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Rechercher : Rémi Hugues. histoire & action française. Rétrospective : 2018 année Maurras

  • Sur Sud Radio, A.Finkielkraut/Brice Couturier:”Le politiquement correct va-t-il nous conduire à la guerre civile ?».

    Découvrez la toute nouvelle émission de Sud Radio Week-End Les Irréductibles ! En cette année de présidentielle Alexandre Devecchio reçoit chaque semaine un invité pour débattre des enjeux de la France pour aujourd’hui et pour demain.

    La liberté d’expression !

    Les deux irréductibles du jour : 

    Alain Finkielkraut, académicien

    Brice Couturier, journaliste et essayiste

  • Aux Mercredis de la NAR : #13 - Gabriel MARTINEZ-GROS pour son livre ”Fascination du djihad”.

    Lors d'une conférence en décembre 2016, Gabriel MARTINEZ-GROS était venu nous présenter son dernier livre de l'époque intitulé "Fascination du djihad" qui a pour vocation d'offrir des clefs de réflexion sur ce phénomène qui a pris toute son importance ces 30 dernières années et dont on a pu voir les effets avec la constitution de l'Etat Islamique (DAESH).

  • Sur TV Libertés, Joe Biden va nuire aux Etats-Unis - Le Zoom - Guy Millière.

    L’essayiste et ex-maître de conférences à Paris VIII, Guy Millière, qui vit aux Etats-Unis depuis plusieurs années, évoque son dernier ouvrage “Après Trump ?”. Lors de cet entretien, il revient sur les quatre ans de mandat de Donald Trump et livre son analyse sur le nouveau président, Joe Biden.

  • Sur Sud Radio, Aquilino Morelle/David Djaiz : L’Europe a-t-elle défait la France ?


    Découvrez la toute nouvelle émission de Sud Radio Week-End, en cette année de présidentielle Alexandre Devecchio reçoit chaque semaine un invité pour débattre des enjeux de la France pour aujourd’hui et pour demain.

    Comment rebâtir la France et l'Europe ?

    Aquilino Morelle, Essayiste et ancien conseiller politique de Lionel Jospin et François Hollande

    David Djaiz, Énarque et auteur de l'essai "Le Nouveau Modèle français" aux éditions Allary Eds

  • Sur la page FB du Lys Ecologique : le bocage plutôt que le ravage !

    Il y a quelques années, nous faisions campagne contre le projet, aujourd’hui heureusement abandonné, d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes. Nos affiches éminemment royalistes étaient d’ailleurs respectées par les militants de l’ACIPA.

    Source : https://www.facebook.com/Le-Lys-%C3%A9cologique-1509779332676141/

  • Sur Valeurs Actuelles, L'ENFER de la FIBROMYALGIE : une pathologie encore trop mal soignée.

    Julien est atteint d'une très lourde fibromyalgie depuis plusieurs années et qui lui provoque d'intenses crises de douleurs. Ce syndrome est encore mal reconnu et difficilement soignable, ce père de famille cherche à le faire reconnaître comme une maladie, pour qu'elle soit mieux prise en charge par l'assurance maladie.

  • Encore un été de racket des Français sur nos autoroutes ! (01/08/2021), par Nicolas Dupont-Aignan.

    Départs en vacances et c’est chaque année le même racket des Français : l’argent économisé pour faire profiter nos enfants est aspiré par la pompe à essence et les péages, en hausse systématique. Parce que la privatisation de nos autoroutes s’est faite contre l’intérêt du peuple et pour ceux des concessionnaires, renationalisons-les dès 2022 pour retirer tous les péages en 5 ans !

  • lafautearousseau souhaite une bonne fête au Prince Gaston de France...

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    Ces fleurs de lys fleurissent sans discontinuer, dans la campagne provençale, depuis l'année 1900, où elles furent plantées par une famille royaliste fidèle.

    Nous les présentons aujourd'hui à notre Dauphin de France, en témoignage d'affection et de fidélité inébranlable à sa personne et au Principe qu'il représente...

  • Pas mieux...

    Le chiffre d'affaires de Pfizer s'établit à 36 milliards de dollars pour l'année 2021 !

    Pour le premier trimestre 2021, le géant pharmaceutique a annoncé 3,5 milliards de dollars de profits. Au deuxième trimestre, ils ont grimpé à 5,5 milliards de dollars...

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  • Bioéthique : La France confrontée à une culture de mort (19), par François Schwerer. Annexes (1/6)...

    L'étude de notre ami François Schwerer s'est donc achevée hier.

    Cet ensemble constitue une véritable somme, aussi bien par son importance que par son intérêt.

    Nous en avons commencé la publication le vendredi 10 janvier, et l'avons poursuivie du lundi au vendredi inclus, comme nous l'avons fait, par exemple, pour l'étude de Pierre Debray, Une politique pour l'an 2000.

    Pour suivre et retrouver ces textes plus commodément, nous avons regroupé la totalité de cette étude, vu son importance, dans une nouvelle Catégorie : François Schwerer - Bioéthique : culture de mort : vous pourrez donc retrouver donc l'ensemble de cette chronique en cliquant sur le lien suivant :

    François Schwerer - Bioéthique : culture de mort...

    Nous avons redonné chaque jour le plan de l'étude, afin que le lecteur puisse correctement "situer" sa lecture dans cet ensemble; voici maintenant le plan des Annexes et textes divers, que nous publierons jusqu'à vendredi prochain, inclus, date finale de la publication de cette importante contribution :

    Annexe 1 : Les lois de bioéthique.

    Annexe 2 : Le projet de loi bioéthique : une horreur peut en cacher une autre.

    Annexe 3 : La loi de bioéthique est essentiellement une loi discriminatoire.

    Annexe 4 : Bioéthique : on a ouvert la boîte de Pandore...

    Annexe 5 : La loi de tous les dangers.

    Annexe 6 : Sondage IFOP pour les AFC / Prière de Jean-Paul II /Quelques statistiques / Lettre pastorale de l'évêque de Bayonne.

    Schwerer.jpgANNEXES

     

    1. les lois de bioéthique (1)

    Dans son encyclique Centesimus annus (2), saint Jean-Paul II expliquait que l’écologie dans son intégralité ne s’arrête pas aux considérations environnementales ni aux questions relatives à l’organisation sociale mais inclue aussi l’écologie humaine. En effet, cette écologie intégrale est tendue non pas exclusivement vers l’accroissement de l’avoir mais d’abord vers le développement de l’être. Pour lui, c’est toute la création qui est l’objet des soins de l’écologie et au sommet de celle-ci se trouve l’homme. Poursuivant dans la même ligne, le pape François a expliqué dans son encyclique Laudato si’ que « tout est lié » (3). Comment peut-on donc défendre les bébés phoques et empêcher d’arriver à la vie autonome les enfants des hommes ? Comment respecter la nature et chercher à déshumaniser l’homme ?

    Le pape Benoît XVI, dans Caritas in veritate aborde la raison profonde qui conduit l’homme d’aujourd’hui à dissocier l’écologie environnementale de l’écologie intégrale et à adopter, in fine, une culture de mort : « Dépourvu de vérité, l’amour bascule dans le sentimentalisme. L’amour devient une coque vide susceptible d’être arbitrairement remplie. C’est le risque mortifère qu’affronte l’amour dans une culture sans vérité. Il est la proie des émotions et de l’opinion contingente des êtres humains ; il devient un terme galvaudé et déformé, jusqu’à signifier son contraire. La vérité libère l’amour des étroitesses de l’émotivité qui le prive de contenus relationnels et sociaux, et d’un fidéisme qui le prive d’un souffle humain et universel » (3).

    Si l’on y réfléchit bien, c’est ce processus qui est sous-jacent dans toutes les « avancées sociétales » portées en France par les lois dites de bioéthique. Leur enchaînement illustre bien la méthode mise en œuvre pour imposer à la France une véritable culture de mort.

     

    (1) : Cette annexe reprend l’essentiel de l’article publié dans le numéro 57 de la Nouvelle Revue Universelle.

    Le terme bioéthique mérite quelques explications. Il est formé de deux mots grecs bio qui signifie la vie et éthique que l’on a pris l’habitude distinguer du mot morale. Or, nous fait remarquer Sylvianne Agacinski, dans « L’homme désincarné », p. 18, « l’éthique n’est pas autre chose que la morale. L’une désignait pour les Grecs la recherche d’une sagesse pratique, soucieuse du bien et du juste ; l’autre était pour les Latins l’étude des mœurs, c’est-à-dire des bonnes façons d’agir les uns avec les autres ».

    (3) : Cf n° 37 et 38.

    (3) : Dans son homélie à Saint-Germain l’Auxerrois, le 1er septembre 2019, Monseigneur Aupetit a rappelé que « la Création a été confiée à l’homme pour qu’il en prenne soin et l’embellisse. Si elle est abîmée, c’est en raison de la cupidité et de l’orgueil de l’homme qui l’a conduit à se « faire comme Dieu ». L’humanité a confondu l’autorité qui fait grandir avec le pouvoir qui écrase et qui exploite tout à son profit. Ce désastre ne concerne pas seulement les plantes vertes et les animaux dans leur biodiversité, elle concerne de plus en plus l’humanité elle-même dans son désir de toute-puissance, par exemple lorsque l’on fabrique un hybride homme-animal ou que l’on vote des lois pour combler les frustrations sans tenir compte de la dignité de l’enfant qui a le droit de naître de l’acte d’amour de son père et de sa mère. Tout cela relève d’un manque d’humilité et d’amour ». Et, il a ajouté : « De la même façon que l’amour génère l’humilité, la véritable humilité ne peut naître que de l’amour ».

