la nuit des temps. Le monarque a toujours été le protecteur du faible contre le fort. Pourquoi ? Pour obtenir un certain équilibre dont lui-même tirait certains avantages.
DROITE ET GAUCHE
Autre problème: la notion de droite et la notion de gauche. Ces expressions sont récentes. Elles ont deux cents ans à peu près. Mais l’idée qu’il y a une droite, des partis de droite, qu’il
Sur notre Page Facebook, Ciboulette Ludivine nous a envoyé un message très court, mais assez virulent, dont l'essentiel consiste à dire qu'elle ne veut pas d'une Royauté parce que "en plus ça coute très cher aux contribuables ! Alors monarchie en France en 2013 ? inutile. Vous révez ! Et en France ? On a pas assez de la crise et du chomage de masse..." etc.. etc... Que Ciboulette ne veuille pas d'une royauté, c'est son affaire. Mais qu'elle dise et croie le contraire de la vérité, à savoir que la royauté coûte très cher, alors qu'en fait c'est notre République qui est une ruine, cela mérite au moins qu'on lui dise, juste, qu'elle se trompe...
1. D'abord, nous la renverrons au rapport publié en avril 2012 par Herman Matthijs, professeur d’administration et de finances publiques à l’Université de Gand (c'était son sixième !) sur le coût des chefs d’Etats européens, dont un de nos lecteurs (de Belgique) nous a envoyé quelques extraits : * Le président de la république française est le chef d’État le plus coûteux d’Europe : en effet, le budget de la présidence de la république française s’élevait, à la parution du rapport, à 111,7 millions d’euros. Le budget de la présidence de la république fédérale d’Allemagne, s’élevait, lui, à 30,7 millions d’euros.
Par ordre décroissant, voici ensuite le budget des différentes royautés européennes :
- pour la couronne néerlandaise : 39,4 millions d’euros ;
- pour la couronne britannique : 38,2 millions d’euros ;
- pour a couronne norvégienne : 25,2 millions d’euros ;
- pour la couronne belge : 14,2 millions d’euros ;
- pour la couronne suédoise : 13,9 millions d’euros ;
- pour la la couronne danoise : 13,2 millions d’euros ;
- pour la la couronne luxembourgeoise : 9,2 millions d’euros ;
- pour la couronne espagnole : 8,2 millions d’euros.
Habituellement, dans ces royautés, les souverains ne partent pas à la retraite, tandis que la république française doit pourvoir à la retraite de trois anciens présidents qui ont coûté chacun 1,5 millions d’euros en 2012.
En outre, il faut ajouter que, dans les pays où il y a un roi ou une reine, la succession est réglée à l’avance, tandis qu’en France elle fait l’objet d’élections dont le coût s’avère absolument exorbitant : pour les élections présidentielles de 2012, il a atteint 228 millions d’euros.
Si les budgets annuels restent à peu près stables, et malgré le décret de la fin août 2012 qui a réduit de 30% la rémunération du président de la république française, le coût du quinquennat de François Hollande s’élèvera à près de 809 millions d’euros, en tenant compte des élections présidentielles et des retraites.
Selon les mêmes conditions et pour la même période, la royauté néerlandaise devrait coûter 197 millions d’euros; la royauté britannique, 191 millions d’euros; la royauté norvégienne, 126 millions d’euros; la royauté belge, 71 millions d’euros; la royauté suédoise, 69,5 millions d’euros; la royauté danoise, 66 millions d’euros; la souveraineté luxembourgeoise, 46 millions d’euros; et la royauté espagnole, 41 millions d’euros.
Ainsi donc, alors que la présidence de la république devrait coûter aux Français quelque 809 millions d’euros sous le quinquennat de François Hollande, dans le même temps les huit principaux souverains européens réunis ne devraient coûter que 807,5 millions d’euros à l’ensemble de leurs sujets, c’est-à-dire qu’à eux huit ils atteignent à peine le coût total de l’actuel président et des trois présidents retraités, en France !
Avec un budget annuel de 40 millions d’euros par an, un Roi de France reviendrait donc 75% moins cher que l’actuel président de la république.…
2. Ensuite, nous lui conseillerons la lecture de l'excellent petit ouvrage 10 très bonnes raisons de restaurer la monarchie, de Renaud Dozoul et Laurent-Louis d'Aumale. Le livre est très court (99 pages, écrites très gros) et se lit donc très facilement; en plus, il est "pétillant", plein d'esprit et d'humour, et, comme il bouscule pas mal d'idés reçues (donc, fausses, évidemment...), c'est un vrai régal. Et, si Ciboulette veut, on ira même jusqu'à le lui offrir !...
Que lit-on, pages 88/89, au chapitre 10 : Parce que ça marche, paragraphe Et c'est moins cher ! :
"Malgré les apparences, la monarchie anglaise coûte beaucoup moins au Trésor britannique que la Présidence française aux Contribuables Associés.
Cinquante-quatre millions d'euros par an pour la couronne contre cent vingt-deux pour l'Élysée : deux fois et demi plus cher ! Ce chiffre intègre les quatre-vingt-deux millions d'Euros du coût net de l'Élysée, et les deux cents millions d'Euros dépensés tous les cinq ans pour les élections présidentielles (les élections législatives suffisant à définir une majorité de gouvernement). Nous jetterons un voile pudique sur le coût du clientélisme électoral (en réalité très difficile à évaluer), qui pousse le président en campagne à arroser un peu de tous les côtés, afin de faire fleurir des voix dans les terres les plus arides.
D'ailleurs, au-delà des frais de la présidence et de ses générosités, on peut méditer sur le poids symbolique de l'État. En l'absence du roi, et le président étant voué à changer régulièrement, l'État est le seul outil d'incarnation permanente de la république. C'est par la taille de l'État que celle-ci assure sa fonction symbolique en France. Un État gros et lourd donne une impression de puissance et de pérennité. Or ce poids a un coût. Les pays où la fonction symbolique est assurée par une famille royale peuvent sans doute plus facilement limiter l'État à sa vocation de gestion de la cité, en faisant un outil plus souple et par conséquent plus efficace."
Et, si l'on rajoute à tout ceci le simple rappel de la dispendieuse sur-administration, avec ses doublons, triplons et quadruplons ! 243 sous-préfecture, depuis plus de deux siècles, cela en fait de l'argent gaspillé, qui aurait été mieux employé dans la Recherche, par exemple; une douzaine de Préfets pour les grandes Régions, comme l'Aquitaine (Préfets, Préfet de Région, Préfet maritime, Prefet de police...); et ce nombre faramineux de députés, comparés aux Etats-Unis, cinq fois plus peuplés que nous ! Et ce Sénat, délicieux fromage pour ceux qui en profitent et pour qui - le mot est de Raffarin... - "le tour de taille n'est pas un problème !", mais qui ne sert à rien, sauf à nous ruiner un peu plus...! Et ces centaines de milliers de fonctionnaires en plus, par rapport aux Allemands, alors que nous sommes 20 millions de moins qu'eux; et cette ENA, unique en Europe et qui ne produit que... des énarques, justement, plaie et calamité de notre siècle...
Voilà ce que l'on peut - liste non limitative... - très rapidement, répondre à Ciboulette, en lui retournant le compliment : si celà lui plaît d'avoir un Système qui nous coûte beaucoup, beaucoup trop cher...
En ce qui concerne l'immigration, nous recevons régulièrement des messages qui, pour être tous très différents les uns des autres, posent en réalité tous le même problème et qui, même avec des formulations parfois très éloignées les unes des autres, en reviennent toujours à la même question centrale : comment en est-on arrivé là, que proposez-vous, que faire pour "en sortir"... ?
Pour essayer de répondre, non pas à tout le monde à la fois et d'un seul coup - c'est "mission impossible"...- mais, peut-être et au moins en partie, à l'essentiel des préoccupations de celles et ceux qui écrivent, nous allons tâcher de proposer ici un rapide survol qui s'efforcera d'abord de résumer la situation dans ses grandes lignes, et par redire, pour commencer, comment on en est arrivé là; puis nous évoquerons les remèdes dérisoires que propose le Pays Légal pour règler (?) des problèmes qu'il a lui-même, tel un apprenti sorcier, follement créés; ensuite, nous reprendrons ce que nous avons déjà écrit ici-même, à savoir qu'une des solutions pour "en sortir" pourrait être de mener ce que l'on pourrait appeler une politique des trois tiers ; et, pour ceux qui seraient sceptiques, on lira, comme une sorte de conclusion provisoire, l'opinion de Michel de Jaeghere...
Nos lecteurs pourront évidemment poursuivre le débat, en continuant à écrire ou en postant des commentaires; ils pourront aussi se référer à notre PDF "Contre la France métisse..." :
http://lafautearousseau.hautetfort.com/list/documents/conference_contre_la_france_metisse___pdf.html
Aujourd'hui ....(4/4) : Le point de vue de Michel de Jaeghère...
