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  • Dans le monde et dans notre Pays légal en folie : revue de presse de lafautearousseau...

    Moment d'anthologie sur BFM/TV...

    Toujours et partout l'odieuse "ré-éducation" est dans les gènes des révolutionnaires, qu'ils soient Français, chinois ou d'ailleurs...

    L'Ambassadeur de Chine a été à deux doigts de le dire "carrément", il s'est malheureusement (diplomatie oblige !) arrêté juste avant : oui, la Révolution en France (et pas "la Révolution française") a pratiqué la "ré-éducation" avec les Colonnes infernales et le Génocide, en Vendée, et la Terreur partout ailleurs. Le Parti communiste chinois (comme l'URSS, héritier des révolutionnaires français) fait pareil : pourquoi s'étonner, s'en étonner ?

    Et la République idéologique, le Système, qui se basent sur cette Révolution, pratiquent, avec leur ministère de la des-Éducation nationale, une ré-éducation permanente du Peuple français, un bourrage de crâne quotidien ininterrompu, maintenant que, depuis 45, il n'y a plus l'Action française, et maintenant que le Système a le monopole des médias du "Sévice public" (le mot est de Goldnadel).

    Alors, oui, ce que fait la Chine communiste est horrible : elle martyrise les catholiques, elle martyrise les Ouïgours, elle martyrise et "efface" peu à peu le Tibet, elle martyrise Hong-Kong, qu'elle a rudement "mis au pas" et, demain, elle s'apprête à "mettre au pas" Taïwan, en martyrisant ceux qui résisteront.

    Qu'a fait d'autre la Révolution en France, la République idéologique, le Système ? Sinon s'imposer par l'émeute, la violence, la Terreur. Puis, une fois installée, remplacer cette Terreur violente par une Terreur douce, un conformatage des esprits par la double propagande de "son" école et de ses médias aux ordres, depuis 45 ?

    Comme le disait si justement Thibon : "le chaos figé des conservateurs du désordre" a remplacé "le chaos explosif des révolutionnaires", mais Macron, c'est toujours Robespierre, en cravate/costard (sauf avec ses très jeunes "admirateurs" antillais !...) et le Système aujourd'hui saccage toujours les fondements de la France, comme sous la Terreur...

    PC Chinois/Révolution en france :

    même combat !

    (extrait vidéo 2'14)

    https://twitter.com/GRoquebert/status/1555092335503056897?s=20&t=Nj85mVJSMVkKd8kb-SiMLQ

     

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    1. Dans Boulevard Voltaire : "Limoges : une ville française..." encore un exemple des conséquences inéluctables de la folle politique d'immigration/invasion imaginée, planifiée, puis imposée par "le Système contre la France"...

    https://www.bvoltaire.fr/limoges-une-ville-francaise/

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    • NOTRE COMBAT : LE SYSTÈME CHANGE LE PEUPLE, CHANGEONS DE SYSTÈME ! (1/2)

    • NOTRE COMBAT : LE SYSTÈME CHANGE LE PEUPLE, CHANGEONS DE SYSTÈME ! (2/2)

     

    2. Et, toujours dans Boulevard Voltaire : Notre-Dame de Paris : une réouverture repoussée à 2025 ? :

    https://www.bvoltaire.fr/notre-dame-de-paris-une-reouverture-repoussee-a-2025/

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    3. Pour la République des copains et des coquins, la soupe est bonne, et il faut en faire profiter les copins et les copines... Alors que Macron a dit qu'il suffisait de traverser la rue pour trouver un boulot, Emmanuelle Wargon a choisi d'aller pantoufler dans une commission bidon, payée par nos impôts, en partie stérilisés et gaspillés dans cette sur-administration de folie qui caractérise le Système. Elle ne pourrait pas trouver un vrai boulot ? Pour info, son poste bidon est à la "Commission pour la Régulation de l'Énergie" : importantissime, vital même, pour le Pays, non ?

    SYSTÈME POURRI !

    https://www.lefigaro.fr/conjoncture/emmanuelle-wargon-rebondit-a-la-commission-de-regulation-de-l-energie-20220803

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    4. Aymeric Caron veut faire interdire la corrida. Pourquoi pas ? Mais, puisqu'il parle de "barbarie indigne", pourquoi, dans un souci de logique et de cohérence, n'ajoute-t-il pas "l'abattage rituel" - qu'il soit halal ou casher - à sa demande d'interdiction ? 

    "La semaine prochaine je déposerai une proposition de loi à l‘Assemblée nationale, soutenue par la FI et j’espère par les autres partis de la NUPEs, pour interdire la corrida en France. Il faut que cesse cette barbarie indigne de notre époque et de nous-mêmes."

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    5. Si c'est Darmanin lui-même qui le dit !...

    Gérald Darmanin : "Aujourd’hui, les étrangers représentent 7 % de la population française et commettent 19 % des actes de délinquance. À Lyon et à Paris, 39 % et 48 % des actes de délinquance sont le fait d’étrangers." 

    Question de la Rédaction : puisque tu le sais, tu fais quoi depuis cinq ans ?

    On dit ça, on dit rien...

    EXPULSION GENERALE ET MASSIVE DES DÉLINQUANTS ÉTRANGERS !

    FERMETURE DES FRONTIÈRES PAR ARRÊT DE LA DÉLIVRANCE DE VISAS À TOUT VA, ET SURTOUT À N'IMPORTE QUI !

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    6. Trouvé sur tweeter; pas mal...

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    7. Et l'on terminera cette série d'aujourd'hui par une bonne nouvelle, venue du Puy du Fou, qui annonce la sortie de son premier film en décembre. Son héros sera le grand Charette, campé par le talentueux Hugo Becker. 

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    La fière devise du Chevalier de Charette est reprise par lafautearousseau :

    "Combattu, souvent; battu, parfois; abattu, jamais !"

    Dans notre Album Drapeaux des Régiments du Royaume de France (472 photos), voir la photo Charette, Officier de marine

     

     

     

    À DEMAIN !

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  • Que se passera-t-il après le krach économique, financier, mondial à venir ?

     

    Par Marc Rousset   

     

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    Le krach, tout le monde y pense sans en parler de peur de déclencher les foudres divines.

    Tel le furet du bois joli, certains le voient poindre à la moindre alerte sur la devise turque, sur les fausses déclarations officielles rassurantes au sujet de la Grèce, à la moindre hausse des taux d’intérêt et du « spread » italien par rapport au taux allemand. Ce n’est pas pour rien, non plus, que les autorités chinoises obligent le groupe HNA à se délester de 50 milliards de dollars d’achats d’actifs à l’étranger ces dernières années (Pierre et Vacances, Hilton, Radisson…) tout comme les groupes Fosun (Club Med), Wanda (immobilier, parcs d’attractions) et Anhang (assurances).

    Le krach d’un système mondial surendetté repoussant sans cesse les faillites à venir en empruntant davantage, en maintenant artificiellement les taux d’intérêt à la baisse (pressions actuelles de Trump sur la Fed) et en pratiquant une politique monétaire laxiste (USA, BCE, Japon, Grande-Bretagne), aura bien lieu, mais où et quand dans un premier temps ? Personne ne le sait… Il est, par contre, possible d’imaginer ce qui se passera après le krach.

    Nous vivons actuellement les derniers moments du système du dollar roi qui s’est installé sournoisement, diamétralement opposé au système sécurisant et conservateur de l’étalon-or qui a duré jusqu’en 1914, malheureusement enterré suite aux nécessités de financer les dépenses exponentielles de la Première Guerre mondiale alors en cours.

    De 1914 à 1944, l’or s’est moins déplacé physiquement, mais il gardait malgré tout son rôle salvateur d’étalon puisque, par exemple, la Réserve fédérale américaine était tenue de garder dans ses coffres une quantité d’or correspondant au minimum à 40 % de la monnaie en circulation.

    En 1945, à Bretton Woods, les États-Unis ont imposé le dollar pour remplacer partiellement l’étalon-or en partant du principe que le monde entier avait soif de dollars et en décidant d’abaisser à 25 % au lieu de 40 % la couverture or physique détenue à Fort Knox. En 1965 et 1968, l’Amérique a décidé de se libérer de la contrainte minimum or des 25 %. Et, en 1971 – ce qui a été le pot aux roses et le début du dérèglement du système financier international, dont nous voyons aujourd’hui les catastrophiques conséquences -, Nixon décida tout simplement, unilatéralement, du fait du prince, que le dollar ne serait plus convertible en or, ce qui revenait à remplacer totalement l’étalon-or par l’étalon-dollar dans le monde.

    Est apparu alors un système où les capitaux du monde entier étaient appelés à circuler librement avec des taux de change flottant au jour le jour entre les monnaies, la devise de référence principale étant le dollar, mais sans aucun arrimage à un étalon universel et physique.

    sans-titre.jpgTant que le krach et la catastrophe à venir n’ont pas encore eu lieu, personne ne se hasarde à demander, bien évidemment, le rétablissement immédiat de l’étalon-or, conscient que cela briserait tout net, immédiatement, la croissance comme une subite douche glacée après un bain laxiste brûlant, avec une terrible récession à la clé.

    En revanche, après le krach, une fois les agents économiques ruinés, il faudra tout reconstruire de zéro. Il est alors très probable que nous vivrons dans un monde sans libre-échange mondialiste, avec des zones autarciques protectionnistes autocentrées et un commerce international réduit au strict échange des produits indispensables à l’importation car non présents ou impossibles à produire dans une zone autarcique (USA, Chine, Russie, Europe de l’Ouest, Japon).

    Apparaîtront, alors, quelques grandes devises internationales correspondant à chaque zone autarcique convertibles en or (euro, yuan, dollar, yen). Ce jour-là, les partisans de l’or, les « cocus » du système actuel ne profitant pas des bulles boursières et immobilières, tiendront leur revanche avec la montée à la verticale du prix de l’or, ce qui fut le cas de l’Allemagne en 1923, mais ce sera une bien maigre et triste consolation au milieu des ruines épouvantables d’un système économique explosé, de la misère sociale, du malheur humain, avec de gigantesques et imprévisibles conséquences politiques et géopolitiques à la clé.    

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    Économiste

    Ancien haut dirigeant d'entreprise

  • Dans le monde et dans notre Pays légal en folie : revue de presse de lafautearousseau...

     

    Chronique tristement banale et ordinaire (et partielle !...) de "la France orange mécanique à cause du Système" et de sa folle politique d'immigration/invasion qu'il impose au Pays depui près de cinq décennies...

    À Nice, dans la nuit de mardi à mercredi, un homme a été poignardé à plusieurs reprises par un Tunisien et un Libyen, devant une école. Au matin les murs étaient maculés de sang…

    C'est La troisième attaque au couteau à Nice en 10 jours !

    https://nicepresse.com/nice-vague-dattaques-au-couteau-une-inquietante-tendance-qui-dure/

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    1. Évidemment d'accord avec Charlotte d'Ornellas : on ne saurait mieux dire ! Le Système, pourri, a généré une (in)Justice pourrie, à son image et à sa ressemblance !... Et puis, la logique le veut : comment l'(in)Justice du Système pourrait-elle sévir contre ces envahisseurs amenés ici, et à nous imposés, par le Système ?...

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    2. Résistance ! Dans L'Incorrect : "Militantisme progressiste à l'Opéra : trop, c'est trop !"... Ce n’est pas encore tout à fait un chœur, mais ce n’est déjà plus un solo : plusieurs artistes lyriques font entendre leur voix pour dénoncer leur ras-le-bol des mises en scène progressistes qui dénaturent les grandes œuvres du répertoire...

    https://lincorrect.org/militantisme-progressiste-a-lopera-trop-cest-trop-lincorrect/

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    3. Élisabeth Lévy, qui a entièrement raison, interpelle et "recadre" la Ministre de la Culture :

    "La ministre de la Culture qui menace C8 et CNews va certainement exiger du service public le respect du pluralisme. Au fait, je croyais que l'Arcom était indépendante !"
     
    (ARCOM = Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, ndlr)

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    En somme, Rima Abdul Malak, ministre de la culture, menace à demi-mot les patrons et présentateurs de C8 et CNews de ne pas reconduire leur autorisation de diffusion, notamment s'ils "ne respectent pas le pluralisme des opinions". Comme le dit Goldnadel (sur tweeter) :
     
    "Lamentable : Le pluralisme est infiniment plus respecté sur cette Tv privée que sur notre audiovisuel public fiscalisé."

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    4. Gare du Nord, ou : quand le Système organise la dangerosité du Pays et nous met tous collectivement en péril; fait de nous tous 66 millions de décapitables en sursis, victimes potentielles permanentes du Terrorisme... De Gabrielle Cluzel, sur CNews :

    "On a mis 66 millions de Français sous clef pendant le #COVID et on arriverait pas à s’attaquer aux dealers ?!"
     
    1A7.jpgLa racaille tue, mais c'est le Système qui l'a voulue et qui l'a installée de force ici, chez nous : le Système tue aussi...

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    5.         RÉINTÉGRATION DES SOIGNANTS !

    RÉINTÉGRATION DES POMPIERS !

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    6. Jean-Cristophe Buisson, reçu par Radio J, explique le blocus du Haut Karabakh par les nazéris... (Directeur adjoint du Figaro Magazine, Jean-Christophe Buisson est l'invité d’Ilana Ferhadian) :

    (extrait vidéo 12'24)

    https://twitter.com/RadioJFrance/status/1615251306012106752?s=20&t=S3gut69kLRtxOWdU3mNWKw

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    SOLIDARITÉ ARMÉNIE

     

    7. Les lecteurs, amis, sympathisants de lafautearousseau présents sur place ou dans les environs y seront !

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    RÉSISTANCE !

    Religion pour religion, nous préférons l'originale : la religion chrétienne bi-millénaire de nos ancêtres plutôt que la Nouvelle Religion Répblicaine, qui fait le malheur de la France depuis ses premiers jours, avec sa boucherie du 10 août 1702 et ses massacres de septembre suivant, son Génocide vendéen de 1794 et la guerre d'extermination (René Viviani, 1906) qu'elle mène au christianisme et qui est sa raison d'être, son essence même...

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    À DEMAIN !

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  • Hervé Juvin : « L'union européenne, une entreprise à décerveler les peuples »

     

    D'après les révélations de Wikileaks, les trois derniers présidents français auraient été mis sur écoute par la NSA. Hervé Juvin voit dans ce scandale le symbole de l'hégémonie américaine et de la naïveté des Européens.

     

    HerveJuvin.jpgVotre livre s'intitule Le mur de l'ouest n'est pas tombé. Comment analysez-vous l'affaire Franceleaks ?                     

    Ne nous faites pas rire ! L'affaire des écoutes américaines des Présidents français, dont il est promis juré qu'elles se sont arrêtées en 2012, en dit plus sur l'état de la France que sur la réalité des écoutes. Partons du principe que tout le monde écoute tout le monde, suggérons avec le sourire que les Français ne sont pas les derniers à le faire, ajoutons que l'explosion de l'espionnage de données par les systèmes américains ne leur assure pas des triomphes stratégiques bien marquants, et regardons-nous !

    Les Français veulent croire que nous vivons dans un monde de bisounours. L'Europe est une entreprise à décerveler les peuples européens, ceux du moins qui croiraient que les mots de puissance, de force, d'intérêt national, ont encore un sens. C'est l'étonnement général qui devrait nous étonner; oui, l'intérêt national américain n'est pas l'intérêt français ! Oui, entre prétendus alliés, tous les coups sont permis, et les entreprises françaises le savent bien ! Oui, les Américains ne manquent pas de complices européens qu'ils savent diviser pour mieux régner ! Oui encore, l'exceptionnalisme américain leur permet d'utiliser tous les moyens pour dominer, pour diriger ou pour vaincre, et la question n'est pas de protester, c'est de combattre !

    Édouard Snowden est en Russie et ces révélations servent objectivement les adversaires des États-Unis. N'est-ce pas tout simplement de la géopolitique ?

    Le premier fait marquant de l'histoire Snowden, c'est que des pays qui se disent attachés à la liberté d'expression et indépendants n'ont pas souhaité l'accueillir, voire se sont alignés sur l'ordre américain visant à le déférer à la justice américaine. Il n'y a pas de quoi être fiers, quand on est Français, et qu'on a été l'un des champions des non-alignés ! Nous sommes rentrés dans le rang ; triste résultat de deux présidences d'intérim, avant de retrouver un Président capable de dire « non ! ».

    Le second fait, c'est que Snowden a révélé un système de pouvoir réellement impérial, qui tend à assurer de fait un empire mondial américain. Nous sommes face au premier nationalisme global. Le point crucial est l'association manifeste d'une surpuissance militaire, d'une surpuissance d'entreprise, et d'un universalisme provincial - une province du monde se prend pour le monde et veut imposer partout son droit, ses normes, ses règles, ses principes, en recrutant partout des complices. Ajoutons que l'affaire des écoutes, celle de la livraison des frégates « Mistral », comme celle des sanctions contre la Russie, éclairent la subordination absolue de ceux que les États-Unis nomment alliés, alors qu'ils les traitent comme des pions ; est-ce la manifestation de la stratégie du «leading from behind» annoncée par Barack Obama dans un célèbre discours à West Point ?

    Le troisième fait est au cœur de mon livre, Le Mur de l'Ouest n'est pas tombé. Les États-Unis attendent la guerre, ils ont besoin de la guerre extérieure qui seule, va les faire sortir de la crise sans fin où l'hyperfinance les a plongés. Seul, un conflit extérieur les fera sortir du conflit intérieur qui monte. D'où la rhétorique de la menace, du terrorisme, de la Nation en danger, qui manipule l'opinion intérieure et qui assure seule l'injustifiable pouvoir de l'hyperfinance sur une Amérique en voie de sous-développement.