     

    C’est ce qu’a reconnu Monseigneur de Moulins-Beaufort lorsque, le 25 juillet 2019, juste après la présentation en Conseil des ministres du projet de loi appelé à être voté en septembre/octobre, il a tristement fait remarquer : « A chaque révision des lois de bioéthique, les encadrements sautent ». Cette fois-ci, cependant, l’évolution prend une nouvelle allure car, comme l’a expliqué Jean-François Delfraissy devant la Commission spéciale de l’Assemblée nationale le 28 août 2019, cette loi de bioéthique est une loi « d’ouverture et de confiance (sic) alors que les dernières lois de bioéthique étaient des lois qui interdisaient (1)».

    (1) : Il s’agit donc d’une loi liberticide comme l’expliquait Pierre Debray en 1998 : « Dans le récit de la Genèse Yahvé donne à Adam et Eve une loi, gage de l’alliance conclue avec eux. Cette loi est symbolisée par le fruit défendu. Pour que l’homme puisse exercer sa liberté il faut effectivement une loi, ou, si vous préférez, en référence au fruit défendu, des interdits » (« Lettre à un jeune européen sur le suicide de l’occident », Cahiers de Pierre Debay, n° 1.

    Il aurait été plus juste de dire des lois qui posaient des limites. La nouvelle loi pose donc en principe qu’il n’y a, du point de vue éthique, aucune limite. Elle reconnaît implicitement que tout ce qui  est techniquement possible est faisable. Cela a amené Jean-Marie Le Méné à considérer qu’« il ne s’agit pas d’une loi de bioéthique mais d’une loi de financement de la technoscience et de ses lucratives applications. En effet, on ne voit pas ce qu’il y a d’éthique ni de scientifique dans le détournement des lois de l’engendrement. En revanche, on voit très bien ce qu’il y a d’économiquement intéressant dans l’appropriation de gamètes et d’embryons destinés à devenir des matières premières exploitables ». Deux jours plus tard, comme pour lui donner raison, la commission spéciale bioéthique de l’Assemblée nationale approuvait un amendement pour ouvrir le marché de la conservation des gamètes aux établissements privés.

    Poursuivant son analyse dans La Croix, le président de la Conférence des évêques de France a expliqué cette évolution politique : « A mes yeux, [ce projet de loi] confirme l’impuissance des politiques à résister à une espèce de pression qu’ils ont eux-mêmes contribué à créer : depuis des années, ils font croire que les solutions techniques, médicales et juridiques permettront de soulager toutes les souffrances et les désirs non réalisés au fur et à mesure qu’ils seront identifiés. En affirmant cela, nos politiques nous trompent car inévitablement, les causes des souffrances se déplaceront. On ne fera que créer d’autres frustrations ». Il aurait pu ajouter que ces nouvelles frustrations serviraient alors de prétexte pour de nouveaux abandons. Il a simplement ajouté, montrant ainsi qu’il est bien conscient de la méthode utilisée : « nous sommes très doués pour habiller nos actes de mots édulcorants et nous donner bonne conscience à bon compte ».

     

    Une politique des petits pas

     

    La première loi française qualifiée de bioéthique remonte au 1er juillet 1994.

    Elle avait pour but d’encadrer le traitement des données nominatives dont le but est la recherche dans le domaine de la santé. Cette première loi portait, sans le dire, atteinte aux fondements même du droit français puisqu’elle conduisait à évaluer le caractère éthique des pratiques de la recherche à l’aune de l’utilité que la collectivité pouvait en retirer. Le droit prenait ainsi une dimension essentiellement utilitariste.

    Elle fut suivie, le 29 juillet de la même année, par deux autres lois relatives au respect du corps humain, au don et à l’utilisation des « produits » du corps humain. Il s’agissait alors de déclarer l’impossibilité pour le corps humain de faire l’objet d’un droit patrimonial, ce que tout le monde considérait comme naturel, sans qu’il fût nécessaire de le préciser. Cependant le vers était déjà largement dans le fruit puisque ce texte appréhendait le corps humain comme quelque chose en soi, préparant implicitement les esprits à une rupture dans la personne humaine (1).

    La deuxième loi du 29 juillet prévoyait aussi l’encadrement de l’aide médicale à la procréation et celui du diagnostic prénatal. Or, cet encadrement reposait essentiellement sur les notions de désir et de « consentement » préalable. Autrement dit, l’encadrement de ces nouvelles pratiques reposait désormais sur des notions purement subjectives. Si les apparences étaient sauves, puisque les pratiques antérieures n’étaient pas bouleversées, le fondement ontologique des lois de bioéthique – et avec elle de tous les types de lois – s’était écroulé (2).

    Puisqu’elle est la suite logique des précédentes, passons rapidement sur la loi de 2004 qui interdisait le clonage d’être humain mais qui étendait l’encadrement des dons de « produits » du corps humain aux importations et exportations. Elle créait « un crime contre l’espèce humaine » dont on n’a jamais vu l’application concrète devant un tribunal, mais ouvrait, « de façon limitée », la recherche sur les embryons. Avec ce nouveau texte, l’embryon pouvait donc, dans certains cas, être réduit à l’état d’objet. En fait, elle permettait ainsi l’utilisation des embryons « surnuméraires » résultant de la fécondation in vitro.

    La loi du 7 juillet 2011 a, pour sa part, autorisé la congélation ultra rapide des ovocytes. Puis la loi du 6 août 2013 a fait passer la recherche sur les embryons du régime d’interdiction avec dérogations à celui d’« autorisation encadrée ».

    La loi de 2019 ne sera donc que la septième loi dite de bioéthique dont se dote la France depuis moins de vingt-cinq ans. Et, comme personne n’imagine que l’on sera arrivé au bout de l’évolution éthique, l’article 32 du projet de loi « renouvelle la clause de réexamen périodique de la présente loi dans un délai de sept ans, afin de s’assurer que le cadre législatif demeure pertinent pour répondre aux enjeux éthiques posés par l’avancée rapide du savoir scientifique ». L’exposé des motifs est donc clair : en France désormais l’éthique est subordonnée à l’avancée du « savoir scientifique ». Elle n’a plus aucun fondement transcendant. Cette loi ouvre non seulement le recours à l’insémination artificielle avec donneur anonyme (pudiquement appelée PMA) aux couples de femmes et aux femmes seules, mais encore la possibilité de recherches sur les embryons humains (par le biais des « cellules souches embryonnaires) et la création de chimères (en introduisant des cellules humaines dans des embryons d’animaux) (3).

    Cette loi n’est pas la dernière. Pour justifier le fait qu’elle ne se penche pas sur la question de la Gestation pour autrui (la GPA), le ministre de la santé, Agnès Buzyn a expliqué devant la commission spéciale de l’Assemblée nationale : « une loi de bioéthique n’est pas une loi d’égalité. Il ne s’agit pas de comparer l’égalité de tous nos concitoyens à l’égard de telle ou telle pratique ». Cela signifie, en clair, qu’une prochaine loi devra s’occuper de cette question de l’égalité… une fois que la loi adoptée aura créé cette nouvelle inégalité !

     

    (1) : En 1995, saint Jean-Paul II remarquait dans son encyclique Evangelium vitae : « le corps n'est plus perçu comme une réalité spécifiquement personnelle, signe et lieu de la relation avec les autres, avec Dieu et avec le monde. Il est réduit à sa pure matérialité, il n'est rien d'autre qu'un ensemble d'organes, de fonctions et d'énergies à employer suivant les seuls critères du plaisir et de l'efficacité » (23).

    (2) : Dès lors, il n’y a plus aucune raison que le projet de loi de 2019 s’oppose au diagnostic préimplantatoire dans le cadre d’une PMA. Devant la commission spéciale de l’Assemblée nationale chargée d’examiner la nouvelle loi, Agnès Buzyn a déclaré le 11 septembre 2019 : « Autant quand on porte un enfant et qu’on est sensible à l’idée du handicap et d’une société inclusive (sic), on peut faire le choix de garder un enfant [atteint d’une maladie chromosomique], autant quand on a le choix entre différents embryons dont un est atteint d’une maladie génétique, il est évident qu’un couple ne choisira de prendre le risque d’être réimplanté » avec un embryon à risque.  Si cela n’est pas de l’eugénisme, on se demande ce que c’est.

    (3) : Cf. notre présentation de la loi dans Politique Magazine (septembre 2019).

     

    Des fuites orchestrées

     

    Le projet de loi a officiellement été présenté en Conseil des ministres le 24 juillet et jusqu’à cette date il n’était normalement pas accessible au public. Mais le 27 juin il faisait déjà l’objet d’une présentation dans Libération qui s’était « procuré » le texte avant même que le Conseil d’Etat n’ait donné son avis. Et le journal Libération commentait alors les propos de Madame Buzyn, ministre de la Santé, publiés deux jours auparavant dans le Journal du Dimanche (JDD). Cela permettait déjà de préparer l’opinion au contenu du texte et de faire indirectement pression sur le législateur en lui suggérant des « améliorations » pour répondre aux attentes de certaines. « Que reste-t-il du rapport du député Jean-Louis Touraine (LREM) destiné à servir de support au projet de loi bioéthique ? Le souffle de décrassage et de levée des interdits n’est plus franchement là ! » précisait le journal. On comprend pourquoi ce député a été choisi parmi les rapporteurs du projet de loi et ce que l’on attend de lui.

    Mais, en même temps, le journal voulait rassurer les opposants. Certes, le projet de loi bouscule totalement les règles de la filiation mais il le fait de façon intelligente puisqu’à côté de la filiation naturelle, il créera un nouveau type de filiation « entre les parents qui ont eu recours à un don (sic) et leurs enfants ainsi nés ». Il sera « inutile ainsi de toucher au code civil ». Ces fuites permettent aussi d’orienter les futurs débats qui ne s’annoncent pas aussi « apaisés » que ne le souhaiterait le gouvernement.