A ceux qui douteraient de la faisabilité de cette politique des trois tiers, nous nous permettrons de communiquer cet article de Michel de Jaeghere, dont nous extrayons juste les quelques lignes suivantes mais que vous lirez dans son intégralité ici :
Michel de Jaeghere.pdf
"...Au regard de ces principes, les lois de la nationalité que je vous ai décrites ne sont pas des lois. Elles devront donc être révisées et rien ne s’oppose à ce que certaines dispositions aient parfois un effet rétroactif.
Il est évident qu’il faudra faire preuve de prudence et d’humanité dans l’examen des cas. Il ne s’agit pas de considérer que toutes les acquisitions de la nationalité française depuis 1945 ne valent rien et de mettre tout le monde dehors. Il faudra faire une révision des listes de nationalité qui prenne en considération les fraudes.
Il était prévu par la loi qu’on ne pouvait pas acquérir la nationalité française en cas d’indignité, par exemple. Quand on pourra prouver qu’une personne qui a acquis la nationalité française était un délinquant, entré clandestinement (donc illégalement) sur le territoire, il me paraît clair que l’on devra pouvoir réviser son acquisition de la nationalité française. La même remarque s’applique au défaut d’assimilation, qui n’a pas été pris en compte en pratique, alors même que c’était prévu. Il me semble qu’il n’y aurait rien de choquant à ce que l’on conteste la nationalité d’un Français d’acquisition qui ne parlerait pas notre langue.
La loi française prévoit par ailleurs que la nationalité puisse être retirée à ceux qui l’ont obtenue par fraude ou par mensonge, ou encore à ceux qui auraient porté atteinte aux intérêts de la nation. Seulement, elle n’est pas appliquée (depuis 1990, on n’a compté que trois décrets de déchéance de la nationalité). On pourrait commencer par la mettre en oeuvre avant de l’étendre à ceux qui ont gravement porté atteinte à la paix civile ou à l’ordre public...."
En effet - et puisqu'il vaut mieux prendre les choses du bon côté - il suffira de suivre l'excellent exemple donné par les juges bobos/gauchos/trotskos du Syndicat de la Magistrature, qui passent leur temps à libérer les clandestins - par définition transgresseurs des lois qu'ils sont censés, eux, les juges, faire respecter - sous pretexte de Vices de forme.
La voilà, la voie à suivre, sur laquelle il faut résolument s'engager, en remerciant les juges pervertis (et le diable, qui porte pierre...) : les vices de forme !
Que l'on passe au peigne fin les listes depuis 1975 et les décrets Chirac, et que l'on annule tout avantage, toute allocation, tout statut, toute naturalisation etc... sur laquelle la moindre virgule, le moindre iota ne sera pas conforme....
Le ménage dans la Maison France en sera grandement facilité !..... (fin).
Dans le Politique Magazine de décembre (n° 69), Yvan Blot a consacré à l'ouvrage de Simon Sebag Montefiore Le jeune Staline (1), la note de lecture que nous reproduisons ci-dessous.
Comme nous le disait Jean-François Mattéi lors de son intervention à la soirée du 21 janvier 2008 (2) la révolution française a bien perturbé, non seulement la France bien sûr, mais aussi toute l'Europe et même le monde, ne s'arrêtant pas à la Russie mais allant nourrir aussi, jusqu'en extrême-orient, un Mao, un Ho Chi Minh, un Pol Pot.
"La révolution française a vraiment nourri la sensibilité des communistes bolchéviques..... le mouvement bolchévique ne tire pas du tout ses racines intellectuelles de la Russie mais bien de l'Occident et singulièrment de la révolution française."
"Voila une plongée dans les eaux du communisme soviétique à ses débuts. Staline, jeune séminariste en Géorgie, fils d'un père violent et alcoolique, Besso Djougachviili dit "le dingue", devient très vite chef de bande avec une spécialité : le braquage des banques ! Pas n'importe quel braquage : le braquage sanglant la plupart du temps. Lorsque sa première épouse meurt de tuberculose ou de typhus, il déclare qu'il n'a désormais plus de sentiment pour l'humanité ! Staline tuera 39.000 personnes (nombre de condamnations à mort qu'il aurait signées) et par sa politique, il fait des dizaines de millions de victimes (famine qu'il organise en Ukraine notamment). Le jeune Staline (le livre va jusqu'à la révolution de 1917) est un personnage vraiment étrange : braqueur de banque que Lénine apprécie (il a toujours besoin d'argent pour la révolution), tueur sans scrupules, véritable Don Juan comme beaucoup de ses complices, il est aussi un dévoreur de livres et poète à ses heures. Là encore, le français devra battre sa coulpe : c'est en lisant Victor Hugo et Emile Zola qu'il devient socialiste de coeur; Karl Marx, dont il connaît l'oeuvre à fond, apporte l'armature doctrinale. Il déclare qu'il est devenu athée en lisant Darwin. Bref, Staline est intellectuellement, non pas un prouit de la Russie mais de l'Occident : la France, l'Allemagne et l'Angleterre lui ont donné ses bases idéologiques. Dans les multiples réunions et commémorations auxquelles il participe, il est frappant de voir que le chant qui retentit est la Marseillaise ! La révolution française a vraiment nourri la sensibilité des communistes bolchéviques !
On s'étonnera peut-être du mélange de gangstérisme et de communisme du milieu géorgien, juif et russe dans lequel Staline commence sa carrière. En fait, Lénine l'apprécie justement pour cela : il est un des rares à être un doctrinaire marxiste de haut niveau (avec une spécialité : la théorie des nationalités) et un praticien de hold-up et de l'assassinat politique. C'est ce mélange détonnant qui fait qu'il est apprécié. C'est un organisateur hors pair totalement dévoué à sa passion révolutionnaire. Glacial envers ses semblables, il est très affectif en même temps : lorsque sa première femme meurt, il ne veut plus quitter le cercueil sur lequel il s'est jeté ! Il adore la poésie, les chants géorgiens et la musique classique. Emprisonné ou exilé en Sibérie, il montre une fermeté à toute épreuve. C'est un criminel de roman : exilé en Sibérie, il trouve le moyen de séduire une fille de paysan de 13 ans ! On voit d'ailleurs que le régime tsariste est plus anarchique que dictatorial. Les exilés en Sibérie sont en réalité peu surveillés. Il est vrai qu'avec moins 30 l'hiver, il leur est difficile de s'échapper. La police secrète -l'Okhrana- semble partout et pourtant, la plupart du temps, Staline lui échappe : il est le roi du déguisement. Son coup favori semble être de se couvrir de pansements comme un grand blessé et de se recroqueviller dans un coin ! Les policiers qui perquisitionnent laissent libre ce moribond. Ils rendent compte et reçoivent l'ordre de le chercher : entre temps Staline a disparu !
Le personnage montre très tôt ses travers criminels : c'est ce qui lui permet de faire carrière ! On voit bien ici le côté criminel de ces milieux révolutionnaires , mais en même temps, le marxisme est pour eux une véritable religion. On est vraiment dans le monde si bien décrit par Dostoïevski dans Les Possédés !
Le livre fourmille d'anecdotes. Il apporte des informations précieuses, non seulement sur Staline mais sur le milieu révolutionnaire de bandits qui l'entoure et montre qu'en fait, le mouvement bolchévique ne tire pas du tout ses racines intellectuelles de la russie mais bien de l'Occident et singulièrement de la Révolution française !"
(1) : Le jeune Staline, de Simon Sebag Montefiori. Calmann-Lévy, 500 pages, 25 euros.
(2) : Voir la note du mercredi 6 février 2008 "Les trois vidéos intégrales du 21 Janvier 2008 à Marseille...." dans la catégorie "Documents Vidéo".
Pour celles et ceux qui l'auraient "laissé passer", voici la copie de l'article publié dans "Le Monde" du mercredi 23 Janvier par Mezri Haddad et Jean-François Mattéi, sous le titre "Point de vue: Sarkozy, papiste ou gaulliste?"
Par-delà la vive polémique qu'il a suscitée, le discours du Latran inaugure une ère nouvelle dans les relations, historiquement méfiantes, entre l'Église et l'État. Nous assistons à un changement hautement symbolique de la politique française dans ses rapports au fait religieux en général et au christianisme en particulier. Celui-ci, avec les autres grandes traditions religieuses y compris l'islam- à condition qu'il procède à son propre aggiornamento - n'est plus exclu au nom de la déesse Raison et de la sacro-sainte spécificité française, mais accueilli au sein d'une laïcité positive capable de les absorber dans un vaste pacte républicain et de les impliquer dans un dessein à la hauteur de la France : une politique de civilisation.