    Quel est, selon vous, le jeu américain vis-à-vis de la Russie ?

    La Russie est l'un des pôles de la résistance à l'ordre américain. Et c'est, à ce jour, la seule puissance militaire réellement capable de faire échec à une agression américaine. Cantonner, encercler, affaiblir la Russie, vient donc en tête de l'agenda effectif des États-Unis. Le général Wesley Clark l'a dit sans ambages ; « il faut en finir avec les États-Nations en Europe ! » Voilà pourquoi, entre autres, l'idéologie américaine nous interdit toute mesure pour lutter contre l'invasion démographique qui nous menace, promeut un individualisme destructeur de nos démocraties et de notre République, veut nous contraindre à une ouverture accrue des frontières, notamment par le traité de libre-échange transatlantique, et nous interdit de réagir contre les atteintes à notre souveraineté que représente l'extraterritorialité montante de son droit des affaires.

    Les États-Unis réveillent le fantôme de la guerre froide pour couper le continent eurasiatique en deux. C'est le grand jeu géopolitique des puissances de la mer qui est reparti ; tout, contre l'union continentale eurasiatique ! Bill Clinton a trahi les assurances données à Gorbatchev par George Bush : l'Otan ne s'étendra jamais aux frontières de la Russie. Les États-Unis accroissent leur présence militaire dans l'est de l'Europe, dans ce qui s'apparente à une nouvelle occupation. Que font des tanks américains en Pologne et dans les pays baltes? Le jeu géopolitique est clair ; l'Eurasie unie serait la première puissance mondiale. Les États-Unis, on les comprend, n'en veulent pas. On comprend moins leurs complices européens. Et moins encore ceux qui répètent que la puissance, la force et les armes ne comptent pas !

    Poutine ne cède-t-il pas au défaut (autocratie, volonté expansionniste) que l'Occident lui prête ?

    Critiquer la volonté impériale des États-Unis n'est pas encenser Monsieur Poutine ! Quand je critique la confusion stratégique américaine, je n'écris rien que des élus américains, comme Elizabeth Warren, comme Rand Paul, comme Jeb Bush lui-même, qui vient de déclarer qu'il n'aurait jamais envahi l'Irak, ont déclaré !

    Je constate simplement que les États-Unis ont eu peur du rapprochement entre l'Union européenne et la Russie, qui aurait menacé le privilège exorbitant du dollar, et qu'ils se sont employés à la faire échouer, comme ils s'étaient employés à affaiblir l'euro. Je constate ensuite que le Président Poutine a tourné la page du communisme pour renouer avec la tradition des tsars ; il a un confesseur, il favorise l'orthodoxie et redonne prestige et autorité à la troisième Rome, il discute avec le Pape François, etc. tout ceci dans un contexte où les États-Unis utilisent les droits de l'individu, sans origine, sans sexe, sans race, sans quoi que ce soit qui le distingue, sauf l'argent, pour dissoudre les sociétés constituées et en finir avec la diversité des cultures et des civilisations, qui n'est rien si elle n'est pas collective. Je salue le fait que la Russie soit un pôle de résistance à l'individualisme absolu, comme l'Inde, comme la Chine, comme l'Islam à sa manière, et qu'elle garde le sens de la diplomatie, qui est celui de reconnaître des intérêts contraires, pas d'écraser ses opposants. La France ne l'est plus. On n'est pas obligé d'être d'accord avec eux sur leur manière singulière d'écrire l'histoire de leur civilisation, pour être d'accord sur le fait que leur singularité est légitime, puisqu'ils l'ont choisie, et mérite d'être préservée !

    La chute de la diversité des sociétés humaines est aussi, elle est plus grave encore que la chute de la biodiversité animale et végétale. Car c'est la survie de l'espèce humaine qui est en danger. Il n'y aura plus de civilisation, s'il n'y a pas des civilisations. Et la Russie orthodoxe, comme l'Islam chiite, comme l'hindutva de Narendra Modi, sont des incarnations de cette merveille : la diversité des formes que l'homme donne à son destin.

    Les Russes savent aussi écouter leurs partenaires et leurs adversaires ?

    Un peu d'histoire. L'invention, l'entraînement, le financement d'Al Qaeda, des talibans, a enfoncé une épine dans le pied de l'URSS, dont elle ne s'est pas relevée. Brzezinski l'a dit avec une rare franchise ; « Al Quaeda a produit des dégâts collatéraux (side effeects) sans importance dans la lutte que nous avons gagnée contre l'URSS ». Partout, y compris pour justifier l'intervention armée en Europe et pour défendre l'islamisation de l'Europe, les États-Unis derrière leur allié saoudien, se sont servis de l'Islam. Ils s'en servent en Inde, en Chine, ils s'en sont servis en Tchetchénie. Et ils se préparent à renouveler l'opération au sud de la Russie, en déstabilisant les États d'Asie centrale et l'extrême-est de la Chine.

    Parmi les preuves multiples, regardons la prise de Palmyre par l'État islamique. Admettons qu'un vent de sable ait effectivement empêché toute intervention aérienne pour la prise de Ramadi, quelques jours plus tôt. Mais Palmyre ! Dans une zone désertique, sans grand relief, Palmyre qui ne peut être atteinte que par des pistes ou des routes droites sur des kilomètres, en terrain découvert ; une armée qui dispose de l'exclusivité aérienne, comme celle de la coalition, peut empêcher toute entrée ou sortie d'un seul véhicule de Palmyre ! L'inaction de la coalition est inexplicable. La diplomatie française, sidérée par les néo-cons qui l'ont envahie, ne semble plus savoir lire une carte de géographie. Mais une France devenue pauvre en monde, livrée à la confusion des valeurs et des intérêts, une France qui n'incarne plus la résistance à l'intérêt mondial dominant qu'est l'intérêt national américain, qui sera peut-être demain l'intérêt chinois, est-elle encore la France ?  

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    Hervé Juvin est un écrivain et essayiste français. Il poursuit un travail de réflexion sur la transformation violente de notre condition humaine qui, selon lui, caractérise ce début de XXIè siècle. Il est par ailleurs associé d'Eurogroup Consulting. Il est l'auteur de Pour une écologie des civilisations (Gallimard) et vient de publier aux éditions Pierre-Guillaume de Roux Le Mur de l'ouest n'est pas tombé.

    Figarovox

     

  • HISTOIRE • Jean Sévillia : ces reines qui ont changé l'Histoire

     

    A l'occasion de la sortie de son dernier livre, Les derniers jours des reines, codirigé par Jean Christophe Buisson, Jean Sévillia évoque pour FigaroVox des figures aussi romanesques que Cléopâtre, Marie-Antoinette ou la reine Victoria. On ne manquera pas de lire ce dernier ouvrage de Jean Sévillia.  LFAR

     

    1dd0ad5cb1fc3695880af1725477b22e.jpgFigaroVox - La France est le pays qui a coupé la tête à son roi, et pourtant les Français, comme en témoignent notamment les succès de librairie des biographies royales ou l'audience des émissions de télévision sur la royauté, semblent éprouver un sentiment monarchiste. Comment expliquez-vous ce paradoxe ? Les Français sont-ils schizophrènes  ?

    Jean Sévillia - D'Ernest Renan à Albert Camus, d'innombrables esprits républicains ont médité sur l'événement traumatique qu'a été la condamnation à mort de Louis XVI. Il ne faut jamais oublier que la France a été constituée en tant que communauté politique sous les rois de France, et par eux. Contrairement à une mythologie qui n'a plus guère cours aujourd'hui, la France n'est pas née en 1789: elle a été forgée au long des siècles par la monarchie, la République ayant recueilli ensuite cet héritage. Il est parfaitement exact qu'au moment de la Révolution, la souveraineté politique passe du roi au peuple, du moins à la représentation nationale, car le peuple réel n'a pas eu son mot à dire au long du processus révolutionnaire. Mais cette substitution de souveraineté ne change rien au fait que c'est l'Etat qui conserve son rôle central et surplombant dans la poursuite du destin français. Or cet Etat possède d'indélébiles racines monarchiques. Napoléon Ier, Napoléon III, Thiers, Clemenceau, Pétain, De Gaulle… Notre histoire postérieure à la Révolution est pleine de chefs d'Etat ou de gouvernement, ou de figures d'autorité, qui jouent les substituts du roi de France. De Gaulle le savait et le sentait si bien qu'il a doté le pays, en 1958, d'une Constitution où le primat reconnu à l'exécutif donnait à nos institutions un air de monarchie républicaine. François Mitterrand, à sa manière, a été une sorte de monarque socialiste. Et l'on voit bien actuellement, en creux, l'importance de la fonction présidentielle, précisément parce que celui qui l'incarne ne semble pas taillé pour la fonction. Alors oui, il y a toujours et il y aura toujours quelque chose de monarchique en France, même si les Français ont coupé la tête à leur roi en 1793.

    Dans la préface des Derniers jours des reines, texte que vous avez cosigné avec Jean-Christophe Buisson, vous développez le concept de royauté au féminin. De quoi s'agit-il ?

    Notre ouvrage traite de femmes qui ont régné, mais à toutes les époques et dans des aires de civilisation très différentes: entre Cléopâtre et la tsarine Alexandra Fedorovna, épouse de Nicolas II, il n'y a à peu près rien de commun sous l'angle de la société dans laquelle elles ont vécu et du système politique qui les avait placées sur le trône. Sur les vingt souveraines évoquées dans le livre, toutes n'ont pas gouverné. En France, les lois coutumières de la monarchie, affinées sous les Capétiens, excluaient les femmes de la succession au trône, ce qui n'était pas le cas dans toutes les dynasties européennes, voir Isabelle la Catholique (Isabelle de Castrille), Marie-Thérèse d'Autriche, Catherine II de Russie, ou la reine Victoria. Mais cela ne signifie pas que les reines de France n'ont pas joué un rôle éminent, a fortiori pour celles qui ont exercé la régence. Mais comme épouses du roi et mères des enfants du roi, donc mères du roi un jour, toutes les reines sont profondément associées au pouvoir. La royauté au féminin, c'est la traduction de la spécificité du système monarchique, qui n'est pas un pouvoir personnel, mais le pouvoir d'une famille.

    Quand les reines ont joué un rôle politique, quel était-il ?

    Les reines qui ont à la fois régné et gouverné ont joué exactement le même rôle politique qu'un homme aurait exercé à leur place. Au XVIIIe siècle, Marie-Thérèse d'Autriche ou Catherine II de Russie ont fait la guerre, ont choisi ou défait des ministres, ont adopté des réformes qui ont changé la société sur laquelle elles régnaient, ont affronté des oppositions: l'ordinaire d'un rôle politique à cette époque. Quant aux reines de France, nous avons évidemment retenu dans notre livre des personnages de premier plan. Catherine de Médicis, femme d'Henri II, puis régente pour son deuxième fils Charles IX, joue un rôle essentiel au moment des guerres de Religion en essayant de maintenir le trône au-dessus des divisions religieuses. La recherche historique l'a lavée de l'accusation d'être la responsable de la Saint-Barthélemy. Sous le règne d'Henri III, son dernier fils, Catherine de Médicis s'efface peu à peu. Anne d'Autriche, l'épouse de Louis XIII, est une princesse espagnole: d'abord hostile envers Richelieu en raison de sa politique à l'encontre de l'Espagne, elle change après la mort de Richelieu et celle de Louis XIII car, par amour pour son fils Louis XIV, elle soutient le nouveau Premier ministre, Mazarin, qui poursuit pourtant la politique de Richelieu. Après la mort de Mazarin, Louis XIV, voulant gouverner personnellement, sera conduit à éloigner sa mère, qu'il aimait néanmoins profondément. Pour un temps limité, qui a cependant son poids dans notre histoire, les reines Catherine de Médicis et Anne d'Autriche ont donc été de vrais rois de France….

    Vous évoquez des figures aussi exceptionnelles que Cléopâtre, Isabelle la Catholique ou Marie-Antoinette. Avez-vous une préférence pour l'une d'entre elles ?

    Si je prends votre question dans son sens tout à fait personnel, je dois vous dire que ma «reine de cœur» ne figure pas dans le livre. J'ai publié il y a dix-huit ans une biographie de l'impératrice Zita, la dernière impératrice d'Autriche, livre que les éditions Perrin réimpriment constamment et dont sortira une réédition actualisée en 2016. Ayant régné pendant deux ans, de 1916 à 1918, détrônée en 1918, exilée en 1919, veuve à 30 ans à la mort de son mari, l'empereur Charles Ier d'Autriche, en 1922, spoliée de son patrimoine familial par les Etats successeurs de l'Autriche-Hongrie, l'impératrice Zita a élevé seule ses huit enfants, vivant dans la pauvreté et la foi. Ses obsèques solennelles à Vienne, selon le vieux rituel impérial, ont marqué, en 1989, année de la fin du communisme, le grand retour de l'histoire en Europe centrale. Parce qu'il faut faire des choix dans un livre collectif, nous n'avons pas retenu l'impératrice Zita, l'histoire autrichienne étant représentée par deux souveraines, la grande Marie-Thérèse et Elisabeth, dite Sissi, la femme de François-Joseph. Ma préférence allait alors à Marie-Antoinette, dont je me suis chargé du portrait.

    Qu'est-ce qui vous intéresse, chez Marie-Antoinette, et comment expliquez-vous le mélange d'amour et de haine que les Français semblent ressentir pour elle ?

    Aujourd'hui, il me semble plutôt que la haine pour Marie-Antoinette a pratiquement disparu! En témoigne l'immense succès des expositions, des livres ou des films qui lui sont consacrés depuis une dizaine d'années. Si notre éditeur a choisi Marie-Antoinette pour illustrer la couverture de l'ouvrage, ce n'est pas un hasard. En ce qui me concerne, je n'ai pas attendu cette «Marie-Antoinette-mania» pour être attaché à cette figure venue d'Autriche, pays dont je suis familier, et qui a traversé ensuite la gloire et la tragédie chez nous, en France. Ce qui est fascinant, chez Marie-Antoinette, c'est la suite de ses retournements. Jeune reine superficielle et frivole, elle devient une mère responsable, soucieuse de ses enfants. Commettant des erreurs politiques au début de la Révolution, en essayant de sauver le trône mais en le desservant en réalité, elle épouse ensuite totalement les vues du roi dès lors que la partie est perdue. Après la décapitation de Louis XVI, Marie-Antoinette touche au sublime par sa dignité lors de son procès et face à sa marche à la mort.

    La princesse Diana n'a pas régné, mais a connu une fin tragique et romanesque. Aurait-elle pu figurer dans votre livre ?

    Outre le fait de n'avoir pas régné, connaître une fin romanesque et tragique ne suffit pas à faire une reine. Ce qui caractérise les reines régnantes est qu'elles s'obligent à habiter leur fonction, même quand elle ne correspond pas à leur goût. Ou alors, elles fuient, comme le fit d'une certaine manière l'impératrice Elisabeth d'Autriche, Sissi, qui est à sa façon une ancêtre de Lady Di. Il reste que la première femme du prince Charles, historiquement parlant, est un personnage emblématique de notre époque par la préférence accordée au destin personnel, au plaisir, au bonheur, par rapport au devoir dynastique. La séquence de sa mort restera un moment exemplaire du culte de l'émotion qui domine notre temps. La reine d'Angleterre a dû plier devant cette vague, pour préserver l'affection de ses sujets. Mais l'émotion est passée, et la reine Elisabeth est toujours là…

    Les reines contemporaines, devenues des people presque comme les autres, ont-elles perdu leur mystère ?

    Toutes les reines contemporaines ne sont pas devenues des princesses people. Songeons, en Belgique, à la reine Fabiola hier, ou à la reine Mathilde aujourd'hui. Ou en Espagne à la reine Sophie, la femme de Juan Carlos, hier, ou à la femme de Philippe VI, la reine Letizia, aujourd'hui. Ce n'est pas parce que la presse parle d'une reine qu'elle est une reine people. On peut conserver sa dignité tout étant la cible de l'attention des autres, ce qui a toujours été le propre des souverains, qui sont des personnages publics. La reine d'Angleterre est un des personnages les plus photographiés de la terre, et pourtant on ne peut pas lui appliquer l'étiquette de people. Vous verrez que, lorsqu'elle disparaîtra, ce sera un événement planétaire, et que les plus républicains des Français seront touchés eux aussi. 

    Rédacteur en chef adjoint au Figaro Magazine et membre du comité scientifique du Figaro Histoire, Jean Sévillia est l'auteur de nombreux succès de librairie (Zita impératrice courage, Historiquement correct, Histoire passionnée de la France). Il publie prochainement La France catholique (éditions Michel Lafon, sortie le 15 octobre). Il a codirigé Les Derniers jours des reines avec Jean-Christophe Buisson, directeur adjoint de la rédaction du Figaro Magazine et auteur d'une biographie du général Mihailovic et d'Assassinés. Un ouvrage collectif dans lequel dix-neuf historiens (dont Didier Le Fur, Jean-François Solnon, Simone Bertière, Jean-Paul Bled, Jean Tulard, Jean des Cars, Arnaud Teyssier et les codirecteurs du livre) brossent le portrait de vingt souveraines à travers la fin de leur vie ; publié aux éditions Perrin, le livre est coédité avec le Figaro Histoire.

