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  • Faire sa fête à Mai 68 ? Chiche !

     

    Par Gabrielle Cluzel

    Une excellente chronique que, cette fois encore, on ne peut qu'approuver, parue dans Boulevard Voltaire du 7.11. 

    Rappelons pour ceux qui l'ignoreraient que Gabrielle Cluzel a participé - d'ailleurs brillamment - au colloque du Cercle de Flore « Refonder le bien commun », du 13 mai dernier, à Paris (Illustration ci-dessous).  LFAR 

    2654943674.jpgC’est la question haletante du jour, le suspense insoutenable, qui suscite autant de passions que le sexe du prochain enfant de la duchesse de Cambridge : Macron commémorera-t-il, oui ou non, Mai 68 ? Le JDD dit non – « Il a décidé de ne rien faire » -, Libération dit oui peut-être – « Mai 68 : Macron ne s’interdit rien. »

    Las, si la duchesse de Cambridge peut avoir des jumeaux, Emmanuel Macron ne pourra pas « en même temps » commémorer et ne pas le faire.

    Après un ballon d’essai, on a vu qu’il savait se mettre en marche… arrière. Quand la société, comme il dit, n’est pas prête.

    Et est-elle prête, alors que le centenaire de la Grande Guerre n’est pas seulement terminé, à voir encenser ces sortes de poilus – pour ça, ils l’étaient indéniablement – et ranimer la flamme du baba (cool) inconnu ?

    La vérité – et il l’a sans doute compris – est que la droite, philosophiquement, s’indigne mais, politiquement, se réjouit. À l’instar de Laurent Wauquiez, si « les bras [lui] en tombent », elle se frotte par avance les moignons : commémorer Mai 68 ? Chiche, on va lui faire sa fête. Et dans les grandes largeurs. Comme il le mérite. Bras dessus, bras dessous, car c’est un des rares sujets sur lequel toutes les consistances de la droite (de molle à dure) semblent à peu près d’accord. Qui sait ? La Manif pour tous fera peut-être figure de pique-nique paroissial à côté de la mobilisation contre cette guerre des boutons (d’acné) vieille d’un demi-siècle qui a tout engendré – ou presque.

    Car le mariage gay, puisqu’on en parle, la PMA, la GPA et tutti quanti ne sont que l’application stricto sensu du décalogue Mai 68 : tu n’interdiras point.

    Et le « Balance ton porc », aussi. La libération sexuelle, la fin du savoir-vivre, de la galanterie n’ont-elles pas ouvert l’auge à deux battants ? Il paraît que notre société corsetée était tellement hypocrite ! Mais posons la question aux femmes : que préfèrent-elles ? Un Weinstein qui rêve de leur sauter dessus mais se borne à leur faire, avec une déférence feinte, mille courbettes, ou un Weinstein qui rêve de leur sauter dessus… et le fait aussi sec, parce qu’au moins, il n’est pas faux cul, il faut lui reconnaître ce mérite ? 

    Samedi, cent femmes célèbres, par une lettre ouverte, ont appelé Emmanuel Macron à agir contre les violences sexuelles. Elles demandent notamment, au collège, « un brevet de la non-violence sur le modèle du brevet de la sécurité routière »… et sont à deux doigts d’inventer la bonne éducation : on ne frappe pas une fille, même avec une rose. Amies de l’eau tiède et du fil à couper le beurre, bonsoir. 

    On continue à tirer le fil, justement ?

    Si les petites villes de la France périphérique sont boudées, n’est-ce pas, entre autres, parce que leur modèle messe-dominicale-blanquette-de-veau-sur-la-nappe-en-percale a été vendu, par Mai 68, au mieux comme le summum de l’ennui, au pire comme un lieu de duplicité inouïe ?

    Si l’ascenseur social, le vrai, celui qui dure, est en panne, n’est-ce pas parce que l’école de Mai 68 – décérébrée, technicisée, où l’on apprend à gagner plus pour penser moins – fait de vous, au mieux, un pauvre gars acculturé au portefeuille bien garni ?

    Si la France est incapable d’assimiler, n’est-ce pas parce qu’acquérir une nationalité, c’est aussi s’imprégner de ses codes, ses usages – façon de se vêtir, langage, culture, art de la table, etc. – et que les soixante-huitards, jugeant ceux-ci détestables, les ont tous mis au feu, avec la politesse (fine fleur du vivre ensemble) au milieu. Est-ce un hasard si seule l’armée, qui a gardé ses rites, est encore capable de créer de vrai Français ?

    On pourrait continuer à l’infini. Alors, oui, qu’Emmanuel Macron fasse son cador et ouvre la boîte de Pandore, qu’on la retourne une bonne fois sur la table pour faire enfin l’inventaire.

    Avec le risque que courent tous les monarques quand ils convoquent, la mémoire comme les états généraux : l’issue n’est jamais certaine.     

    Ecrivain, journaliste

    Son blog

  • Congrès des maires de France : enracinés contre nomades, le nouveau clivage français

     

    Par  

    « Tel est le nouveau clivage français : entre les enracinés et les nomades ». C'est la conclusion de cette remarquable tribune [Figarovox, 20.11] où tant d'idées sont nôtres, formulées, diffusées, défendues de longue date par notre école de pensée, depuis les maîtres de la contre-révolution jusqu'à l'Action française en son passé déjà lointain comme en son présent actif. On les retrouvera ou découvrira au fil de la lecture de cet article, écrit à l'occasion du centième congrès des maires de France.  Lafautearousseau  

     

    Quand 65% des Français se défient des institutions et de leurs responsables politiques nationaux, 67% apprécient leur maire.

    Alors que s'ouvre le centième Congrès des maires de France dans un climat de tension rarement atteint entre l'exécutif et les élus locaux, cette réalité en miroir mérite d'être méditée. Le rejet des partis, la dégringolade systématique dans l'opinion de tout président nouvellement élu, le dégoût des citoyens pour le spectacle politique quotidien, d'une part, mais aussi l'attachement des Français à leurs territoires et à la vie qu'ils y mènent (62% d'entre eux vivent et meurent dans leur département de naissance), l'ampleur de l'engagement associatif, les cellules communautaires de toutes natures (de producteurs, de consommateurs, de chômeurs, de parents d'élèves, etc.) qui s'essayent et qui s'ébauchent chaque jour un peu plus notamment grâce au numérique, tout cela dit une seule et même chose : en France, le dernier espace de confiance est local.

    Cela s'explique aisément lorsqu'on évalue le bilan du trop fameux « modèle français », qui se réduit dans les faits à une interminable extension du domaine de l'État: un État omnipotent, tentaculaire et dévorateur, qui se regarde comme seul défenseur légitime d'un « intérêt général » de moins en moins évident, qui étouffe, gendarme ou encadre toute expression politique ou sociale qui lui échappe. Ce modèle-là, dont de plus en plus de Français constatent l'inefficacité et le coût abyssal, est naturellement défendu par une classe politique formée pour le maintenir. Ce modèle-là pratique depuis quarante ans une « décentralisation insincère », selon la formule d'un ancien Premier ministre, et impose normes, réglementations et cadre d'action à des collectivités qui n'en peuvent mais - la communauté de communes étant le dernier de ces cauchemars bureaucratiques.

    A contrario, tout le monde peut éprouver encore le bon et le noble de la politique chez ces milliers d'élus locaux, « petits » plus souvent que « grands », qui ne comptent pas leurs heures pour le service de concitoyens qu'ils connaissent et qui les connaissent. Qu'on se souvienne des moyens, de l'imagination, de l'art du « bout de ficelle » que les communes ont souvent dû déployer, avec leur tissu associatif, pour appliquer la réforme des rythmes scolaires de 2013, tombée d'en-haut, sans vision, sans concertation, sans nul souci des conditions singulières de chaque territoire. Cela, c'est la politique dans « le monde de la vie », une politique à hauteur d'hommes.

    Il ne s'agit nullement ici de la défense corporatiste des élus locaux. Ils ont leurs associations et leurs représentants. Il y a bien sûr à l'échelon local des gabegies scandaleuses, des échecs retentissants, des tyranneaux ridicules. Mais face à une sphère publico-institutionnelle qui gêne plus qu'elle ne porte le maire comme l'agriculteur, l'électricien, le directeur de maison de retraite ou le médecin de campagne, face à un État qui se refuse à se réformer sérieusement, aujourd'hui guère plus qu'hier, les ressources et les solutions sont à chercher dans l'action concrète et modeste du cercle de confiance qu'est la commune et grâce aux délibérations de la démocratie du face-à-face.

    « Que l'autorité se borne à être juste, nous nous chargerons d'être heureux », écrivait Benjamin Constant. Que l'État se borne à accomplir les missions pour lesquelles il est irremplaçable, à commencer par ses missions régaliennes, les acteurs de terrain - non seulement les communes mais les associations, les entreprises, les familles, etc. - se chargeront de répondre à leurs besoins. Éducation, culture, aide sociale, logement, formation, développement économique, environnement et même intégration des immigrés ou sécurité : les champs sont nombreux où davantage d'autonomie, de liberté et de responsabilité pourront produire les effets bénéfiques que plus personne n'attend de la énième réforme d'un ministre qu'on n'écoute pas. Ces effets seront obtenus, au surplus, en développant et en renforçant un lien social, local, spontané, dont l'affaiblissement, voire la disparition, se fait déjà si péniblement sentir dans les territoires ruraux, les communes petites et moyennes et les villes des périphéries de ces monstres froids et inutiles que sont les métropoles. Car la solitude et l'isolement sont parmi les faits sociaux les plus prégnants en même temps que les plus tus de l'époque.

    Cette politique à hauteur d'hommes, cette démocratie du face-à-face, ces projets réussis parce que conçus au plus près du réel sont par nature enracinés. Les racines sont non seulement la mémoire vive de ce qui fut mais aussi ce qui attache et ce qui tient bon. Certains rêvent de s'en affranchir et d'en affranchir les Français: la mondialisation, le nomadisme, la technologisation des êtres et des choses sont leur nouvelle frontière. Les mêmes, jusqu'au plus haut sommet de l'État, conduisent aujourd'hui une politique platement jacobine, comptable et brutale à l'égard des territoires. Dans le débat sur l'inquiétude identitaire et l'« insécurité culturelle » qui sert de vaste toile de fond à la vie politique de notre pays, le combat pour les communes, et plus largement pour les libertés concrètes et enracinées, est celui de demain. Car tel est le nouveau clivage français : entre les enracinés et les nomades.  

    Jean-Thomas Lesueur est délégué général de l'Institut Thomas More.