Il ne s'agit donc pas, comme cela a été écrit, d'une altération grave des principes fondateurs de la laïcité, encore moins d'une remise en question de la loi de 1905, ce "monument inviolable", selon Jacques Chirac. Il s'agit au contraire d'un retour aux sources authentiques de la morale laïque. A l'instar des laïcités anglo-saxonnes ou germaniques, qui ont entretenu des rapports confluents et non conflictuels avec le religieux, la laïcité française, "enfin parvenue à maturité", se normalise en se mettant au diapason des nouveaux défis du siècle : choc des civilisations, apothéose du matérialisme et de l'hédonisme, néant spirituel, métastase de l'intégrisme, mondialisation du terrorisme...
Ces défis ont frappé de caducité le laïcisme qui, au nom du postulat marxiste ("la religion est l'opium du peuple"), a juré la mort de Dieu et l'extinction de la religion. A l'origine, en effet, la laïcité n'entendait pas extirper du corps social toute survivance religieuse, mais limiter l'hégémonisme spirituel et temporel de l'Église. La séparation de l'Eglise et de l'Etat a été l'aboutissement d'un long processus de sécularisation qui a commencé au Moyen Âge, s'est raffermi grâce aux Lumières, a trouvé sa première traduction politique dans le radicalisme révolutionnaire de 1789 pour rencontrer ensuite sa première phase libérale et républicaine dans le Concordat napoléonien de 1801.
Avec la loi de 1905, c'est l'idéal laïc qui est imposé en France comme norme juridique et paradigme absolu du rapport entre foi et loi. En restituant au politique et au religieux leur autonomie réciproque, la loi de 1905 a été une rupture refondatrice, une destruction constructive. Théoriquement, la laïcité ne devait donc pas s'opposer à la religion, mais lui aménager une sphère qui lui est propre. Que s'est il passé en pratique ? La religion chrétienne a été stigmatisée, culpabilisée, et progressivement rayée, pas seulement des controverses politiques ou intellectuelles, mais également du débat moral et éthique.
"Le cléricalisme ? Voilà l'ennemi !", rugissait Gambetta. En fait, la lutte de la laïcité contre le cléricalisme a tourné au combat de l'athéisme contre le christianisme. Dans ce combat où la fille aînée de l'Eglise a perdu une partie de son âme, la laïcité a sacrifié un élément constitutif de sa philosophie : la tolérance. C'est ainsi que la France, terre du baptême de Clovis, est passée de la religion d'Etat, le gallicanisme, à l'athéisme d'Etat. Dopée par sa victoire sur le traditionalisme catholique, leurrée par le mythe rationaliste suivant lequel le religieux, le sacré même sont voués à la disparition, la laïcité française a baissé la garde en tombant dans un sommeil profond... jusqu'à l'irruption fracassante d'un islam conquérant et d'un islamisme guerroyant. L'eschatologie wébérienne du désenchantement du monde, reprise par Marcel Gauchet, a fait long feu.
C'est dans ce contexte nouveau qu'il convient de lire les discours présidentiels à Rome, symbole du catholicisme, et à Riyad, symbole de l'islam. La laïcité positive à laquelle il appelle est en rupture avec le laïcisme français dont la dernière manifestation politique fut l'opposition d'inclure, dans le préambule à la Constitution européenne, toute référence aux "racines chrétiennes de l'Europe". Changement de génération ou régénération de la laïcité française, Nicolas Sarkozy ose affirmer que "les racines de la France sont essentiellement chrétiennes".
Plutôt que d'y voir une trahison de la "laïcité républicaine", ne peut-on reconnaître dans la laïcité positive des symptômes plus profonds ? Peut-être les prémices de la politique de civilisation dont le président vient, à Riyad, de préciser le contenu : "C'est une politique qui se donne pour but de civiliser la globalisation (et) qui intègre la dimension intellectuelle, morale, spirituelle..." Peut- être la volonté de renouer avec cette philosophie d'essence thomiste qui a été longtemps marginalisée en France au profit exclusif du marxisme et de l'existentialisme. N'oublions pas que le personnalisme d'Emmanuel Mounier a été une réponse à l'existentialisme sartrien ; de même que l'humanisme intégral théorisé par Jacques Maritain fut une réaction à l'humanisme marxiste. Par-delà ce ressourcement philosophique et ces premiers balbutiements d'une politique de civilisation, n'y a-t-il pas dans le repositionnement sarkozyen un retour au gaullisme ? De Gaulle, en effet, qui a gravé la laïcité de l'Etat dans la Constitution, ne déclarait il pas, le 31 mai 1967 à Rome : "L'Église est éternelle et la France ne mourra pas. L'essentiel, pour elle, est qu'elle reste fidèle à ce qu'elle est et, par conséquent, fidèle à tous les liens qui l'unissent à notre Église." C'est encore lui qui affirmait, le 11 février 1950 : "Nous sommes un pays chrétien, c'est un fait. Nous le sommes depuis longtemps... Eh bien, nous n'avons pas besoin de nous méconnaître et cette flamme chrétienne, en ce qu'elle a d'humain, en ce qu'elle a de moral, elle est aussi la nôtre."
Mezri Haddad, philosophe.
Jean-François Mattéi, philosophe.
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Par Gabrielle Cluzel
Voici un récit de la rencontre de Versailles vécue par Gabrielle Cluzel pour Boulevard Voltaire, publié hier mardi. Par ses référence historiques, mais aussi littéraires, ses réflexions d'ordre politique mais aussi culturel, on le verra, cet article de choses vues et les remarques qu'elles induisent, intéressera le lecteur royaliste, ou seulement patriote, de Lafautearousseau. Rappelons pour ceux qui l'ignoreraient que Gabrielle Cluzel a participé - d'ailleurs brillamment - au colloque du Cercle de Flore « Refonder le bien commun », du 13 mai dernier, à Paris (Illustration ci-dessous). LFAR
Hier, Emmanuel Macron a reçu Vladimir Poutine à Versailles. Ils y ont tous deux donné une conférence de presse dans l’après-midi. J’ai eu la joie et le privilège d’y participer pour Boulevard Voltaire.Un journaliste de la presse alternative dans ce genre de rassemblement, c’est un peu Proust chez la duchesse de Guermantes. « C’est pour quel média ? », claironne, à l’entrée, la dame qui compulse ses listes d’un doigt mouillé, telle l’aboyeur à l’entrée du bal. « Boulevard Voltaire », chuchoté-je, en regardant à droite et à gauche comme si j’avouais être vendeuse dans un sex-shop. Non, tout va bien. Le cameraman, devant, me tient encore la porte. Il n’a pas dû entendre.
Mais oui, j’ai pu rentrer. Mais non, on ne m’a pas refusé mon accréditation. Dites donc, on ne vit pas en Union soviétique, quand même… pour rester dans le registre géographique de la journée.
Les journalistes sont invités à attendre dans la galerie des Batailles. Le cadre est somptueux, les murs sont couverts d’immenses tableaux chantant l’épopée militaire française sous l’Ancien Régime. Ils sont virils, guerriers, figuratifs, regorgent d’étendards dorés, d’uniformes chamarrés et de fierté française glorifiée : tout ce que déteste la gauche, mais on n’a rien trouvé de mieux pour en imposer au dirigeant d’une grande puissance avec lequel on souhaite négocier.
« Il n’y a pas une culture française, mais des cultures françaises », a dit Emmanuel Macron, mais c’est pourtant celle-là – la grande, l’éternelle, la belle, la seule qui incarne notre pays dans l’imaginaire étranger, à défaut de peupler encore celui des Français – qu’il a choisie. Eh pardi ! Je le comprends : le premier qui réussit à inspirer le respect à qui que ce soit à l’ombre d’un plug anal vert pomme, assis dans l’entonnoir du vagin de la reine, me prévient.
Si la ponctualité est la politesse des rois, on se souvient vite qu’en dépit du cadre, on est en république. Les journalistes poireautent, poireautent, poireautent. Les plus à plaindre sont les chaînes d’information continue. Elles se refilent le micro pour commenter, sur l’air d’une pièce de Beckett En attendant Macron. « Les deux présidents ont passé une heure à discuter ensemble, ils avaient beaucoup de choses à se dire. » Certes. Ils ont aussi passé une heure à table. Ils devaient avoir très faim, hein ?
Les présidents arrivent enfin.
Macron évoque dès le début Pierre le Grand, et Poutine Anne de Kiev. Tous deux une amitié franco-russe qui n’a jamais cessé. Hollande, devant sa télé, doit s’étrangler. Poutine avoue être très impressionné par Versailles, qu’il n’avait jamais visité. Macron cite son ministre de la Culture, éditeur, qui a publié Tchekhov et Dostoïevski. L’un et l’autre annoncent un partenariat culturel, dans lequel les jeunesses des deux pays auront grande part.