    Entretien réalisé par Alexandre Devecchio            

  • Réponse de fond du Vice-ministre polonais des Affaires étrangères aux critiques de Bruxelles

     

    Lire ce très intéressant entretien, que vient de publier Valeurs actuelles, avec le vice-ministre polonais des Affaires étrangères, c'est se persuader qu'il ne sera pas facile pour Bruxelles et les démocraties molles de l'Ouest européen d'imposer aux vingt-huit Etats membres de l'Union le modèle hors sol, hors racines, multi-culturaliste, universaliste et post-national qu'ils ont en tête. La Pologne est un grand pays et elle s'inscrit, comme la France devrait le faire, en opposition très claire à ce modèle déconstructiviste. On ne pourra pas la traiter pour quantité négligeable. Et, dans la voie qu'elle vient de se tracer, il n'est pas exclu qu'elle fasse école. Qu'elle soit précurseur... Il n'y a d'ailleurs pas de raison de ne pas le souhaiter.  Lafautearousseau   

     

    aleksander_stepkowskicdr.jpgCritiqué pour ses réformes de la Justice et des médias, le nouveau gouvernement polonais est sous le feu des attaques de Bruxelles. Afin de s’expliquer, Aleksander Stepkowski, le vice-ministre polonais des Affaires étrangères a accepté d’accorder un entretien exclusif à Valeurs actuelles.

    VA. Quels sont les objectifs de votre gouvernement à long terme ?

    Très brièvement : l’objectif principal est le développement social à travers le renforcement de la famille, en lui assurant une sécurité non seulement économique mais plus générale également. L’aspect le plus important de cette politique est de renforcer l’identité polonaise, notamment le patriotisme et les valeurs culturelles qui ont longtemps été des caractéristiques polonaises mais qui sont devenues synonymes d’agressivité – souvent à torts – cette critique a été soutenue délibérément et institutionnellement par les précédents gouvernements polonais. Nous pensons que la Pologne devrait jouer un rôle actif et important sur la scène politique européenne.

    VA. Quels sont les principaux défis auxquels est confrontée la société polonaise ?

    La société polonaise est dans une situation délicate. Les familles sont particulièrement fragilisées, alors même que la famille est censée être particulièrement protégée et défendue par l’Etat polonais d’après l’article 18 de notre Constitution. Les familles sont cependant devenues victimes de discriminations dans la plupart des aspects de la vie sociale. Se marier devient même un motif de discrimination. Vivre célibataire est plus facile et moins cher. La Pologne souffre en effet d’une crise démographique importante ainsi que d’une importante crise migratoire économique. Plusieurs millions de polonais parmi les plus dynamiques participent à l’enrichissement d’autres nations parce qu’ils n’ont pas eu suffisamment d’opportunités de développement dans leur pays natal. Le nouveau gouvernement polonais va apporter un changement radical à cet état de choses. Nous voulons établir des conditions favorables afin que les polonais reviennent de l’étranger.

    VA. Pensez-vous que la société polonaise puisse échapper à l’individualisme libéral qui a transformé les sociétés occidentales ces dernières décennies ?

    Tout dépend de la manière dont vous entendez la possibilité d’y échapper. A bien des égards ce n’est pas possible dans la mesure où la société contemporaine est construite sur une anthropologie individualiste. Par ailleurs, nous pouvons résister aux transgressions culturelles contemporaines issues de l’individualisme et chercher à renforcer les communautés existantes. Il faudrait développer un sens de l’interdépendance mutuelle qui soit comprise non pas comme un obstacle à la réalisation individuelle mais un prérequis nécessaire au développement personnel.

    VA. Comment défendre la famille ?

    Tout commence par la conscience que nous avons vraiment de ce que nous sommes et des conditions nécessaires à notre développement. Il faut arrêter d’envisager la société comme un groupe d’individus mais l’appréhender comme un système de communautés interconnectées. Il faut ensuite ajuster la loi à cette perspective sociale. Je dois dire que les solutions françaises concernant la politique familiale sont bien plus favorables à la famille qu’en Pologne, nous devons suivre votre exemple. Par ailleurs une condition nécessaire au développement de la famille est la protection de l’identité naturelle de la personne humaine et de la famille, et dans ce domaine, la Pologne est dans une meilleure position. Nous reconnaissons et protégeons toujours l’identité naturelle du mariage ainsi que l’autonomie familiale. Il y a eu d’importantes menaces qui ont plané sur l’autonomie de la famille ces dernières années en Pologne, mais la société civile a paru absolument déterminée à défendre les valeurs fondamentales de la vie de famille et s’est organisée en ce sens. En France, si la mobilisation autour de La Manif pour Tous a été sans précédent, elle est intervenue dans un contexte tout à fait différent ; c’est l’identité naturelle même des structures fondamentales de la société qui était radicalement reniée par l’initiative législative.

    Nous avons beaucoup à perdre dans ce contexte et il nous faut nous protéger avec prudence et détermination.

    VA. L’Europe fait face à une double crise: démographique et migratoire, ces crises sont d’une magnitude sans précédent. Pensez-vous qu’il y a un risque d’effondrement de la société occidentale Européenne ? Comment faut-il réagir ?

    Le danger est très sérieux. Le problème est que son origine est une sorte d’auto-agression envers notre identité dans ses aspects les plus profonds : notre identité culturelle et notre identité humaine.

    Notre système éducatif ainsi que la culture elle-même présente l’identité comme une menace à la liberté et une source d’agression. C’est pour cette raison que la mutation de notre identité est proposée comme une libération et un moyen de prévenir la violence. Cette auto-agression nous mène finalement à une autodestruction. Il est important d’évoquer que la stratégie finale de l’Union Soviétique communiste élaborée à la fin des années 70 du 20ème siècle pour envahir l’Europe reposait sur une hypothèse : après une agression militaire initiale des forces communistes sur l’Europe de l’ouest, le reste de l’Europe aurait été incapable de se défendre sous l’influence des intellectuels de gauche qui auraient paralysé l’Europe occidentale avec des slogans pacifiques. La capitulation intellectuelle était un prérequis nécessaire au succès de la révolution communiste. Nous expérimentons une situation similaire aujourd’hui, mais l’invasion devient possible non pas à cause du pacifisme mais à cause de slogans humanitaires appelant à la solidarité et à la tolérance. 

    VA. L’Europe occidentale est également confrontée à une crise culturelle, marquée par l’échec de transmission de sa culture et de sa religion aux nouvelles générations. La situation est-elle différente en Pologne ?

    Oui. La transmission que vous évoquez n’est possible qu’à travers une transmission de l’identité, identité religieuse et culturelle. Si l’Européen contemporain n’est pas capable de dire qui il est, non seulement dans une dimension religieuse mais également sexuelle, comment peut-il en parler à ses enfants ? Nous ne pouvons transmettre aux générations suivantes que ce que nous comprenons de nous-mêmes, ce à quoi nous sommes fidèles dans nos vies.

    En Pologne nous sommes confrontés aux mêmes défis culturels que l’Europe de l’ouest, même si nos problèmes ne sont pas aussi avancés. Néanmoins, les jeunes témoignent très souvent de leur foi - et de manière très courageuse. La question est de savoir s’ils demeureront fidèles face aux défis existentiels et aux tentations.

    J’ai personnellement tendance à être assez pessimiste, mais je dois reconnaître que je vois souvent des jeunes dont la conduite personnelle me remplit d’espoir.

    Ils ont cependant besoin d’avoir des chefs (spirituels et temporels) responsables et expérimentés qui ne leur fassent pas faux bond.

    VA. Qu’est-ce que l’Europe pour vous ?

    L’Europe est pour moi une entité culturelle dont les origines spécifiques déterminent l’identité. Voilà « mon » Europe, celle à laquelle je m’identifie. Malheureusement, les sociétés européennes contemporaines perdent souvent leur identité telle que je la comprends. Certains phénomènes sociaux sont réputés représenter des valeurs européennes, bien que pour ma part ils n’aient rien d’européen. Si je vois une cathédrale gothique, je n’ai pas de doutes, je vois quelque chose de très européen, même si elle a été construite en Amérique et pas pendant le Moyen-Âge comme la cathédrale St Patrick à New York par exemple. En revanche lorsque j’emmène ma voiture en réparation dans un atelier installé dans une ancienne église gothique, il me semble évident que ce continent qui porte toujours le nom d’Europe perd dramatiquement son identité.

    VA. L’une des premières mesures de votre gouvernement a visé l’audiovisuel public, on a accusé votre gouvernement de porter atteinte à la liberté de la presse…

    Le principal objectif du gouvernement est la réintroduction du pluralisme dans les institutions polonaises. Cela concerne également les médias publics. La position des médias publics sur le marché polonais des médias a été affaiblie par l'ancien gouvernement. Le nouveau gouvernement veut rendre une base financière stable aux médias publics qui a été presque détruite par l'ancien gouvernement. Cette réforme se compose de deux parties. La première vise à assurer une meilleure gestion et à mettre en œuvre des normes requises par le Conseil de l'Europe en 2010 à l’égard de la Hongrie. Dans l'opinion officielle du Conseil de l'Europe, il est clairement indiqué que le régulateur des médias sur le marché ne devrait pas avoir le pouvoir d'influencer la composition des conseils de gestion et de contrôle des médias publics. C’est exactement ce qui a été fait en Pologne : le Conseil national de la radiodiffusion a perdu son pouvoir de nommer les membres de la direction des médias publics, pouvoir qu’il  a longtemps exercé. Nous avons donc commencé à mettre en œuvre des normes européennes organisant les relations entre l’Etat et les médias publics, dont il est propriétaire

    VA. Qu’en est-il de la réforme de la Cour constitutionnelle : on reproche à votre gouvernement d’avoir nommé, à peine arrivés aux affaires, des nouveaux juges…

    Ici encore, l’unique objectif des changements rapides opérés quant à la désignation des juges constitutionnels vise à introduire du pluralisme au sein du Tribunal Constitutionnel. La précédente majorité avait entrepris de nommer cinq nouveaux juges alors qu’ils en avaient déjà nommés neuf sur un total de quinze. Ils voulaient nommer 15 sur les 15 juges du Tribunal Constitutionnel. Pour cela, ils ont désigné des juges pour des postes qui ne deviendraient vacants qu’après les élections ; élections où ils ont perdu le soutien de la population. Pour cette raison, afin de défendre le pluralisme au sein du Tribunal, une action rapide était nécessaire. Je dois reconnaître qu’après notre action, il reste toujours les deux tiers des juges qui ont été désignés par l’ancienne majorité.

    Notre seul objectif est de restaurer le pluralisme au sein du Tribunal Constitutionnel, pluralisme qui était mis en cause par le précédent gouvernement à la toute fin de son mandat. 

    Valeurs actuelles

     

  • Yoram Hazony : «Les nouveaux universalistes vouent aux gémonies l'indépendance nationale», par Paul Sugy.

    Yoram Hazony est spécialiste de la Bible et docteur en philosophie politique. Il est auteur de The Virtue of Nationalism (Basic Books, 2018). Yochanan Katz

    Le nationalisme est sur toutes les lèvres, et pourtant, affirme Yoram Hazony, ce concept n'a jamais été aussi mal compris. Le philosophe entend réhabiliter la «vertu du nationalisme», qu'il oppose à la «tentation impérialiste», et promouvoir la vision d'un monde fondé sur l'indépendance et la liberté des nations.

    FIGAROVOX/GRAND ENTRETIEN – Le nationalisme est sur toutes les lèvres, et pourtant, affirme Yoram HAZONY, ce concept n’a jamais été aussi mal compris. Le philosophe entend réhabiliter la «vertu du nationalisme», qu’il oppose à la «tentation impérialiste», et promouvoir la vision d’un monde fondé sur l’indépendance et la liberté des nations.

    Yoram HAZONY est spécialiste de la Bible et docteur en philosophie politique. Il a fondé le Herzl Institute et enseigne la philosophie et la théologie à Jérusalem. Ce penseur de la droite israélienne est également auteur de nombreux articles publiés dans les journaux américains les plus prestigieux, du New York Times au Wall Street Journal. Presque inconnu en France, son livre The Virtue of Nationalism a suscité un vif débat aux États-Unis.

    LE FIGARO MAGAZINE. – Le 11 novembre dernier, Emmanuel MACRON déclarait aux chefs d’Etat du monde entier: «Le nationalisme est la trahison du patriotisme.» Qu’en pensez-vous?

    Yoram HAZONY. – Aujourd’hui, on ne cesse de nous répéter que le nationalisme a provoqué les deux guerres mondiales, et on lui impute même la responsabilité de la Shoah. Mais cette lecture historique n’est pas satisfaisante. J’appelle «nationaliste» quelqu’un qui souhaite vivre dans un monde constitué de nations indépendantes. De sorte qu’à mes yeux, Hitler n’était pas le moins du monde nationaliste. Il était même tout le contraire: Hitler méprisait la vision nationaliste, et il appelle dans Mein Kampf à détruire les autres États-nations européens pour que les Allemands soient les maîtres du monde. Dès son origine, le nazisme est une entreprise impérialiste, pas nationaliste.

    Quant à la Première Guerre mondiale, le nationalisme est loin de l’avoir déclenchée à lui seul! Le nationalisme serbe a fourni un prétexte, mais en réalité c’est la visée impérialiste des grandes puissances européennes (l’Allemagne, la France, l’Angleterre) qui a transformé ce conflit régional en une guerre planétaire. Ainsi, le principal moteur des deux guerres mondiales était l’impérialisme, pas le nationalisme.

    Donald TRUMP, lui, avait déclaré il y a quelques semaines: «Je suis nationaliste.» Y a-t-il aujourd’hui un retour du nationalisme?

    Le nationalisme est en effet en vogue en ce moment: c’est du jamais-vu depuis 1990, date à laquelle Margaret THATCHER a été renversée par son propre camp à cause de son hostilité à l’Union européenne. Depuis plusieurs décennies, les principaux partis politiques aux États-Unis et en Europe, de droite comme de gauche, ont souscrit à ce que l’on pourrait appeler «l’impérialisme libéral», c’est-à-dire l’idée selon laquelle le monde entier devrait être régi par une seule et même législation, imposée si besoin par la contrainte. Mais aujourd’hui, une génération plus tard, une demande de souveraineté nationale émerge et s’est exprimée avec force aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Italie, en Europe de l’Est et ailleurs encore.

    Avec un peu de chance et beaucoup d’efforts, cet élan nationaliste peut aboutir à un nouvel ordre politique, fondé sur la cohabitation de nations indépendantes et souveraines. Mais nous devons aussi être lucides: les élites «impérialistes libérales» n’ont pas disparu, elles sont seulement affaiblies. Si, en face d’eux, le camp nationaliste ne parvient pas à faire ses preuves, elles ne tarderont pas à revenir dans le jeu.

    Quel est ce «nouvel empire libéral» dont vous parlez? Et qu’entendez-vous exactement par «impérialisme»?

    Historiquement, le «nationalisme» décrit une vision du monde où le meilleur système de gouvernement serait la coexistence de nations indépendantes, et libres de tracer leur propre route comme elles l’entendent. On l’oppose à «l’impérialisme», qui cherche à apporter au monde la paix et la prospérité en unifiant l’humanité, autant que possible, sous un seul et même régime politique. Les dirigeants de l’Union européenne, de même que la plupart des élites américaines, croient dur comme fer en l’impérialisme. Ils pensent que la démocratie libérale est la seule forme admissible de gouvernement, et qu’il faut l’imposer progressivement au monde entier. C’est ce que l’on appelle souvent le «mondialisme», et c’est précisément ce que j’entends par «nouvel empire libéral».

    Bien sûr, tous les «impérialistes libéraux» ne sont pas d’accord entre eux sur la stratégie à employer! L’impérialisme américain a voulu imposer de force la démocratie dans un certain nombre de pays, comme en Yougoslavie, en Irak, en Libye ou en Afghanistan. En Europe, on se désolidarise du militarisme américain: les impérialistes allemands ou bruxellois préfèrent d’autres formes de coercition… mais leur objectif est le même. Regardez comment l’Allemagne cherche à imposer son programme économique à la Grèce ou à l’Italie, ou sa vision immigrationniste à la République tchèque, la Hongrie ou la Pologne. En Italie, le budget a même été rejeté par la Commission européenne!

    Est-ce que, selon vous, le nationalisme et l’impérialisme sont deux visions de l’ordre mondial qui s’affrontaient déjà dans la Bible?

    Le conflit entre nationalisme et impérialisme est aussi vieux que l’Occident lui-même. La vision nationaliste est l’un des enseignements politiques fondamentaux de la Bible hébraïque: le Dieu d’Israël fut le premier qui donna à son peuple des frontières, et Moïse avertit les Hébreux qu’ils seraient punis s’ils tentaient de conquérir les terres de leurs voisins, car Yahvé a donné aussi aux autres nations leur territoire et leur liberté. Ainsi, la Bible propose le nationalisme comme alternative aux visées impérialistes des pharaons, mais aussi des Assyriens, des Perses ou, bien sûr, des Babyloniens. Et l’histoire du Moyen Âge ou de l’époque moderne montre que la plupart des grandes nations européennes – la France, l’Angleterre, les Pays-Bas… – se sont inspirées de l’exemple d’Israël.

    Mais le nationalisme de l’Ancien Testament ne fut pas tout de suite imité par l’Occident. La majeure partie de l’histoire occidentale est dominée par un modèle politique inverse: celui de l’impérialisme romain. C’est de là qu’est né le Saint Empire romain germanique, qui a toujours cherché à étendre sa domination, tout comme le califat musulman. Les Français aussi ont par moments été tentés par l’impérialisme et ont cherché à conquérir le monde: Napoléon, par exemple, était un fervent admirateur de l’Empire romain et n’avait pour seul but que d’imposer son modèle de gouvernement «éclairé» à tous les pays qu’il avait conquis. Ainsi a-t-il rédigé de nouvelles constitutions pour nombre d’entre eux: les Pays-Bas, l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne… Son projet, en somme, était le même que celui de l’Union européenne aujourd’hui : réunir tous les peuples sous une seule et même législation.