  •  Chemnitz : « L’OPA hostile » de l'Islam qui occupe et mobilise les peuples d’Europe

     

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    Les manifestations de Chemnitz, ville saxonne de 240 000 habitants, nous renvoient l'image d'une Allemagne « nouvelle », nous voulons dire en rupture avec celle que nous connaissions depuis 1945 ; celle dont la capitale était à Bonn au bord du Rhin et non à Berlin en Prusse,  celle d'Adenauer, Helmut Schmidt, Schroeder ou Angela Merkel, la « petite »  que Kohl avait couvée pour qu'elle lui succède ; une Allemagne vaincue, unie dans les affres de la défaite, culpabilisée et repentie ; mais une Allemagne unie pour renaître après l'apocalypse de 1945, reconstruire sa prospérité, se réunifier dès qu'elle le pourrait ; une Allemagne paisible,  pacifiste, atlantiste, sous le parapluie américain alors indispensable. se satisfaisant d'être un géant économique et de n'être qu'un nain politique, sagement européen. Une Allemagne du consensus sur ces bases sans grande gloire mais assise sur des montagnes de deutsche marks,  ou d'euros,  bourrée d'excédents commerciaux et budgétaires.  

    On pouvait croire son nationalisme éteint. Il n'était qu'endormi. Ou plutôt, il avait changé de champ d'application, optant pour la puissance économique. Il se révéla unitaire et puissant lorsque vint l'heure de la réunification et qu'il fallut reconstruire l'Est ruiné par 45 ans de communisme. Effort titanesque accompli en trente ans. Ce furent les formes du nationalisme allemand des années 1945-2010 sans-doute aujourd'hui dépassées. 

    Comme il se passe partout en Europe et ailleurs, l'intrusion massive de l'Islam sur notre continent, l'afflux de migrants, d'abord turcs en Allemagne, ensuite orientaux et africains, quasiment tous musulmans, semblent avoir progressivement réveillé outre-Rhin un nationalisme allemand politique et identitaire cette fois.  

    Nationalisme défensif et non offensif. Ceci pour d'assez simples raisons : 1. L'Allemagne, malgré ses traditions guerrières et militaires n'a pas ou presque pas d'armée. C'est un fait. 2. Son peuple se compose de beaucoup de vieillards. Ils ne sont guère taillés pour les aventures extérieures. Exception faite de l'exportation... 3. Le souci aujourd'hui dominant en Allemagne est la préservation de l'identité du peuple allemand. Souci d’ordre intérieur. Qu'en sera-t-il à des horizons plus lointains ? Nous l'ignorons. Tout est possible. Nous évoquons ici la réalité présente de l'Allemagne qui n'est, sans-doute pour un temps assez long, un danger militaire pour aucun de ses voisins. 

    methode_times_prod_web_bin_8f93b4f0-ac7d-11e8-aa49-f23497b9293e.jpgEn 2010, déjà, Thilo Sarrazin, avait publié « L'Allemagne disparaît » - ou suivant une plus juste traduction « L'Allemagne se suicide » - un livre pour dénoncer l'invasion islamique dans une Allemagne qui démographiquement s'effondre sur elle-même et risque d'en être doublement dénaturée. Thilo Sarrazin n'est pas n'importe qui. Il n'a rien d'un militant d'extrême-droite. Membre ancien et éminent du SPD, économiste et banquier, siégeant au directoire de la Deutsche Bundesbank, il appartient plutôt à l'établissement politique et économique. Son livre eut un retentissement considérable et devint emblématique du courant anti-immigration en train de prendre corps en Allemagne à droite et à gauche de l'échiquier politique.  

    Cinq ans plus tard, ignorant ce courant grandissant, on sait comment, à l'automne 2015, Angela Merkel se crut bien imprudemment autorisée à appeler l'Allemagne et l'Europe à accueillir un million et demi de migrants et ces derniers à s'y précipiter. Ce qu'ils firent spectaculairement. Cette décision fut l'une de celles dont les conséquences n'en finissent pas de retentir à court mais aussi à très long terme. Angela Merkel l'a payée très cher. Mais aussi son parti la CDU, dont l'unité a été brisée par la fronde de la CSU sa traditionnelle alliée bavaroise antimigrants ; et le vieil équilibre consensuel du Bundestag rompu par l'arrivée de 93 députés de l'AfD. La population allemande a sérieusement souffert des migrants, de diverses manières et en divers lieux, comme à Cologne, comme lors des attentats de Munich, Berlin et autres lieux. Sa colère a grandi comme elle grandit dans toute l'Europe.  

    Huit ans après son premier livre, son premier cri d'alarme, Thilo Sarrazin publie en cette rentrée un nouvel ouvrage dont, dans le contexte actuel, il y a gros à parier qu'il aura un écho considérable. Son titre ? « OPA hostile de l'Islam » . OPA lancée, bien entendu, contre l'Europe, c'est à dire contre les peuples et contre les nations d'Europe, unis, au moins provisoirement, comme en d'autres temps, pour leur commune défense, leur commune survie face à l'islam. 

    chemnitz-demo-010918-845x470.jpgRegardons les cartes, comme il se doit : Chemnitz se situe à l’est de l’Allemagne, dans ce qui fut la DDR, non loin de Leipzig et de Dresde, où les horreurs de la dernière guerre atteignirent leur paroxysme, non loin de Prague, l’une des capitales des pays de Visegrad où l’on se refuse à l’accueil des migrants. Tel est tout simplement aujourd’hui l’enjeu vital qui occupe et mobilise les peuples d’Europe.   

    Retrouvez l'ensemble des chroniques En deux mots en cliquant sur le lien suivant ... 

    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Maurras et le Fascisme [6]

    Mussolini, 1923 

    Par Pierre Debray

    Nouveau Microsoft Publisher Document.jpgC'est une étude historique, idéologique et politique, importante et profonde, que nous publions ici en quelques jours. Elle est de Pierre Debray et date de 1960. Tout y reste parfaitement actuel, sauf les références au communisme - russe, français ou mondial - qui s'est effondré. L'assimilation de l'Action française et du maurrassisme au fascisme reste un fantasme fort répandu des journalistes et de la doxa. Quant au fascisme en soi-même, si l'on commet l'erreur de le décontextualiser de sa stricte identité italienne, il reste pour certains une tentation, notamment parmi les jeunes. On ne le connaît pas sérieusement. Mais il peut-être pour quelques-uns comme une sorte d'idéal rêvé. Cette étude de Pierre Debray dissipe ces rêveries. Elle s'étalera sur une dizaine de jours. Ceux qui en feront la lecture en ressortiront tout simplement politiquement plus compétents. LFAR

     

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    Mussolini a justifié son attitude par un article prophétique, quand on songe qu’il date de 1915 : « Notre intervention a un double but : national et international... Elle signifie : contribution à la désagrégation de l’empire austro-hongrois, peut-être révolution en Allemagne et par un contrecoup inévitable, révolution en Russie. Elle signifie, en somme, un pas en avant pour la cause de la liberté et de la révolution...» Et le 12 juin 1914 déjà : « Nous comprenons les craintes du réformiste et de la démocratie devant une telle situation. » 

    Après la victoire, il pourra affirmer : « Nous, les partisans de l’intervention, nous sommes les seuls à avoir le droit de parler de révolution en Italie. » Et il explique Prima-Guerra-Mondiale1-800x400-800x400.jpgque « la guerre a appelé les masses prolétariennes au premier plan. Elle a brisé leurs chaînes. Elle les a extrêmement valorisées. Une guerre de masse se conclut par le triomphe des masses. Si la révolution de 1789 - qui fut en même temps révolution et guerre - ouvrit les portes et les voies du monde à la bourgeoisie, la révolution actuelle qui est aussi une guerre, paraît devoir ouvrir les portes de l’avenir aux masses qui ont fait leur dur noviciat du sang et de la mort dans les tranchées. » 

    Le Mussolini de 1919 qui reconstitue ses faisceaux se donne un programme anarcho-syndicaliste. À la fin de l’année de 1919, il envoie d’ailleurs son « salut cordial » au chef anarchiste Malatesta. Que réclament les faisceaux ? Le suffrage universel avec vote des femmes, la suppression du sénat, vieille revendication de la gauche ; la journée de huit heures avec retraite à 65 ans ; la création de conseils ouvriers pour « perfectionner les démocraties politiques » et permettre la participation du travail à la gestion de l’économie ; le remplacement de l’armée permanente par une milice nationale « purement défensive » avec de courtes périodes d’instruction. Il est remarquable que lors du congrès de Vérone, du 17 novembre 1943, Mussolini, libéré par les Allemands de sa prison, reprendra son programme originel. 

    320px-Fasces_lictoriae.jpgLe mot de faisceau n’a du reste pas été forgé par lui. Il est apparu pour la première fois en Sicile aux alentours de 1890, où il désignait des groupes d’anarcho-syndicalistes, qui s’attaquaient aux féodaux. Ainsi que l’écrit M. Prelot, les premiers fascistes « sortis du socialisme par la porte de gauche, celle du syndicalisme révolutionnaire, ces soréliens, ces blanquistes reprochent surtout aux “ officiels ” d’être des révolutionnaires pour rire qui dissertent et palabrent toujours sur le grand soir, sans se décider jamais à agir... » 

    Certes, l’événement justifiait Mussolini. « Mai 1915 a été, affirmait-il, le premier épisode de la révolution, son commencement. » Effectivement, l’entrée en guerre de l’Italie avait provoqué un rapide développement de l’industrie lourde et la constitution de masses prolétariennes. La fin du conflit trouvera l’Italie dans un état d’épuisement financier qui rendra impossible la reconversion de l’économie de guerre. D’où le chômage, générateur de convulsions sociales. Mussolini n’en aura cependant pas le profit. Les sociaux-démocrates joueront contre lui du pacifisme populaire. En 1919, il essuiera à Milan un terrible échec électoral, n’obtenant que 4 657 voix contre 70 000 aux socialistes orthodoxes. Il écrira dans un mouvement de découragement : « À nous qui sommes les morituri de l’individualisme, il ne reste pour le présent obscur et le lendemain ténébreux que la religion désormais absurde, mais toujours consolante de l’anarchie. » 

    Le 3 décembre 1919, c’est la grève générale. Les mouvements populaires se continueront tout au long de l’année 1920 par des occupations d’usine et des révoltes agraires. L’historien fasciste Valsecchi écrira plus tard que « le parti socialiste n’avait qu’à tendre la main vers le pouvoir d’État pour s’en emparer, mais il eut peur de le faire et montra son impuissance ». En réalité, la social-démocratie était partagée en trois tendances : réformiste qui craignait l’action violente, maximaliste, qui au contraire y poussait sans savoir l’organiser, communiste repliée sur un sectarisme que Lénine leur reprochera durement. Sa défaite ne s’explique cependant pas uniquement par sa division. Il manquait aux travailleurs en lutte un appui militaire. L’armée régulière maintenue dans une stricte discipline et les anciens combattants voyaient avec mépris et colère le désordre s’installer sans que le gouvernement semblât désireux de lutter.