Puis vient le tour de la Syrie : la priorité absolue est la lutte contre Daech, et elle passe par la coopération des deux pays. Ils parlent même – à l’initiative d’un journaliste de l’AFP – de la rencontre entre Poutine et Marine Le Pen. Poutine ne renie rien, bien au contraire – « Marine Le Pen a toujours œuvré pour le rapprochement avec la Russie ». Macron ne lui en fait pas grief puisque, finalement, c’est lui qui a gagné.
Le parcours d’Emmanuel Macron aurait été d’ailleurs presque sans faute… sans la question d’une journaliste de Russia Today : celle-ci s’étonne de l’ostracisme dont son média a fait l’objet durant sa campagne. « RT et Sputnik sont des organes d’influence, pas des journalistes », s’emporte-t-il, se prenant de ce fait légèrement les pieds dans le tapis : parce que tous ces braves gens de la presse française ici présents ont toujours été, peut-être, à l’endroit de Vladimir Poutine, d’une parfaite neutralité ?
On retiendra cependant un mot de son discours : « Je suis un pragmatique », qui laisse enfin espérer un retour salvateur à un peu de realpolitik. On peut être de la presse alternative et constater les évolutions positives, non ? •
Gabrielle Cluzel
Ecrivain, journaliste
Voir aussi dans Lafautearousseau ...
[Vidéo du colloque et intervention de Gabrielle Cluzelle à partir de 2 h 50']
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...Quand l'Europe était "française", et que ses élites, partout, parlaient français....
Le mérite de cette carte ne réside évidemment pas dans son esthétique, franchement désastreuse...
Il est de nous donner une idée de l'influence française au XVIIIème siècle, lui-même prolongeant le XVIIème, au point qu'on devrait presque parle "des" Grands siècles, le XVIIème et le XVIIIème formant un ensemble inséparable, du point de vue culturel, au cours duquel la France a exercé une prépondérance et une fascination qu'elle ne devait plus retrouver par la suite.
Le roi de Prusse, le grand Frédéric, pourtant adversaire acharné de la France, ne s'exprimait qu'en français, et ne lisait que des auteurs français. Bainville explique (dans "L'Allemagne") que si, d'aventure, il lui arrivait de lire un auteur allemand, il se le faisait traduire, d'abord, en français !... C'était l'époque où les écrivains russes, non seulement employaient des mots français dans leurs romans, mais même des phrases entières...
Même le si funeste et si anti-français Traité de Vienne de 1815 fut intégralement rédigé en français, et signé par chacun des souverains coalisés contre nous, es-qualité, en français !...
Cette prépondérance culturelle, qu'on a du mal à imaginer aujourd'hui, s'est traduite, du point de vue architectural, par une sorte de frénésie d'imitations du palais-temple du Roi soleil : on pourrait parler, sur le ton de la plaisanterie, d'une véritable épidémie de "Versaillite aigüe"....
C'était le temps où la France donnait le ton, dans tous les domaines; c'était le temps de "l'Europe française"...
1. C'est en Allemagne que l'on compte le plus grand nombre d'imitations de Versailles, presque chaque potentat local se faisant construire le sien.
Les plus célèbres sont :
* à Bonn, les châteaux d'Augustusburg et de Falkenlust;
* à Brühl, celui de l'archevêque-électeur de Cologne;
* mais aussi ceux de Mannheim, Ludwigsburg, Schwetzingen, Karlsruhe...
* Herrenhausen à Hanovre;
*Schleissheim près de Munich; * Nordkirchen, près de Coesfeld, édifié pour le prince-évêque de Münster;
* la Residenz de l'archevêque de Würzburg;
* le Wilhelmshöhe, à Cassel, construit en 1786 par Wilhelm IX, Landgrave de Hesse-Kassel.
Et, bien sûr les palais de Sans souci à Potsdam et de Charlottenburg, près de Berlin, et ceux de Louis II de Bavière, qui commanda la construction du château de Herrenchiemsee, sous la forme d'une copie presque à l'identique de Versailles, et la petite réplique de Linderhoff...
2. En Autriche-Hongrie, le château de Schönbrunn, à Vienne, reprend les volumes et l'équilibre de la façade côté jardin de Versailles.
Mais on peut citer, aussi, le château d'Esterházy, en Hongrie.
3. En Belgique, Charles de Lorraine se fit construire un palais à Bruxelles, vers 1760.
Le mouvement devait durer, puisque la plupart des réalisations du roi Léopold II de Belgique, réalisées autour de 1900, sont d'inspiration française. Et, en 1892, le duc Engelbert-Marie d’Arenberg, suite à l’incendie d'une partie de son palais sur le Petit Sablon, commanda aux architectes français Flanneau et Girault une reconstitution du célèbre escalier des Ambassadeurs, construit pour Louis XIV à Versailles entre 1672 et 1679, et malheureusement détruit sous Louis XV...
4. En Espagne, Philippe V (le duc d'Anjou, petit-fils de Louis XIV et premier roi Bourbon d'Espagne) fit construire le palais de La Granja près de Madrid, qui lui rappelait le Versailles de son enfance et que les Espagnols appellent toujours "el pequeno Versalles" (le petit Versailles) ....
5. Au Portugal, c'est le palais royal de Queluz (près de Lisbonne) qui reprend les canons versaillais...
6. En Italie, Luigi Vanvitelli, construisit, à partir de 1752, le palais de Caserte près de Naples; mais on peut citer aussi Colorno près de Parme et Stupinigi à l'extérieur de Turin...
7. En Pologne, le palais de Wilanów fut édifié au sud de Varsovie pour le compte de Jean Sobieski, roi de Pologne: mais on peut citer aussi Lazienki, et le palais de Branicki à Bialystok...
8. En Russie, le Tsar Pierre 1er, qui s'était rendu à Versailles à l'occasion de sa "Grande Ambassade" fit construire, dans les faubourgs de Saint-Pétersbourg, le complexe de Peterhof, entouré de jardins et de parcs.
9. En Suède, on peut citer le château de Drottningholm à Stockholm.
10. Enfin, la Grande-Bretagne vit s'édifier Chatsworth House, et le palais de Blenheim, construit comme monument national pour l'adversaire de Louis XIV, le duc de Marlborough...
En France même, la réplique la plus célèbre, et la plus réussie, est le château de Lunéville, en Lorraine (d'ailleurs, souvent appelé "le Versailles lorrain").
Le château de Saverne dans le Bas-Rhin, qui fut résidence principale des princes-évêques de Strasbourg jusqu'à la Révolution Française, est, lui aussi, directement inspiré, de Versailles...
Pour retrouver l'intégralité du feuilleton, cliquez sur le lien suivant :
L'aventure France racontée par les Cartes...
lafautearousseau
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Annie Laurent nous a fait l'amitié de nous signaler l'important entretien qu'elle vient d'accorder au site ami Le Rouge et le Noir. Les lecteurs de Lafautearousseau en prendront connaissance avec grand intérêt. Eventuellement pour le commenter et en débattre. LFAR
Titulaire d’un doctorat d’Etat en sciences politiques, Annie Laurent s’est spécialisée dans les domaines touchant aux questions politiques du Proche-Orient, à l’Islam, aux chrétiens d’Orient et aux relations interreligieuses. Auteur de plusieurs livres sur ces sujets, elle fut aussi nommée experte par le pape Benoît XVI au Synode spécial des Évêques pour le Moyen-Orient qui s’est tenu à Rome en octobre 2010.
Elle a bien voulu accorder un entretien fleuve au Rouge & le Noir à l’occasion de la sortie de son dernier ouvrage, L’Islam - pour tous ceux qui veulent en parler (mais ne le connaissent pas encore) publié aux éditions Artège en avril 2017. 288 pages.
R&N : Quelles sont les principales questions que soulève la présence de l’islam en Europe ?
Annie Laurent : « Naguère, nous rencontrions des musulmans, aujourd’hui nous rencontrons l’islam ». Cette phrase prononcée par le cardinal Bernard Panafieu, archevêque émérite de Marseille, dans une conférence qu’il donnait il y a une quinzaine d’années, illustre bien le changement de perspective qui s’est opéré, dans notre pays. Après la Seconde Guerre mondiale, les premiers immigrés musulmans étaient pour l’essentiel des hommes qui venaient en célibataires pour des raisons économiques et aspiraient à rentrer dans leurs pays d’origine une fois qu’ils auraient les moyens de faire vivre leurs familles chez eux. Ils n’avaient donc aucune revendication d’ordre religieux ou communautaire. Tout a changé à partir des années 1970 au cours desquelles divers gouvernements ont opté pour le regroupement familial (en France, ce fut en 1974, sous la présidence de Valéry Giscard d’Estaing), puis pour des assouplissements en matière de nationalité (droit du sol plutôt que droit du sang) et, enfin, la possibilité accordée aux étrangers de fonder des associations de la loi 1901. Des évolutions de cette nature se sont produites dans la plupart des pays d’Europe, certains optant même officiellement pour le multiculturalisme, comme en Grande-Bretagne.