    Pourquoi le modèle nationaliste est-il meilleur, selon vous?

    Parce que ce modèle permet à chaque nation de décider ses propres lois en vertu de ses traditions particulières. Un tel modèle assure une vraie diversité politique, et permet à tous les pays de déployer leur génie à montrer que leurs institutions et leurs valeurs sont les meilleures. Un tel équilibre international ressemblerait à celui qui s’est établi en Europe après les traités de Westphalie signés en 1648, et qui ont permis l’existence d’une grande diversité de points de vue politiques, institutionnels et religieux. Ces traités ont donné aux nations européennes un dynamisme nouveau: grâce à cette diversité, les nations sont devenues autant de laboratoires d’idées dans lesquels ont été expérimentés, développés et éprouvés les théories philosophiques et les systèmes politiques que l’on associe aujourd’hui au monde occidental.

    À l’évidence, toutes ces expériences ne se valent pas et certaines n’ont bien sûr pas été de grands succès. Mais la réussite de l’une seule d’entre elles – la France, par exemple – suffit pour que les autres l’imitent et apprennent grâce à son exemple. Tandis que, par contraste, un gouvernement impérialiste comme celui de l’Union européenne tue toute forme de diversité dans l’œuf. Les élites bruxelloises sont persuadées de savoir déjà avec exactitude la façon dont le monde entier doit vivre. Il est pourtant manifeste que ce n’est pas le cas…

    Mais ce «nouvel ordre international» n’a-t-il pas permis, malgré tout, un certain nombre de progrès en facilitant les échanges marchands ou en créant une justice pénale internationale, par exemple?

    Peut-être, mais nous n’avons pas besoin d’un nouvel impérialisme pour permettre l’essor du commerce international ou pour traîner en justice les criminels. Des nations indépendantes sont tout à fait capables de se coordonner entre elles. Alors, certes, il y aura toujours quelques désaccords à surmonter, et il faudra pour cela un certain nombre de négociations. Et je suis tout à fait capable de comprendre que d’aucuns soient tentés de se dire que, si on crée un gouvernement mondial, on s’épargne toutes ces frictions.

    Mais c’est là une immense utopie. La diversité des nations rend strictement impossible de convenir, universellement, d’une vision unique en matière de commerce et d’immigration, de justice, de religion, de guerre ou de paix. La diversité des points de vue, et, partant, chacun de ces désaccords, sont une conséquence nécessaire de la liberté humaine, qui fait que chaque nation a ses propres valeurs et ses propres intérêts. La seule manière d’éviter ces désaccords est de faire régner une absolue tyrannie – et c’est du reste ce dont l’Union européenne se rend peu à peu compte: seules les mesures coercitives permettent d’instaurer une relative uniformité entre les États membres.

    Ne redoutez-vous pas la compétition accrue à laquelle se livreraient les nations dans un monde tel que vous le souhaitez? Au risque de renforcer le rejet ou la haine de ses voisins?

    Dans mon livre, je consacre un chapitre entier à cette objection qui m’est souvent faite. Il arrive parfois qu’à force de vouloir le meilleur pour les siens, on en vienne à haïr les autres, lorsque ceux-ci sont perçus comme des rivaux. Mais nous devons alors reconnaître, tout aussi humblement, que les mouvements universalistes ne sont pas exempts non plus d’une certaine inclination à la haine ou au sectarisme. Chacun des grands courants universels de l’histoire en a fait montre, qu’il s’agisse du christianisme, de l’islam ou du marxisme. En bâtissant leur empire, les universalistes ont souvent rejeté les particularismes nationaux qui se sont mis en travers de leur chemin et ont refusé d’accepter leur prétention à apporter à l’humanité entière la paix et la prospérité.

    Cette détestation du particulier, qui est une constante dans tous les grands universalismes, est flagrante aujourd’hui dès lors qu’un pays sort du rang: regardez le torrent de mépris et d’insultes qui s’est répandu contre les Britanniques qui ont opté pour le Brexit, contre TRUMP, contre SALVINI, contre la Hongrie, l’Autriche et la Pologne, contre Israël… Les nouveaux universalistes vouent aux gémonies l’indépendance nationale.

    En quoi le nationalisme est-il une «vertu»?

    Dans le sens où un nationaliste ne prétend pas savoir ce qui est bon pour n’importe qui, n’importe où dans le monde. Il fait preuve d’une grande humilité, lui, au moins. N’est-ce pas incroyable de vouloir dicter à tous les pays qui ils doivent choisir pour ministre, quel budget ils doivent voter, et qui sera en droit de traverser leurs frontières?

    Face à cette arrogance vicieuse, je considère en effet le nationalisme comme une vertu. Le nationaliste, lui, dessine une frontière par terre et dit au reste du monde: «Au-delà de cette limite, je renonce à faire imposer ma volonté. Je laisse mes voisins libres d’être différents.» Un universaliste répondra que c’est immoral, car c’est la marque d’une profonde indifférence à l’égard des autres. Mais c’est en réalité tout l’inverse: le nationaliste est vertueux, car il limite sa propre arrogance et laisse les autres conduire leur vie à leur guise.

    Que vous inspirent les difficultés qu’ont les Britanniques à mettre en œuvre le Brexit ? N’est-il pas déjà trop tard pour revenir en arrière?

    Non, il n’est pas trop tard. Si les différents gouvernements nationalistes aujourd’hui au pouvoir dans le monde parviennent à prouver leur capacité à diriger un pays de manière responsable, et sans engendrer de haine ou de tensions, alors ils viendront peut-être à bout de l’impérialisme libéral. Ils ont une chance de restaurer un ordre du monde fondé sur la liberté des nations. Il ne tient désormais qu’à eux de la saisir, et je ne peux prédire s’ils y parviendront: j’espère seulement qu’ils auront assez de sagesse et de talent pour cela.

     

    Yoram Hazony est spécialiste de la Bible et docteur en philosophie politique. Il a fondé le Herzl Institute et enseigne la philosophie et la théologie à Jérusalem. Ce penseur de la droite israélienne est également auteur de nombreux articles publiés dans les journaux américains les plus prestigieux, du New York Times au Wall Street Journal. Presque inconnu en France, sonlivre The Virtue of Nationalism a suscité un vif débat aux Etats-Unis.

    Source : https://www.lefigaro.fr/vox/

  • La fin de la coopération monétaire franco-africaine soumettrait le continent africain au règne du dollar et à la pénétra

    Loup Viallat, auteur de "La fin du franc CFA". Image: Capture d'écran TV Libertés.

    Entretien avec Loup Viallet, qui analyse la situation du franc CFA, monnaie et système en sursis…

    Considéré par certains comme le dernier héritage de la colonisation, le Franc CFA (FCFA) est encore l’objet de tous les fantasmes. Il y a un an, les présidents français et ivoirien ont annoncé que cette monnaie commune à quinze pays africains serait remplacée dans la moitié ouest-africaine d’entre eux, par « l’Eco », une nouvelle devise dont la création se fait toujours attendre.

     frédéric de natal.jpgDans un ouvrage récent, La fin du franc CFA (oct. 2020, VA Éditions, Versailles), qui commence à faire parler de lui à droite, le géopolitologue Loup Viallet dévoile les enjeux vertigineux de la coopération monétaire franco-africaine pour l’Europe et pour l’Afrique. Alors que cette thématique est ordinairement désertée dans le débat public, on l’a vu revenir à travers les discours portés le mois dernier par la directrice de l’ISSEP Marion Maréchal, à l’occasion de sa série d’interventions médiatiques. L’ISSEP, dont le tout nouveau think-tank a publié parmi ses premières analyses une note signée par… Loup Viallet.

    Pour le magazine Causeur, il a accepté de répondre à nos questions sur ce sujet qui cristallise beaucoup de passions et alimente de nouvelles idées.

    Frederic de Natal. Qu’est-ce que le Franc CFA? 

    Loup Viallet. Le Franc CFA (Communauté Financière Africaine-ndlr) est la monnaie d’un pays sur trois en Afrique sub-saharienne dont l’ensemble forme ce qu’on appelle « la zone franc ». Contrairement aux monnaies de leurs pays voisins qui fluctuent en permanence au gré des prix des matières premières, et dont la fragilité expose leurs économies et leurs sociétés à des phénomènes chroniques d’hyperinflation, le franc CFA est la monnaie la plus stable et la plus crédible du continent africain. Elle sert de socle à deux marchés communs africains, l’UEMOA en Afrique de l’Ouest et la CEMAC en Afrique centrale, supprimant les coûts liés au change entre leurs pays membres, mais aussi avec les dix-neuf pays de la zone euro. Sa convertibilité en euros est garantie par le Trésor français, dans le cadre d’un partenariat monétaire surveillé par les institutions européennes et administré par les banques centrales africaines et les chefs d’État africains. C’est un atout auquel les dirigeants africains ré-adhèrent régulièrement, mais ce n’est pas non plus une baguette magique : avoir une monnaie stable et crédible ne suffit pas à protéger les pays africains de la désindustrialisation asiatique, ne les incite pas à transformer leurs économies et à sortir de leurs rentes primaires ou à renforcer l’unité fiscale et infrastructurelle de leurs marchés communs. C’est un symbole enfin, celui de souveraineté limitée des pays africains de la zone franc qui fait dire à certains que le franc CFA est un instrument de prédation, un lien néocolonial.

    Pourquoi et par qui est-elle décriée aujourd’hui?

    Pour de nombreux courants militants qui s’inscrivent d’abord dans la gauche intellectuelle et politique, les « indigénistes » ou les « décoloniaux » en France, et les « panafricanistes » en Afrique francophone, le Franc CFA est le bras armé du capitalisme et du néocolonialisme de la France en Afrique. Son maintien serait à l’origine d’un enrichissement odieux de l’ancienne métropole sur le dos de ses anciennes colonies. Ces thèses sont aussi relayées dans les milieux souverainistes, où ce lien est souvent compris à travers un prisme altermondialiste. Toujours est-il que cette monnaie fait l’objet de beaucoup de fantasmes et de rumeurs qui entretiennent les pays africains dans une certaine infantilisation, tenant leurs dirigeants pour des irresponsables, les présentant alternativement comme soumis à l’ancienne métropole ou comme des martyrs de la liberté africaine. Ces discours sont faux et dangereux.

    Pourquoi avoir écrit un ouvrage sur ce sujet qui semble particulièrement diviser le «village franco-africain»? 

    Cela fait plusieurs années que j’écoute le discours des « indigénistes » sur cette question qui me tient particulièrement à cœur. J’ai voulu comprendre si cela était vrai, d’où venaient ces types de discours, comment fonctionne l’organisation monétaire de l’Afrique afin de mieux répondre aux questions, aux enjeux que cela comporte tant pour l’Europe ou la France. Or, force est de constater que nous avons affaire de la part de ces gens à des discours très démagogiques. Il est regrettable de voir que des politiques français reprennent ce genre de caricatures, et ne s’emploient même pas à démontrer qu’il n’y a pas de néo-colonialisme de la part de la France. Ou encore des dirigeants et des intellectuels africains, qui tiennent des discours ambigus, dénonçant une mainmise d’un côté mais sans pour autant rompre avec la coopération monétaire de l’autre. Lorsqu’il était président de la république de Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo n’a pas dénoncé le franc CFA et a même renouvelé l’adhésion de son pays aux institutions de la zone franc. Or, dans son autobiographie publiée une décennie plus tard, il en a fait la « clé de voûte » d’un système de spoliation par lequel la France s’enrichirait.

    Le Franc CFA est l’instrument d’un néocolonialisme de la France en Afrique? 

    Cette vision d’une France néocoloniale qui tirerait sa prospérité de l’exploitation des pays africains est complètement fausse. La puissance économique de la France ne repose pas sur ses liens passés ou présents avec l’Afrique. La zone franc ne représente que 0,6% du commerce extérieur de la France contre 40% à la veille des indépendances (tenant compte de l’ancienne Indochine), tandis que la France polarise 10 à 15% des échanges des pays de la zone franc aujourd’hui contre 60% à la veille des indépendances.  La France ne dispose plus de monopole économique dans son ancien « pré carré » : sur ce terrain les entreprises françaises sont désormais en concurrence avec des sociétés américaines, allemandes, italiennes, espagnoles, chinoises, turques, indiennes. On note aussi que la majorité des intérêts économiques français en Afrique sont hors de la zone franc : au Nigeria, au Maroc, en Tunisie, en Afrique du Sud. Quant à l’approvisionnement en uranium qui suscite beaucoup de fantasmes sur l’action de la France au Niger, il s’opère avec le Canada et avec le Kazakhstan sans nécessiter de partenariat monétaire. Enfin, la France n’a pas d’hégémonie politique dans les pays de la zone franc, ainsi qu’en a attesté le coup d’État imprévu au Mali à l’été 2020. Aujourd’hui le premier créancier et le premier fournisseur des pays de la zone franc c’est la Chine. 

    Les pays africains peuvent-ils en entrer ou sortir librement au sein de zone Franc? 

    Oui. La possibilité d’adhérer ou de dénoncer la coopération monétaire est prévue par les traités. Cela a été le cas de Madagascar en 1963, de la Mauritanie en 1973, de la Guinée-Conakry en 1960 ou encore du Mali en 1962 avant finalement d’y revenir 22 ans plus tard car sa monnaie était trop instable et inconvertible. Plus récemment, la Guinée équatoriale et la Guinée-Bissau ont rejoint la zone franc, respectivement en 1985 et en 1997 pour bénéficier de sa crédibilité. On voit bien dès lors que ce n’est pas une monnaie coloniale mais un service qui permet à des pays pauvres et rentiers de jouir d’une sécurité financière favorable au développement du commerce, de l’investissement, de l’épargne, de la production, de l’emploi et de la diversification économique. 

    Que penser de l’éco, cette nouvelle monnaie qui doit remplacer le Franc CFA dans huit pays d’Afrique de l’Ouest? 

    Il y a la même différence entre le franc CFA et l’éco qu’il y a entre les notions d’ « assistance » et d’ « assistanat ». Le changement de nom est superficiel, d’autant que d’autres monnaies portent le nom de franc sans qu’il ne prête à débat : le franc pacifique, le franc suisse, le franc congolais, le franc guinéen. Par ailleurs, ce nom rappelle celui du garant, sans lequel la monnaie n’existerait pas. Mais il y a plus grave, le franc CFA fonctionnait avec des contreparties de la part des pays africains, des sortes de devoirs, associés au droit de détenir une monnaie dont ils n’ont pas à garantir la qualité. Dans la nouvelle mouture de l’éco, ces devoirs disparaîtront, ce qui engage la relation franco-africaine sur deux pentes. La première est que les pays africains n’auront aucun compte à rendre sur l’administration de cette monnaie et n’auront aucune incitation pour réaliser les réformes économiques nécessaires pour sortir de leur modèle rentier. La seconde implique pour la France de développer une solidarité financière coûteuse pour son budget public et permissive pour les pays de la zone franc, qui seront autorisés à poursuivre leurs déficits massifs avec l’Asie en se reposant sur la garantie de convertibilité française. C’est un mauvais accord qui va amplifier les pires défauts de la coopération actuelle.

    Faut-il poursuivre la coopération franco-africaine?

    Pour répondre à cette question, il faut avoir bien conscience des enjeux que provoquerait la rupture de ce lien, à la fois pour la France, pour la zone euro et les pays de la zone franc et plus largement pour l’Europe et l’Afrique. La fin du franc CFA achèverait de soumettre les économies du continent africain aux variations du dollar, aux fluctuations des prix mondiaux des matières premières et à la pénétration de la monnaie chinoise, ce qui signerait leur enlisement dans le piège de la rente primaire. L’exploitation du cacao, de l’hévéa, du pétrole ou du gaz dégage trop peu de ressources pour financer des services publics de base, ne nourrit pas des peuples entiers, laisse sans emploi la majorité des populations en âge de travailler. Par ailleurs on ne peut ignorer que les modèles mono-agricole et mono-extractif sont exposés au réchauffement climatique et à la raréfaction des ressources fossiles. L’Afrique subsaharienne est soumise à un nouveau désordre, ses gouvernements ne parviennent pas à répondre aux besoins de populations en augmentation constante, dans un contexte où le réchauffement climatique menace les rendements et l’habitat. Ce désordre se manifeste par l’exil de millions d’Africains, par la faillite des frontières, la prolifération des bandes armées, des trafics illicites et des idéologies contestataires. Il constitue une source très puissante de déstabilisation et d’insécurité pour les pays africains, mais aussi pour les pays d’Europe, qui se situent dans leur grand-voisinage. Ni la France, ni les autres pays européens n’ont intérêt à ce que l’Afrique sombre dans l’anarchie et le sous-développement. Tel n’est pas nécessairement le cas de puissances plus éloignées, qui pourraient tirer parti de la situation pour bénéficier d’un réservoir de matières premières certes limité mais disponible, mais aussi pour contrôler l’organisation politique africaine et imposer leur paix aux frontières de l’Europe. La coopération monétaire est un des instruments dont les Africains et les Européens disposent pour éviter cette situation et pour bâtir des réponses aux principaux défis qui leurs sont communs en ce début de siècle.

     

    Frederic de Natal

    Source : https://www.causeur.fr/

  • Droite, gauche : la grande confusion, par Pierre de Lauzun.