    Mussolini comprit que le socialisme n’aboutirait pas sans l’union des producteurs et des soldats. Là-dessus il était d’accord avec Lénine. Les soviets de 1917 ne s’intitulent-ils pas soviets d’ouvriers et de soldats ? Les fascistes avaient commencé par encourager les occupations d’usine et même ils avaient tenté de les transformer en expropriations. Le 17 mars, la maison Franchi Grigorini de Dalminé ayant refusé un relèvement de salaire, ils s’étaient emparés de l’usine et l’avaient fait fonctionner sans le patron. Cependant les cinq premiers fascistes, pour la plupart socialistes interventionnistes et intellectuels d’avant-garde, étaient rejoints par de nombreux « arditi », anciens membres des corps francs, l’équivalent de nos parachutistes, qui ne voulaient plus du vieil ordre bourgeois, tout en se montrant écœurés par le pacifisme des socialistes officiels. L’interventionnisme de Mussolini qui l’avait isolé dans le premier temps, commençait à le servir. Il en tira les conséquences. Il lui fallait fondre les deux clientèles. Il y parvint sans rompre avec la tradition du socialisme révolutionnaire. Il engagea, en effet, la bataille contre les socialistes officiels, non pas dans les grandes villes, mais en Émilie. Cette région paysanne était l’une des plus rouges d’Italie. Les ouvriers agricoles étaient organisés en ligues qui avaient acquis un véritable monopole de l’emploi. Nul ne pouvait travailler la terre sans leur permission.     (A suivre)

    Illustration ci-dessus : Pierre Debray au rassemblement royaliste des Baux de Provence [1973-2005]

    Lire les article précédents ...

    Maurras et le Fascisme  [1]  [2]  [3]  [4]  [5]

  • Difficile rentrée

     

    Par Hilaire de Crémiers 

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    À quoi sert le remaniement ministériel ? 

    Tout était nouveau ; tout devait être beau, facile, agréable. C’était il y a un an. La France ne pouvait que sortir du marasme et les Français que retrouver leur enthousiasme. L’illusion n’a pas duré le temps d’une année. Macron s’est cru un cas unique ; il ressemble de plus en plus à ses prédécesseurs : même chute de popularité, même déception, même recherche désespérée dans toutes les directions d’électorats divers et variés pour regarnir sa gibecière vidée, et jusqu’aux chasseurs ! Cet exercice le force à des contradictions insurmontables qu’aucun « en même temps » ne résoudra.

    le-ministre-de-la-transition-ecologique-et-solidaire-nicolas-hulot-ici-le-27-juin-2018-a-paris_6080750.jpgNicolas Hulot a quitté le gouvernement. C’était prévisible. Il l’a fait sans ménagement ; il a démissionné sans se présenter devant le chef de l’État ni devant le chef du gouvernement. Il s’est cru insulté ; il a insulté en retour ! Il avait le sentiment d’être un pantin, ce qui était évident. Le ministre de la Transition écologique ne peut être qu’une sorte de caution morale dans un gouvernement de techniciens, pour ne pas dire de technocrates, chargé de faire adopter des mesures économiques commandées par Bruxelles et sous la pression d’une conjoncture de moins en moins favorable. L’écologie politique n’est qu’un discours. Arrêter le nucléaire est impossible et serait suicidaire ; construire des éoliennes sur tous les horizons commence à indisposer les Français qui se sentent violenter. Le reste ne peut être que des mesurettes entre l’absurde, l’inutile, le superflu qui coûte toujours cher. Hulot n’est pas à plaindre ; il retournera à cette écologie profitable qui est sa marque de fabrique et qui lui donne de solides revenus. Son discours se vendra d’autant plus cher.

    À l’heure où s’imprime ce numéro de Politique magazine, le successeur n’est pas encore connu. Il suffit de savoir que Daniel Cohn-Bendit a été, un moment, pressenti pour comprendre que Macron n’a pas changé de stratégie. Le prochain titulaire, quel qu’il soit, sera donc nécessairement un sous-Cohn-Bendit et un sous-Hulot ! Un choix pour la com’ et un choix par défaut !

    Le chef de l’État ne sait pas ce qu’est la France. Il joue avec des notoriétés médiatiques, des équilibres d’influence. Sa politique dite d’ouverture s’enferme sur elle-même ; elle s’enroule inéluctablement dans un cercle fermé de connivences qui ne tournent qu’autour de sa personne. À quoi sert le remaniement ?

    80c3ac97e4ec9fa251766baab9fb79a5-patrimoine-je-ne-veux-pas-etre-un-cache-misere-stephane-bern-menace-de-quitter-sa-mission.jpgC’est si vrai que Stéphane Bern fait savoir aussi son mécontentement. Et, lui, il sait de quoi il parle : le patrimoine français, il le connaît et vraiment : villages, villes, clochers, châteaux. Il a vu, commenté, apprécié ; il défend et promeut avec sincérité, s’étant lui-même personnellement mis à la tâche. Il ne fait pas de politique : il cherche à sauver des monuments ; il essaye de trouver de l’argent ; il travaille ; il fixe des priorités. Le ministère de la Culture est dirigé n’importe comment ; y a sévi jusqu’à aujourd’hui une dame qui est en froid avec la justice, qui, enivrée par son poste, s’est crue arrivée et qui est incapable d’assurer les directions de son ministère dont plusieurs sont privées de titulaire. Le ministère ne vient pas en aide à une personnalité comme Stéphane Bern ; il dépense son maigre argent à tout-va pour des questions de prestige et sur les choix idéologiques et capricieux de Madame. Sa sotte suffisance a déjà fait démissionner la commission chargée des commémorations nationales. Maintenant, elle a décidé, pour faire plaisir aux gens d’argent – telle est la macronie –, d’écarter des décisions concernant le patrimoine les architectes des bâtiments de France : ces hauts fonctionnaires d’une remarquable culture – nous en avons encore – sont les vrais gardiens de notre patrimoine. Stéphane Bern menace de démissionner lui aussi ; il ne veut pas être condamné à jouer les utilités. Alors qui, demain, au ministère de la Culture ?

    La macronie est-elle capable d’offrir un candidat de valeur ? Et Macron est-il capable de choisir en dehors de ses calculs personnels. À quoi sert le remaniement ?

    À prendre tous les ministères, les uns après les autres, y compris les régaliens, les mêmes problèmes se posent partout : la Justice, l’Intérieur, la Défense, les Affaires étrangères, l’Économie et le Budget. Ni la sécurité intérieure, ni la sécurité extérieure ne sont assurées ; la France est envahie et n’est pas défendue. Les migrants sont livrés aux passeurs et aux marchands de sommeil. Et les Français doivent payer et toujours payer…Et ne parlons pas de Madame Schiappa qui a soulevé l’indignation de toutes les associations de défense des enfants mineurs pour son refus de fixer un âge minimum de protection légale de l’enfance face aux prédateurs sexuels. À croire que… Mais elle est connue pour sa propre littérature et son soutien personnel à toutes les déviances ! C’est qu’on est en macronie.

    40321010_762783734060210_4002064566660890624_o.jpgLes Français se sont trompés d’homme fort : une fois de plus ! Il faudrait un gouvernement resserré et rassemblé avec de fortes personnalités, toutes vouées au seul service de la France. Car, après tout, c’est pour cet unique but qu’il existe un État français. Les Français sont lassés des discours ; ils sont indignés d’un chef de l’État qui passe sont temps à l’Étranger à les insulter. Et qui pense qu’il n’existe pas plus de Français que de Danois ! Macron lutte contre « le nationalisme », c’est sa ligne électorale, tout en étant obligé de constater que le « nationalisme » renaît partout. Concrètement, il alimente celui des autres pendant qu’il ne cesse d’affaiblir politiquement, économiquement, socialement, ce qui peut rester encore de forces françaises.

    Cet homme n’aime pas la France, il s’aime lui-même. À quoi sert le remaniement ?    

    Hilaire de Crémiers

    A lire sur Lafautearousseau ...

    Un coup de chapeau à Stéphane Bern pour son courage dans la défense du patrimoine !

    La démission de Nicolas Hulot une catastrophe nationale ? Faut rire !

  • Ceuta et Melilla : l’assaut du limes entre l’Europe et l’Afrique va-t-il réveiller les Espagnols ?

     

    Par Javier Portella

    Nouveau Microsoft Publisher Document.jpgAu plus chaud de la crise catalane, l'été et l'automne derniers, nous avons souvent accompagné nos analyses des événements de Catalogne des articles compétents et autorisés de Javier Portella parus dans Boulevard Voltaire. Voici aujourd'hui l'Espagne de nouveau menacée, cette fois-ci par l'afflux des migrants qui chassés d'Italie ou de Malte la prennent désormais pour cible. Menacée aussi, disons-le, par la naïveté et le laxisme de sa politique d'accueil. Javier Portella - notre confrère espagnol - donne ici son analyse de la situation [Boulevard Voltaire, 4.08] non sans quelque espoir d'une possible réaction du peuple espagnol. Comme il s'en produit partout en Europe.   LFAR

     

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    Comme tout le monde le sait, les légions qui, sous le nom de Guardia Civil, défendent le limes séparant (encore) l’Europe de l’Afrique aux enclaves espagnoles de Melilla et Ceuta ont récemment fait l’objet, dans cette dernière ville, d’un assaut brutal avec des sprays transformés en jette-flammes et jets de chaux vive, pierres et excréments.

    L’attaque s’est soldée par la victoire sans coup férir des assaillants. Comment aurait-il pu en être autrement alors qu’il est interdit à nos légions d’employer tout moyen de défense, y compris les instruments propres aux forces anti-émeutes ?

    Tout cela s’est passé alors que les barbelés qui couronnent les murailles plus que fragiles protégeant l’enclave n’ont pas encore été enlevés, comme il avait été promis par le nouveau gouvernement socialiste, désireux, c’est évident, d’en faciliter l’assaut. Mais il a suffi qu’une telle mesure soit annoncée pour que « l’effet d’appel » soit immédiat. Un « effet d’appel » qui s’est également produit grâce à l’accueil donné par l’Espagne aux « auto-naufragés » du bateau Aquarius (un « auto-naufragé » est celui qui, faisant preuve d’une imprudence plus que téméraire, se lance à la mer sur un bateau de fortune qui finira souvent par naufrager). De même, il a suffi de décréter le libre accès de tout immigrant illégal à la Sécurité sociale espagnole pour que « l’effet d’appel » se voie renforcé par une mesure qui s’ajoute à l’ensemble de facilités et d’aides diverses octroyées à quiconque vient grossir la main-d’œuvre bon marché souhaitée par l’oligarchie.