    Cette nouvelle « filiation », reconnaît le journal, est incohérente. Mais ne s’agit-il pas « d’une tactique destinée à apaiser la

  • Frédéric Rouvillois : « La menace du politiquement correct pèse sur l’université ».

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    Frédéric Rouvillois nous recevant à l'occasion de la parution de son dernier roman

    © Photo : Cercle Droit&Liberté

    Le commissaire Lohmann mène l'enquête dans le monde feutré des agrégés des facultés de droit. Un club sélect où l'on n'entre pas sans peine, pour n'en jamais plus ressortir, sauf les deux pieds devant.

    - Entretien sans langue de bois avec le Professeur Frédéric Rouvillois qui signe avec "Un mauvais maître" (La Nouvelle Librairie) son premier polar dans lequel il croque efficacement les travers d'un milieu qu'il connait bien : l'Université.

    Entretien d'Alcyde Le Poser pour le Cercle Droit&Liberté.

    CERCLE DROIT&LIBERTÉ : Le recours à la fiction permet une plus grande liberté dans l’écriture, est-ce la raison pour laquelle vous avez décidé de vous essayer au genre du roman policier pour parler de l’université ?

    FRÉDÉRIC ROUVILLOIS. Oui bien entendu. Avec un roman, tout le monde l’a compris depuis toujours et notamment Voltaire, on peut dire de nombreuses choses que l’on ne pourrait pas énoncer dans la vie et qui d’ailleurs ne présenteraient pas forcément d’intérêt. Imaginer un personnage qui a plus ou moins les traits d’une personne réelle et s’amuser à le faire vivre dans son milieu, ou dans quelque chose qui s’y apparente, avec des personnages qui ressemblent aux personnes qu’il pourrait croiser et lui faire faire des choses dont on imagine qu’il pourrait les faire, là c’est absolument jouissif et cela permet d’avoir un regard lucide sur un milieu particulier.

    «L’université est en effet un milieu où coexistent (notamment) des gens véritablement admirables et des crapules stupéfiantes.»

    Dans ce roman, je pense que cela permettra de faire comprendre clairement beaucoup de choses qui ne sont jamais dites mais qui intriguent beaucoup, notamment dans le milieu des étudiants qui préparent des thèses, et qui ignorent à quelle sauce on va les dévorer. En effet, on a l’impression qu’il s’agit d’un monde à part, caché par une sorte de rideau sacré comme le rideau du Temple de Jérusalem. Dans ce roman, ce qui m’est apparu amusant, ça a été, sinon de déchirer le rideau en question – parce qu’il est tout de même sacré -, au moins de le tirer un peu pour voir ce qu’il y a derrière et comprendre que la réalité est assez complexe. L’université est en effet un milieu où coexistent (notamment) des gens véritablement admirables et des crapules stupéfiantes.

    Bref, ce tout petit monde est une reproduction microcosmique du monde normal dans lequel, à côté des gens ordinaires, il y a des saints et des salauds, avec la particularité qu’ici les salauds sont souvent des salauds de haut-vol…

    CERCLE DROIT&LIBERTÉOn sent en filigrane de votre roman une critique du milieu universitaire, ce tout petit monde des professeurs de droit, avec son entrisme, sa déconnexion du réel mais surtout sa cruauté. Quel regard portez-vous sur l’état de l’université ?

    FRÉDÉRIC ROUVILLOIS. Ce que je décris en 2020 aurait pu être décrit en 1950, 1900 ou en 1700, plutôt qu’« Un mauvais maître » on aurait écrit « Un grand seigneur méchant homme » ou « Un salaud philosophe ». C’est un type de milieu particulier, peu importe les époques, dans lequel on peut trouver des gens très bien comme des individus épouvantables et excessivement intelligents, qui prendront leur plaisir à faire du mal autour d’eux, parfois gratuitement, d’autre fois pour éliminer ceux qui pourraient leur faire de l’ombre : vous vous souvenez peut-être de l’excellent film de Patrice Leconte, Ridicule, et en particulier du personnage joué par Bernard Giraudeau, l’abbé de Villecourt, « Un mauvais Prêtre », qui d’ailleurs, comme celui de mon roman, ne l’emporte pas au paradis…

    Dans cet ordre-là, le monde des professeurs de droit, dans son homogénéité, avec son caractère clos, composé de personnes qui se voient en permanence et ont oublié qu’il y a un monde à l’extérieur, me semble effectivement un milieu où la cruauté, la jalousie, la méchanceté dissimulée sous la plus exquise urbanité, sont souvent très fortes.

    «C’est un microcosme d’anciens premiers de la classe (..) ils ont de ce fait souvent, un "ego surdimensionné"»

    Au fond, c’est un microcosme d’anciens premiers de la classe : ils ont raflé toutes les premières places au cours de leur cursus, et ils ont de ce fait souvent, pas toujours, mais souvent, un « ego surdimensionné », comme on dit dans les médias. Cela créé psychologiquement quelque chose de bien particulier. Et dans certains cas, cela donne des résultats épouvantables. Mon personnage principal, François Desnard, est en quelque sorte l’incarnation, le soleil noir, le concentré imaginaire de ce que ce milieu peut produire à la fois de plus brillant et de plus pervers, bref, de pire…

    CERCLE DROIT&LIBERTÉ : Vous dites à un moment de votre roman que certains professeurs « se rallièrent au politiquement correct et en furent largement récompensés (…) ». Faut-il abandonner toute forme d’esprit critique pour briller à l’université et a fortiori en société ?

    FRÉDÉRIC ROUVILLOIS. De mon point de vue, le grand intérêt d’être universitaire, c’est la liberté ! C’est un peu la fable de La Fontaine, « Le chien et le loup », dans laquelle ce dernier est celui qui a accepté d’être pauvre pour être libre, tandis que le premier a accepté de renoncer à sa liberté pour avoir une pâté abondante et quotidienne, « os de poulets, os de pigeons, sans parler de maintes caresses » … Si le loup, qui a renoncé à l’argent et à un bien-être matériel élevé pour demeurer libre, renonce également à sa liberté, on peut dire qu’au final il n’a rien compris.

    «Le grand intérêt d’être universitaire, c’est la liberté !»

    Qu’il est le dindon de la farce, pour ne pas dire pire. D’autant que cette liberté, il l’échangera au plus contre presque rien, la vague direction d’une section ou d’un centre de recherche, les charges de doyen, de président de son université, au mieux, de recteur… L’universitaire qui, par ambition, est prêt à échanger sa liberté contre ces babioles institutionnelles et ces colifichets administratifs, n’a en réalité rien gagné, mais tout perdu…

    CERCLE DROIT&LIBERTÉ : Vous savez peut-être que le Cercle Droit et Liberté a été fondé pour encourager l’esprit critique après que nous avons fait le constat qu’un certain politiquement correct se développait dans l’Université française, favorisant ainsi le développement d’une pensée unique progressiste. Partagez-vous ce constat ? Pensez-vous que les « Mauvais maîtres » y ont leur part de responsabilité ?

    FRÉDÉRIC ROUVILLOIS. Le fait que cette doxa progressiste se développe et s’ancre de plus en plus dans l’université est malheureusement une évidence.

    Heureusement il reste quelques facultés de droit qui, telles des villages gaulois entourés par les camps romains, parviennent à résister un peu- et je suis très fier de faire partie de l’une d’elles, même si elle vient de fusionner dans un agrégat gigantesque et un peu inquiétant rebaptisé « Université de Paris ». On a su jusqu’ici y conserver l’ADN initial de l’Université Paris Descartes. Pour rappel, c’est une faculté de droit qui est née dans les années 1970, dans un contexte très particulier, lorsque des professeurs de droit de Nanterre dégoutés de la situation de cette université pourrie par Mai 68 ont obtenu de la ministre de l’enseignement supérieur de l’époque d’être exfiltrés et de créer, dans le cadre de l’Université Paris 5, une petite faculté de droit. Autrement dit, il y avait un ADN singulier, une tendance conservatrice, méfiante à l’égard des billevesées du politiquement correct, libre et critique, que nous avons réussi assez largement à maintenir, notamment chez les publicistes.

    Ce particularisme est pourtant de plus en plus rare, puisque même la célèbre Paris 2 Panthéon-Assas, qui jadis fut le temple de la résistance, a pris le tournant, il y a une trentaine d’années, des « gens de droite qui ont honte d’être de droite » faisant entrer les loups dans la bergerie, qui à leur tour ont su faire entrer d’autres proches… Et « dédroitiser » cette université à marches forcées.

    «La menace du politiquement correct pèse sur l’Université, d’autant que la tendance générale l'incite à suivre l’exemple des campus américains»

    Pour en revenir à votre question, il est certain que la menace du politiquement correct pèse sur l’Université, d’autant que la tendance générale l’incite à suivre l’exemple des campus américains [1]…

    CERCLE DROIT&LIBERTÉ : A l’opposé de ce « mauvais maître », vous dédicacez également votre roman aux bons maîtres et à « Jean-Luc », qui semblerait être Jean-Luc Coronel de Boissezon. Pourriez-vous nous en dire plus sur cette figure du bon maître ?

    FRÉDÉRIC ROUVILLOIS. Le bon maître c’est celui qui accepte cette situation du loup par rapport au chien, celui qui assume cette liberté et qui va se consacrer aux deux fonctions de l’enseignant-chercheur. C’est le bon roi de la typologie d’Aristote, celui qui agit non pas pour lui ni pour se faire plaisir mais qui, d’une part, enseigne et se voue à apprendre à ses étudiants l’esprit critique et la rigueur et qui, d’autre part, recherche, écrit, produit, fait produire, de façon libre et désintéressée, le côté un peu Jüngerien du professeur de droit.