    La droite peine, la gauche s'éparpille, le paysage politique est en fusion. Le système bi-partisan profite de lois électorales mais exaspère les divisions, on a le sentiment d'un système sur le point de se désagréger. Que choisir ?

    4.jpgJ’ai évoqué dans un précédent article l’information selon laquelle il y aurait une droitisation de l’opinion, ce qui laisse entendre qu’on aurait une idée claire de ce qu’est la droite. Or sur la base de la traditionnelle division tripartite de la droite dans ce qu’on appellera pour simplifier les conservateurs, les libéraux et les populistes, un examen plus détaillé montre que seuls ces derniers ont vu leur rôle et influence s’accroître, du moins pendant un temps, sur la base d’ailleurs d’un corps d’idées passablement flou.

    Mais, pour compléter l’analyse, il faut voir ce qui se passe à gauche. On sait que la gauche est intellectuellement hégémonique : elle domine la production intellectuelle et l’expression publique des idées et informations de façon croissante avec le temps. Dominer ne veut pas dire qu’elle est supérieure, encore moins qu’elle a raison ; mais elle contrôle la production et la dissémination des idées. Sur la scène politique, cela s’est traduit non pas par la domination de ce qu’à un moment donné, on appelle politiquement la gauche, ou pas automatiquement, mais par le glissement de l’arc politique : l’axe droite/gauche garde son rôle prépondérant dans la définition de la polarité politique, mais les idées de gauche anciennes dépassées par de nouvelles idées de gauche glissent sur la droite de l’arc politique. Après tout, même les bonapartistes (ancêtres des populistes) et les orléanistes (libéraux) viennent en partie appréciable de la gauche, ou en tirent une partie de leurs idées ; ils ne sont pas compréhensibles sans le rappel de cette origine – le glissement ayant été suivi d’une mutation, avec hybridation et fixation sur la droite. Et inversement, les seuls à toujours avoir été classés à droite, les anciens légitimistes, ou encore les héritiers de la pensée classique, sont refoulés plus sur la droite, et s’hybrident dans ce qu’on appelle les conservateurs.

    Les dilemmes croissants de la gauche

    Et à gauche ? Face à la division tripartite de la droite, on constate un phénomène différent, car la gauche, elle, est entièrement un lieu d’origine. On pouvait jusqu’à récemment y discerner trois grands courants, quoique de poids très différents. Il y a d’abord un courant libéral de gauche/républicain/radical, tourné vers la mise en place de la démocratie libérale comme régime politique, attaché à l’émancipation, très hostile à la religion, avec des nuances internes entre libéraux et républicains. Dominant sous la IIIe République, il a beaucoup perdu de sa pertinence politique et tend à se faire refouler à son tour sur la droite (où il contribue au syncrétisme : ce fut le cas du parti radical intégré dans l’UDF). Mais il reste important sur le plan des idées, en tant que tradition libérale de gauche, émancipatrice ; on le voit actuellement en matière de mœurs.

    Un deuxième courant est le socialisme au sens large, de plus en plus prépondérant depuis le siècle dernier, avec trois variantes nettement différenciées, sociale-démocrate, communiste et gauchiste. Mais comme on sait, il est à son tour touché par l’obsolescence. On peut même parler d’un effondrement historique du socialisme, successivement sous ses deux formes pertinentes au niveau gouvernemental : la communiste, évidemment, et plus récemment la sociale-démocrate, pour des raisons combinées : épuisement du ressort budgétaire, réduction de la classe ouvrière, et adhésion à la mondialisation, liée au refus du patriotisme ; or la nation est désormais la seule base de protection des travailleurs locaux. Le gauchisme subsiste mais reste périphérique.

    Un troisième courant est l’anarchisme, généralement négligeable politiquement mais distinct des précédents, sauf hybridation éventuelle avec le gauchisme.

    S’y ajoute bien sûr l’émergence plus récente d’un nouveau courant, l’écologisme. Mais à regarder de près, son positionnement à gauche ne devrait pas aller de soi, sur la base de ce seul souci écologique. Certes cela remet en question l’économie dominante, et donc conduit à prendre un positionnement contestataire, ce qui s’apparente à la gauche. Mais surtout il y a eu dans l’écologisme politique une greffe massive d’idées de gauche nullement liées en soi à l’écologie, et notamment libérales/libertaires (questions de mœurs). Cela dit, au total, dans aucun pays le courant écologique ne paraît en passe de jouer le rôle politico-idéologique central que jouait à gauche le socialisme. Il reste donc une tendance globale à l’affaiblissement relatif de la gauche politique.

    La situation se complique encore de façon déterminante par l’émergence d’une autre problématique, qui touche cette fois à la composition de la population elle-même. Problématique qui est double : celle des migrants, et celle de la critique woke/intersectionnelle. La problématique des migrants n’est pas facile pour les courants de gauche établis, et notamment les socialistes. Le migrant a une origine, des vues et des intérêts qui divergent sensiblement de ceux des milieux populaires traditionnels, notamment ouvriers. Mais le réflexe dominant de la gauche politique, son mode de pensée spontané, émancipateur et cherchant sa base dans ce qu’il pense être les victimes, le conduit à voir les migrants comme on voyait le prolétariat. Outre que cela accroît le divorce entre la gauche et sa base populaire d’origine, cela ne lui donne pas une base de rechange, car cela se fait en bonne partie sans les migrants eux-mêmes (même s’ils votent à gauche quand ils votent) ; et il n’y a rien ici d’équivalent à ce qu’étaient les syndicats. En outre la fascination des émancipateurs pour les évolutions sociétales est diamétralement contradictoire avec les préférences spontanées des migrants, musulmans notamment. Une nouvelle synthèse est rendue dès lors difficile et la problématique des migrations accélère l’évolution des socialismes et leur désagrégation.

    S’y ajoute, plus récemment en France, la problématique de l’intersectionnalité et de l’idéologie woke. Elle aussi séduit la gauche car elle se présente comme une nouvelle vague d’émancipation, combinant les préoccupations sur les mœurs et le souci des “minorités” raciales, ethnique, sexuelles ou autres. Mais de ce fait non seulement la gauche abandonne le terrain de l’universalisme, qu’elle revendiquait, mais surtout elle s’enferme dans des revendications contradictoires, ainsi entre le féminisme et la fascination étrange que l’islam, perçu comme religion des dominés, exerce sur elle.

    Il résulte de toute ceci une très grande confusion à gauche au niveau politique, même si son hégémonie idéologique reste intacte, voire est plus ambitieuse dans sa radicalité et son intolérance.

    Conséquences pour la scène politique

    On comprend dans un tel contexte les velléités de remise en cause du clivage droite-gauche ; mais il subsiste comme facteur majeur de polarisation de la vie politique. D’autant qu’il recouvre et exprime les nouvelles polarités, ainsi sur les questions de mœurs et de société, sur l’immigration et les thèmes « woke ». En revanche on a vu de plus en plus en plus et logiquement le glissement du vote populaire à droite, essentiellement au profit du populisme, au moins pendant un temps. Les dernières élections ne remettent pas en cause cette constatation : outre que la faible participation rend leur pertinence contestable, elles marquent surtout la stabilité de la politique locale et en aucun cas un renouveau des idées dites de droite. D’ailleurs la persistance de l’hégémonie des idées de gauche ne permet pas une affirmation d’idées plus véritablement de droite dans l’opinion. Le glissement s’est donc fait donc sans contenu nouveau, en tout cas sans élaboration de la pensée.

    De leur côté, les immigrés et leurs descendants ne jouent pas encore comme tels de rôle majeur. S’ils votent à gauche, de façon prévisible vu l’état de l’arc politique, leur identification réelle aux traditions de gauche n’est en rien acquise, notamment en contexte musulman. On sait que Houellebecq a imaginé une situation où ils prendraient position sur la droite, dans un cadre politique qui leur serait propre. C’est concevable intellectuellement, mais loin de la réalité actuelle. En dominante ils restent donc des supplétifs passifs de la gauche. Et si on peut penser qu’à terme ils devraient avoir leurs propres partis, ce serait sans doute au début plutôt à gauche, accroissant par-là la confusion de ce côté.

    En résumé donc, si la scène idéologique, médiatique ou éducative reste dominée par la gauche, cela ne donne pas à celle-ci les moyens de se reconstituer une base politique solide, tout au contraire. Mais à droite la situation n’est pas meilleure : elle reste intellectuellement divisée, dominée, et le courant qui montait, populiste, est le plus faible sur ce plan.

    Devant une telle situation, la scène politique est nécessairement confuse. Aucune formule ne permet de reconstituer un bloc dominant analogue à ce qu’ont établi, en leur temps, les radicaux ou les gaullistes en France, ou les sociaux-démocrates scandinaves. Ou la tranquille alternance conservateurs/sociaux-démocrates des Allemands ou des Britanniques. Mais, inversement, cela permet des combinatoires multiples, dont le point commun est la précarité relative de chaque formule. Ainsi le macronisme au profit du centre : exploitant à fond la faiblesse des gauches et droites historiques, et jouant sur l’anathémisation du populisme, il agrège libéraux de gauche et libéraux de droite avec des fragments d’autres courants pour obtenir une majorité relative, le tout saupoudré d’européisme, ce qui permet un temps de garder le pouvoir par défaut – avec l’aide des mécanismes électoraux.

    À partir de faits analogues, la combinatoire peut être différente dans d’autres pays. Le maintien du cadre formel bipartisan permet, en pays anglosaxon, que subsiste une alternance, même si de façon sous-jacente les deux camps sont désormais très hétérogènes,
    notamment aux États-Unis où, paradoxalement, cette hétérogénéité se combine avec une radicalisation et une polarisation bien plus grandes qu’autrefois. Le schéma Biden a quelques affinités avec le macronisme (la comparaison avec Roosevelt est très exagérée), même si la mécanique bipartisane le déporte quelque peu sur la gauche. Inversement, au Royaume-Uni Boris Johnson a réuni les droites sur un thème national (Brexit) avec des emprunts à gauche (questions de mœurs). Dans les deux cas, rien ne garantit que cela dure. Sans parler de l’Italie, où les technocrates ont provisoirement repris la main sur un arrière-plan politique et idéologique particulièrement confus et instable. Instabilité qu’on retrouve de façon atténuée en Espagne, et même en Allemagne.

    Une vraie clarification peut donc demander du temps, en attendant que des dominantes émergent. Dans une large mesure, la question n’est pas uniquement de savoir si la gauche, le centre ou la droite politiques l’emporte, mais laquelle. Dans l’état actuel des choses, les partisans d’une option claire ne peuvent être que déçus. Je plaide comme on sait, pour la pensée politique classique et conservatrice (ainsi dans mon dernier livre Le grand retournement). Mais le vent ne lui est apparemment pas favorable. Dans l’intervalle, il s’agit alors de faire au mieux, malgré le contexte. Ce sera une affaire de conjoncture, et de personnes ; c’est important car c’est l’affaire de tous, mais cela ne sera sans doute que des palliatifs. Sur le fond, il faut en revanche recourir à la vieille sagesse chinoise : dans les temps défavorables, il s’agit de survivre et de préserver ce qui importe, et donc de transmettre l’essentiel. Sans s’affoler : la roue de l’histoire tourne.

    Illustration : On se perd en conjectures sur le nouveau culte gauchiste francilien, qui témoigne d’une certaine confusion des esprits.

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    Source : https://www.politiquemagazine.fr/

  • Feuilleton : ”Qui n 'a pas lutté n'a pas vécu”... : Léon Daudet ! (1)

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     (retrouvez l'intégralité des textes et documents de ce sujet, sous sa forme de Feuilleton ou bien sous sa forme d'Album)

    Aujourd'hui : Au sommaire...; présentation du feuilleton...

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    ndlr : ce sujet a été réalisé à partir d'extraits tirés des dix livres de souvenirs suivants de Léon Daudet : Paris vécu (rive droite), Paris vécu (rive gauche), Député de Paris, Fantômes et vivants, Devant la douleur, Au temps de Judas, l'Entre-deux guerres, Salons et Journaux, La pluie de sang, Vers le Roi...

     

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    1. Au sommaire de ce Feuilleton...

    1. L'enfance et l'adolescence heureuse...
    2. Un jeune homme insouciant, potache, voyageur...
    3. Ouvert, curieux de tant de choses et de gens...
    4. Avant, puis avec Maurras, "la" rencontre de sa vie...
    5. Sièges du mouvement, portraits de dirigeants...
    6. Tranches de vie...
    7. L'avant-guerre (I), les débuts du journal...
    8. L'avant-guerre (II), tout pour éviter la guerre...
    9. La Guerre, "la pluie de sang" (I)...
    10. La Guerre, "la pluie de sang" (II)...
    11. Député de Paris, quatre années bien remplies (I)...
    12. Député de paris, quatre années bien remplies (II)...
    13. De Paris à Paris, en passant par la Belgique...
    14. Dernières années, derniers combats, jusqu'au bout.
    15. Léon Daudet vu par... Conclusion.

     

    2. Présentation du Feuilleton...

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    On connaît la formule célèbre de Thibaudet, selon laquelle "Maurras est un continent". Mais, chacun à sa façon, chacun avec son style et dans son domaine, Bainville et Daudet sont, aussi, "des continents". Et leur amitié avec Maurras fut si indéfectible (seule la mort vint les séparer); leur action fut si intimement mêlée à la sienne, à partir du moment où ils le rencontrèrent, pour ne plus jamais le quitter; leur fréquentation réciproque fut si constante ("Au bon temps, nous nous voyions tous les jours", dira Maurras, lorsque mourut Bainville...); leur accord sur tout ce qui est essentiel fut si complet, si profond, si permanent... qu'il est impossible de parler de l'un des trois amis (au sens le plus complet et le plus fort du terme "ami", celui de l'amitié d'esprit) sans évoquer, immédiatement et pour ainsi dire automatiquement, les deux autres.

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    Qu'on n'aille cependant pas imaginer une désolante et stérile uniformité régnant entre eux : en dehors des points majeurs, sur lesquels l'accord est indispensable pour la véritable amitié ("eadem velle, eadem nolle, ea est vera amicitia...") la plus grande liberté régnait, au contraire, entre eux sur tous les autres sujets : Henri Massis a raconté plaisamment comment, un soir, alors qu'il ramenait en voiture Jacques Bainville et Léon Daudet, celui-ci lui avait dit, après que Bainville eût été déposé, et juste au moment d'arriver chez lui, au 33 rue Saint-Guillaume : "Maurras, quelle tête politique ! Mais ses idées littéraires, ah ça, non !".
    Tout est dit dans l'anecdote, qui est, de fait, bien plus qu'une anecdote...

    C'est d'ailleurs à Henri Massis, qui lui reprochait de faire l'apologie d'André Gide, que Daudet écrira une courte réponse contenant ces mots :


    "Notre mouvement d'AF n'a subsisté que par l'extrême liberté de chacun de nous - sauf sur le terrain politique - dans les domaines de littérature, de philosophie, des sciences et d'art. Autrement, où irions-nous ?..."


    Voilà pourquoi - en ayant commencé par un Album "Maîtres et témoins, I : Frédéric Mistral" - et après un Album "Maîtres et témoins, II : Jacques Bainville", un Album "Maîtres et témoins, III : Léon Daudet" s'imposait tout naturellement. Et voici maintenant cet Album présenté sous une autre forme : celle du feuilleton, pour certains plus agréable ou plus commode à consulter...

    Partir, ainsi, à la découverte de Léon Daudet, homme et oeuvre confondus; "lire Daudet", c’est d'abord partir à la découverte d'un homme d'exception, d'une personnalité hors norme; c'est aussi découvrir, de l'intérieur, l'histoire de l'Action française; et enfin, bien sûr, parcourir 60 ans de la vie publique et officielle française, et pas seulement "politique".
    C'est aussi la lire en dehors du cadre de la vérité officielle, et se permettre ainsi d’accéder à la vérité vraie, à l’histoire véritable de l’extrême-fin du XIXème siècle et de la première moitié du XXème siècle français, échappant ainsi aux travestissements, déformations, omissions ou mensonges en tous genres et de toutes natures dont les chroniqueurs patentés du Pays légal l’ont littéralement truffée.
    Le tout, à la manière et avec le style inimitable de Daudet, sa verve et sa truculence qui furent, à la fois, sa principale qualité et, probablement aussi, son principal défaut. Et qui permettra de découvrir un homme extraordinairement ouvert, curieux de tout, qui savait vivre en dehors de "la politique" et qui aimait aussi bien Monet ou Camille Claudel, Barbey d'Aurevilly, Courteline, Rodin ou... Picasso !