    On dit, cependant, qu’à quelque chose malheur est bon. Un grand bonheur pourrait, en effet, découler de tant de malheur : celui permettant que se dessillent enfin les yeux de la société espagnole, la seule dans toute l’Europe qui lève encore les épaules face à ce qui, ailleurs, soulève rage et indignation ; la seule dont les forces dirigeantes ne doivent même pas se déranger pour essayer de justifier l’injustifiable ; la seule, enfin, où les options patriotiques ne sont pas encore représentées au Parlement (ce qui pourrait, pourtant, bientôt changer, des sondages pronostiquant pour les prochaines élections l’entrée à la Chambre du parti Vox).

    Seule l’aggravation de la pression migratoire, seul le pourrissement d’une situation qui devient de plus en plus intenable pourront faire que, surmontant la bouillie visqueuse du sentimentalisme que les médias du Système déversent à flots sur la population, celle-ci finisse par prendre conscience du véritable enjeu. Un enjeu – celui du plus grand transvasement de populations jamais accompli dans l’Histoire – qui n’est constitué, quelle qu’en soit l’importance, ni par les violences et délits commis, ni par le risque d’attentats terroristes, ni par les maladies qui, disparues depuis belle lurette, sont en train de réapparaître, ni par les sommes folles dépensées afin d’accueillir, soigner et loger les populations arrivées en vue, non pas de survivre, mais d’obtenir les bienfaits matériels qu’elles sont incapables de créer chez elles. (Seul le sentimentalisme angélique peut imaginer qu’est en train de crever de faim quelqu’un capable de payer 4.000 euros à un trafiquant pour traverser la Méditerranée et arriver au pays de cocagne.)

    Le grand, le véritable enjeu n’est pas d’ordre matériel. Le grand, le véritable enjeu est le remplacement, au bout de quelques générations, de tout le socle ethno-culturel sur lequel repose notre être, notre identité, notre civilisation.

    Le grand, le véritable enjeu est ce que Renaud Camus appelle – d’un nom qui a fait fortune méritée – le Grand Remplacement.    

    Écrivain et journaliste espagnol

     

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  • Par-delà l'affaire Benalla, réflexion sur les vrais problèmes sécuritaires de la France

     

    Par  Xavier Raufer 

    2293089609.14.jpg« Sujet stratégique, à la rentrée ! » écrit Xavier Raufer en présentant cette intéressante réflexion sur les véritables et immenses problèmes de la France en matière de sécurité. [Boulevard Voltaire, 20.07]. Ce n'est pas que dans l'affaire Benalla, Emmanuel Macron fuirait ses responsabilités, feindrait d'ignorer les faits, comme le colportent à contre-temps des images inconséquentes traînant sur des réseaux sociaux politiquement incompétents ; ce qui inquiète Xavier Raufer, c'est cette grave ignorance de ce qu’est la sécurité, cet amateurisme d'État, que révèle cette affaire, en cette matière cruciale, et c'est la faiblesse des équipes et des hommes, en charge du gouvernement du pays. En l'occurrence, de sa sécurité.   LFAR

     

    xavier-raufer-810x456.jpgGrave, car symptomatique : l’affaire de l’élyséenne mouche du coche Benalla trahit une grave ignorance de ce qu’est la sécurité ; de comment on l’obtient et la maintient, par une cruciale sélection des hommes et prévision de toute chausse-trape possible.

    Or, là, choisissant d’abord, laissant batifoler ensuite, un zigoto qui est clairement à la sécurité ce que M. Hanouna est à France Culture, la présidence Macron a tout faux.

    Côté terrorisme, le quinquennat Macron avait cependant pas mal commencé. Un Président saisissant vite et bien les enjeux, un appareil resserré et proactif. D’où plus de détection de terroristes avant l’acte. Rassurés, nos partenaires internationaux en sécurité voyaient la France sortie de l’impuissance de la triade Hollande-Taubira-Cazeneuve.

    Restait la sécurité intérieure, ni M. Collomb ni Mme Belloubet n’étant exactement de ces cruciaux généraux de terrain qui optimisent le plan du chef dans la bataille, tel Lannes et sa géniale progression en échelle à Austerlitz. Mais bon, avis général favorable.

    Avis décisif, insistons, car à l’ère des chocs stratégiques brutaux, le champ terreur-crime-fraudes-trafics est affaire d’échanges rapides et pointus, entre gens de confiance. Or, début juillet – avant même l’épisode Benalla -, une rafale de loupés judiciaires et policiers replonge la France dans les affres sécuritaires de l’ère Mitterrand-Hollande.

    L’évasion de Redoine Faïd. Toute la France savait que Faïd s’évaderait. Du neuf-trois au plateau de Creil, les caïds attendaient qu’il « s’arrache ». Les avocats – défense, partie civile – vivaient dans cette hantise. Les gardiens de prison bombardaient leurs supérieurs de fébriles alertes… Faïd va s’évader ! Or, « trop facilement », disent des experts, Faïd s’évade. Nouvelle si dingue que, quand un gardien prévient – sur son portable à lui – le commissaire du coin, celui-ci croit à une blague !

    Partout au monde, un ministre ou directeur coupable du désastre était viré illico. Car tous auraient dû savoir – mais ignoraient – qu’un « gros » braqueur n’est pas un truand anodin. Il marche à 100 % à l’adrénaline. Braquage, évasion l’enivrent plus que la meilleure cocaïne. Pour and co., une sensation si intense qu’ils la recherchent à tout prix. Ainsi, renvoyer aux calendes son transfert de prison est une incroyable ânerie, à sanctionner brutalement ; car, symptôme d’un désordre grave de l’État, une telle évasion humilie durablement le pays en cause. Là, Mme Belloubet, hagarde Georgina Dufoix, nous rejoue vingt-sept ans après « responsable mais pas coupable ».

    Ajoutons-y une police épuisée et dépressive, des policiers lynchés partout en France, devant l’école de leurs enfants, chez eux ou au supermarché, par des voyous ivres d’impunité, prenant les « keufs » pour des « bouffons ».

    Pire : Nantes embrasé après la mort, non d’un gamin innocent, mais d’un truand recherché pour « vol en bande organisée », la Justice et le Premier ministre donnant le pénible sentiment qu’ils s’excusent d’exister et sacrifient un flic de base.

    Moscou, Washington et Pékin, via Londres et Bruxelles : réaction des pros de la sécurité, Macron frime à l’étranger mais, chez lui, il n’y arrive pas. De fait, dans la France de l’été 2018, police et Justice sont à la dérive :

    Police : un ministre de l’Intérieur fatigué et un ministère rigide, incapables de vraies réformes face aux défis nouveaux – tels que concevoir une doctrine et une pratique pour les hybrides terreur-crime, problème majeur de demain.

    Justice : nul parquet spécifique ne traite ensemble – car le réel est là – terrorisme et crime organisé ; nulle coordination nationale des JIRS (juridictions inter-régionales spécialisées), cruciales juridictions traquant chacune dans son coin le crime organisé, celle de Marseille coupée de celle de Lille, etc.

    Ainsi émerge l’avenir du quinquennat Macron : la première marche, SNCF-CGT, quasi franchie ; la seconde, des dispositifs sociaux (le « pognon de dingue ») plus ardue. La troisième à présent inaccessible : la sécurité intérieure, domaine où la coordination serrée du renseignement et de la lutte antiterroriste à l’Élysée ne suffit pas.

    Car la France a un seul problème criminel – énorme : ces quartiers hors contrôle qui s’embrasent quand on touche à un voyou, demain à un hybride-terroriste ; quartiers où déferle la cocaïne qui inonde la France ; quartiers d’où sont issus l’évadé Redouane Faïd et Redouane Lakdim, l’assassin du colonel Beltrame. Quartiers où, depuis un-demi siècle, une « politique de la ville » mi-Bisounours mi-corruption enracine le crime, la terreur et les trafics. Quartiers où la République a disparu – et ne semble pas près de revenir – puisqu’au lieu du mirifique plan Borloo, rien de sérieux n’est énoncé.

    Voici la troisième marche du Président Macron – une reconquête, plutôt. Tâche exténuante dont M. Collomb et Mme Belloubet sont incapables. Mais qui d’autre ? Car M. Macron est le Président le plus isolé de la Ve République. Et vouloir tirer un Davout, un Soult ou un Ney de la pitoyable République en marche est une blague – pour le coup, une vraie.   

    Xavier Raufer 

    Docteur en géopolitique et criminologue.

    Il enseigne dans les universités Panthéon-Assas (Paris II), George Mason (Washington DC) et Université de Sciences politiques et de droit (Pékin)

  • Théâtre & Cinéma • L'hommage de Philippe de Villiers à Jean Piat

     

    Par Philippe De Villiers

    Hommage au grand comédien décédé mardi soir à l'âge de 93 ans. Jean Piat avait prêté sa voix à la cinéscénie du Puy du Fou, et continue d'enchanter, depuis quarante ans, les visiteurs du parc vendéen. 

     

    XVMad399f8c-bc32-11e8-be44-0755e0b79ca2-200x300.jpgLe rideau est tombé. La scène est vide. Jean Piat est parti. Comme pour Gérard Philippe ou quelques autres célébrités artistiques qui étaient entrées dans les paysages de nos mémoires intimes, nous ressentons un grand trouble au plus profond de nos cœurs ; quelque chose de la Création s'en est allé.

    Jean Piat était beaucoup plus qu'un homme de scène, une figure émouvante, une présence vivante des moments forts de nos vies. Il avait, pour son art, des exigences qu'on dirait aujourd'hui volontiers désuètes. Ses colères allaient à son métier, dont il portait haut les prestiges à la manière de l'artisan chaisier de Charles Péguy. Il aimait la belle ouvrage. Il avait peu de goût pour le théâtre gesticulatoire où les metteurs en scène, cédant à l'hubris de l'époque, réécrivent les œuvres pour y loger de viles prétentions moitrinaires. Il était de l'ancienne école, celle de Jouvet ; «Le Théâtre, c'est le Verbe» : les mots, la musique des mots, la puissance des mots. Les périodes qui glissent en confidence. Les silences. Les éloquences de l'âme. Et puis ce timbre de velours et, un peu plus tard, qui vient s'y fondre, le bronze qui sonne dans les graves. La langue française en majesté.