    «Le bon maître agit non pas pour lui mais pour le bien commun.»

    A l’inverse, le mauvais maître dans mon roman est quelqu’un d’extrêmement doué sur tous les plans, mais qui utilise ses dons à mauvais escient : pour lui-même, son narcissisme, son désir frénétique de domination ou encore son goût du luxe. Au fond, c’est le despote, celui qui gouverne pour son plaisir propre et non le bien commun.

    Dieu merci, de bons maîtres existent mais malheureusement se brûlent parfois les ailes, comme Jean-Luc Coronel de Boissezon, qui a agi de la manière qui lui a été reprochée car il ne supportait pas de voir humilié et détruit l’idéal universitaire. Sa réaction paraissait pourtant tout à fait légitime et modérée à une situation qui devenait hors de contrôle et surréaliste. Mais parce que c’était lui, parce qu’il s’appelait comme il s’appelait, parce qu’il a un look qui ne plait pas, il a été condamné d’une manière complètement injuste par des injustes. Un blâme aurait déjà été disproportionné, mais la révocation c’est au-delà de l’imaginable. J’espère qu’en appel ou en cassation, les juges retrouveront la raison et auront la main moins invraisemblablement lourde.

    CERCLE DROIT&LIBERTÉ : Autre sujet, vous dédiez plusieurs pages au concours de l’agrégation en droit au cours desquelles vous semblez dénoncer que « l’anonymat y est inconnu ». Autrement dit, le système actuel du concours favoriserait les « habiles », c’est-à-dire ceux qui connaissent le jury, et la sélection reposerait davantage sur des raisons étrangères à la qualité scientifique. Faut-il, d’après vous, réformer le concours de l’agrégation ?

    FRÉDÉRIC ROUVILLOIS. Je ne dénonce pas, je constate. Dans l’agrégation de droit, toutes les épreuves sont orales, vous êtes face à un jury de sept personnes et par définition il n’y a pas d’anonymat. Dans les faits néanmoins, une sorte de convenance et de savoir-vivre compense la situation. D’ailleurs, pour avoir siégé, j’ai été frappé par l’honnêteté et l’impartialité globales des membres du jury.

    Au fond, je pense que c’est un très mauvais mode de recrutement, mais le moins pire de tous, dans la mesure où il permet aussi à des gens qui ne sont pas des « habiles » et qui n’ont pas de relations de devenir professeur de droit. En d’autres termes, il y a en définitive plus de bonnes que de mauvaises surprises, et plus de révélations que d’injustices : avec un système de recrutement local, tel qu’il existe par exemple chez les littéraires ou les historiens, Jean-Luc Coronel ou Benoît Fleury n’auraient jamais été professeurs…Ni moi, du reste.

    CERCLE DROIT&LIBERTÉ : Enfin, un personnage m’a intrigué, il s’agit de Dominique Verdoni. Celui-ci apparait au début et à la fin de l’ouvrage, comme pour ouvrir et clore l’intrigue. Ce personnage semble incarner « monsieur moyen » à travers lequel on décèle une forme de critique de l’homme moderne. Partagez-vous ce constat ?

    FRÉDÉRIC ROUVILLOIS. Oui effectivement, je n’y avais d’ailleurs pas pensé. De fait, c’est le personnage qui est en dehors du jeu, c’est le retour du monde normal, le Français moyen dans ce qu’il a au fond de plus quelconque, un peu hâbleur, un peu dragueur, un peu victime de la mode, mais qui à la rigueur peut sembler plus rassurant que le monde clos des professeurs de droit…

    CERCLE DROIT&LIBERTÉ  : Nous vous remercions pour cet entretien que vous avez accepté de nous accorder et il ne nous reste plus qu’à vous souhaiter un joyeux Noël ! 

    [1] Nous renverrons ici utilement au documentaire « Evergreen et les dérives du progressisme » :

    https://www.youtube.com/watch?v=u54cAvqLRpA&t=2025s

  • France Relance, par François Schwerer.

    Le plan de relance, baptisé « France Relance », a officiellement pour but de redonner à tous les acteurs économiques confiance en l’avenir, pour que les uns investissent et embauchent et que les autres consomment. Mais ce plan annoncé solennellement par le chef du gouvernement est-il vraiment adapté aux besoins réels ? Son objectif est-il d'ailleurs conforme à la mission de l’État ?

    Pour qu’un plan de relance réponde à son objectif, il faut qu’il permette de remettre en route les secteurs de l’activité économique qui sont en panne ou, du moins, qui ne répondent pas à ce que l’on attend d’eux. Il faut donc que le diagnostic soit exact et que les moyens mis en œuvre, non seulement soient intrinsèquement efficaces, mais qu’en plus ils soient correctement ordonnés les uns par rapport aux autres pour se renforcer mutuellement et non se télescoper.

    La crise sanitaire que nous traversons, et le confinement imposé par les Pouvoirs publics, ont pesé sur l’économie, tant du côté de l’offre que du côté de la demande. Mais pas de la même façon. En effet, au plus fort de la crise, le gouvernement a mis en œuvre des mesures « sociales » en indemnisant le chômage partiel dans le but de soutenir la consommation et donc la demande. En ce qui concerne la production (c’est-à-dire l’offre), on a promu le télétravail, autrement dit le travail tertiaire. Mais rien n’a été fait véritablement, ni pour soutenir la production agricole ni pour aider la production industrielle. Il en est résulté que la consommation, artificiellement soutenue, n’a pu se porter principalement que sur des services ou sur des biens importés. Dès lors, toute relance de la consommation qui serait décrétée aujourd’hui, sans être précédée d’une relance de la production nationale de biens matériels serait inadaptée, voire contre-productive.

    Le gouvernement communique régulièrement sur le fait que, pendant la période de confinement, les Français ont épargné au lieu de consommer. Il les invite donc à inverser leurs habitudes, comme s’ils étaient coupables du ralentissement économique actuel. Mais le surcroît d’épargne enregistré a deux causes principales. Certains Français n’ont pas pu utiliser leur argent pour des dépenses ayant trait aux voyages, aux spectacles, aux sorties entre amis et si, demain, ils sont à nouveau libres de leurs loisirs, ils n’ont pas besoin d’incitation pour recommencer à dépenser. Il suffit qu’on les autorise à ne plus vivre masqués. Les autres ont épargné par peur de l’avenir, parce que le secteur d’activité qui constituait leur gagne-pain est sinistré ; parce qu’ils risquent demain de se trouver sans travail. Ceux-là n’écouteront pas non plus les sirènes gouvernementales car ils ne veulent pas risquer de se fracasser sur le rocher de Charybde, la misère, ou de se perdre sur celui de Scylla, le chômage de très longue durée.

    De plus, quand on parle de relance, il faut bien garder en tête que l’État n’a pas à être directement producteur de richesses. Il peut se montrer soit consommateur en lançant une politique de grands travaux, soit  investisseur en apportant des capitaux aux entreprises qu’il veut soutenir, soit enfin redistributeur en prélevant des sommes sur les activités les moins utiles pour les affecter à de plus efficientes. Dans son dernier rôle, l’État agit en modifiant les règles fiscales en vigueur ; dans les deux premiers, il doit mobiliser des fonds. Pour cela, si son budget n’est pas habituellement excédentaire et s’il n’a pas la maîtrise de sa monnaie, il doit impérativement accroître les prélèvements soit immédiatement par une augmentation des impôts, soit à terme par l’emprunt qu’il faudra bien, un jour, rembourser.

    Un plan de 100 milliards, vraiment ?

    Le plan promet 7 milliards pour la rénovation énergétique des bâtiments (dont 600 millions figuraient déjà dans le budget pour 2020), à condition que les entreprises s’engagent à « utiliser le moins possible de travailleurs détachés » (sic), ce qui est le moins que l’on puisse demander. Un vrai plan de relance serait allé jusqu’à exiger que le bénéficiaire de l’aide étatique produise en France en employant quasi exclusivement une main-d’œuvre française et en se fournissant essentiellement en France… ce qui n’est pas tenable au regard des engagements européens.

    Il prévoit encore un encouragement à la relocalisation par une promesse de baisse des impôts de production[1] de 10 milliards en 2021 et autant en 2022. En échange les collectivités locales qui bénéficient normalement de ces ressources, seront « intégralement compensées » par une dotation prélevée sur le revenu de la TVA. En contrepartie, les entreprises s’engagent à promouvoir l’égalité homme-femme, défendre l’environnement et « partager la valeur ». Parmi les mesures qui mêlent ainsi le souci de relocalisation et celui de « verdissement » de la production, le gouvernement envisage de faire produire en France, dans les deux ans, des batteries pour véhicules électriques… lesquelles avaient été externalisées parce que polluantes ! Dans le même esprit le gouvernement entend lutter contre « l’artificialisation des sols »… en autorisant des dépassements du seuil de densité. Comme l’explique la présidente de la Fédération des promoteurs immobiliers, il s’agit de « mettre plus de ménages à l’hectare »[2].

    6,7 milliards seront consacrés à l’insertion des jeunes, « via des parcours d’insertion aux métiers d’avenir, en lien avec les régions, soit des formations qualifiantes ». 7,6 milliards seront consacrés à la création d’un « bouclier anti-chômage », autrement dit à l’indemnisation du chômage partiel – qui s’appelle désormais le « régime d’activité partielle de longue durée » ! Hélas, ce plan précise qu’il vise à promouvoir 160 000 embauches en deux ans alors que ceux qui ont été mis au chômage par la crise sont infiniment plus nombreux (500 000 selon le Premier ministre).