    Cet Album a été construit, pour l'essentiel, à partir des dix ouvrages de "Souvenirs" suivants de Léon Daudet :

    1. Les sept volumes de ses Souvenirs proprement dits, dont Pierre Gaxotte dit qu’ils sont "indestructibles" et dont Marcel Proust parle comme de "prodigieux Souvenirs", ajoutant :
    "Les ressemblances entre Saint-Simon et Léon Daudet sont nombreuses : la plus profonde me semble l'alternance, et l'égale réussite, des portraits magnifiquement atroces et des portraits doux, vénérants, nobles."
    Bernard Oudin, qui a établi les notes de "Souvenirs et polémiques" dans la collection Bouquins (1992) ajoute, pour sa part :


    "Nul n’a su comme lui faire le portrait au vitriol de ses contemporains, esquisser une silhouette en quelques traits mordants, décerner des surnoms qui collent à la peau, trouver la formule assassine qui étend raide l’adversaire, décrire avec une verve prodigieuse les ridicules d’un salon, d’une académie, d’une assemblée parlementaire, d’un tribunal, évoquer l’ambiance hallucinante des hôpitaux de sa jeunesse. Tout un monde, toute une époque, ressurgissent sous sa plume, avec les couleurs de la vie même." :


    1. Première série des souvenirs : "Fantômes et vivants" (Souvenirs des milieux politiques, littéraires, artistiques et médicaux de 1880 à 1905), paru en 1914;
    2. Deuxième série : "Devant la douleur", paru en 1915;
    3. Troisième série : "L’Entre-deux-Guerres" (Souvenirs des milieux politiques, littéraires, artistiques et médicaux de 1880 à 1905), paru également en 1915;
    4. Quatrième série : "Salons et journaux" (Souvenirs des milieux politiques, littéraires, artistiques et médicaux de 1880 à 1908), paru en 1917;
    5. Cinquième série : "Au temps de Judas" (Souvenirs des milieux politiques, littéraires, artistiques et médicaux de 1880 à 1908), paru en 1920;
    6. Sixième série : "Vers le Roi" (Souvenirs des milieux politiques, littéraires, artistiques et médicaux de 1908 à 1914), paru en 1921;
    7. Septième et dernière série : "La pluie de sang", paru en 1932, et consacrée à la Guerre de 1914/1918...

    2. Puis trois autres ouvrages qui, s'ils ne portent pas explicitement le nom de "Souvenirs" peuvent et doivent pourtant, bel et bien, être considérées comme tels, et donc être ajoutés à cette liste, dont ils font de toute évidence partie, de fait :

    1. "Député de Paris", dans lequel Daudet raconte ses quatre années et demi de mandature dans la Chambre Bleu horizon, paru en 1933;

    2. "Paris vécu", en deux tomes, "Rive droite", "Rive gauche", parus en 1929 et 1930.

    Les passages concernant "Un autre Victor Hugo" ont été tirés de "La tragique existence de Victor Hugo"; et ceux concernant l'exil à Bruxelles, de "Vingt-neuf mois d'exil", deux autre ouvrages de Léon Daudet...

    Enfin, quelques passages ont été empruntés au livre d'Albert Marty, "L'Action française racontée par elle-même"; au "Maurras et notre temps", d'Henri Massis; et, en ce qui concerne la critique du libéralisme, au "Stupide XIXème siècle", que Daudet fit paraître en 1922, alors qu'il était Député, en même temps que son "Sylla".
    Et, pour ce qui est d'un grand nombre de renseignements précis (dates, lieux, chiffres, personnages, synthèses...) on largement utilisé le remarquable Dictionnaire Encyclopédique d'Histoire, de Michel Mourre...

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    Croquis de Léon Daudet, tiré de la Base de données de l'Assemblée nationale. Par un curieux hasard de date, né un 16 novembre (1867) c'est aussi un 16 novembre (1919) qu'il fit son entrée à l'Assemblée nationale, comme député du 3ème secteur de Paris (XVIème arrondissement) : il avait donc très exactement 52 ans...



    Juste deux mots, avant d'ouvrir et de feuilleter cet Album, fait pour établir ou rétablir la vérité, face au(x) mensonge(s) officiel(s) d'une vérité "politiquement et historiquement correcte(s)", alors qu'on n'apprend souvent au public qu'une histoire grossièrement tronquée, falsifiée, dénaturée...

    1. D'abord, pour ceux qui seraient surpris, voire choqués, par la verdeur de certaines phrases, jugements, appréciations etc. de Daudet : le "b.a.-ba" de tout historien, ou de quiconque lit un texte "ancien", en tout cas d'une autre époque, est de ne pas le faire avec la mentalité de son propre temps, à lui, mais en se remettant dans l'esprit et la mentalité de l'époque qu'il étudie : or, du temps de Daudet, tous les polémistes, à quelque bord qu'ils appartînssent - de l'extrême-droite à l'extrême-gauche - s'exprimaient avec une virulence dont on n'a plus idée aujourd'hui; et, souvent même, ils dépassaient très largement les "verdeurs" de Léon Daudet...

    2. Ensuite, sur deux termes de vocabulaire. Là où Daudet parle (il y a cent ans...) de "République" et de "Démocratie", les royalistes d'aujourd'hui préfèrent parler de "République idéologique", de "démocratie idéologique", et critiquer "le Système". Nous ne sommes pas hostiles, en effet, à la république en soi - conçue comme la "res publica", la "chose publique" - ni à la participation active des citoyens à cette "res publica", qu'est la vraie démocratie. C'est la République idéologique, la Démocratie idéologique que nous rejetons : nous sommes, comme le disait Maurras, 36.000 fois républicains, à la base, au niveau communal; fédéralistes au niveau intermédiaire des Provinces (technocratiquement baptisées aujourd'hui "Régions", par un Système qui a rétabli, mais mal, en partie seulement, et d'une façon aberrante pour certaines, les Provinces que la Révolution avait supprimées, justement, par idéologie...); et, enfin, pour reprendre l'expression de Léon Daudet, nous sommes royalistes une seule fois, uniquement "au sommet", car nous souhaitons "nationaliser l'État par le Roi" : le Roi, protecteur des républiques françaises; ou, les républiques sous le Roi, tel est - reprenant les formules de Maurras - le vocabulaire employé par les royalistes aujourd'hui. Celui de Daudet s'explique par son contexte (une République idéologique récente, datant de 1875, et voulue par l'étranger, en l'occurrence, l'Allemagne de Bismarck) : autres temps, autres mots, et autre façons de "présenter" les choses. Mais ce sont bien, toujours, évidemment, les mêmes idées...

  • Société & Actualité • Nul n’osera décapiter la République

     

    Par Aristide Leucate

     

    3266751844.jpgPlus que quelques jours et nous serons fixés sur les deux outsiders qui auront réussi à accéder au second tour de l’élection présidentielle. Il ne sera proposé ici aucun pronostic, tant les imprévus et autres surprises peuvent toujours survenir, en application de cet aphorisme, souvent vérifié, selon lequel « lorsque vous avez éliminé l’impossible, ce qui reste, si improbable soit-il, est nécessairement la vérité » (Arthur Conan Doyle). Toutefois, pouvons-nous, sans risque de nous tromper, prophétiser que quel que soit l’heureux élu, rien ne changera positivement pour la France et les Français.

    Commençons par observer que les onze candidats revendiquent ne pas faire partie du « Système » et se présentent même comme « anti-Système ». Il ne s’agit, rien de moins, que d’un effet d’annonce apophatique (ou, si l’on préfère, un discours récurrent centré sur le déni) dont le but est prosaïquement d’attirer le chaland dans les mailles piégeuses de son filet électoraliste. Le plus troublant, en apparence, réside dans le fait qu’aucun d’entre eux ne semble partager une définition commune de ce qu’ils dénoncent…

    À chacun son système

    L’on n’est guère avancé, sauf à considérer avec Alain de Benoist que « les choses s’éclairent si on ajoute un adjectif ». En effet, « les maurrassiens s’en prennent au système démocratique, les antilibéraux au système capitaliste, les écologistes au système productiviste, les tenants de la théorie du genre au système familial ». Cependant, poursuit-il, « si le mot Système est vague, cela correspond aussi à son caractère intrinsèquement englobant ». Et de poursuivre : « Une critique anti-Système est toujours une critique globale. Elle peut viser le couple droite-gauche, le système des partis, la classe politique dans son ensemble, ou encore ce qu’on appelle l’Establishment, la Caste, la Nouvelle Classe, les élites, etc. Dans tous les cas, on s’en prend à un tout dont les parties font système. » (Monde & Vie, mars 2017) S’emmurant, plus que jamais, dans une logique d’enchérissement permanent, le Système démo-représentatif n’est jamais à court d’imagination ; partant, nos onze concurrents renforcent la résilience du Système qu’ils vitupèrent, démontrant, par là même, qu’ils en font partie. C’est dire que l’on ne doit raisonnablement rien attendre du futur gouvernement du quinquennat à venir.

    Nécessité de la monarchie

    Le régime républicain perdurera, aucun des candidats en lice n’ayant prévu de rappeler un prince dynastique sur le trône vacant. L’enjeu n’est pas que de principe – il n’a même, d’ailleurs, rien à voir avec un quelconque principe –, attendu précisément que la preuve a été maintes fois administrée, notamment par la République elle-même, que cette dernière était proprement nocive à la France. Le maître de l’Action française, Charles Maurras, a écrit une multitude de belles et fortes pages s’attachant à démonter l’écheveau républicain de façon à démontrer la nécessité politique et vitale de la monarchie : « Dans l’état présent des nations, les royaumes, les empires, les républiques se plaignent tous du gaspillage financier : ce gaspillage sort de la confusion générale du Parlement et du Souverain. […] La Monarchie existe par sa propre force, sua mole stat. Elle n’a pas besoin de consulter à chaque instant un prétendu souverain électeur. […] Précisément parce que son principe ne l’oblige pas à harceler les gens, à aller les sommer constamment de la trouver belle. La République est une religion. La Monarchie est une famille. Celle-ci n’a besoin que d’être trouvée acceptable. Celle-là exige que l’on suive ses rites, ses dogmes, ses prêtres, ses partis. » (Mes idées politiques, 1937) Contre la démesure sans fin des partis, ferments de stériles divisions, la monarchie a pour elle la vertu rare de la tempérance.

    La souveraineté sauve

    Il ne s’agit point d’une clause de style, mais de la claire et haute conscience du souci primordial de la politique qu’avait génialement entrevu Pierre Boutang dans Reprendre le pouvoir : le salut. « Il y a souci lorsqu’émerge une possibilité de perdre ou de sauver », soulignait-il. Ce souci est inhérent à l’exercice du pouvoir dont « la nature […] est de sauver » ; « celui qui sauve – les autres et les pauvres, le peuple, donc –, celui qui est en situation de garder sauf, exerce un pouvoir légitime devant quoi les clercs, les “intellectuels” n’ont pas plus à se prosterner qu’à prendre des airs dégoutés », précise Boutang. Dans sa quête du « secret » politique, le même remarquait judicieusement que cet acte de sauver avait quelque cousinage étymologique avec le mot salut : « ancienne monnaie (salus nummarius) ainsi nommée parce que sa légende portait “salus populi suprema lex esto” ». De première part, l’on voit combien est irréductible le lien entre le pouvoir et le peuple et que ce lien ne peut être soumis aux caprices et humeurs, par définition inconstants et variables, de la seule volonté, même et surtout générale. De seconde part, comment rester aveugle à cette homologie entre ce salus nummarius et la prérogative régalienne, héritée de Jean II le Bon, de battre monnaie, soit après le droit de lever l’ost (l’armée) et celui de rendre justice, le signe le plus tangible, le plus visible, sinon le plus éclatant de la souveraineté ? Patiemment, la monarchie française a fini par comprendre qu’en aliénant ce souverain bien, elle se condamnait à la servitude.

    Que n’a commis, pourtant, la République en se donnant sans retenue, ni solide contrepartie, et avec une imprudence consommée, à l’oligopole de Bruxelles ? Ce faisant, elle a considérablement alourdi les autres malheurs français, là où la monarchie, sans probablement les éviter, les aurait assurément tempérés. Parmi les candidats animés de la farouche volonté de s’extirper de l’hydre européo-mondialiste, combien parviendront réellement à leurs fins ? L’invocation des mânes gaulliennes risque, indubitablement, de s’avérer inopérante. Le temps manquera, des pesanteurs de toutes sortes se feront irrémédiablement sentir, sans parler des obstacles qui se multiplieront comme les pains christiques.

    L’État a perdu le peuple

    Mais en perdant le pouvoir, l’État a aussi perdu le peuple. Celui-ci est devenu parfaitement abêt, gâté par une société d’abondance où le principe de plaisir – analysé par Zygmunt Bauman comme le « le fait d’avoir des sensations, voire même d’en espérer de nouvelles, que l’on a tendance à vivre comme un plaisir » –, s’est substitué à l’éthique de la responsabilité, pour parler comme Max Weber. La constance avec laquelle, scrutins après scrutins, nos contemporains – bien que progressivement gagnés par une lassitude confinant à la lucidité – pérennisent, volens nolens, le système démocratique sans jamais s’émanciper de son Église républicaine, est un indicateur fiable de l’état de liquéfaction avancée de la société actuelle. Le naturaliste américain Henry-David Thoreau ne cessait de s’étonner de cette « bien étrange époque que celle ou les empires, les royaumes et les républiques viennent mendier à la porte d’un simple particulier et s’installer à ses côtés pour débiter leurs doléances » : « je ne peux pas prendre un journal sans trouver quelque lamentable gouvernement, aux abois et en fin de course, qui vient intercéder auprès de moi, lecteur, afin que je vote pour lui qui m’importune autant qu’un mendiant italien » (Essais, 2007). À méditer…   

  • Allons-nous vers une révolution économique et monétaire ?, par François Schwerer.

    Nous sommes entrés dans une économie de la dette où tous, nations, entreprises et individus, pourraient vivre à crédit. Ou ne s'agit-il pas de passer à une monnaie électronique universelle, plus sûr moyen de contrôle jamais inventé ?

    6.jpgÀ la faveur de la crise sanitaire qui occupe les médias et inquiète les esprits, les divers gouvernements ont pris des mesures économiques et financières qui laisse augurer d’un changement en profondeur de tout le système monétaire mondial. Dans la partie qui se joue sous nos yeux, si le président français se préoccupe d’abord de la « déconstruction » du système actuel, ces homologues américains, allemands, russes et chinois avancent leurs pions tout comme les géants du commerce électronique et des communications.

    La crise des subprimes n’a-t-elle été qu’une répétition générale ?

    La crise économique de 2007/2008 a commencé aux Etats-Unis avec l’éclatement de la « bulle » des subprimes. On a beaucoup glosé sur ses causes et ses conséquences mais on a souvent laissé dans l’ombre l’enchaînement technique des événements. Or, dans le déroulé du processus trois éléments principaux sont à prendre en considération : une utilisation inconsidérée des crédits par des emprunteurs qui n’avaient pas les moyens de les rembourser, un taux variable de ces crédits présentés comme particulièrement bas pour être attractifs (et augmentant brutalement au bout de deux ou trois ans) et un équilibre provisoirement assuré par une augmentation non justifiée par la réalité économique de la valeur des actifs servant de garantie aux opérations. En un mot, l’enrichissement individuel n’était plus recherché dans la production économique mais dans la spéculation financière.

    Le système a explosé parce qu’il existe une incompatibilité entre l’augmentation des taux d’intérêt et celle des actifs financiers. Si les taux augmentent la valeur des actifs diminue (et inversement) ; dès lors l’augmentation des taux des crédits devaient fatalement conduire à une baisse de la valeur des actifs donnés en garantie. Les emprunteurs ne pouvant rembourser leurs dettes, les prêteurs se sont retrouvés à la tête d’actifs dévalorisés. Plutôt que de venir en aide aux petits emprunteurs imprudents et d’assainir le marché immobilier, les pouvoirs publics ont œuvré pour sauver les prêteurs en inondant les marchés de liquidités et pour restaurer artificiellement la valeur des actifs confisqués du fait du jeu des garanties.

    Si ces mesures ont donné l’apparence d’un redémarrage du système économique, elles ont créé les conditions d’une nouvelle crise beaucoup plus grave. En effet, les emprunteurs ne sont plus des particuliers dont l’horizon se limitait à se loger mais des États voulant maintenir des systèmes sociaux fondés sur un mécanisme de Ponzi[1] et des groupes financiers multinationaux qui veulent dominer le marché mondial. Les taux d’intérêt sont maintenus artificiellement bas par des banques centrales qui accompagnent le système et la valeur des actifs donnés en garantie s’envole au gré des échanges boursiers spéculatifs.

    Les économistes en vue expliquent que ce nouveau système est sans risque puisque l’on a changé le paradigme financier ; les taux ne sont pas destinés à augmenter, ils sont durablement maintenus bas par un consensus politique mondial. Cependant, ils font le pari que d’une part il n’y aura pas d’accident sur le marché boursier international, lequel viendrait ruiner brutalement la confiance dans la valeur des actifs donnés en garantie, et que d’autre part aucun État ne sera jamais tenté d’augmenter les taux d’intérêt.

    La pensée économique est fondamentalement viciée

    Intellectuellement, force est de constater le vice de la pensée économique contemporaine qui affirme que plus les liquidités sont abondantes, plus le crédit est bon marché et plus la croissance économique réelle est élevée. Il justifie que l’on soit passé d’une économie de capitaux à une économie d’endettement et que l’on ait appliqué aux « marchés » du crédit les mêmes règles qu’aux marchés des produits et services. Mais le marché du crédit ne fonctionne pas comme celui des biens et services. Sur le marché des crédits, « l’offre et la demande augmentent en même temps. Les prêts sont perçus comme sûrs puisqu’ils sont garantis par une richesse qui s’apprécie. Ce n’est pas le cas dans la production industrielle, par exemple : lorsque l’offre augmente plus que la demande, il se produit un ajustement des prix à la baisse. Pourquoi ? Parce que la demande est indépendante de l’offre. Au contraire, en matière de crédit, offre et demande vont dans le même sens parce que toutes deux sont attirées par un facteur commun qui est la perspective de hausse de la valeur des actifs, ce qui empêche le taux d’intérêt, régulateur du crédit, d’atteindre un équilibre. […] Le crédit est fait pour les promesses d’enrichissement futur, et elles sont les mêmes pour le prêteur comme pour l’emprunteur. D’où l’effet de boule-de-neige » [2].