    Nous venons de perdre un grand acteur. Il honorait de sa maestria, de ses fidélités, la «Maison de Molière». Il s'y sentait chez lui. C'était sa maison. Il y fréquentait le souvenir des légendes qui l'avaient précédé. Il était dans la lignée des grands. Le Répertoire venait à lui comme une deuxième nature. Il bouillait à la ville, consumant ses impatiences. La scène était son brasier quotidien, il respirait dans la coulisse le feu de la rampe, il avait besoin d'être ébloui pour éblouir. Il brûlait les planches. Il allait vers tous les auteurs. Il jouait tout, avec la même considération, et portait d'une même élégance, dans son petit théâtre imaginaire, les archétypes de sa parenté métaphorique qui était profondément française: le panache de Cyrano, les grandeurs de cœur de Musset, les impatiences du Fâcheux de Molière. Il était classique, il était moderne, il savait prendre le costume, humer l'esprit du temps et se lover, avec toutes les humilités nécessaires, dans les allégories de ses personnages qu'il grandissait encore par le jeu de son regard bleu d'orage et le port de sa noblesse. Il savait alterner la déclamation et les murmures les plus touchants.

    Sa vie ne fut qu'une suite de défis. Il s'attaquait à toutes les pointes du Hoc de son métier. Et il arrivait tout en haut en déposant un mot d'humour. Je l'ai même vu chanter dans «L'Homme de la Mancha», au théâtre Marigny. Il était splendide, faisant presque oublier Jacques Brel. Tout sonnait juste chez lui. Il trouvait toujours le bon ton. Quand il s'est essayé à l'écriture, il a laissé derrière lui des bonheurs de plume. C'était un conférencier et un écrivain de vraie culture, qui avait toujours la rime au bord des lèvres et savait faire chanter la langue de Ronsard. Naturellement, on retiendra surtout la haute figure du théâtre qui laisse aujourd'hui un grand vide. Que dire de cette voix qui, depuis Les Rois maudits jusqu'au Seigneur des Anneaux, est entrée dans toutes les chaumières? Toute la France reconnaît cet organe aux accents envoûtants. Pour beaucoup de Français, il était un grand voisin de génération ou de confuse tendresse. Il mêlait ses souvenirs aux nôtres. Il était de nos souvenirs. Il faisait partie de notre patrimoine d'affections et d'émotions.

    Pour quelques-uns d'entre nous, Jean Piat ne fut pas qu'un acteur ou un metteur en scène. C'était aussi un ami, exigeant et délicat. J'ai eu la chance de pouvoir l'approcher, un scenario sous le bras, dans sa loge, au Français. J'étais étudiant, je tremblais de tous mes membres. C'était au mois de novembre 1977. Il m'a ouvert sa porte puis il m'a écouté et regardé dans les yeux, par-dessus ses petites lunettes Grand-Siècle. J'ai commencé à lui parler de ma création artistique du Puy du Fou. Très vite, il m'a interrompu: «Vous avez la flamme, vous êtes un drôle d'énarque! laissez-moi vos textes! c'est oui! je viendrai au Puy du Fou». Ainsi Jean Piat devint l'un des premiers défricheurs de cette aventure.

    S'il peut arriver, dans des moments rares, qu'une seule voix, sur une humble colline de hêtres, parvienne à résumer une œuvre, lui donner son souffle, son élan, habiller son Verbe de lyrisme, alors la voix de Jean Piat illustre, incarne à elle seule, l'aventure artistique du Puy du Fou.

    Depuis quarante ans, sur les affleurements de granit, cette voix ne se couche jamais. De jour comme de nuit, elle est partout présente dans les allées du Légendaire français.

    Cette parole qui vient du fond des âges et n'a jamais vieilli, renouvelle sans cesse, dans le cœur de nos hôtes et mémoires en manque, les frissons de nos romances, en leur donnant forme humaine.

    Hélas, Jean Piat vient de s'éteindre. C'est un monument du théâtre et du cinéma qui disparaît. Un pan de la Comédie française qui s'abîme dans les silences éternels.

    Pour le Puy du Fou, c'est un choc. Il était de la famille, depuis le premier jour, il fut le premier Puyfolais «hors-les-murs». Le premier qui accepta d'offrir son talent à l'œuvre en gestation, en allant enregistrer, dans un studio de fortune, les intonations inaugurales et les premiers serments de la prosopopée puyfolaise.

    Il restera dans la mémoire puyfolaise comme l'un des pionniers de cette grande aventure humaine et culturelle dans l'intimité de laquelle il se reconnaissait, et à laquelle il ne cessa de manifester son attachement et sa tendresse. Son souvenir est impérissable.

    Jean Piat est parti rejoindre, dans le mystère de la voie lactée, les petites lucioles de tous ses admirateurs disparus. Mais il nous a laissé sa voix en dédicace.

    Elle est immortelle, intemporelle, c'est une voix de l'âme française qui ne mourra jamais.  

     

    Philippe De Villiers

    Philippe de Villiers, ancien ministre, est écrivain et créateur du célèbre parc du Puy du Fou, à la renommée internationale.  

     
  • Une Allemagne à l'avenir incertain ...

    Stuttgart, le château neuf 

     

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    Jacques Bainville avait visité l'Allemagne pour écrire à vingt ans son Louis II de Bavière (1900).

    Il en retira que tout en Allemagne - celle de Guillaume II - avait l'aspect d'une honnête maison de famille propre et bien ordonnée. L'Allemagne présente aujourd'hui encore cette allure générale qu'un siècle d’extraordinaires tribulations et de tragédies inouïes n'a pas vraiment modifiée. 

    Louis-II-de-Baviere.jpgAu temps de Louis II, l'industrialisation du pays était déjà largement en route et les technologies du XXe siècle s'installaient à grands pas.  Elles intéressaient Louis II comme tous les princes européens de son temps. Il les voulut à Neuschwanstein, son château des légendes germaniques. (que Maurras eût dites barbares) ...  Ces technologies, l'Allemagne allait savoir les exploiter à grande échelle au cours des décennies suivantes, et les développer jusqu'à l'excellence. Bainville a dit aussi, dans un contexte historique qui justifiait sa remarque, que l'Allemagne faisait l'industrie pour la guerre et la guerre pour l'industrie. N’agitons pas des peurs anachroniques : aujourd'hui, jusqu'à nouvel ordre, elle fait surtout l'industrie pour l'exportation. Elle y réussit jusqu'à l'exagération, sa marque de fabrique,  et en tout cas mieux que quiconque dans le monde. Chine exceptée. 

    Mercedes-Benz20S-Klasse20W26.jpgVisitez donc, si vous ne l'avez déjà fait, le musée Mercedes de Stuttgart. Tout un symbole. Vous y verrez d'abord un bâtiment ultra-moderne d'une esthétique acceptable, pure, dessiné par des architectes et des ingénieurs d'évidente compétence et de bon goût. Tout l'inverse du musée Guggenheim de Bilbao à qui l'on pourrait le comparer, laideur en moins, pour sa taille et ses volumes. L'intérieur retrace l'épopée de l'industrie automobile européenne à travers les réalisations Daimler-Benz et Mercedes, depuis les temps héroïques des premiers véhicules à moteur jusqu'aux IMG_0497.jpgplus récents modèles qui aujourd'hui inondent le monde, y compris les USA de Donald Trump lequel les menace des pires sanctions ... Le musée Mercedes de Stuttgart n'est pris ici que comme symbole de la puissance et de l'excellence de l'industrie allemande d'aujourd'hui. Esthétique comprise. 

    Côté ville, à Stuttgart, vous longerez les châteaux des ducs de Wurtemberg, l'un ancien, l'autre dit nouveau inspiré de Versailles, détruit pendant la dernière guerre, reconstruit après à l'identique, et vous croiserez une population nombreuse qui sait festoyer après l'effort, souvent vêtue de costumes ou même d'uniformes traditionnels, et qui vit selon ses racines, entre bière et vin, Danube et Neckar. Mais une population qui décroit en nombre et croît en âge ce qui est le véritable drame de l'Allemagne d'aujourd'hui et sans-doute bien plus encore de demain. 

    Cette évolution funeste s'apprécie si l'on peut dire d'un simple coup d'œil. Les beaux hôtels des bords du lac de Constance ou de La Forêt Noire ne sont plus habités de jeunes et fringants voyageurs mais principalement de vieillards plus ou moins valides qui viennent y user leurs forces déclinantes, y briller de leurs derniers feux ... Les plus « jeunes » y arrivent, à travers les routes boisées de Bavière ou du Bade, dans leurs voitures de collection de toute beauté qui ramènent aux temps anciens d'avant ou d'après-guerre. Celles-là même que l'on a admirées au musée Mercedes de Stuttgart... Nostalgie de la jeunesse, quand tu nous tiens ...! 

    Une partie non-négligeable de la réalité allemande d'aujourd'hui nous semble tenir dans cette dialectique : une puissance industrielle encore intacte face à un effondrement démographique sans analogue. Des entreprises encore dynamiques et insolemment prospères et une population vieillissante de retraités accrochés à leur épargne, veillant à sa préservation et à sa rentabilité. 

    picture.jpgL'Allemagne d'Angela Merkel, c'est à dire le grand patronat allemand, a longtemps cru pouvoir compenser ce déclin démographique par l'immigration. Derrière l'appel de la Chancelière à l'accueil d'un million et demi de migrants, il n'y avait pas que de bons sentiments. Il y avait aussi de gros intérêts. Réels ou supposés car les Allemands ont dû éprouver que tous les arrivants n'étaient pas des Turcs laborieux et qu'il ne serait pas si facile de les mettre au travail, à supposer qu'ils aient un métier. L'expérience - négative et amère à bien des égards - ne pourra pas, de toute évidence, être poursuivie ni renouvelée. Elle a déstabilisé la chancelière Merkel et fragilisé sa grande coalition ; elle a réveillé le sentiment national et identitaire allemand, à droite comme à gauche, car la gauche allemande a peu à voir avec la gauche française. Et pas seulement aux extrêmes : un homme comme Thilo Sarrazin, issu de l'établissement, n'en procède nullement. 

    L'Allemagne est donc - comme la France - à la croisée des chemins. Comme le nôtre, malgré de flatteuses apparences, son avenir est incertain. Elle entre dans une zone de risques et de turbulences encore difficilement identifiables mais réels. Et qui, bien-sûr, comme toujours, intéressent la France. C'est ce que nous avons essayé de montrer et de décrire simplement et bien partiellement à travers quelques choses vues Outre-Rhin.   

    Retrouvez l'ensemble des chroniques En deux mots en cliquant sur le lien suivant ... 

    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Le Lancet : l’Oligarchie, fin de partie ?, par Christian Vanneste.

    Veran contre Raoult, c’était la carte contre le territoire, le médecin socialiste ambitieux devenu ministre contre un infectiologue de renommée mondiale mais anticonformiste à la tête de l’IHU marseillais. Le premier s’appuyait sur les institutions et les instances qui constituent le microcosme médical, composé de spécialistes qui, à force de courir d’une réunion à l’autre, ne voient plus guère de malades. Le second, c’était le terrain, les patients en direct, et près de 4000 personnes testées et soignées, mais en dehors des règles académiques.

    christian vanneste.jpgLe premier, et son Cerbère Salomon, égrenaient les chiffres, dessinaient les cartes des zones les plus touchées et de celles qui l’étaient moins. Le second administrait aux volontaires infectés par le Covid-19 des doses d’hydroxychloroquine et d’azythromycine pendant quelques jours avec des résultats positifs, puisqu’on ne constatait que 0,5 % de décès parmi eux.