    Jean Castex a avoué que ce plan de 100 milliards ne serait à la charge de l’État que pour 80 milliards, le reste étant financé par les partenaires de l’État… déjà en déficit ! Et sur les 80 milliards à la charge de l’État, 40 proviendront des subventions européennes (déjà actées dans le cadre du plan européen de relance de 750 milliards). Le seul problème est qu’au moment où France Relance est annoncé, le Parlement européen ne s’est pas encore prononcé sur le projet, que celui-ci n’est donc pas encore ratifiable (et la Hongrie ne semble pas prête à ratifier un texte que les Parlementaires auraient assortis de conditions spéciales) et que l’on ne sait pas encore comment et dans quel délai les 750 milliards qui vont être empruntés seront remboursables car la nouvelle taxe sur les plastiques à usage unique sera bien insuffisante pour y faire face.

    Le plan est-il crédible ?

    La troisième loi de finances rectificative pour 2020, votée en juillet faisait état d’un déficit annuel de 25 milliards d’euros. Un mois plus tard, alors qu’on nous annonçait que la reprise était là, le ministre des comptes publics expliquaient que « le manque à gagner fiscal pour l’État, du fait de la crise, s’élève à 70 milliards d’euros, soit 15 % des recettes prévues ». Or le budget d’origine était déjà envisagé en déficit de 129 milliards. Ces évaluations ne tiennent pas compte du trou de la Sécurité sociale, fortement creusé par les mesures de soutien social. À ce rythme, la France devrait terminer l’année 2020 avec un déficit supplémentaire de près de 300 milliards (soit environ 15 % du PIB).

    Deux conséquences : le plan total, avec 100 milliards sur deux ans (dont moins de 40 nouveaux) ne représente rien au regard des 300 milliards de déficit prévu pour l’année. Plus grave : si le Gouvernement a annoncé au Parlement courant juillet un manque à gagner de 25 milliards alors que courant août il avoue qu’il est de plus de 70 milliards, cela signifie soit qu’il s’appuie sur des chiffres totalement incontrôlés, soit qu’il ne dit pas la vérité aux représentants du peuple au moment de lui faire avaliser ses décisions.

    Pour financer ce plan, le gouvernement compte sur la « croissance » ! Comme l’a expliqué Jean Castex en présentant le plan : « Je le redis et je veux que les Français en soient convaincus : il n’y aura pas d’augmentation d’impôts ». Certes, il n’est pas prévu d’augmentation des impôts pour les particuliers, mais, « en même temps », il y aura une nouvelle taxe (« la taxe Covid ») sur les contrats d’assurance santé et sur les mutuelles, ce qui sera automatiquement et obligatoirement répercuté dans le coût des contrats… dont la taxation devrait augmenter de 18 %. Il n’y aura pas d’augmentation des impôts pour financer le plan de relance mais, « en même temps » il y aura une augmentation des taxes sur les revenus des retraités pour financer le trou de la Sécurité sociale.

    La Caisse des Dépôts et Consignations prétend vouloir utiliser le surcroît d’épargne figurant sur les « livrets A » pour financer certaines mesures inscrites dans le plan. Mais « en même temps », le ministre de l’Économie incite les Français à consommer rapidement l’argent épargné pendant la période de confinement. On aura donc du mal à utiliser cet argent deux fois. Quant aux 40 milliards qui doivent être obtenus auprès de l’Union européenne, leur usage sera en fait contrôlé par la Commission et il n’est pas assuré qu’elle accepte l’usage précis qu’entend en faire le gouvernement français.

    À l’inverse, on s’étonne du fait que le gouvernement ne semble pas envisager, pour trouver l’argent nécessaire au financement de ce plan, de différer des dépenses non prioritaires et d’annuler des projets de dépenses externes (à l’étranger), voire simplement de commencer à recenser les dépenses improductives

    Plan de relance ou opération de communication ?

    Pour répondre à un souci apparu pendant la crise sanitaire, le plan dit prévoir de privilégier les secteurs stratégiques : produits de santé, « intrants » critiques pour l’industrie, électronique, agroalimentaire et télécommunications (5G). Si les secteurs sont ainsi bien identifiés, ils le sont en termes assez généraux pour que personne ne sache qui sera vraiment concerné. On peut donc penser que cette allusion aux secteurs prioritaires ne constitue pas en soi un objectif économique mais traduise simplement l’expression d’un critère d’attribution des subventions et crédits annoncés par ailleurs. Il ne s’agirait donc pas d’un nouveau chapitre du plan de relance mais d’une autre présentation de l’affectation de ce plan.

    Au total, ce plan est un catalogue de soixante-dix mesures qui n’ont rien de commun entre elles, sauf d’avoir été annoncées au même moment, et qui ne constituent pas un plan de relance mais une opération de communication ratissant le plus large possible. Il ne sert à rien que ces mesures constituent un tout cohérent ni que l’on sache comment les financer, seul compte la possibilité de faire des promesses à un nombre importants d’électeurs et à une échéance suffisamment éloignée puisque comme chacun sait, les promesses n’intéressent que ceux qui y croient.

    Un montant symbolique : 100 milliards. Un recyclage de mesures qui avaient déjà été annoncées à maintes reprises et de travaux d’entretien qui n’avaient jamais été faits (comme 250 millions pour la réfection des ponts menaçant ruine). Trois secteurs médiatiquement porteurs : le verdissement de l’économie, la compétitivité des entreprises et la cohésion sociale ! Un plan de dépense non financé qui ne présente aucune échéance réelle.

    Or un plan de relance, surtout en sortie de crise, se doit de porter rapidement quelques fruits pour faire renaître la confiance. Ce qui aurait pu être rendu possible, par exemple, par des investissements publics dans des projets d’infrastructure, permettant à la fois de redonner du travail aux chômeurs et de relancer la consommation. Mais, à quoi bon se fatiguer ? L’opposition ne ferait pas mieux. Ainsi, Eric Woerth annonce qu’il votera ce plan alors même qu’il craint « qu’il se transforme en bombe financière à retardement ». Que lui importe ? Ce n’est pas lui qui assumera la responsabilité de ce « plan de com ».

    Ceci étant, faut-il un « plan de relance » ? Ce que les citoyens attendent de l’État, ce n’est pas un plan de relance mais la mise en œuvre des conditions de la relance. La relance doit être le fait des agents privés ; l’État doit leur donner les moyens d’agir et les encourager. Il doit aussi donner l’exemple par une politique d’aménagement du territoire qui permette à chacun de travailler et vivre au pays, en protégeant les entreprises nationales et n’encourageant pas la vente des entreprises stratégiques à des intérêts financiers étrangers, en veillant à un niveau d’éducation convenable, etc. Cela signifie aussi clairement que l’État doit abandonner l’administration des choses qu’il ne pourra jamais faire correctement et renouer avec son rôle fondamental qui est de gouverner les hommes.

     

    Illustration : Le plan de relance générale a déjà permis de relancer les fermetures d’usine. Une efficacité redoutable.

    [1]   Il s’agit de la contribution économique territoriale (CET), de la cotisation foncière des entreprises (CFE), de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et de la taxe foncière sur les propriétés bâties, qui sera aussi réduite de moitié, mais uniquement pour les établissements industriels.

    [2]   On peut lire dans l’arrêté du préfet de l’Hérault 2020-01-959 que, face à la pandémie, « les métropoles sont des territoires plus critiques du fait de leur densité ».

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    Source : https://www.politiquemagazine.fr/

  • Et revoilà la guerre froide !

     

    par Gilles Varange

    Les Américains viennent de terminer la construction d’une première base à Deveslu, en Roumanie, la seconde devant être achevée en Pologne d’ici à 2018 : le climat de tension avec la Russie entretenu par Washington place les Européens en première ligne.

     

    2867209962.jpgLes 2 et 3 décembre 1989, trois semaines après la chute du mur de Berlin, les présidents George Herbert Bush (le père) et Mikhaïl Gorbatchev, accompagnés de leurs ministres des Affaires étrangères, se rencontraient au large de l’île de Malte, à bord du croiseur soviétique Maxim Gorki. Durant ces deux journées historiques, les dirigeants des deux superpuissances de l’époque allaient s’efforcer d’éviter que le profond ébranlement subi par le bloc soviétique ne se transforme en une situation incontrôlable susceptible de déboucher sur un conflit planétaire. Le chef du Kremlin, hanté par la menace d’un naufrage économique et déjà résigné à la perte de son glacis est-européen, n’avait plus que deux objectifs en tête : sauver ce qu’il restait de l’Empire et arracher la promesse d’une aide financière massive des pays occidentaux.

    Aussi fit-il d’emblée une concession que son homologue américain n’avait peut-être jamais espérée : il se dit disposé à rapatrier les centaines de milliers d’hommes de l’Armée rouge stationnés chez les satellites européens de l’URSS, quelles qu’en fussent les conséquences politiques, à une unique mais impérative condition. Il exigea du président américain la promesse solennelle que les états-Unis ne mettraient à aucun moment ce retrait à profit pour avancer leurs propres troupes en direction des frontières soviétiques ou pour accepter l’entrée d’anciens pays membres du pacte de Varsovie dans l’OTAN.

    Le secrétaire d’Etat américain et homme de confiance de Bush, James Baker, se serait exclamé alors sur le ton de la plus parfaite sincérité : « Soyez-en certain, nous n’avancerons jamais d’un pouce. Pas d’un pouce ! » De l’aide financière attendue, le pauvre Gorbatchev ne vit jamais un seul dollar. Mais les concessions faites sur le Maxim Gorki, rapidement connues des organes de sécurité soviétiques, lui valurent la défection immédiate des derniers éléments de l’armée et du KGB qui lui étaient restés fidèles. C’est à ce moment-là que le dernier président de l’Union Soviétique signa son arrêt de mort politique.