    En fait, le vice fondamental de la pensée économique est de considérer que la sphère économique et financière obéit à des lois mathématiques que l’on peut piloter grâce à des algorithmes et que la science maîtrise. Il occulte le fait qu’elle est en réalité une « science humaine » c’est-à-dire une sphère qui dépend de décisions individuelles multiples elles-mêmes influencées par des considérations psychologiques, des équilibres sociologiques et des intérêts politiques. C’est le même vice qui conduit les conseillers de Joe Biden à expliquer que dans la théorie monétaire moderne, le niveau du crédit n’est pas un problème pour un État qui contrôle sa monnaie… tant que le phénomène inflationniste est contenu !

    Nos hommes politiques en profitent pour communiquer sur le fait que, la science économique ayant fait des progrès et le monde étant plus uni qu’autrefois, nous savons désormais comment surmonter toutes les difficultés. La preuve ? Nous sommes sortis de la crise des subprimes ! On peut donc continuer à vivre à crédit, à consommer sans travailler, à bénéficier de soins gratuits, à distribuer des subventions sans augmenter les impôts. Et, en même temps, à « offrir » aux épargnants des taux d’intérêt négatifs !

    Le système actuel est-il pérenne ?

    On peut non seulement en douter, mais encore on peut penser que nos hommes politiques aussi en doutent. Chacun sent bien que les réactions humaines peuvent être imprévisibles et donc que le système économique n’est pas un moteur bien réglé qui peut tourner indéfiniment sans qu’aucune usure ne vienne le gripper. Chacun sait bien que les épargnants ne vont pas voir leur pouvoir d’achat s’éroder sans rendre les banques dans leur ensemble responsables de ce qu’ils considèrent comme un vol. Chacun comprend que la « croissance » derrière laquelle on court depuis des années et la reprise économique sans cesse retardée ne vont pas d’un coup de baguette magique annuler les montagnes de dettes accumulées. Alors comment expliquer une telle attitude qui, à première vue, paraît suicidaire ?

    Les géants de l’Internet d’abord et certains chefs d’État ensuite commencent à lever un coin du voile sur la révolution monétaire qu’ils appellent de leurs vœux : la monnaie électronique. Si la Chine et la Russie veulent une monnaie électronique garantie par l’État, si Madame Merkel veut une monnaie électronique garantie officiellement par l’Union européenne, il semble que les États-Unis soient plus tentés par une monnaie électronique dont la solidité technique soit garantie par la qualité des programmes informatiques qui la soutiendraient et la solidité économique par le caractère universel de son usage.

    Pour passer en douceur vers ce nouveau système, on apprivoise les agents économiques en faisant circuler électroniquement la monnaie fiduciaire [3] actuelle tout en les poussant à se méfier des banques qui ne sont plus capables d’en garantir ni la valeur ni la circulation universelle. Et pour imposer le nouveau système de référence, les États se livrent à une lutte sans merci dans laquelle ils cherchent à montrer que celui qu’ils veulent construire est le plus sûr. C’est pourquoi les États-Unis mettent en avant leur aura dans les logiciels informatiques et la présence internationale de leurs groupes de sociétés tandis que la Chine s’appuie sur sa capacité de production en tant qu’usine du monde et sur son emprise sur les matières premières.

    Une fois le système bancaire discrédité et le montant des dettes devenu insupportable, il faudra pour assainir la situation passer à une nouvelle forme de monnaie dont l’objet principal sera d’assurer un « lien social » entre tous mais dont la fonction de réserve de valeur aura totalement disparu. En présentant le projet chinois de « monnaie numérique », le Wall Street Journal a, cependant, le 20 avril 2021, souligné ceci : « On s’attend à ce qu’elle donne au gouvernement chinois de nouveaux outils importants pour surveiller à la fois son économie et sa population. […] La monnaie elle-même est programmable. Pékin a testé des dates d’expiration pour encourager les utilisateurs à dépenser rapidement lorsque l’économie a besoin d’un coup de pouce. Cette monnaie est également traçable, ce qui ajoute un nouvel outil à l’arsenal de la surveillance d’État ». Le système américain concurrent donnerait ces outils aux officines de marketing pour permettre de mieux cibler les clients potentiels. En l’état actuel des choses, on ne voit pas bien une monnaie numérique européenne pouvoir s’immiscer d’une façon quelconque dans ce jeu des puissances économiques mondiales.

     

    [1] Système de cavalerie financière dans lequel les nouveaux entrants financent les sortants.

    [2] M. Aglietta, « Capitalisme et désordres financiers », in Géopolitique, n° 102, juillet 2008, p. 24.

    [3] F. Schwerer, « De la circulation électronique des monnaies scripturales vers la monnaie électronique universelle », in Actes du Colloque de droit des affaires consacré au « Droit des affaires au XXIe siècle », Deauville, 27 et 28 juin 2000.

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    Source : https://www.politiquemagazine.fr/

  • Littérature & Société • Relire Soljenitsyne pour retrouver une source de vérité et de courage

      

    Par   

    soleil.jpgTRIBUNE - À l'occasion du dixième anniversaire de la mort d'Alexandre Soljenitsyne et du quarantième anniversaire de son discours d'Harvard, Laurent Ottavi revient sur les maux occidentaux que pointait le dissident russe. Il y voit une dimension prophétique. [Figarovox 3.08]. « Ne pas vivre dans le mensonge » où, de fait, nous vivons de tant de manières.  Soljenitsyne peut aider notre monde à le détruire.    

     

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    Ce 3 août 2018 [était] le dixième anniversaire de la mort d'Alexandre Soljenitsyne. Le dissident russe, auteur d'Une journée d'Ivan Denissovitch et de L'Archipel du Goulag, fût une figure controversée, souvent qualifiée de « réactionnaire ». Le ressentiment de l'élite libérale américaine à son égard remonte à un discours retentissant, Le déclin du courage, dont c'est le 40ème anniversaire cette année. Le texte de ce discours prononcé à Harvard a été réédité en 2017 aux éditions des Belles lettres. 

    Il faut le resituer dans son contexte et dans la biographie de son auteur, pour en saisir toute la portée.

    Du Goulag à Harvard

    À la veille de la victoire des Alliés, Alexandre Soljenitsyne écrit dans une correspondance que Staline est un chef de guerre incompétent, qui a affaibli l'Armée rouge par les purges et s'est imprudemment allié à Adolf Hitler. Cette critique le conduit pendant huit années dans l'enfer du Goulag, « où ce fut, écrit-il, mon sort de survivre, tandis que d'autres - peut être plus doués et plus forts que moi - périssaient ». Il révèle l'existence des camps de travaux forcés au monde dans Une journée d'Ivan Denissovitch. Staline, depuis, est mort. Ce texte est publié dans une revue littéraire avec l'autorisation de Nikita Khrouchtchev. Il donne à son auteur une renommée en Russie mais aussi dans le monde.

    Alexandre Soljenitsyne est récompensé du prix Nobel de littérature en 1970. Après d'autres écrits et sa demande de supprimer toute censure sur l'art, il fait paraître en 1973, à Paris, son livre le plus connu, L'Archipel du Goulag. Le dissident est déchu de sa nationalité et exilé. Il vit d'abord à Zurich puis s'installe aux États-Unis. Il y réside depuis deux ans, dans la plus grande discrétion, quand il est invité par l'université d'Harvard à prononcer un discours lors de la séance solennelle de fin d'année, le 8 juin 1978.

    La parole du dissident, dans le contexte de guerre froide, est très attendue. Alexandre Soljenitsyne, pensent les Occidentaux, est venu faire l'éloge du monde libre. Quelle ne fût pas leur surprise ! Le dissident ne fait pas le procès du communisme ; il fait un portrait à charge de l'Occident.

    L'amère vérité

    Il le fait « en ami », mais avec l'exigence, presque toujours amère, de la vérité, qui est la devise (Veritas) d'Harvard. Le texte qu'il prononce ce jour-là a traversé le temps de la guerre froide pour nous renseigner, encore aujourd'hui, sur ce que nous sommes. C'est pourquoi il mérite encore toute notre attention. Il n'est pas, comme a pu le penser l'élite américaine, celui d'un réactionnaire ou d'un homme ingrat à l'égard du pays qui l'a accueilli. Alexandre Soljenitsyne reste fidèle dans ce discours à sa ligne de conduite passée, à l'honneur, à la Vérité.

    « Ne pas vivre dans le mensonge » était le nom de son dernier samizdat paru en URSS. Qu'est-ce que le totalitarisme, en effet, sinon essentiellement un mensonge en ce qu'il cherche à dénaturer l'homme en faisant fi de sa condition et à transfigurer le monde ? Alexandre Soljenitsyne parle d'autant plus librement pendant son discours d'Harvard qu'il se trouve dans une démocratie. La réception si controversée de ce discours l'amènera à faire cette réflexion dans ses mémoires : « Jusqu'au discours d'Harvard, écrit-il, je m'étais naïvement figuré vivre dans un pays où l'on pouvait dire ce qu'on voulait, sans flatter la société environnante. Mais la démocratie, elle aussi, attend qu'on la flatte ».

    Le discours d'Alexandre Soljenitsyne, à la fois méditatif et audacieux, est une alerte, une mise en garde, un avertissement. Comme la vigie, son auteur envoie des signaux. Ce qu'il pointe n'a fait que s'aggraver depuis. A posteriori, le discours d'Harvard s'est donc avéré, en grande partie, prophétique. Soljenitsyne voit suffisamment bien ce qui est, pour anticiper ce qui sera. « En ami », il a le courage de le dire.

    Le déclin du courage

    Dès le début de son texte, il remet l'orgueil du « monde libre » à sa place, en affirmant qu'il ne recommanderait pas la société occidentale comme «idéal pour la transformation» de la sienne : « Étant donné la richesse de développement spirituel acquise dans la douleur par notre pays en ce siècle, le système occidental dans son état actuel d'épuisement spirituel ne présente aucun attrait ». Le caractère de l'homme s'est affermi à l'Est et affaibli à l'Ouest. Il vise ici, à la fois la prétention des Occidentaux à se croire la pointe avancée du Progrès dans ses multiples dimensions et à vouloir imposer leur modèle - les autres pays étant jugés « selon leur degré d'avancement dans cette voie » - mais aussi la décadence de l'Occident. Il souligne sa débilité, c'est-à-dire sa faiblesse, liée à ce qu'il nomme le déclin du courage, « qui semble, dit-il, aller ici ou là jusqu'à la perte de toute trace de virilité » et qui « a toujours été considéré comme le signe avant-coureur de la fin ». Pour lui, l'esprit de Munich continue à dominer le XXe siècle.

    Alexandre Soljenitsyne cible plus particulièrement la couche dirigeante et la couche intellectuelle dominante, c'est-à-dire ceux qui donnent « sa direction à la vie de la société ». Il parle notamment des mass-médias qui (dés)informent avec hâte et superficialité. La presse, alors qu'elle n'est pas élue, est d'après lui la première force des États occidentaux et encombre l'âme de futilités au nom du « droit de tout savoir ». Elle est marquée par l'esprit grégaire, comme le milieu universitaire, empêchant aux esprits fins et originaux de s'exprimer.

    La lâcheté, l'indisposition au sacrifice des classes les plus socialement élevées trouvent évidemment un écho dans notre monde contemporain marqué par la révolte des élites des pays occidentaux et l'expansion de l'islamisme, qui a su habilement tirer parti de nos lâchetés. Aujourd'hui comme hier, le défaut de courage et le refoulement du tragique de l'Histoire se paient par le grossissement du monstre. Que l'on songe à l'après-Bataclan et aux injonctions au «tous en terrasse ! » qui l'ont accompagné en lisant ces lignes : « un monde civilisé et timide n'a rien trouvé d'autre à opposer à la renaissance brutale et à visage découvert de la barbarie que des sourires et des concessions (…) vos écrans, vos publications sont emplis de sourires de commande et de verres levés. Cette liesse, c'est pourquoi ? ».

    Juridisme sans âme 

    L'Occident, nous dit Soljenitsyne, s'est perdu en atteignant son but. Dans la société d'abondance déchristianisée, l'homme est amolli. Son confort sans précédent dans l'histoire lui fait rechigner au sacrifice et perdre sa volonté, ce qui est un problème bien plus grave que l'armement : « quand on est affaibli spirituellement, dit-il, cet armement devient lui-même un fardeau pour le capitulard ». Il a l'illusion d'une liberté sans borne (« la liberté de faire quoi ? ») mais il ne fait que se vautrer dans l'insignifiance. Comme l'homme-masse décrit par le philosophe espagnol Ortega y Gasset, il réclame sans cesse des droits et délaisse ses devoirs. Les grands hommes, dans ce contexte, ne surgissent plus.

    Cette société d'abondance déchristianisée est le fruit d'une conception du monde née avec la Renaissance et qui « est coulée dans les moules politiques à partir de l'ère des Lumières ». C'est le projet d'autonomie : l'homme est sa propre loi. De l'Esprit (Moyen Âge), le curseur a été excessivement déplacé vers la Matière (à partir de la modernité), au risque de la démesure. L'érosion de ce qu'il restait des siècles chrétiens a ensuite amené, selon Soljenitsyne, à la situation contemporaine.

    Corollaire de la société de l'abondance où le marché est roi, le droit est omniprésent en Occident. Ne permet-il pas de compenser la dégradation des mœurs ? Autant l'URSS est un État sans lois, autant l'Occident est aujourd'hui, selon Soljenitsyne, un juridisme sans âme. Il est dévitalisé par un droit « trop froid, trop formel pour exercer sur la société une influence bénéfique ». Il encourage la médiocrité, plutôt que l'élan. Il ne peut suffire à mettre les hommes debout, comme l'exigent pourtant les épreuves de l'Histoire.

    Pour se hisser, l'homme a besoin de plus. Chez le chrétien orthodoxe qu'est Soljenitsyne, le remède est spirituel. En conclusion de son discours, il juge que « nous n'avons d'autre choix que de monter toujours plus haut », vers ce qui élève l'âme, plutôt que vers les basses futilités. Ce plus-haut est un frein aux pulsions, aux passions, à l'irresponsabilité. Il donne du sens. Il donne des raisons de se sacrifier, de donner sa vie. Le propos de Soljenitsyne est condensé dans la célèbre phrase de Bernanos : « on ne comprend absolument rien à la civilisation moderne si l'on n'admet pas d'abord qu'elle est une conspiration universelle contre toute espèce de vie intérieure ». Cette vie intérieure, chez le dissident passé par l'enfer du Goulag, est ce qui nous est le plus précieux. À l'Est, elle est piétinée par la foire du Parti, à l'Ouest ; elle est encombrée par la foire du commerce.

    « Ne soutenir en rien consciemment le mensonge »

    La philosophe Chantal Delsol, en s'appuyant en grande partie sur les dissidents de l'est (dont Soljenitsyne), a démontré dans La Haine du monde que la postmodernité poursuivait les mêmes finalités que les totalitarismes. Celles de transfigurer le monde et de renaturer l'homme. Seulement, elle le fait sans la terreur mais par la dérision.

    La postmodernité, comme le communisme, engendre des démiurges qui font le choix du mensonge. Le démiurge se désintéresse de sa vie intérieure. Il veut, non pas se parfaire, mais être perfection. Il veut, non pas parfaire le monde, mais un monde parfait. Les apôtres de la gouvernance mondiale jettent les nations aux poubelles de l'Histoire. Les idéologues du gender font fi des différences sexuelles. Les transhumanistes promettent « l'homme augmenté » débarrassé de sa condition de mortel et capable de s'autocréer.

    Comme Chantal Delsol, Alexandre Soljenitsyne explique l'attraction longtemps exercée par le communisme sur les intellectuels occidentaux par le lien avec les Lumières françaises, et leur idéal d'émancipation perverti, excessif, qui est toujours celui de la postmodernité. Dans ce cadre, l'enracinement est l'ennemi à abattre. Le matérialisme, qu'il soit communiste ou postmoderne, se déploie sur la destruction de ce qui ancre l'individu à un lieu et à une histoire et de ce qui le relie à un Plus-haut que lui-même.

    Dans un autre discours, celui relatif à son prix Nobel qu'il n'a jamais prononcé, Alexandre Soljenitsyne écrit que seul l'art a le pouvoir de détruire le mensonge. L'homme simple, cependant, peut et doit le refuser: « par moi, ne soutenir en rien consciemment le mensonge ». Relire le discours du dissident russe, c'est retrouver la source de vérité et de courage. Sans elle, l'Occident ne se remettra pas debout face à ceux qui ne lui laissent le « choix » qu'entre deux options : la soumission ou la mort.    

    Laurent Ottavi est journaliste à la Revue des Deux Mondes et à Polony TV.

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  • À quand une vraie politique nationale ?, par Hilaire de Crémiers.

    Les ouvriers sont les premiers à exprimer un nationalisme économique spontané.

    Source : https://www.politiquemagazine.fr/

    Le drame qui vient devrait se traduire par un réajustement de la donne politique. Est-ce possible ?

    L’échec est cinglant. Comme si l’univers entier, y compris les virus et les pandémies, s’était chargé de le désavouer ! Comme si les évènements s’étaient appliqués à se mettre eux-mêmes en travers du « projet » macronien, « son grand projet », celui dont il proclamait d’une voix de tête lancée à la folie : « c’est mon projet ».

    hilaire de crémiers.jpgVoilà trois ans que ce jeune homme, imbu de son rêve personnel, est arrivé au pouvoir. Tout devait changer sous l’impulsion de son programme résolument novateur : un progressisme libéral hautement revendiqué, appris et concocté dans les meilleures écoles de la République, tellement attrayant, tellement conquérant qu’aucun obstacle n’y pourrait résister. C’était la voie de l’avenir. Et ce n’était pas seulement la France, c’était l’Europe, c’était le monde dans son ensemble qui ne pouvaient qu’être transformés, transfigurés par une telle illumination ; une affaire de quelques mois, tout au plus de quelques années. Il suffisait de l’écouter ; c’était pour ainsi dire déjà accompli. Le monde ébaudi n’avait plus qu’à saluer.