    Cette apparence du sérieux institutionnel contre une sorte de braconnage médical était renforcée par le style volontiers provocateur du « druide » marseillais qui ne cessait de rappeler son audience internationale et son niveau scientifique dont il affichait si peu les signes ostentatoires. Mais la carte sûre d’elle s’est assez vite fissurée, crevassée : pourquoi l’Etat avait-il, au mois de Janvier, classé parmi les produits toxiques cette chloroquine utilisée depuis près de 80 ans contre le paludisme et nécessaire aux malades du lupus ? Pourquoi le ministre Veran avait-il réservé son usage aux malades gravement atteints par le Covid-19, et sans l’antibiotique préconisé dans le protocole Raoult ? Ce dernier avait pourtant insisté sur la nécessité d’en user précocement pour diminuer la charge virale, ce qu’il constatait à Marseille, et sur son inutilité dès lors que les problèmes respiratoires aigus, qui allaient entraîner la mort, ne dépendaient plus du virus. La thérapeutique du professeur marseillais était mise en oeuvre dans de nombreux pays dans le monde, en France, elle suscitait une véritable guerre civile médicale. Mais, derrière Raoult, soutenu en France par Onfray, et à l’étranger par Trump, se profilait l’ombre du populisme. L’infectiologue de réputation mondiale devenait alors un charlatan ! Aussi, lorsque la revue de référence, The Lancet, publia une étude portant sur 96 000 cas et concluant à la nocivité de l’hydroxychloroquine, un cri de triomphe parcourut le microcosme de la bienpensance, dont les vecteurs médiatiques, pavoisèrent et jubilèrent. La bête était morte, les institutions internationales et nationales, l’OMS et l’ANSM, l’agence française du médicament française, suspendaient les essais cliniques de la molécule dans le cadre de l’épidémie actuelle. Le ministre Veran se mettait au niveau de Cohn-Bendit pour demander aux partisans de Raoult de « fermer leur gueule ».

    Cette danse sur un cadavre n’a duré que quelques jours. De nombreuses personnalités scientifiques, y compris des opposants à la thérapie marseillaise, ont décelé la supercherie : la revue de référence avait publié sans véritable contrôle un article manifestement fallacieux, bourré d’erreurs factuelles, et fondé sur des sources incertaines. Trois des quatre signataires, dont le principal, Mandeep Mehra, se désolidarisaient du quatrième, le meneur de l’opération, Sapan Desai, dirigeant de Surgisphère, la société d’analyse, opératrice de la collecte et de la présentation des « données ». The Lancet lui même mettait en garde, et on assista alors à la pantalonnade du ministre Veran allant demander des explications au Lancet qui l’avait amené un vendredi soir à interdire l’emploi du médicament contesté, même dans le protocole inopérant dans lequel il l’avait d’abord autorisé. Ainsi, une revue étrangère avait conduit le ministre d’un grand pays soi-disant doté du meilleur système de santé du monde, bardé d’autorités, d’agences, de conseils destinés à conforter le ministère dans la sûreté de sa politique… à prendre une décision précipitée d’ignorant pressé, comme si d’autres motifs avaient agi aussi. A quoi sert l’ANSM qui va revoir sa copie ? A quoi sert le Haut Conseil de la Santé Publique qui au lieu de conseiller le ministre de façon autonome joue les girouettes selon que le vent souffle dans le sens du Lancet ou contre lui ? A quoi sert la Haute Autorité de la Santé, cette autorité administrative indépendante chargée précisément de faire prévaloir l’intérêt public ? On sait que son ancien président, Jean-Luc Harousseau était favorable l’introduction de la thérapeutique à l’hôpital. A quoi sert le Conseil Scientifique que Raoult a quitté ? Le Comité Analyse Recherche et Expertise qui s’y est ajouté ? A rien, sinon à dépenser de l’argent public, à créer des emplois inopérants qui mobilisent des ressources qui seraient plus utiles auprès des malades ?

    L’éthique et le bon sens ont conduit Didier Raoult à préconiser une méthode : dépister les personnes infectées, les isoler, les soigner. Il a su se procurer les tests auprès notamment d’un laboratoire vétérinaire auquel le gouvernement ne daignait pas répondre. Il n’a pas, comme le conseillait Veran, renvoyé les gens chez eux avec du Doliprane… pour contaminer leurs proches. Il les a soignés avec une thérapeutique hors-AMM, en prenant les précautions nécessaires. C’est ce que doit faire un médecin devant un malade dès lors qu’il n’est pas un Diafoirus prêt à voir mourir ses patients selon les règles de la médecine au terme d’essais « randomisés ». C’est ce que devaient pouvoir faire tous les médecins, ces médecins de ville qu’on a méprisés jusqu’à les priver des moyens matériels indispensables à l’exercice de leur métier, comme les masques. L’expérience du Covid devrait ouvrir les yeux des Français sur le microcosme qui les dirige et les informe, sur son incompétence, sur cette armée de colonels qui n’ont jamais livré la moindre bataille, et dont les décisions ne sont pas exemptes de copinage, de calculs intéressés voire de corruption. Il est plus que temps de faire tomber cette oligarchie qui, elle, est vraiment inutile et même nocive à la France.

  • Le contre-sens suicidaire de la prétendue « écologie », par Christian Vanneste.

    Le grand paradoxe ou plutôt l’énorme mensonge de « l’écologie » politique repose sur une idée : la vie. La pandémie du Covid-19 a accentué au-delà du raisonnable la peur de la mort. Ni le nombre de morts, ni les tranches d’âge assez logiquement les plus touchées n’auraient du conduire à pareille panique planétaire augmentée dans notre pays par la gesticulation d’un gouvernement dépassé par la question. Sans doute la priorité donnée à la protection de la vie a-t-elle facilité un glissement de l’opinion vers ceux dont le fonds de commerce se confond avec l’exploitation politique de la peur face aux menaces chimique ou nucléaire.

    christian vanneste.jpgEntre pollution et contamination, l’amalgame sémantique a été depuis longtemps utilisé par les marxistes repeints en vert qui se sont emparés de « l’écologie ». Le climat mental créé par la crise sanitaire a donc développé surtout chez les urbains des grandes villes l’idée qu’il fallait améliorer la qualité de l’air, de l’alimentation, et se méfier davantage des produits d’une grande industrie cynique prête à jouer sur notre santé pour augmenter ses profits. Le rôle des grands laboratoires pharmaceutiques dans « l’étrange défaite » de notre système de santé et en particulier dans le navrant débat autour du « protocole Raoult » a donné du crédit à cette hostilité et permis la réunion contre le capitalisme du gauchisme assoiffé de révolution et des bobos soucieux de leur santé. Le taux d’abstention avec sans doute une mobilisation plus sélective des électeurs a fait le reste. On remarquera seulement que l’autre bénéficiaire politique potentiel de la pandémie, le souverainisme, qui dénonce lui de manière plus précise, et l’excessive circulation des biens et des personnes, et la délocalisation de notre production, qui expliquent à la fois la propagation rapide du virus et l’absence des moyens matériels pour le combattre, n’a pas su utiliser cette carte pourtant maîtresse.

    Ce n’est certainement pas en fermant Fessenheim et en diminuant notre production d’électricité nucléaire, en ruinant nos industries automobile et aéronautique par une pluie toxique de taxes et de réglementations que nous vivrons mieux. La France produit peu de gaz à effet de serre : 0,9% du total mondial de CO2, deux fois moins que l’Allemagne. Cette question ne devrait en aucun cas être sa priorité, et on se demande par quelle aberration le président accidentel que nous subissons en fait tout un fromage. Que le confinement ait baissé l’émission du CO2 de seulement 8%, comme il le souligne, est anecdotique par rapport au marasme économique et social que l’incarcération sanitaire des Français va entraîner en raison de l’impréparation de notre pays. ll voulait montrer par là que la décroissance n’améliorerait pas la qualité de notre air de façon significative. Certes, mais elle tuerait à coup sûr notre économie, nos emplois, notre pays. Et c’est dans cette contradiction que réside le grand mensonge vert : sous prétexte de mieux protéger la vie de chacun, sauf les avortés et les euthanasiés, bien sûr, les « verts » veulent surtout tuer notre vieille nation, comme si la survie de celle-ci n’était pas la première protection de la vie de chacun de ses membres, comme si la vie d’une nation ne pouvait pas être prolongée sans limite alors que tel n’est pas le cas pour les individus.

    Zemmour s’est fait brocarder récemment pour un de ses raccourcis tellement rapide qu’il risque de paraître ridicule. « Complotiste » s’est écriée en choeur la « bienpensance »…. Voilà que Zemmour confond le vert écologique, le vert gentil avec le vert islamiste, le vert méchant : aucun rapport, il délire ! Et pourtant non : s’il est vrai que la même couleur est le fruit du hasard, la convergence des luttes, elle, ne l’est pas ! Les ennemis de nos ennemis sont nos amis. Tous ceux qui veulent affaiblir, puis tuer la France, ensevelir son histoire sous un tombereau de honte, remplacer sa population, ravager sa culture, y répandre l’insécurité à force de laxisme, se liguent naturellement contre elle. Peu importent les oppositions cruelles sur les droits des « lgbt », sur l’égalité hommes/femmes, l’immigration africaine et musulmane est bienvenue, le multiculturalisme est l’avenir, le cannabis est bon pour la santé et il fait vivre un certain nombre de quartiers hors-la-loi. Notre société connaît une menace mortelle : c’est l’addition des communautés minoritaires unies pour renverser plus qu’un pays, une civilisation. L’intersectionnalité entre les groupes féministes, lgbt, antiracistes, anticapitalistes, indigénistes, végan, antifascistes, islamistes, antivoitures, écologistes, va faire que malgré les divergences considérables, on ne va pas se combattre, ni se critiquer, qu’on va même parfois défiler ensemble pour défendre la Palestine ou une famille de délinquants. Cette effervescence-là est le côté obscur des tribus d’internautes célébrées par Maffesoli. Comme un canard sans tête qui continue à courir, la gauche, privée du prolétariat ouvrier qui a compris qu’il n’avait rien à attendre d’elle, a choisi la stratégie prônée par les démocrates américains ou par Terra Nova : la majorité de demain sera l’addition des minorités. C’est un choix mortifère qui est celui de nos prétendus écologistes, de nos « pastèques », vertes à l’extérieur et rouges à l’intérieur, d’autant plus dangereusement mortelles qu’elles avancent en prétendant défendre la vie. Un signe ne trompe pas : le fond totalitaire transparaît avec l’intolérance et cette prétention exorbitante d’une politique fondée sur une science, sur une connaissance absolue. Le marxisme se voulait « socialisme scientifique ». Ses orphelins embrassent « l’écologie ». Or la politique n’est pas une science et la science elle-même est fondée sur le doute plus que sur la certitude. Raoult n’a cessé de le répéter à des journalistes obtus dont l’inintelligence et l’inculture sont pour beaucoup dans le suicide de notre pays.