    Agitation militaire

    Un demi-siècle plus tard, tous les anciens pays membres du Pacte de Varsovie ont adhéré à l’OTAN et – choix hautement symbolique ! – c’est dans cette dernière capitale que Barak Obama a décidé de rassembler l’ensemble de ses féaux européens à l’occasion du sommet annuel de l’Alliance atlantique qui s’ouvrira le 8 juillet. Objectif principal de cette réunion selon le chef de la diplomatie polonaise, Witold Waszczykowski : convaincre les principaux partenaires des états-Unis de la nécessité d’augmenter sensiblement leurs budgets de la Défense de manière à faire face « à la menace croissante d’une invasion russe ». Rien n’a d’ailleurs été négligé, depuis quelques mois, pour accréditer la thèse d’une offensive russe imminente : exercice Cold Response en Norvège du 19 février au 22 mars, avec la participation de 15 000 soldats et d’un énorme matériel.

    Manœuvres communes des armées américaine et finlandaise en mars. Enfin, au début de juin, sur les territoires de la Pologne et des trois états baltes, ex-Républiques soviétiques, organisation des manœuvres dites Anaconda, les plus spectaculaires menées par l’Otan depuis 1989 : 30 000 hommes des unités d’élite de 18 pays, 3000 véhicules, 105 avions et 15 navires patrouillant dans les eaux de la Baltique. Tout ce remue-ménage pour être en mesure de déclarer « opérationnelle », à l’ouverture du sommet de Varsovie, la nouvelle force Fer de Lance à haute réactivité, tournée exclusivement vers l’Est, dont la création avait été annoncée en 2014, au plus fort de la crise ukrainienne.

    Barak Obama avait donné le ton, dès sa rencontre du 25 avril dernier à Hanovre avec les principaux dirigeants européens, en appelant Angela Merkel – traitée tout au long de l’entrevue avec la considération due au chef naturel de l’Europe – à déployer une partie de l’armée allemande en Pologne et dans les pays Baltes ! Il se murmure d’ailleurs que François Hollande a été profondément humilié lors de ces entretiens par l’attitude condescendante affichée à son endroit par le chef de la Maison-Blanche dont il s’est pourtant employé à satisfaire toutes les exigences depuis son accession à l’Elysée.

    Dans une quasi-clandestinité, n’est-il pas allé jusqu’à faire adopter par le Conseil des ministres du 4 janvier 2016, puis par les quelques députés présents dans l’hémicycle du Palais-Bourbon, le 7 avril suivant, un projet de loi permettant la ré-adhésion de la France au protocole de 1952 fixant « le cadre juridique du stationnement des quartiers généraux de l’OTAN et de leurs personnels » ? En fait, ce texte rend à nouveau possible à l’avenir la réinstallation de bases américaines sur le territoire français.

    Dangereuse stratégie

    Cette soumission des Européens à la stratégie de la tension avec la Russie voulue par Washington sera illustrée de manière encore plus éclatante, lors du sommet de Varsovie, par l’annonce du passage sous responsabilité de l’OTAN du « bouclier antimissile » dont les Américains viennent de terminer la construction de la première base à Deveslu, en Roumanie, la seconde devant être achevée en Pologne d’ici à 2018. Le Wall Street Journal a révélé, il y a quelques semaines, combien le transfert des états-Unis à l’OTAN de ce prétendu système antimissile – en lequel Vladimir Poutine voit une menace directe pour la sécurité de son pays – provoquait l’inquiétude de nombreux hauts fonctionnaires français de la Défense qui ont multiplié les avertissements en direction de l’élysée. Pour ces derniers, il ne fait aucun doute que le contrôle effectif de ce « bouclier » de l’OTAN restera exclusivement entre les mains des hommes du Pentagone.

    Les états-Unis œuvrent-ils alors sciemment au déclenchement d’une guerre avec la Russie sur le continent européen que, selon la quasi-totalité des experts, les forces de l’OTAN seraient assurées de perdre en moins de quarante-huit heures ? L’hypothèse apparaît tellement folle que chacun cherche des motifs cachés aux propos bellicistes de Washington : volonté de ressusciter l’ancienne menace soviétique pour restaurer la cohésion d’une Alliance atlantique n’ayant plus vraiment de raisons d’être ?

    Désir de s’assurer le maintien de la servilité des principaux dirigeants européens ? Ou piège tendu au Kremlin pour l’amener à se lancer dans une nouvelle course aux armements au détriment d’une économie russe déjà gravement touchée par les sanctions occidentales et par la chute des prix du pétrole ? En attendant, force est de constater les ravages provoqués par une politique américaine aveugle et sourde aux réalités du monde : tandis qu’un climat de guerre froide se répand à nouveau en Europe, Moscou et Pékin se rapprochent de plus en plus étroitement dans une alliance de fait contre Washington. On a connu des diplomaties plus habiles… 

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  • (II/II) : Transition énergétique, ou simple opération politique, et … gaz de schistes, par Champsaur

    II) Le cas étrange et aberrant de la France …ou comment la politique ne ferait pas bon ménage avec la science.

     

    pechelbron.jpgLe risque environnemental ne vient pas du gaz lui-même: une fois extrait, ce dernier a les mêmes caractéristiques que le gaz consommé habituellement. C'est son exploitation qui inquiète, en particulier la fracturation hydraulique. Or nous forons en France depuis la découverte du champ de Péchelbronn, en Alsace, en 1879 (ci-contre, ndlr).

    En France, l’aventure a commencé en mars 2010, lorsque Jean-Louis Borloo, alors ministre de l’Écologie, signait l’autorisation de prospection des gaz de schiste sur le territoire. « C’est la première fois, en France, que des demandes de permis mentionnaient les gaz de schiste, raconte Michel Séranne. Cette information a mis 9 mois avant de d’être connue des médias les plus informés. Puis, très vite, cela a abouti à la véritable controverse que nous connaissons ».

    En février 2011, soit un peu moins d’un an après les premières autorisations, la ministre de l’Écologie, Nathalie Kosciusko-Morizet et le ministre de l’Industrie, Éric Besson, ont chargé le vice-président du Conseil général de l’industrie, de l’énergie et des technologies et le vice-président du Conseil général de l’environnement et du développement durable, de diligenter une mission portant sur les hydrocarbures de roche-mère. Cette mission a donné lieu, en avril dernier, à la publication d’un rapport provisoire intitulé « Les hydrocarbures de roche-mère en France ». La recommandation principale qui est sortie de ce rapport étant de parfaire les connaissances scientifiques, en n’autorisant que les puits expérimentaux aux industriels.

    En juin 2011, deux mois après la publication de ce rapport et six mois après les premières manifestations anti gaz de schiste, la France décide d’interdire l’utilisation de la fracturation hydraulique (gouvernement Fillon !). Les industriels avaient jusqu’à septembre 2011 pour proposer des alternatives à cette technique. Mais aucune méthode n’a été mise au point qui satisfasse les industriels. La technique de fracturation au CO2 ou celle dite de l’arc électrique ne sont pas assez rentables.

    GERARD MESTRALLET.jpgAu début du mois d’octobre 2011, les trois permis de recherche de gaz de schiste qui avaient été octroyés, ont été abrogés par le gouvernement. Le premier, appelé  « Montélimar »  (Drôme, Ardèche, Gard, Hérault), délivré à Total et les deux autres, attribués à l’américain Schuepbach (en association avec GDF Suez), « Nant » (Aveyron, Hérault) et Villeneuve-de-Berg »  (Ardèche). Faisant dire non sans amertume, à Gérard Mestrallet (ci-contre), PDG de GDF Suez, que « la France a tourné la page des gaz de schiste avant de l’ouvrir ».

    À peu près aux mêmes époques, en juillet 2011, l'Académie des technologies avait fait connaître sa position: ne pas faire de recherche, ne pas évaluer les éventuelles réserves contenues dans notre sous-sol, ne pas développer de technologies d'exploitation durable serait inconséquent et imprudent. En juin 2010, une délégation de l'Académie des technologies a rencontré à Washington les principaux acteurs de l'énergie aux États-Unis. Le message a été très clair et très homogène. La priorité des États-Unis est l'indépendance énergétique, à égalité avec l'amélioration de l'emploi. Cette politique repose sur deux piliers: le pétrole offshore profond sur les côtes américaines et le shale gas (ou gaz de schiste) que nous découvrions et qui représentait déjà 22% de la consommation américaine.

    Alors que les industriels français se sont retrouvés bloqués.