    Une mystique de fou

    Qu’on se souvienne de sa profession de foi en Sorbonne en septembre 2017, intitulée « Initiative pour l’Europe » : c’était autant de béatitudes édictées pour l’heureux avènement de ce nouveau royaume, tout au long de l’énumération de ce qu’il appelait les chantiers de « son projet européen » qu’il allait ouvrir et mener à terme pour construire enfin « l’Europe souveraine, unie, démocratique », maîtresse de son destin, dont lui seul, dans la suite des pères fondateurs, les prophètes des temps jadis, avait su garder la bonne nouvelle afin, lui encore et toujours, d’en faire aboutir le dessein quasi christique, là, maintenant, au cours de son fulgurant quinquennat. Il n’hésitait pas à se figurer lui-même menant de haute main cette aventure politique et mystique, y voyant tout simplement l’accomplissement de sa vocation et, par la même occasion, la preuve de son propre génie. Du Bonaparte pour notre temps, et qui se croit vraiment un être providentiel, celui grâce à qui les temps si longuement promis vont enfin se réaliser. Moi, je vais… parce que, moi, je suis…Toujours la même chanson, comme une ritournelle en France, et qui fonctionne toujours, et à laquelle n’a échappé, pour ainsi dire, aucun homme politique, même parmi les plus médiocres. Souvenez-vous de Mitterrand, Chirac, Sarkozy en 2007 et Hollande en 2012, plaçant l’Europe future à construire en tête de leur programme… et tout le tralala qui va avec… Que de phrases, que de grands mots !

    Alors un Macron !… À la vérité, une perpétuelle parodie de religion – car qu’est-ce d’autre que cette République et cette Europe, sans cesse fantasmées, sinon des mythes religieux ? – et qui se couvre du grand mot de laïcité, pour duper les esprits crédules des électeurs et des citoyens, à qui il est dispensé de mirifiques programmes politiques pour alimenter leurs passions et dont les imaginations s’excitent à de si grandioses perspectives messianiques. Macron est, de ce point de vue, la dernière illustration, ô combien topique, de ce confusionnisme typiquement républicain et fâcheusement français : « Tantum religio potuit suadere malorum ».

    Qu’on se souvienne encore de son époustouflante annonce prophétique au forum économique mondial de Davos en janvier 2018, où, se présentant en toute simplicité comme le vainqueur historique en France de l’hydre populiste et nationaliste, il en offrait généreusement lui-même le modèle à l’Europe et au monde dans toute la force et la grâce de ses héroïques vertus pour parachever les exploits de ses travaux herculéens et ainsi purger définitivement la planète de l’infection abominable des monstres qui ne cessaient de menacer, de manière récurrente, la paix sociale et internationale. Il déterminait « les piliers » de « sa stratégie » décisive, toute axée sur « des bouleversements nécessaires », Macron, dans son audace de pensée, n’hésitant jamais devant le grotesque de métaphores incohérentes, exaltation divinatoire oblige ! De cinq ans en cinq ans, précisait-il, il se proposait à chaque niveau, national, européen, mondial, où il se plaçait successivement en acteur principal, de garantir par son efficacité technique, dans le cadre d’un capitalisme rénové et moralisé, une mondialisation « heureuse » et « vertueuse », deux adjectifs qu’il accolait avec jubilation ; selon la pente naturelle de son esprit évangélisateur, il prolongeait ses sublimes considérations du moment, tout à la fois, en philosophie politique et en morale pratique, sans doute à la manière de Paul Ricoeur, son maître prétendu, ou, mieux encore, d’Emmanuel Kant, cité par lui en conclusion dans sa version orale, comme modèle de pensée agissante, capable de renouveler le cœur de l’humanité ; ce qui en dit long sur son propre subjectivisme idéaliste, explication indubitablement congrue du vice fondamental de sa pensée. Ah, Dieu nous préserve des philosophes de quatre sous qui prétendent régenter le monde !

    Pourquoi rappeler ces discours-programmes du début du quinquennat de Macron et qu’il livrait superbement au public du haut de son magistère comme la révélation même de sa doctrine de salut et le dévoilement de son œuvre future, planifiée dès l’origine, de rédemption du monde ? Pourquoi chercher à saisir les raisons profondes de son engagement si total en politique, conçu comme une manière d’incarnation personnelle, qu’il justifiait à chaque instant en invoquant l’impérieuse nécessité de triompher du mal, ce mal du repli sur soi, du souverainisme national, ce mal insupportable des frontières, de l’économie limitée et fermée, ce mal tragique du refus de l’ouverture au multiculturalisme, comme aux progrès évidents de l’éthique sociétale, Mal absolu qu’il désignait et stigmatisait avec véhémence, cet ensemble des forces mauvaises partout à la manœuvre dans le monde et qu’il osait, seul, affronter face à face ?

    La vérité politique essentielle

    Parce qu’en deux ans la réalité a totalement contredit sa vision. Rien ne s’est passé comme il l’a prévu ou prédit. Rien de rien ! Sa chimère a été démentie par les faits. Sauf qu’il a contribué comme ses prédécesseurs, au nom de son utopie, à démanteler la société familiale, nationale et professionnelle, comme à effacer la souveraineté française. Ce qui ne l’empêche pas de continuer à être dans le déni, de ne cesser, soutenu par les médias officiels, de controuver la vérité la plus éclatante de la plus simple des réalités. N’est-ce-pas le sens de ses interventions, et encore tout récemment, alors qu’il doit répondre aux oppositions de plus en plus violentes qui jaillissent continûment tant de la nature des choses que des populations qui subissent les conséquences de ses choix politiques. Et cela ne fait que commencer. Macron n’a pas fini de pâtir de l’implacable retournement des situations. Il est dores et déjà la cible de tous les mécontentements qui ne vont cesser de grossir avec la dégradation des conditions de vie.

    Les chiffres tombent chaque mois plus catastrophiques. Qu’est-ce que ce sera à la rentrée prochaine ? Un chômage qui crèvera tous les plafonds, une chute du PIB si considérable qu’il sera impossible de remonter la pente avant longtemps, entraînant en cascade des ruines et des arrêts d’activités dans des secteurs-clefs, vitaux pour la France, des pertes fiscales et parafiscales irrécupérables, une aggravation des déficits budgétaires, bien au-delà de toutes les prévisions des successives lois de finances rectificatives, et un bilan désastreux, impossible à chiffrer, des caisses de Sécurité sociale et de tous les organismes sociaux, enfin un alourdissement de la dette publique dans des proportions telles qu’elle ne sera plus soutenable, sauf de manière illusoire. Inutile de donner ici des chiffres en constante évolution. La zone euro, en dépit de Macron et des subterfuges de Bruxelles et de la BCE, risque d’en être affectée au point d’exploser. Le Maire et Darmanin peuvent se faire du souci, Edouard Philippe pareillement. On parle de remaniement ministériel ; il en est certains qui en profiteront pour s’esbigner… en se réservant pour l’avenir. Après la crise sanitaire, la France va subir une crise économique et sociale qui ne peut que déboucher en crise politique. Vraisemblablement d’une gravité sans précédent. Comme une fin de régime.

    Les diagnostics ne manquent pas dont la pertinence suscite de plus en plus d’intérêt, d’Éric Zemmour à Marcel Gauchet, de Pierre Manent à André Bercoff, de Coralie Delaume à Michel Onfray, pour n’en citer que quelques-uns, car la liste s’allonge de ceux qui comprennent et qui expliquent, chacun à sa façon, que le système est radicalement faussé. Ce qu’ils remettent en cause, c’est la conception même de la République et de l’Europe, de la souveraineté et de l’avenir de la société qui préside, à travers ce qu’ils appellent les élites, au déclin alarmant de la France. Et ce qui est visé plus précisément, ce sont les chimères macroniennes, dénoncées dans ces colonnes depuis le début, et qui constituèrent pourtant le tremplin assuré de son élection, avec l’aide des financiers véreux qui ont su en profiter et qui ont fait main basse sur les médias de la République officielle. Pour Macron comme pour les prédécesseurs. Car c’est toujours la même chose !

    Et si, donc, c’était une question de régime ? Et pas seulement une question de personne ? Si Macron n’était que le énième avatar de la même erreur première ? Si la République n’était qu’une fausse religion ? L’Europe d’Hollande et de Macron qu’une frauduleuse mystique ? Si la politique exigeait enfin un peu de solide vérité ? Si la France souveraine avait besoin d’un vrai souverain ?

    Hilaire de Crémiers

    Directeur de la publication de Politique magazine et de la Nouvelle revue universelle

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  • Un conseiller régional d'Occitanie, poursuivi pour outrage après avoir crié « Vive le roi ! », par Jean-Claude Bon­ne­mè

    Emma­nuel Crenne, conseiller régio­nal d’Oc­ci­ta­nie explique les motifs de sa mise en exa­men et indique pour­quoi il a rejoint les royalistes.

    Nous repre­nons ici l’entretien de JC Bon­ne­mère avec notre ami Emma­nuel Crenne que nous sui­vons depuis l’intrusion roya­liste, s’apparentant plu­tôt au monôme étu­diant qu’à un acte de vio­lence, au conseil régio­nal et qui a tant déplu aux élus si sen­sibles au res­pect des sanc­tuaires répu­bli­cains. (NDLR)

    Il aura fait par­ler de lui, jusqu’au bout de son man­dat à la Région Occi­ta­nie ! Accro­ché par Bri­gitte Rivière, conseillère régio­nale sor­tante, tête de liste LR dans le Lot, la semaine pas­sée, dans les colonnes de La Vie Quer­cy­noise et sur Actulot.fr. Emma­nuel Crenne qui ne se repré­sente pas à ces élec­tions régio­nales, dénonce des pro­pos « inexacts et men­son­gers » à son égard. M. Crenne tient à faire valoir qu’il n’a pas été mis en exa­men pour des motifs de « vio­lences volon­taires au sein du Conseil régio­nal d’Occitanie », comme l’indique l’élue régio­nale du Lot, mais pour « outrage » envers Mme Carole Del­ga en dénon­çant « sa tra­hi­son et sa col­la­bo­ra­tion avec l’isla­mo-gau­chisme » suite à l’inauguration de la mos­quée de Tou­louse et aus­si pour avoir crié « Vive le roi » dans l’hémicycle du Conseil régio­nal. Retour sur le par­cours poli­tique et le man­dat mou­ve­men­tés de l’ex élu lotois RN.

    Actu : Vous avez démis­sion­né du Ras­sem­ble­ment Natio­nal et vous vous affi­chez roya­liste, c’est une reconversion ?

    Emma­nuel Crenne : J’ai tou­jours été roya­liste, bien que les ori­gines de ma famille soient plu­tôt de nature popu­laire. Mes arrières-grands-parents sont des immi­grés ita­liens, qui ont fui le fas­cisme, j’ai une arrière-grand-mère juive… mais pas de trace de sang royaliste.

    Qu’est-ce qui a pu vous ame­ner chez les royalistes ?

    E. C. : Il est vrai qu’en étu­diant l’his­toire de France, j’ai été cho­qué par les mas­sacres révo­lu­tion­naires. Je me suis ren­du compte éga­le­ment que la vision répu­bli­caine de l’his­toire de la Révo­lu­tion n’é­tait pas tout à fait juste, ce qui peut se com­prendre… Je me sou­viens éga­le­ment que mon pro­fes­seur d’his­toire au lycée, m’a­vait qua­li­fié de Chouan. J’ai com­pris pour­quoi, bien plus tard.

    Quelle est votre vision de la socié­té finalement ?

    E. C. : C’est une vision tra­di­tion­nelle ; je pense que l’on vient de quelque part et que l’on va quelque part. Cela ne veut pas dire que je sois confi­né dans le pas­sé. Connaître ses racines ce n’est pas faire preuve d’une fer­me­ture d’es­prit, bien au contraire, c’est savoir les uti­li­ser pour aller de l’avant.

    Vous avez été res­pon­sable du FN puis du RN dans le Lot et élu conseiller régio­nal, avant de quit­ter ce par­ti avec pertes et fra­cas, que s’est-il passé ?

    E. C. : Je m’é­tais enga­gé dans ce par­ti poli­tique, parce que j’a­vais des ami­tiés dans ce cercle-là, mais aus­si par devoir, parce qu’on m’a­vait deman­dé de l’aide. Le cor­pus idéo­lo­gique du RN a cer­tains recou­pe­ments avec ce que je pense, essen­tiel­le­ment concer­nant l’is­la­mi­sa­tion de la socié­té et l’im­mi­gra­tion. Au demeu­rant, j’ob­serve que plus de 60 % des Fran­çais sont sur cette ligne… Pour le reste j’ai quit­té le RN prin­ci­pa­le­ment pour des rai­sons pro­fes­sion­nelles, tout en sou­te­nant l’é­quipe que j’a­vais mise en place autour de Bru­no Ler­voire. Je ne cache­rai pas non plus que j’ai eu quelques fric­tions avec le siège, por­tant sur les loyers des locaux de la permanence.

    Qu’est-ce que cela signi­fie d’être roya­liste en 2021 ?

    E. C. : J’ai pas­sé 20 ans en Angle­terre et j’ai obser­vé le fonc­tion­ne­ment d’une royau­té ins­pi­rée de la monar­chie fran­çaise ; un régime dans lequel l’exé­cu­tif est dynas­tique et non élec­tif. Ce qui per­met à l’exé­cu­tif d’être au-des­sus des par­tis et d’être arbitre. Ceci pré­sente l’a­van­tage d’ap­por­ter un grand équi­libre dans la socié­té et d’é­vi­ter les dérives extrêmes. Ceci explique d’ailleurs en grande par­tie la sta­bi­li­té ins­ti­tu­tion­nelle, éco­no­mique et socié­tale au Royaume-Uni. Mal­gré toutes les crises, la royau­té consti­tue l’ancre de la socié­té. Autre élé­ment fort, la Reine est l’in­car­na­tion de la nation.

    Avouez qu’en France, la royau­té appa­raît comme un régime d’un autre âge ?

    E. C. : Sur le plan his­to­rique, la royau­té domine l’his­toire de France. La construc­tion de la France a été faite par les rois. En France l’É­tat pré­cède la nation alors qu’en Alle­magne, par exemple, c’est l’in­verse. Cet État va construire une nation à par­tir des peuples. Obser­vez que Louis XVI s’a­dres­sait à ses peuples, ce qui n’a pas empê­ché la consti­tu­tion de la nation fran­çaise. Celle-ci se construit avec Jeanne d’Arc, qui en sau­vant le roi, va don­ner un esprit natio­nal, pour la pre­mière fois. Ain­si à par­tir de cette époque-là c’est dans le monarque que s’in­carne la nation.

    Comp­tez-vous prendre des enga­ge­ments au niveau du Lot, à ce sujet ?

    E. C. : Ce sera plu­tôt au plan natio­nal. Certes soyons réa­listes, pour l’heure la res­tau­ra­tion de la monar­chie est une uto­pie. Cela dit en 2016, a été effec­tué un son­dage qui mon­trait que près d’un tiers des Fran­çais étaient favo­rables à une res­tau­ra­tion monar­chique. Ceci est assez éton­nant et montre que ce sont les racines du peuple fran­çais qui parlent, parce qu’au fond, les Fran­çais savent que ce sont les rois qui ont construit la France et dans une période de crise telle que nous la vivons aujourd’­hui, fina­le­ment, cela reste un point d’an­crage pour essayer de sau­ver le pays. Ce qui compte c’est de se poser la ques­tion du sys­tème poli­tique qu’il faut pour la France.

    Vous esti­mez donc qu’une royau­té serait pré­fé­rable à la démo­cra­tie pour la France ?

    E. C. : Aujourd’­hui Emma­nuel Macron se com­porte en chef de par­ti, comme l’ont fait tous ses pré­dé­ces­seurs, peut-être à l’ex­cep­tion de De Gaulle, qui a eu l’es­prit un peu plus ras­sem­bleur. On voit bien la dif­fi­cul­té qu’il y a dans cette Ve Répu­blique, pour le Chef de l’É­tat, à appa­raître comme le pré­sident de tous les Fran­çais, alors qu’un roi de France n’au­rait aucune dif­fi­cul­té à le faire, parce qu’il est par nature au-des­sus des par­tis et que son pou­voir se trans­met de père en fils, sans contes­ta­tion poli­tique. Cette sta­bi­li­té manque à la France, qui en 200 ans a vu défi­ler près d’une ving­taine de consti­tu­tions… Tout cela est lié à la mort du roi le 21 jan­vier 1793, un crime dont la France ne s’est jamais remise. D’ailleurs c’est Emma­nuel Macron qui l’a dit lui-même avant son élec­tion, lors d’un dis­cours pro­non­cé en juillet 2015, « Dans la poli­tique fran­çaise, cet absent est la figure du roi, dont je pense fon­da­men­ta­le­ment que le peuple fran­çais n’a pas vou­lu la mort. La Ter­reur a creu­sé un vide émo­tion­nel, ima­gi­naire, col­lec­tif : le roi n’est plus là ! » et il a par­fai­te­ment raison !

    Source : https://www.actionfrancaise.net/