  • Niger : affaiblis, les islamistes ”passent de la guérilla au terrorisme”, par Vladimir de Gmeline.

    Source : https://www.marianne.net/

    Paradoxalement, l'assassinat d'humanitaires français au Niger est un signe d'affaiblissement des groupes terroristes, incapables de prendre d'assaut des villes comme naguère. Reste le problème de la corruption, qui mine les efforts pour mettre sur pied des forces locales efficaces.

    13.jpgFallait-il faire cette sortie dans la réserve naturelle de Kouaré, pour aller observer les girafes ? Et la France est-elle en train de s'enliser au Sahel ? Depuis l'attaque qui a coûté la vie le 9 août à sept employés d'Acted, une ONG française, dans ce parc situé à vingt-cinq kilomètres de Niamey, la capitale du Niger, ces deux questions tournent dans les esprits. On dissèque les procédures de sûreté, les conseils aux voyageurs du Quai d'Orsay, et le patron d'Acted, Frédéric Roussel, interpelle la communauté internationale sur « la sécurité et l'inviolabilité des humanitaires ». On se demande, surtout, à quoi sert la présence française, si de tels actes peuvent encore être perpétrés, et si des jeunes gens venus aider la population sont ainsi exécutés ? Pour de nombreux observateurs, cette attaque est un signe de plus de l'échec de la France et des pays du G5 à contenir la menace islamiste.

    « Il n'y a pas nécessairement eu d'erreur du côté des ONG » observe Hamid*, un analyste en sécurité nigérian, « elle était en zone jaune, pas orange, et très fréquentée par des expatriés. Il y a des visites chaque week-end. Mais c'est là qu'est le problème. Il n'a pas été correctement pris en compte par les autorités nigériennes. A partir du moment où un secteur accueille du monde, même si il est à priori calme, il est nécessaire de renforcer les mesures, c'est automatique. Il faut une surveillance accrue, même si elle est discrète et disséminée. Le renseignement est essentiel. »

    "Aujourd'hui, il n'y a plus une colonne capable de prendre Kidal ou Tombouctou"

    Sans les mettre en cause, ce professionnel aguerri pointe néanmoins « un aspect dont on ne parle pas assez, la politique de refus des escortes des ONG » : « Quand ils affichent leur logo sur leurs bâtiments et leur véhicules, et précisent qu'ils sont 'no weapon', sans armes, ils se protègent. Un convoi armé, on risque de faire feu sur lui ou de faire exploser les véhicules pour le stopper. Un convoi sans armes, ce ne sera pas nécessaire. Mais aujourd'hui, ce système montre ses limites. Il faut absolument que les déplacements d'humanitaires soient signalées aux forces de sécurité, ce qu'ils ne font pas forcément, surtout pour leurs activités ponctuelles.»
    Cette dégradation de la situation sécuritaire signifie-telle pour autant un échec de Barkhane ? « Il faut se replacer dans le contexte, et voir où on en était il y a quelques années, quand les islamistes occupaient Tombouctou et marchaient sur Bamako, ce qui a donné lieu au déclenchement de l'opération Serval » tempère Pierre*, expert de la zone et des guerres insurrectionnelles. « Depuis, l'impact de Barkahne (qui a suivi l'opération Serval, ndlr) sur la situation sécuritaire est réel, on a tendance à l'oublier : le nord du Mali et la Mauritanie sont stabilisés, la problématique touareg n'est plus d'actualité, les groupes d'Aqmi (Al-Qaïda au Maghreb islamique) ont été mis par terre, d'Abou Zeïd en 2013 à la neutralisation d'Abdelmalek Droukdel, leur émir, en juin 2020, ce n'est quand même pas rien ! Aujourd'hui, il n'y a plus une colonne capable de prendre Kidal ou Tombouctou. »

    "Il faut faire monter les armées du G5 en gamme"

    La problématique s'est déplacée sur le nord-est du Mali, dans cette zone dite « des trois frontières » avec le Niger et le Burkina-Fasso. Lors de notre reportage avec la Légion étrangère en mars dernier, les officiers que nous avions accompagné en patrouille, comme le capitaine Jordan du 2ème REI (Régiment étranger d'infanterie) défendaient leur action et leur bilan : « On parle de sentiment anti-français, à Bamako, d'accord, admettons, mais je ne l'ai pas vu ici. Bamako c'est une capitale très éloignée de ces zones désertiques et rurales, où les gens sont contents de nous voir. Notre présence et cette des armées nationales, alors qu'ils se sentaient complètement abandonnés par le pouvoir central, c'est le signe qu'une autorité est présente et revient pour les protéger. »

    Même conviction de la part du Rep Comanfor (le représentant du commandant de Barkhane à Gao, au Mali), le colonel Bernard : « Avec l'EIGS (Etat islamique au grand Sahara) on est passé à une stratégie plus violente. La nôtre repose sur trois leviers. On 'tape' les GAT (Groupes armés terroristes), on aide nos partenaires et on travaille avec eux, et on travaille avec la population par le biais des actions civilo-militaires. » Problème, malgré des bons résultats en termes de nombres de combattants neutralisés, les armées nationales et du G5 sont encore à la peine : « On est là pour cinq à dix ans, il faut les faire monter en gamme. »

     

    Pour le terrorisme, "pas besoin de sanctuaire"

    Si l'attaque de Kouaré peut-être interprétée comme un signe de l'affaiblissement des GAT, le résultat n'en est pas moins désastreux, comme toujours quand des terroristes acculés sèment la terreur, au hasard, sur des actions dites « d'opportunité » ou planifiées, ce que l'on ignore encore pour celle-ci : « Ils subissent énormément de pertes » explique Pierre, « entre les forces spéciales de l'opération Sabre qui multiplient les opérations de neutralisation à un rythme intense, et Barkhane qui les accule, ils sont très affaiblis. Ils attaquent des humanitaires parce qu'ils n'arrivent plus à attaquer des casernes comme ils le faisaient encore il y a quelques mois. Ils ne peuvent plus prendre d'otages, ils n'ont plus de sanctuaires et ne peuvent pas remonter vers le nord. Donc plus d'opérations massives, et ils sont maintenant en train de passer de la guérilla au terrorisme. Le Niger est désormais le pays où l'insécurité risque d'être croissante. »
    Car les conséquences psychologique sont catastrophiques : « Bien sûr que Barkhane a de bons résultats, et que le G5 n'est pas à la hauteur, c'est indéniable, on sait cela » nuance Hamid, « le problème c'est que pour mener ces actions, les terroristes n'ont pas besoin de sanctuaires, ils sont mobiles et volatiles. Ici à Niamey, l'impact sur les esprits est catastrophiques, les gens sont très choqués et inquiets. C'est à vingt-cinq kilomètres et les victimes ne sont pas des soldats qui tombent au champ d'honneur, mais de jeunes humanitaires qui sont là pour aider les gens. »

    130 millions d'euros d'aides détournés

    Il pointe le gouvernement en place et les détournements de fonds : « Le nœud vient de la corruption, c'est une question de gouvernance. Les fonds attribués par la France au ministère de la Défense nigérien ne vont pas à la sécurité. Et les gens qui chez nous dénoncent ces détournements se retrouvent en prison. Pourquoi cela reste impuni, pourquoi la France ne dit rien ? » Des détournements effectués à travers des surfacturations de matériel, des contrats fictifs et des fausses mises en concurrence. Le tout pour un montant de 130 millions d'euros, selon un audit publié en février, à la suite des attaques des camps d'Inatès et de Chinadoger, près de la frontière avec le Mali, où l'armée avait perdu 71 et 89 soldats, et ramené à 76 millions en juin.
    Sur cette affaire, la députée Frédérique Dumas, membre du groupe d'amitié France-Niger, avait posé une question écrite à la ministre des Armées, Florence Parly, en mai dernier. La France ne pourra plus tolérer ces pratiques, si elle ne veut pas que ses ressortissants soient à nouveau visés. Frapper les terroristes est une chose, mais sans une sévère moralisation de la vie politique locale, tous les efforts seront vains.

    *Les prénoms ont été modifiés

  • Vis ma vie de Parisien : entre comité « Vérité pour Tralala » et vegans blafards, par Xavier Eman.

    Source : https://www.revue-elements.com/

    Dans « A moy que chault », Xavier Eman tient le feuilleton de notre apocalypse molle. À Paris, son héros, Frédéric slalome entre une manifestation de vegans blafards et un rassemblement du comité « Vérité pour Tralala ».

    4.jpgLorsque Frédéric s’extirpa du métro, arrachant nerveusement le masque chirurgical qui l’avait fait suffoquer jusque-là, il fût étonné par l’effervescence qui régnait sur la place Maubert. Certes, c’était jour de marché. Les bobos du quartier s’affairaient pour acheter leur brie truffé et leur filet mignon de veau en vue du repas dominical. Mais il n’y avait pas que ça. L’atmosphère était électrique, chargée d’une inhabituelle tension. Les clients des divers étals semblaient plus pressés, plus fébriles qu’à l’ordinaire, les commerçants plus renfrognés…

    Des bourgeois à gueules de syphilitiques

    Frédéric mit quelques instants à découvrir la cause de cette ambiance particulière : une centaine de personnes était rassemblée dans un coin de la place, séparée du marché par un étique cordon de quelques CRS. À la tête du regroupement, un trentenaire prématurément chauve en pantacourts et marinière lançait des slogans d’une voix à demi châtrée qui cherchait des accents virils sans parvenir à en trouver. « Une voix de curé Vatican II » ne put s’empêcher de penser Frédéric.

    « Assez, assez, assez de sang versé ! » s’époumonait l’étrange petit homme. Frédéric crut un instant qu’il s’agissait d’une manifestation de dénonciation des crimes de la racaille qui – du lynchage de chauffeur de bus de Bayonne à l’écrasement barbare de l’aide-soignante de Lyon – ensanglantaient le quotidien des français. Il fut rapidement détrompé en découvrant les pancartes exhibées par les manifestants. « Lait = viol » pouvait-on lire sur l’une, « Viandard = salopard » sur une autre. Ce n’était que cela. Un attroupement de « végans », des bourgeois à gueules de syphilitiques venus conspuer leurs collègues CSP+ complices, par leurs achats criminels, des horribles bouchers, fromagers, et autres poissonniers génocidaires…

    En d’autres temps, Frédéric aurait sans doute souri de ce spectacle. Il serait allé dans la foulée dévorer une entrecôte saignante dans le bistrot le plus proche. Mais l’époque n’était plus à la légèreté. Il se sentait las, un peu accablé et décida de s’éloigner au plus vite.