    Un exercice où la gouvernance de notre pays est passée maître, repousser les décisions, comme s’il s’agissait de gagner du temps, là où au contraire, il n’y a pas à en perdre. Les propos les moins agressifs, mais néanmoins d’une misérable dialectique, furent ceux de François Hollande, avec la pirouette désormais classique du renversement de la charge de la preuve : «Actuellement, personne ne peut affirmer que l’exploitation des gaz et huile de schiste est exempte de risque pour l’environnement et pour la santé ; ce n’est pas parce que l’on n’a pas démontré la dangerosité de l’exploitation qu’elle est totalement sans risque». On peut facilement dérouler le même raisonnement de simplet pour toute activité industrielle, où se mêle le jargon à la mode du risque zéro, et du principe de précaution. Et au-delà vient toute la gamme du vocabulaire de combat du dictionnaire d’inspiration trotskyste, un amphigouri de néologismes créés pour la circonstance comme négationisme, climatosceptique. Dans un réflexe pavlovien cette communauté ne s’interdit pas le terrorisme intellectuel, en témoignent les commentaires après la vincent courtillot.jpgconférence débat organisée par Vincent Courtillot à l’Académie des Sciences le 26 Février 2013 dernier, avec cinq de ses collègues, britanniques et américains. S’en est suivie une débauche de hurlements sur internet, qui ne visaient qu’à lui interdire de parler. Mais le summum fut atteint avec la ministre de ce gouvernement, une certaine Delphine Batho, qui sanctionna la réunion par un : « Donner ainsi crédit aux thèses d’un climatosceptique notoire qui juge stupide les travaux du Giec, c’est triste pour l’Académie des Sciences ». Précisons que cette apparatchik a pour tout bagage universitaire un vague baccalauréat de lettres, et qu’elle s’est surtout illustrée pour avoir généré des troubles comme syndicaliste étudiante partout où elle est passée. Il est vrai aussi que Courtillot, comme de nombreux autres vrais scientifiques, ne lie pas le changement de climat, variation éternelle à la surface du globe depuis les 4,5 milliards d’années d’existence de notre Terre, à l’activité industrielle de l’Homme, réellement mesurable depuis moins de 150 ans ! On pensait que nos Académies étaient des lieux de réflexions, de liberté intellectuelle sous la protection de l’État. Mme Batho vient d’inventer une autre règle.

    C’est dans cette ambiance qu’avec un certain culot, le gouvernement a ouvert une concertation sur la transition énergétique, dont la composition de la commission ne laisse aucun doute sur la marque strictement politique de la manoeuvre. Dans une démarche totalement irrationnelle, puisqu’il s’agit d’interdire même les sondages par forage, donc d’évaluer nos réserves, ils ont écrit d’avance la conclusion, habillée par un faux débat. Il est inadmissible qu’avec la technicité dont nous disposons, notre expérience en la matière, une poignée d’agitateurs professionnels décident de la politique industrielle et énergétique. Et notre Institut Français de Pétrole (IFP) condamné à travailler en cachette …

    HENRI PREVOT.jpgDans un article du Figaro du 22 Février 2013 un ancien membre du Conseil général des mines, Henri Prévot, ingénieur du corps des mines, connu, considère que le débat sur l’énergie est biaisé. Ce qui est baptisé transition énergétique va se résumer à « comment gaspiller 20 à 30 milliards par an », dans un simili débat canalisé, corseté, contrôlé, cadenassé, comme savent le faire les esprits totalitaires et obscurantistes aujourd’hui aux commandes de notre pays. Il s’agit essentiellement de sortir du nucléaire, donc en détruisant des emplois par centaine de milliers tout en aggravant la précarité énergétique. Dans une circulaire aux préfets Mme Batho écrit la conclusion avant tout débat : «… Le président de la République a fixé le cap d’évolution de la part du nucléaire dans la production d’électricité dans notre pays de 75 à 50 % en 2025. Dans ce cadre la centrale de Fessenheim sera fermée à la fin de l’année 2016 … »

    Il est alors utile de comparer avec l’approche radicalement différente des États-Unis. Pour son second mandat Barak Hussein Obama a lourdement insisté sur la responsabilité que se fixait sa grande île vis-à-vis de l’environnement, et de la protection de la planète. Mais le fossé s’ouvre sous nos pas quand on compare les deux projets : d’un côté son équipe chargée de l’environnement récemment désignée, et de l’autre la camarilla qui a pris d’assaut la rue de Solférino, pour des dosages électoraux ayant abouti à une place démesurée dans la représentation nationale (18 députés) malgré leurs très modestes 850.000 électeurs sur 44 millions d’inscrits.

    La nouvelle équipe environnementale de Washington pourrait s’appeler « Comment faire de l’écologie intelligemment, et en restant pragmatique ».

    Après avoir nommé Sally Jewell, une chef d'entreprise connue pour ses engagements écologistes, au département de l'Intérieur (qui supervise l'exploitation des hydrocarbures sur les terres de l'Etat fédéral), c’est Gina McCarthy qui prend la tête de l'EPA, l'Agence pour la protection de l'environnement, qui a en charge, notamment, la supervision des activités de fracturation hydraulique. Cette Bostonienne de cinquante-huit ans travaille déjà à l'Agence, où elle s'occupe de la pollution de l'air. Elle a collaboré dans le passé avec Mitt Romney, comme chef de l'agence environnementale du Massachusetts. Elle passe pour avoir une approche équilibrée. Selon le sénateur républicain Richard Blumenthal, « elle reconnaît qu'il y a un équilibre à trouver entre la protection de l'environnement et la croissance économique, mais elle est convaincue que les deux se soutiennent mutuellement ». Les lobbys des grands groupes énergétiques lui reconnaissent une grande capacité d'écoute.

    Au département de l'Énergie, un scientifique, Ernest Moniz, qui dirige actuellement au MIT de Boston un projet baptisé « Energy Initiative ». Soutenu par BP, Royal Dutch Shell et Chevron, entre autres, le projet vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Dans le même temps nos plateaux de télévision sont colonisés en France par une avocate incompétente dans ces domaines, une certaine Corinne Lepage, ou l’équipe des écolos du parlement européen, élus à cette sinécure à la faveur d’un montage. Une meneuse, Michèle Rivasi, vient de rappeler la ligne : « Là où le nucléaire passe, la démocratie trépasse ». Quels rapports avec les process industriels et la science ? Et tant pis pour le charabia !

     

    III) Des raisons d’espérer  

    DAVID MAC KAY.JPGL’ouvrage du  professeur de physique britannique (Cambridge) David McKay, vient d’être traduit en français, et pourrait s’appeler « Comment réduire les émissions d’âneries ». Sur la planète encombrée des ouvrages sur les questions énergétiques son pavé de 500 pages, L'énergie durable, pas que du vent !, est original par sa construction, par la richesse de ses innombrables infographies, par son ton, direct et souvent humoristique. Il peut se savourer soit au fil des pages, soit en sautant les chapitres techniques.

    En bon scientifique, l'auteur se fixe comme objectif «d'être franc au sujet des chiffres». Pour expliquer comment résoudre l'équation de la transition énergétique, c'est-à-dire produire de l'énergie durable et décarbonée à un coût abordable, David MacKay insiste sur les grandeurs et les échelles, de la consommation comme de la production de chaque source d'énergie. Un exemple: «Pour que l'éolien fournisse 100 % de la consommation électrique du Royaume-Uni, il faudrait recouvrir 7 % de la surface du pays de moulins à vent», explique-t-il.

    S’agissant de notre pays, le papier d’un économiste pourrait être titré « À toute chose malheur est bon ». Il nous dit dans les Echos (4 Février 2013), non sans cynisme « Les gaz de schiste peuvent attendre ». Revenant sur l’extrême volatilité des prix du marché, il suggère de profiter de la chute et de nous fournir aux Etats Unis avec le bénéfice de conserver nos réserves. Et nous ajoutons en attendant que nos politiciens reviennent à la raison. Raisonnement faussement séduisant, car beaucoup de voix s’élèvent aux États Unis pour faire cesser l’exportation, dans le même but de conserver la précieuse réserve du sous-sol. Rien ne dit que nous pourrons aisément acheter notre gaz outre atlantique.

    Sans oublier que le nerf de la guerre, identifié depuis longtemps est le dépôt de brevets. Nous sommes là aussi hors jeu. Quand l’heure sera venue de renvoyer à leur bac à sable les Jouzel, Rebelle, Placé, Hulot et autre Eva Joly, que nous serons le dos au mur, et obligés d’ouvrir les yeux, les brevets ne seront pas chez nous. En économie les stocks de brevets s’appellent le capital immatériel. C’est l’essentiel du capital de maisons comme Apple ou Samsung.

    Une très longue histoire qui ne fait que débuter, mais où la France ne s’est pas donné les outils pour l’instant … (fin).

  • Les Grecs indépendants, une extrême droite ?

    Photo : Panos Kemmenos, leader des Grecs indépendants. 

    Par Yves Morel

    L’accès au pouvoir d’Alexis Tsipras en Grèce n’a été possible qu’avec l’appoint des 13 députés des Grecs indépendants qui a permis à Syriza, la formation du nouveau Premier ministre, d’obtenir la majorité à la Boulè (fixée à 151 sièges, quand elle en disposait de 149). Un ralliement qui, quoique jugé prévisible par quelques politiques et observateurs, a surpris tout le monde. Les deux formations sont, en effet, aux antipodes l’une de l’autre. Coalition de la gauche radicale incluant des alternatifs de sensibilité écologiste, des socialistes anticapitalistes marxisants, proche à la fois, sur l’échiquier politique français, d’Attac, du NPA, du Front de Gauche, des Alternatifs et de l’aile gauche des Verts, Syriza n’a rien en commun avec les Grecs indépendants, nationalistes, conservateurs, favorables à l’entreprise privée, et très liés à l’armée et à l’Église orthodoxe.

    Les deux partis se sont pourtant retrouvés sur leur plus petit dénominateur commun : leur hostilité à l’euro, le refus de la politique d’austérité imposée par Bruxelles et la renégociation du remboursement de la dette grecque. Et la capitulation de Tsipras à Bruxelles ne semble pas avoir entamé cette alliance limitée à ce seul point.