Ainsi, peu à peu, le Vieux Continent a eu affaire à une immigration de peuplement, donc définitive. Les musulmans en Europe veulent vivre selon les principes de leur religion et de leur culture. Il faut savoir que l’islam porte un projet qui est aussi social et politique puisqu’il mêle le spirituel et le temporel. Et cette conception repose sur une volonté attribuée à Dieu, à travers le Coran, et sur l’exemplarité de Mahomet, qualifié de « beau modèle » dans ce même Coran (33, 21).
Or, les fondements de la culture islamique sont étrangers à ceux de la culture européenne, qui repose essentiellement sur le christianisme. Par exemple, l’islam ignore le concept de « personne », qui est d’origine biblique et s’enracine dans la réalité du Dieu trinitaire. La Genèse enseigne en effet que “Dieu créa l’homme à Son image, à l’image de Dieu, Il le créa, Il les créa homme et femme” (Gen 1, 27). Ainsi comprise, la personne humaine est dotée d’une dignité inaliénable et inviolable. Or, le récit coranique de la création occulte cette merveilleuse réalité. Allah reste étranger à l’homme, Il ne partage rien avec lui. Le mot « personne » est d’ailleurs absent du vocabulaire arabe. C’est pourquoi les chrétiens arabisés du Proche-Orient ont conservé l’usage du mot « ouqnoum », qui signifie « personne » en araméen, la langue que parlait le Christ. Dans l’islam, l’individu trouve sa dignité en tant que « soumis » à Dieu et membre de l’Oumma, la communauté des musulmans, éléments qui le privent d’une vraie liberté, notamment dans le domaine de la conscience et de la raison.
Il s’agit là d’une divergence fondamentale entre le christianisme et l’islam concernant la vision de l’homme et de sa vocation.
En s’établissant en Europe, les musulmans auraient pu bénéficier de la conception chrétienne en matière d’anthropologie. Mais l’islam s’installe chez nous alors que nous avons perdu de vue les racines de cette vision sur l’homme et de tout ce qui constitue les fondements de notre civilisation, notamment la liberté, dévoyée en libéralisme absolu, et l’égalité, dévoyée en égalitarisme ; alors aussi que nous sommes pervertis par l’athéisme et le laïcisme. Ayant délaissé notre héritage chrétien, nous sommes incapables de transmettre aux musulmans ce que nous avons de meilleur. En outre, ces derniers rejettent notre culture actuelle, alors qu’il y a encore un siècle elle leur paraissait attrayante et digne d’imitation.
Pour répondre plus précisément à votre question, l’islam en Europe heurte de plein fouet une société décadente qui, non seulement la rend incapable de relever le défi existentiel représenté par cette réalité nouvelle, mais la prépare à se soumettre à un système où Dieu et la loi divine ont la première place. Le problème est donc avant tout spirituel et culturel.
Quel statut l’islam donne-t-il au texte du Coran ? Comment l’islam accepte-t-il (ou non) la critique littéraire et historique de son texte et de sa formation ?
Selon une définition dogmatique fixée au IXe siècle, au temps du califat abbasside régnant à Bagdad, le Coran est un Livre « incréé ». Il a Dieu seul pour auteur. Il fait même partie de l’être divin puisque, dans sa forme matérielle, il est la copie conforme d’un original, la « Mère du Livre », conservé auprès d’Allah de toute éternité (Coran 13, 39), donc préexistant à l’histoire. Contrairement à la Bible, qui se présente comme un recueil d’œuvres écrites par des hommes sous la motion de l’Esprit Saint (doctrine de l’inspiration), la créature humaine n’a joué aucun rôle dans l’élaboration et la rédaction du Coran. Pour accréditer cette thèse, les musulmans ont toujours dit que Mahomet était illettré et ils l’ont présenté comme le transmetteur passif.
A cause de son statut divin, le Coran est intouchable. Il ne peut être soumis à une exégèse faisant appel aux sciences humaines, selon les critères historico-critiques appliqués à la Bible dans l’Église catholique. Il n’est pas interdit de s’interroger sur « les circonstances historiques de la Révélation » ; cette science est reconnue par les écoles qui ne s’en tiennent pas à une lecture littéraliste, mais elle ne peut contredire le caractère éternel du Coran dont le contenu est anhistorique. De même, les savants musulmans admettent le rôle du troisième calife, Othman, dans la composition du Coran tel qu’il existe encore. Mais ils ne s’interrogent pas, par exemple, sur les raisons qui ont motivé l’ordonnancement du texte. Les sourates et les versets ne sont pas classés par ordre chronologique de leur « descente » (mot servant à qualifier la transmission du Coran à Mahomet par l’ange Gabriel) ni par ordre thématique. L’ordre retenu est la longueur décroissante des sourates, la première mise à part, qui est très brève. Si bien que la deuxième est la plus longue tandis que la dernière, la 114è, est la plus courte. S’il en fut ainsi c’est que Dieu l’a voulu. La critique littéraire est également impossible. Le Coran se présente comme ayant été dicté en langue arabe (41, 2-3 et 43, 3). Or, des recherches effectuées par des philologues, malheureusement non musulmans, montrent que ce texte contient des emprunts à d’autres langues sémitiques comme l’araméen et le syriaque.
Il faut espérer que des musulmans oseront un jour se lancer dans des recherches scientifiques sur tous les aspects relatifs aux origines du Coran et de leur religion. On observe cependant de nos jours une prise de conscience chez certains de leurs intellectuels du fait qu’il y a un mal interne à l’islam et que la crise actuelle, d’une gravité sans précédent, ne trouvera pas de solution tant qu’une autorité reconnue n’aura pas le courage de soutenir d’authentiques travaux scientifiques sur le Coran.
« Ce n’est pas ça l’islam », entendons-nous régulièrement après un attentat islamique. Les mouvements djihadistes se situent-ils en marge de l’islam ?
Il est de bon ton d’affirmer que l’islamisme, au sein duquel le djihadisme constitue la forme violente, est étranger à l’islam, qu’il en constitue une perversion ou un accident de l’histoire. Cela est faux. D’ailleurs, jusqu’au XXe siècle, en Occident, la religion des musulmans était appelée « islamisme ». Désormais, on veut distinguer l’islam compris comme religion de l’islamisme compris comme idéologie. Mais les deux dimensions sont étroitement mêlées.
Le Coran comporte des dizaines de versets dans lesquels Allah demande aux musulmans de combattre, de tuer, d’humilier, etc. Je n’en citerai ici que deux : « Combattez : ceux qui ne croient pas en Dieu et au Jour dernier ; ceux qui ne déclarent pas illicite ce que Dieu et son Prophète ont déclaré illicite ; ceux qui, parmi les gens du Livre [juifs et chrétiens selon le Coran], ne pratiquent pas la vraie religion. Combattez-les jusqu’à ce qu’ils paient directement le tribut après s’être humiliés » (9, 29). Et celui-ci : « Que les incrédules n’espèrent pas l’emporter sur vous ! Ils sont incapables de vous affaiblir. Préparez, pour lutter contre eux, tout ce que vous trouverez de forces et de cavalerie, afin d’effrayer l’ennemi de Dieu et le vôtre » (8, 59-60).
Les djihadistes se conforment donc à ce qu’ils croient être des ordres divins. Et ils anathématisent ceux qui, parmi leurs coreligionnaires, refusent de pratiquer la violence. Pour eux, ce sont de mauvais musulmans qui méritent donc également la mort.
On ne doit certes pas enfermer tous les musulmans, pris indistinctement, dans un cadre idéologique légitimant la violence, mais prétendre que les djihadistes trahissent l’islam est une erreur. Le problème est qu’aucune autorité ne peut vraiment les condamner, sauf à considérer le Coran comme condamnable.
Le concept de taqiya existe-t-il réellement dans l’islam ou est-ce une invention récente ?
Précisons d’abord le sens de ce mot arabe : taqiya signifie « dissimulation ». Or, là aussi, contrairement à une idée reçue, il ne s’agit pas d’une perversion de l’islam. Certes, le Coran interdit formellement de renoncer à leur religion, sous peine de châtiments divins et de malédictions éternelles (cf. 2, 217 ; 3, 87 ; 4, 115 et 16, 106). Les musulmans ne peuvent donc en principe dissimuler leur identité et travestir leurs croyances. Cependant, le Coran évoque deux types de situations où il est possible, voire recommandé, de pratiquer la taqiya. D’une part, en cas de contrainte extérieure, le musulman peut renier Dieu extérieurement tout en conservant sa croyance dans le cœur (16, 106). D’autre part, en cas de rapports de forces défavorables, lorsque le fait de s’opposer aux infidèles présente du danger, il est possible de prendre ceux-ci pour alliés (3, 28-29) alors qu’en principe cela n’est pas autorisé (3, 118 ; 5, 51 ; 9, 23 ; 60, 13).
On est loin ici de la doctrine chrétienne, pour laquelle aucun prétexte ne doit servir à dissimuler sa foi en Jésus-Christ ou son identité baptismale, ce qui peut évidemment conduire au martyre.
Cela dit, historiquement, la taqiya a d’abord été pratiquée dans les communautés minoritaires ou dissidentes (chiites, druzes, alaouites, alévis). Mais aujourd’hui, elle est admise chez les sunnites, surtout lorsque ceux-ci sont en situation de minorités comme c’est le cas en Europe.
Les catholiques sont invités à imiter le Christ et les saints. Quel modèle Mahomet est-il pour le musulman ? L’islam donne-t-il à ses fidèles d’autres exemples à suivre ?
Pour les musulmans, Mahomet est le « sceau des prophètes ». « Pas de prophète après moi », aurait-il dit, selon la tradition islamique. Il est donc le plus grand, le préféré d’Allah qui lui a accordé une bénédiction spéciale, et son comportement est édifiant. Toute critique à son égard est dès lors considérée comme blasphématoire. On l’a vu avec les réactions violentes qui ont suivi les caricatures de Mahomet.
Du fait de cette excellence, cela ordonne de lui obéir car cela revient à obéir à Dieu (3, 132 ; 4, 80). Tout ce que Mahomet a dit, a fait ou n’a pas fait, en telle ou telle circonstance est donc normatif, digne d’imitation. Les récits rapportant tous ses actes, ses recommandations et ses ordres ont été recueillis par des témoins, puis rassemblés dans des volumes qui constituent la Sunna, la tradition prophétique. Celle-ci a tellement d’importance qu’elle est la deuxième source du droit musulman. Elle complète ce qui manque au Coran dans l’ordre législatif. En Occident, on a trop tendance à minimiser l’importance de la Sunna. Ce qui me frappe, c’est que les musulmans savent que Mahomet a tué, a menti et a rusé, a pillé des caravanes, a spolié les juifs de Médine de leurs biens, a été polygame, autrement dit n’a pas eu une vie morale exemplaire. Mais ils ne s’interrogent pas sur son comportement et ne se lancent pas dans une comparaison avec celui de Jésus tel qu’il est rapporté dans les Évangile. Au contraire, le fait que Mahomet ait eu une vie comme celle de nombreux hommes sert l’apologétique islamique : elle permet de montrer que les musulmans ne considèrent pas Mahomet comme un dieu, sous-entendu comme le font les chrétiens avec Jésus.
Pour l’islam, Jésus n’est qu’un prophète, chargé d’une double mission : apporter l’Évangile pour rectifier les erreurs que les juifs auraient introduites dans la Torah de Moïse, annoncer la venue de Mahomet comme « sceau des prophètes ». C’est en cela qu’il est digne de respect. Mais il n’est ni le Fils de Dieu, ni Rédempteur. Ignorant la réalité du péché originel, l’islam ne conçoit pas la nécessité d’un salut.
Un personnage occupe une place privilégiée dans le Coran. Il s’agit de Marie, à laquelle la sourate 19, qui porte d’ailleurs son nom, consacre de beaux passages. Certes, son identité est floue car elle est présentée à la fois comme la mère de Jésus et comme la sœur de Moïse et d’Aaron, lesquels avaient bien une sœur portant le nom de Mariam. Mais des générations séparent les deux Marie. Selon le Coran, Marie est honorée pour avoir donné naissance au prophète Jésus, conçu miraculeusement. Sa virginité perpétuelle est également reconnue. Mais, après la naissance de son fils, elle disparaît, on ne parle plus d’elle. Cependant, elle est décrite comme une parfaite musulmane, soumise à Dieu. C’est en cela que les musulmans sont i
Du XVIe siècle au XXIe, la Turquie n'a cessé de décroître. Erdogan, conscient que son pays est un pivot entre l'Europe et l'Asie, veut lui redonner une place prépondérante. La faiblesse de l'Union européenne favorise ses desseins de nostalgique ottoman.
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Le sultan Erdogan rêve souvent de l’Empire ottoman. Durant plusieurs siècles, cet empire régna sur d’immenses territoires comprenant le Proche-Orient, la péninsule arabique et une partie de l’Afrique du nord où il avait dominé les tribus arabes ou supplanté des califats déclinants. L’Europe fut aussi sa proie avec les Balkans et plus au nord jusqu’aux portes de Vienne. Rome fut un moment un objectif avoué. Après avoir transformé Sainte-Sophie en mosquée, pourquoi ne pas faire la même chose avec Saint-Pierre de Rome ? Le triomphe serait complet.
La Méditerranée n’échappait pas à la voracité ottomane et, soit directement soit par le biais des barbaresques, les galères d’Allah faisaient régner la terreur. C’est pourtant là que le déclin commença avec l’échec du siège de Malte en 1565 puis la destruction de la flotte turque à Lépante en 1571.
La défaite devant Vienne en 1683 amorça le reflux définitif et, jusqu’à la première guerre mondiale, l’Empire ottoman traîna sa misère d’« homme malade de l’Europe ». Les convoitises étaient multiples. Les Russes rêvaient de reconquérir Constantinople et de refaire de Sainte-Sophie la grande basilique du monde orthodoxe. La funeste guerre de Crimée les en empêcha.
Mais l’histoire s’accéléra au XXe siècle. Les Italiens conquirent la Libye en 1911, puis Rhodes et le Dodécanèse. Les guerres balkaniques de 1912-1913 entraînèrent le départ définitif de cette région. Enfin, le Traité de Sèvres en 1920 dépeça totalement la Turquie, cœur de l’Empire. Les Français reçurent la Cilicie ; les Grecs, Constantinople, la Thrace et l’Anatolie égéenne ; l’Italie, le sud-ouest de l’Anatolie. La création d’un État arménien à l’est compléta le tableau et la Turquie fut réduite à l’Anatolie centrale avec Ankara.
Un homme va inverser le cours de l’histoire : Mustapha Kemal. Depuis son réduit, il part à la reconquête des territoires perdus et profite de la mollesse des Occidentaux en traitant avec eux séparément. Les Français notamment abandonnent la Cilicie et les chrétiens qui la peuplaient. Seuls les Grecs se battent, mais ils sont vaincus et doivent quitter l’Anatolie égéenne après des millénaires de présence. Leur ville, Smyrne, est détruite et deviendra Izmir.
Parallèlement, Mustapha Kemal proclame la république et entreprend une politique de laïcisation à marche forcée : interdiction du voile et de tout costume religieux, abolition des tribunaux coraniques, occidentalisation généralisée. Malgré plusieurs révoltes religieuses menées notamment par les Kurdes et différentes confréries religieuses, Kemal tient bon et réprime durement. Il s’appuie sur son immense aura de sauveur du pays.
À sa mort, il laisse un État-nation laïque et une armée puissante, chargée de veiller à la laïcité du pays. Au fond, Kemal n’aimait pas l’islam, religion arabe dont les Turcs auraient dû selon lui rester à l’écart.
La révolution religieuse d’Erdogan
Ce rappel historique était nécessaire si l’on veut comprendre l’ampleur de la révolution religieuse voulue par Erdogan.
Ce militant islamiste de la première heure va patiemment tisser sa toile et enchaîner les mandats : maire d’Istanbul en 1994, premier ministre de 2003 à 2014, puis président de la République. Seul accroc : quelques mois de prison en 1998 pour propos islamistes (« Les minarets seront nos baïonnettes »). C’est l’armée turque qui avait organisé la procédure, comme la constitution le lui permettait, et Erdogan lui vouera une haine profonde.
Le coup d’État kémaliste de 2016 et son échec seront l’occasion pour Erdogan de se venger et d’épurer l’armée de ses éléments laïques. L’islamisation de la société turque s’accélère alors.
Parallèlement, Erdogan déploie une politique étrangère particulièrement hégémonique, ce qui est tout à fait nouveau depuis un siècle.
Certes, la Turquie avait été très active auprès des musulmans bosniaques qu’elle arma, finança et islamisa dans les années 90 mais c’était avec la bénédiction des États-Unis dont l’obsession était de détruire la puissance serbe. L’expansion n’était en rien le cœur de la diplomatie turque. Erdogan va s’y atteler, là aussi avec méthode.