    Un parti souverainiste dirigé par un grec francophile

    Où situer les Grecs indépendants (Anexátítí Éllines, soit ANEL)? Leurs positions souverainistes les apparentent, à l’esprit de beaucoup, à Debout le France de Nicolas Dupont-Aignan. Et, de fait, les deux mouvements sont nés d’une rupture d’avec leur formation d’origine, qui se trouvait être le grand parti conservateur de leur pays : Debout la France (DLF) fut d’abord, et jusqu’en 2008, un courant de l’UMP, et Dupont-Aignan, un élu de cette formation avant de la quitter ; les Grecs indépendants, quant à eux, fondés en février 2012, sont une dissidence de Nouvelle Démocratie, dont Kammenos fut député. De plus, ce dernier affiche ouvertement ses affinités souverainistes avec Dupont-Aignan, lequel ne lui ménage pas son soutien public ; les deux hommes se sont rencontrés, s’apprécient, et Kammenos a pris publiquement la parole lors d’un meeting de DLF.

    Leurs relations sont d’autant plus aisées que Kammenos parle couramment le français et connaît très bien notre pays, sa sensibilité et sa culture ; après avoir été élève d’un lycée français de Grèce, il a effectué ses études supérieures de sciences économiques, de gestion des entreprises et de psychologie à l’université Lyon II, puis à Lausanne, en Suisse romande. Les deux partis et leurs leaders respectifs combattent l’euro, la politique européenne commune pilotée par la Commission européenne, la tyrannie des critères de convergence et la limitation draconienne des déficits budgétaires, le culte monétariste de la devise forte, la mondialisation et le libéralisme sans frontières, la disparition des souverainetés nationales au profit du marché mondialisé, de la technocratie de bruxelloise et de la loi des bourses et des grandes banques.

    Proche de DLF ou du MPF ?

    Cependant la ressemblance s’arrête là. Car quant au reste, les différences et les oppositions apparaissent en nombre. En effet, Dupont-Aignan et DLF sont des républicains laïcs, relativement progressistes, dont le gaullisme orthodoxe se nuance assez fortement de mendésisme, les rapprochant en cela du Pôle républicain et de la gauche chevènementiste. A l’opposé, Kamennos et les Grecs indépendants s’ancrent résolument à droite, défendent la religion et la morale chrétiennes, entretiennent les meilleurs rapports avec l’Eglise orthodoxe, réprouvent les mesures laïques votées ces dernières années en Grèce (mariage civil, partenariat civil pour les couples homosexuels, laïcisation de l’enseignement) et combattent résolument le multiculturalisme et l’immigration. En fait, ils s’apparentent beaucoup plus au Mouvement pour la France (MPF) de Philippe de Villiers qu’au DLF de Dupont-Aignan ; leurs vues coïncident en tous point avec ceux du Vendéen, la seule petite différence résidant en la différence confessionnelle, l’ANEL se réclamant de la religion orthodoxe quand le MPF fait fond sur le catholicisme ; ceci dit, tous deux promeuvent l’idéal d’une civilisation chrétienne. Mais ce n’est pas seulement sur les questions d’éthique et de société que se situent les affinités entre l’ANEL et le MPF : les deux formations se ressemblent également par leur nationalisme économique.

    Toutes deux sont hostiles au grand marché européen sans frontières découlant de l’Acte unique européen et de l’institution de l’euro, des critères de convergences et contraintes budgétaires en découlant, de la Banque Centrale Européenne, se prononcent en faveur du protectionnisme patriotique et revendiquent le droit, pour leurs nations respectives, de mener une politique commerciale extérieure conforme à leurs intérêts propres et à leur parcours et traditions historiques. Ce patriotisme économique était ouvertement revendiqué en France par Philippe de Villiers et Jimmy Goldsmith en 1894-1897, et il l’est aujourd’hui en Grèce par l’ANEL. Kamennos préconise la conclusion d’alliances économiques fécondes de la Grèce avec la Russie et la Chine et considère avec un optimisme allègre la position géographique de son pays qui, selon lui, peut devenir la plaque tournante des exportations chinoises vers l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique septentrionale. C’est avec enthousiasme qu’il annonce « la résurrection de la route de la soie à la fois sur terre et sur mer ». Et, ministre délégué à la Marine marchande, dans le second gouvernement de Kostas Karamanlis (2007-2009), il a décidé la conclusion d’un accord avec le groupe chinois COSMO attribuant à ce dernier une concession de trente ans dans la station de conteneurs du port du Pirée (30 novembre 2008).

    Un parti d’extrême droite ?

    L’ANEL, parti des Grecs indépendants, est donc, assurément, un parti de droite, nationaliste, chrétien, hostile à l’Europe communautaire. Il est le jumeau intellectuel et moral du MPF français bien plus que l’équivalent approximatif du DLF de Dupont-Aignan, nonobstant les relations amicales entre les deux partis. Doit-on l’assimiler à l’extrême-droite, à l’instar de Daniel Cohn-Bendit, qui voit en Kamennos « un homophobe, un antisémite et un raciste » et considère l’alliance de Syriza avec l’ANEL comme un « scandale » ?

    Il conviendrait d’abord de clarifier cette notion d’ « extrême droite », tout comme d’ailleurs celle d’ « extrême gauche ». Quel(s) critère(s) permet(tent) de qualifier un parti d’ «extrême » ou d’«extrémiste » ? De l’avis général des politologues et des historiens contemporainistes, un parti peut être qualifié ainsi lorsqu’il préconise – idéologiquement, éthiquement et institutionnellement – une rupture radicale avec le régime dont il combat le gouvernement, et l’édification d’un nouveau système politique et social fondé sur des valeurs et une vision de l’homme et du monde en opposition avec lui. Tel n’est pas le cas de l’ANEL qui ne préconise pas un changement de régime et critique les orientations des grands partis habituellement au pouvoir en Grèce sans contester pour autant la démocratie libérale et parlementaire instaurée par la constitution de 1974. Les Grecs indépendants réclament certes un contrôle sévère de l’immigration, l’exclusion des clandestins, défendent une morale chrétienne rigoureuse, plaident la cause de l’exemption d’impôts de l’Eglise orthodoxe, se prononcent contre la banalisation de l’homosexualité et le mariage gay et lesbien, critiquent la « culture » du rap, du tag, du reggae et des tam-tams, défendent la tradition culturelle hellénique, mais tout cela reste parfaitement compatible avec la démocratie libérale.

    Et le fait que M. Kamennos soit décoré de l’Eglise orthodoxe tchèque et du Grand Patriarcat de Jérusalem ne fait pas de lui un champion de la théocratie. Quant à l’accusation d’antisémitisme, lancée à propos de la critique de l’exemption d’impôts des juifs, musulmans et bouddhistes (et, à ce sujet, pourquoi ne pas parler également de racisme anti-arabe ou anti-asiatique ?), elle est bancale : dénoncer le privilège indu d’une communauté (en l’occurrence de trois communautés différentes) au nom de la simple égalité devant la loi ne relève pas du racisme. Du reste, l’ANEL ne conclut guère d’alliances qu’avec des partis reconnus comme démocratiques. Aucun des partis du groupe parlementaire européen auquel elle appartient ne peut être sérieusement et de bonne foi taxé d’opposition à la démocratie et aux libertés publiques. Et nous avons vu quels liens cordiaux l’unissaient au DLF de Dupont-Aignan, indubitablement républicain et laïc. En fait, le seul parti d’extrême droite et antidémocratique de la Grèce actuelle est l’Aube dorée. Rappelons, pour clore ce point, qu’en France, l’ultra gauche elle-même n’a pas critiqué le choix de Syriza de s’allier à l’ANEL, qu’il s’agisse d’EELV (de par son porte-parole Julien Bayou, à Athènes au début de cette année et ardent soutien de Syriza), ou du parti communiste (de par les propos récents de Pierre Laurent), qui ont estimé qu’un tel accord pouvait offrir pour la Grèce des perspectives intéressantes.

    La même relativisation de cette notion d’extrémisme vaut pour Syriza. Cette formation, née de l’alliance de divers partis et associations allant de la gauche marxiste aux représentants d’un idéal humaniste et social-démocrate modéré en passant par les altermondialistes et les écologistes, a été située à l’extrême gauche, alors que rien, dans son programme – au demeurant critiquable sur bien des points – n’indique l’ambition d’édifier une société collectiviste ou anarchiste et une volonté de rupture d’avec la « démocratie bourgeoise » libérale et parlementaire, le capitalisme, la libre entreprise. Le simple fait pour un parti de refuser la mondialisation néolibérale, la financiarisation de l’économie, la soumission aux lois du marché et aux fluctuations boursières, et la tyrannie de la Commission européenne, de la BCE et des « critères de convergence », ne suffit pas à le classer à l’ « extrême gauche » ; de même que l’adhésion à l’idée d’instituer la taxe Tobin sur les transactions financières (critiquable, elle aussi), n’est pas le fait des seuls gens de d’extrême gauche ou simplement de gauche (des centristes comme François Bayrou et des hommes de droite comme Jacques Chirac et Paul-Marie Coûteaux s’y sont ralliés).

    Ni Syriza ni ANEL ne sont des partis extrémistes, ni Alexis Tsipras ni Panos Kamennos ne sont des extrémistes désireux d’instaurer, le premier une république populaire teintée d’écologisme et de libertarisme sociétal, le second une théocratie nationaliste. Ces deux mouvements et leurs meneurs respectifs ne sont que les expressions différentes, certes opposées mais complémentaires, du refus d’une Europe supranationale destructrice des peuples.

    En réalité, l’ANEL et son alliance au pouvoir avec SYRIZA montrent surtout l’inanité de la traditionnelle classification des formations politiques en éventail allant de l’extrême gauche à l’extrême droite, et révèlent que la défense de la civilisation, de la tradition et de la nation excèdent les trop habituels et spécieux clivages politiques et sont parfaitement compatibles avec la défense des intérêts économiques et sociaux du peuple.   

    Docteur ès-lettres, écrivain, spécialiste de l'histoire de l'enseignement en France, collaborateur de la Nouvelle Revue universelle