La guerre en Syrie, qui éclate en 2011, va être le premier acte de cette omniprésence. Soutenant les milices islamistes turkmènes, et celles liées au Qatar, la Turquie ne ménagera pas ses efforts et son argent pour tenter de renverser Bachar el-Assad. Ce dernier, alaouite donc proche des chiites, sera l’objet d’une haine toute particulière. Au-delà des principes religieux, il y a l’enjeu du gaz. Le Qatar a joué un rôle actif en Syrie avec pour objectif d’y installer un régime sunnite permettant de faire un jour passer des gazoducs. C’est pour l’instant impossible car, alliée de la Russie, elle aussi exportatrice de gaz, la Syrie ne permettra jamais au Qatar de faire passer son gaz chez lui.
La Turquie et le Qatar ont des liens étroits car leur idéologie relève de la même obédience, celle des très politiques Frères musulmans. Cette confrérie, récente mais fort active dans le monde musulman, est en conflit ouvert avec les wahhabites saoudiens, et lorsque Mohamed ben Salman (MBS), prince héritier d’Arabie Saoudite, décrètera un blocus terrestre et maritime contre le Qatar en 2017, Erdogan volera au secours de son frère en islamisme. Aujourd’hui, un important contingent turc campe au Qatar, lui assurant une solide protection. En échange, le Qatar investit beaucoup en Turquie et a aménagé chez lui un port en eau profonde afin de permettre à la marine turque d’y mouiller.
Grâce à la Russie, l’opération syrienne va échouer malgré les efforts d’Erdogan qui laissera passer sur son sol des dizaines de milliers de volontaires de Daech en route pour le grand djihad syrien. Il finira, sous la pression des Occidentaux, par bloquer les accès, et Daech l’en punira par une série d’attentats sanglants perpétrés sur le sol turc.
Profitant des multiples rebondissements de cette guerre sans fin, la Turquie va envahir le sol syrien à plusieurs reprises : au nord-ouest, dans la province d’Idleb, pour protéger les milices turkmènes, et au nord sous prétexte de lutter contre Daech et d’empêcher les Kurdes, considérés comme terroristes, de créer un territoire autonome au nord de la Syrie.
Seuls les Russes aujourd’hui contrôlent l’invasion turque. Au nord, Poutine a clairement signifié à Erdogan de ne pas aller plus loin et à Idleb, la partie turque a été rognée à deux reprises en 2019 et 2020 par des attaques russo-syriennes qu’Erdogan n’a pu empêcher. Des dizaines de soldats turcs ont été tués et Erdogan a compris qu’il avait trouvé un adversaire supérieur.
Russie forte, Europe faible
Ce n’est pas le cas des Occidentaux bien sûr. La guerre en Syrie a provoqué l’afflux de plusieurs millions de réfugiés (on parle de 3 à 4 millions). Le désordre qui prévaut dans la région fait qu’à ces Syriens (bien souvent islamistes) se sont ajoutés des Irakiens, des Afghans, des Iraniens, des Kurdes, des Pakistanais et d’autres encore.
Cette Tour de Babel est, il est vrai, un poids très lourd pour la Turquie, mais elle est surtout une bombe à retardement pour l’Europe occidentale. Les négociations entre l’Europe et Erdogan se sont résumées à un chantage éhonté de la part de ce dernier qui a reçu quelques milliards d’euros (on parle de 6 ou 7, et ce n’est sûrement pas fini) en échange du contrôle de ses réfugiés. Et lorsque le chèque tarde, Erdogan envoie quelques milliers d’entre eux vers la Grèce. La dernière tentative s’est toutefois soldée par un échec grâce à l’énergie des Grecs (dont on ferait bien de s’inspirer chez nous) qui ont bloqué les réfugiés à leurs frontières. La violence avec laquelle ces derniers ont attaqué la police grecque en dit long sur leur état d’esprit…
Tous ces épisodes ont convaincu Erdogan de deux principes : la Russie est forte et l’Europe est faible. Ses initiatives suivantes prouveront qu’il sait très bien s’adapter.
Il a d’autant plus intérêt à soigner sa relation avec la Russie que la Turquie souffre d’un déficit énergétique très coûteux alors que ses besoins sont en croissance constante et les finances du pays médiocres. Les deux ennemis en Syrie se sont parfaitement entendus sur cette question et un gazoduc appelé Turkstream partant de Russie, traversant la Mer Noire et finissant son trajet près d’Istanbul a été solennellement inauguré début 2020.
Mais cela ne suffit pas. C’est pourquoi Erdogan s’intéresse de très près aux affaires gazières de Méditerranée.
Depuis quelques années, plusieurs gisements de gaz ont été découverts en Méditerranée orientale. Israël, l’Egypte, la Grèce et Chypre en sont les heureux bénéficiaires. Ils s’entendent si bien qu’ils ont créé en 2019 le Forum du gaz de la Méditerranée orientale (FGMO) en invitant en outre la Jordanie, l’Autorité palestinienne et l’Italie. L’idée est de construire un gazoduc appelé Eastmed qui partirait de Chypre, longerait la Crète puis la Grèce pour finir en Italie.
Tous ces pays ont décidé d’écarter la Turquie pour un bon motif : elle ne peut prétendre à aucun gisement faute d’eaux territoriales concernées par les gisements et surtout d’entente avec les autres pays. L’occupation illégale de la partie nord de Chypre ne saurait être créatrice de droits. L’affaire aurait tout de même pu s’arranger par le biais de négociations. En effet, au-delà des eaux territoriales, il y a les ZEE (Zones économiques exclusives), tracées à la suite de négociations entre États.
Erdogan ne peut accepter d’être ainsi mis à l’écart. Il faut donc bien comprendre que l’activité de la Turquie en Méditerranée n’est pas seulement liée à une volonté d’expansion mais aussi à la tentative de forcer les pays du FGMO à l’inclure dans le partage du gâteau. Ceux-ci n’étant guère décidés à faire des concessions à l’ombrageux ottoman, ils subissent régulièrement des coups de force de la marine turque qui procède à des forages illégaux ou à des agressions contre d’autres navires de forage.
De ce fait, l’implantation en Libye relève quant à elle de cette double ambition : redonner à la Turquie un statut de grande puissance et diminuer sa dépendance énergétique
En intervenant militairement en Libye, Erdogan a sauvé le premier ministre Sarraj qui, en échange, a accepté de parapher avec son sauveur une ZEE parfaitement illégale car elle ne tient compte que des droits maritimes de la Libye et de la Turquie. Toutes les îles grecques ont coulé, en quelque sorte !
La “diplomatie religieuse” turque
Le bras de fer maritime ne fait que commencer et il s’agrémente de livraisons d’armes massives à la Libye protégées par la marine de guerre turque. Cette violation d’un embargo d’ailleurs peu respecté a entraîné une réaction pour une fois courageuse de la France, qui dut cependant reculer devant la pression américaine. Le secrétaire d’État Pompéo a subtilement rappelé à cette occasion que le seul ennemi en Méditerranée était la Russie qui ne devait pas s’implanter en Libye.
C’est pourtant chose faite. Poutine soutient Haftar, vaincu en Tripolitaine par les Turcs et les islamistes syriens arrivés dans leurs bagages, mais tenant l’est de la Cyrénaïque. Les champs de pétrole libyens se trouvent entre les deux, près de Syrte et il est frappant de constater que les hommes d’Erdogan se sont arrêtés juste avant Syrte, alors que les hommes d’Haftar étaient en déroute.
Turcs et Russes se partagent donc aujourd’hui la Libye, excepté le sud (Fezzan) où, de ce fait, un retour de Daech est observé.
On mesure en passant l’invraisemblable stupidité de l’intervention franco-anglo-américaine de 2011 : avoir détruit l’État libyen pour laisser les Turcs et les Russes se le partager ensuite, cela laisse pantois. Vraiment cette guerre est « rationnellement inexplicable » selon le bon mot de Bernard Lugan.
Quoi qu’il en soit, les deux adversaires/partenaires se retrouvent à nouveau face à face. Il faut bien reconnaître que si en Syrie les succès turcs sont modestes, en Libye ce fut une réussite qui permet à la Turquie de posséder un solide point d’appui en Méditerranée.
Il faut enfin aborder un aspect moins connu de l’expansion turque que l’on pourrait baptiser (si l’on ose dire) « diplomatie religieuse ». Ce terme délicat recouvre habituellement la façon dont l’Arabie Saoudite a financé à travers le monde des mosquées, des imams et des écoles coraniques d’obédience wahhabite. Les Turcs font exactement la même chose dans les Balkans, en Afrique de l’Est, au Liban et en Europe, particulièrement en Allemagne et en France (dernier exemple, la grande mosquée de Strasbourg avec l’aide de la municipalité).
On en parle peu et on a tort. Un nombre inconnu d’imams turcs prêchent dans des mosquées financées par la Turquie ; ils sont souvent fonctionnaires turcs et leurs propos relèvent d’un islamo-nationaliste turc dont on ferait bien de se préoccuper. Parallèlement, le mouvement des « Loups gris », composé de nationalistes turcs, s’implante en France et certains de ses membres ont attaqué cet été un rassemblement arménien à Décines, près de Lyon.
C’est peut-être moins spectaculaire que les drones turcs en Libye ou en Syrie, mais peut-être plus dangereux à long terme. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien qu’Erdogan se donne la peine de faire de nombreuses réunions publiques en France et en Allemagne dès qu’une élection a lieu en Turquie.
La politique hégémonique turque mise en place par Erdogan ne fait que commencer et son caractère islamo-nationaliste ne doit échapper à personne.
Illustration : À Varna, en Bulgarie, le navire d’assaut amphibie turc Sancaktar, capable de transporter blindés, troupes et barges de débarquement.
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Source : https://www.politiquemagazine.fr/
Le diable porte pierre : nous pressentons devoir quelque jour tresser des couronnes au couple improbable que forment François Hollande et Christiane Taubira.
La droite serait-elle restée au pouvoir qu’elle aurait fait adopter un statut d’union homosexuelle d’apparence bénigne, lisse comme un miroir, conçu de manière à ne provoquer que quelques vaguelettes. Celui-ci n’en eût pas moins entraîné dans son sillage, au profit de ces nouveaux « contractants », la possibilité de s’offrir un enfant par insémination médicale et, le cas échéant, par location d’utérus à prix tarifé – le fameux duo PMA-GPA – qu’aurait inéluctablement imposée la jurisprudence européenne. Le tout serait passé comme une lettre à la poste, dûment tamponnée par le Conseil constitutionnel.
Mais voilà : avec les socialistes au pouvoir, l’inattendu est survenu ! La provocation – rapace chez elle, bêtasse chez lui – de la loi Hollande-Taubira a eu pour effet de déclencher dans l’opinion une prise de conscience de plus en plus nette de la pente tragique sur laquelle nous nous trouvons engagés.
Felix culpa ! Ce choc en retour, tout à fait stupéfiant par son ampleur, est mesurable notamment à la violence des réactions hostiles qu’il provoque. Il est significatif que la première victime expiatoire de cette hostilité fût un rabbin. Pour ses dénonciateurs, les « plagiats » dont le grand rabbin de France a été accusé n’étaient évidemment pas une découverte. Mais ce n’est que lorsqu’il transgressa le désordre établi, avec un argumentaire fondé à la fois sur un bon sens imparable et une irréfutable théologie biblique, qu’il fut jugé, condamné, exécuté. (On ne se souvient pas que Jacques Attali, convaincu en 1982 d’un « délit » identique, ait dû démissionner de son poste de conseiller à l’Élysée.)
Mais que dire de cet étonnant mouvement, sans précédent et sans équivalent dans le monde ? De quelle nature procède-t-il ? Au-delà de la diversité des motivations qui ont amené cette foule, peu encline aux démonstrations de rue, à se mobiliser, quelle force tellurique secrète, quel ébranlement sismique intime a fait d’elle, radieuse et déterminée, cette « grande armée » en marche ?
La lecture que nous en faisons mérite d’être précisée, et soumise à nos lecteurs. Nous y voyons une réponse enfin donnée à la solennelle apostrophe lancée par Georges Bernanos, le 7 février 1947, dans le grand amphithéâtre archicomble de la Sorbonne. Le doigt pointé vers son auditoire, paraissant « le procureur de la Chrétienté »[1], Bernanos s’exclama : Dieu veuille que la France donne au monde ce message qu’il attend, et qui sonnera partout le signal de l’insurrection de l’esprit ! [2]
Le monde, tel que nous le voyons, est en train de faire exploser la confiance illimitée, accordée, en toute inconscience, à la science, à la technique et à l’économique pour assurer le progrès indéfini de l’humanité. Sous nos yeux encore incrédules, la planète est en cours d’éclatement. Les ententes internationales les mieux intentionnées ont du plomb dans l’aile, et les plus douteuses, comme l’Organisation mondiale du commerce ou l’Union européenne, sont en voie de liquéfaction, peut-être de liquidation. Déjà, les étendards cyniques du chacun-pour-soi claquent dans le vent de l’histoire. Le plus ancien pays du monde, la Chine, retrouve son identité multimillénaire, tout en se laissant miner par ses emprunts à l’Occident, commettant les mêmes erreurs historiques, développant une classe de pauvres, un prolétariat, appelé aux mêmes révoltes que le nôtre. Et l’Occident lui-même paraît entré dans une irrémédiable décadence intellectuelle, morale, et sans doute matérielle. En attendant qu’il soit contraint de faire, au sein de ce progrès technique qu’il a lui-même conçu, l’inventaire de ce qui est durable – dans l’art de communiquer ou les pratiques médicales par exemple –, et de ce qui l’entraîne vers l’abîme.
Cela fait un siècle, pourtant, que nous avons été prévenus. Un siècle précisément cette année. C’était au début de 1913, dans ses Cahiers de la Quinzaine, que Charles Péguy a publié L’Argent. Dix-huit mois plus tard, il était fauché par la mitraille allemande, devenant en quelque sorte la première victime du XXe siècle naissant, qui en fera des dizaines de millions d’autres. Gigantesque holocauste offert à des dieux morts : deux guerres mondiales, Auschwitz, le Goulag... Avant que ne se déchaînent les orages d’acier, Péguy n’avait eu que le temps de désigner le coupable : l’argent. Non pas la monnaie utile aux échanges, mais l’argent sacralisé, intronisé en veau d’or, Mammon, l’autre nom du Diable, expression suprême du lucre, du désir matériel divinisé, avec ses religions, ses rites, ses cultes et ses grands-prêtres. Dans ce texte de circonstance, l’air de rien, l’air de parler d’autre chose, Péguy avait débusqué l’ennemi. Il l’avait fait sortir de sa tanière, et l’avait flingué. Mais la bête aux mille têtes, l’animal de cauchemar, après s’être vengée, a resurgi partout, bien décidée à nous submerger.
C’est à l’issue des grands massacres de 1939-1945 que Bernanos – peu avant, lui aussi, que sa voix ne s’éteigne – poussât le cri que nous venons de citer : Dieu veuille que la France donne au monde ce message… Et voilà qu’en ce printemps de 2013, en ce printemps français de 2013, Dieu a bien voulu que le cœur de la France s’éveille, que, face au monde, il exprime sa colère. Et que l’âme de la France fasse éclater à la face du monde le signal de l’insurrection de l’esprit.
Surcroît de grâce, signe supplémentaire, est survenue, en ce même printemps, cette étonnante coïncidence : l’élection du pape François. Un Américain – hors-normes, il est vrai –, Henry Miller, disait un jour qu’il ne s’arrêtait pas une seconde à l’idée que François d’Assise pût avoir quoi que ce soit à apprendre de notre mode de vie.[3] Le crédit que le pape François accorde à l’univers de la spéculation sans frein et des vanités mondaines, on le connaît déjà : il ne pèse pas lourd… Ce pape vient encore de dénoncer avec vigueur le lien entre « l’adoration de l’antique veau d’or », « le fétichisme de l’argent » et « la profonde crise anthropologique, la négation du primat de l’homme »[4].
Très Saint-Père, la France vient déposer à vos pieds le plus beau cadeau qu’elle pouvait vous offrir : le signal d’une insurrection spirituelle ! Vous n’aurez pas de mal à y reconnaître la signature d’un homme que vous aimez, Léon Bloy, le révolté de Dieu, pour qui celui qui ne prie pas le Seigneur prie le Diable, et dont Bernanos disait qu’il était le dernier prophète du peuple des Pauvres. Très Saint-Père,voyez le peuple de France : il recommence à voir le Ciel, et pour ses seuls vrais biens, il se bat sans retour !
[1] Selon le témoignage de Jean de Fabrègues, La France catholique, 3 avril 1953
[2] Le texte de cette conférence figure, sous le titre Révolution et Liberté, dans La Liberté, pour quoi faire ? (Bernanos, Essais et écrits de combat, t.2, La Pléiade, 1995, p.1322). Et son esprit domine le recueil d’articles de l’après-guerre Français si vous saviez, qui sera publié en 1961 (Ibid. p. 1071.)
[3] Préface à La merveilleuse aventure de Cabeza di Vaca, d’Haniel Long (éditions P.J. Oswald)
[4] Pape François, Discours à quatre ambassadeurs remettant leurs lettres de créance le 16 mai 2013.