    Les animalistes en colère

    En descendant le boulevard Saint-Germain, il tomba bientôt sur un nouveau rassemblement, plus vindicatif et vociférant. Il s’agissait cette fois, comme lui expliqua un fonctionnaire de police qui semblait moins serein que ses collègues chargés de contenir les animalistes en colère, d’une « marche blanche » en l’honneur de Kader, un jeune de la cité de « Joyeux Bosquets » à Trappes, mort des suites de ses blessures après avoir été percuté par une voiture alors qu’il brûlait un feu rouge en moto. Ne portant pas de casque, sa tête avait violemment cogné le bitume, provoquant une hémorragie fatale.

    Le conducteur de l’automobile étant un gendarme à la retraite, la famille et l’entourage de la victime refusaient d’accepter la « thèse de l’accident ». Ils s’étaient donc réunis pour « réclamer justice » et dénoncer le racisme systémique du code de la route et des feux tricolores. Car Kader – contrairement à ce que son casier judiciaire, riche de quinze condamnations donc trois pour vol avec violences et deux pour agression sexuelle, aurait pu laisser penser – était un « très gentil garçon », « toujours poli, aimable et serviable ». Le « voisin idéal » que toute la cité pleurait à chaudes larmes.

    C’est en tout cas ainsi qu’il était présenté dans tous les médias relayant complaisamment les émouvantes et touchantes images de fatmas étouffant leurs larmes dans leur hidjab à l’évocation du brave garçon décédé.

    Le comité « Vérité pour Tralala »

    À cette manifestation communautaire s’était joint un nombre conséquent de membres du comité « Vérité pour Tralala », solidaires de ce nouveau « drame de l’exclusion et de la haine ». Ceux-là étaient reconnaissables à leurs mines patibulaires, leurs mains gantées, et leur propension à se mettre à genoux le poing levé au passage de la moindre caméra d’une chaîne de télévision, d’ailleurs nombreuses pour couvrir l’événement.

    Parmi la foule bigarrée, on pouvait également observer pas mal de visages pâles, de bons caucasiens apparemment pas gênés le moins du monde par le voisinage d’individus braillant hystériquement que « Les blancs doivent payer l’addition ! » et aspirant à « La fin du règne blanc, maintenant ! ».  Certains reprenaient même ces sympathiques slogans avec toute la véhémente conviction de la catharsis masochiste.

    Légèrement écœuré, Frédéric s’enfuit une seconde fois.

    Malgré l’encombrement des rues et des trottoirs, malgré l’omniprésence des passants, il fut envahi d’un profond sentiment de solitude, d’isolement et d’abandon. Bien qu’étant au cœur même de la ville qui l’avait vu naître, Il ressentait soudain physiquement toute la douleur de l’exil.

  • Principe de précaution et servitude volontaire, par Christian Vanneste.

    Source : https://www.christianvanneste.fr/

    Le pouvoir actuel n’est pas libéral, mais « progressiste » ce qui est le contraire. Le libéralisme repose sur l’idée que la personne douée de raison peut au profit de la collectivité jouir d’une autonomie dont elle fera le meilleur usage non seulement dans son activité économique mais aussi dans l’ensemble de la vie sociale, avec bien sûr une juste répression des cas où son comportement nuirait à la collectivité.

    christian vanneste.jpgCette conception conduit à concevoir la société comme un vaste espace de liberté avec en son centre un noyau capable d’exercer les sanctions qui s’imposent à ceux qui contreviennent à des lois les moins nombreuses et les plus claires possibles. Le progressisme repose au contraire sur l’extension indéfinie du noyau central sous la forme d’un Etat tentaculaire multipliant les règlements et les interventions mais en clamant que c’est pour l’augmentation du bien-être et des menus plaisirs de chacun, et la sauvegarde de la santé et de la sécurité de tous. Ce système a été annoncé notamment par deux auteurs français épris de vraie liberté : La Boétie qui dénonce le caractère volontaire de la servitude chez les peuples qui acceptent de perdre leurs libertés et par Tocqueville annonçant une nouvelle forme de despotisme qui ne ruine la liberté que pour prétendre apporter le bonheur. Il est fascinant de constater à quel point la situation actuelle accrédite leurs craintes.

    Le levier du mécanisme réside dans le principe de précaution, et l’énergie qui le meut est la peur. Chacun désire naturellement persister dans son être et n’envisage sa disparition ou même son effacement progressif par l’âge et les handicaps qu’avec dépit. Le plus souvent, nous souhaitons au moins le meilleur avenir pour nos proches et nos enfants. C’est pourquoi le principe de précaution agit avec tant de force puisqu’il consiste à affirmer qu’il faut, face à un danger, prendre le maximum de mesures pour prévenir celui-ci, et donc sauver des vies, chacun recevant le message en pensant à la sienne. On remarquera l’utilisation de l’argument par exemple pour justifier la limitation de la vitesse, ou le confinement. Il s’agit de vies ou de morts virtuelles dont l’existence est purement statistique, mais l’effet est assuré : beaucoup placent leur vie parmi celles qui ont été sauvées et se font les collaborateurs zèlés et enthousiastes des restrictions qu’on apporte à leurs libertés puisque c’est « pour leur bien ». Evidemment, l’efficacité du processus varie avec les peurs : lorsqu’il s’agit d’environnement, de pollution, et plus encore de réchauffement climatique, la peur demeure lointaine et abstraite et n’est pas à la mesure des contraintes qu’on prétend imposer aux automobilistes, par exemple. De même, la convergence de la limitation de vitesse avec l’augmentation des amendes déclenchées par des radars a rendu le bon sens des conducteurs soupçonneux, et avec raison. La vitesse n’est pas, n’est plus la cause principale des accidents, mais seulement le facteur le plus facile à sanctionner quand il s’agit d’automobiles. Alors, le Covid-19 est arrivé, et là, tous les éléments ont été réunis pour permettre à l’Etat de jouer les protecteurs envahissants mais dévoués, et pour la foule moutonnière d’applaudir à la multiplication des précautions. Certes, en France, l’Etat avait manqué le départ, mal perçu l’opportunité en continuant à lui préférer le réchauffement climatique, mais il se rattrape depuis. Moins il y a de morts, plus il y a de précautions, c’est-à-dire d’atteintes à nos libertés.

    D’abord, il faut constater le caractère limité de la pandémie. Dans le pire des cas, celui de la Belgique, le virus aura tué une personne sur 1000, et le plus souvent atteinte par l’âge, et des pathologies qui ont affaibli son organisme. Dans les pays qui sont pointés comme subissant une catastrophe sanitaire, le chiffre est un peu supérieur à une personne sur 2000, et en France, légèrement inférieur. Mais plus les données paraissent satisfaisantes, plus le discours alarmiste s’amplifie, avec le risque d’une deuxième vague, l’inquiétude devant la rentrée scolaire, les rumeurs sur de nouveaux foyers que la propagande se plaît à nommer « clusters », et la menace d’un nouveau confinement calamiteux pour notre économie sinistrée. Quelle que soit la solidité de ces craintes, on ne peut que constater l’intérêt que le pouvoir y trouve en montrant son apparent dévouement et en recevant l’assentiment de la partie la plus « civique » de la population, hélas souvent la plus propice à la servitude volontaire. Un peu de lucidité serait souhaitable. Tandis que certains applaudissent lorsqu’une équipe de policiers force une famille à quitter un TGV qu’on arrête exprès parce qu’elle portait mal ce masque, inutile il y a quelques mois, trois gendarmes, appelés pour une rixe dans le centre-ville de Roquefort-La Bédoule, se sont retrouvés face à une vingtaine de personnes particulièrement agressives qui n’ont pas tardé à se retourner contre eux. Des policiers qui appliquent avec excès des règles à des contrevenants peu dangereux, d’autres qui reculent devant des loubards ou qui, pis encore deviennent leurs victimes, et d’autres enfin qui se font distraits lorsque le récalcitrant est trop vindicatif ou semble trop dangereux : les Français vont-ils accepter longtemps encore un pouvoir qui ne sait pas évaluer les véritables dangers et protéger véritablement toute la population ?

  • Livre – L’ordre et le désordre, dans Analyse et théorie, Démocratie, Livres, de Eugène Berg.

    Source : https://www.revueconflits.com/

    Aujourd’hui persona non grata, Charles Maurras a pourtant développé de nombreuses réflexions intéressantes, notamment sur le patriotisme ou la figure du chef. Dans cet ouvrage, le maître à penser de l’Action Française brille dans une réflexion actuelle et précieuse.

    5.jpgOn ne lit plus Maurras, dont la pensée est reléguée dans un passé révolu. Or son Kiel et Tanger (1910) est l’un des premiers  ouvrages consacrés en France à la question géopolitique. Son Enquête sur la Monarchie (1900) peut paraître désuète, elle n’en constitue pas moins une réflexion sur le pouvoir et sa permanence , le lien national, l’enracinement dans la durée des collectivités humaines, qui après avoir abandonné le rêve de l’ empire universel, ont constitué des nations, concrètes, vivantes, charnelles. Ne parle-t-on pas aujourd’hui, pour ce qui en est de régime politique de la Vè République, de Monarchie républicaine, où le politologue Georges Burdeau, qui fut le professeur de l’auteur de ces lignes, distinguait le pouvoir d’Etat, s’inscrivant dans la durée et le pouvoir tout court, incarné par les partis ? Charles Maurras, n’est ni un ultra légitimiste dans la lignée des Bonald, Burke ou Maistre. Il est encore moins un théoricien du fascisme, le pendant de Gentile ou Mussolini. Tout les oppose, à commencer par leur conception, du « chef » ou de la nation. C ‘est celle -ci qui est placée au cœur de sa pensée.

    Vers un patriotisme refondé

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    L'ordre et le désordre (Français)

    Ecrit en 1948, cet opuscule concis ne se paye pas de mots. Il relève bien que c’est la prodigieuse persévérance de l’Angleterre au cours des années 1940- 1945, qui a sauvé les vieilles démocraties, que c’est l’évolution panslaviste ou plutôt panrusse des Soviets, qui a alimenté la résistance que la Russie a opposé aux Nazis, la Russie dont l’héroïsme est exalté par Vladimir Poutine 75 ans après la victoire du 9 mai 1945. Il évoque même, bien avant l’America first, l’éclosion de la vaste conscience américaine. D’où son appel à un patriotisme français, seule bannière susceptible de rassembler, ouvriers, bourgeois, agriculteurs, artisans, intellectuels… D’où son appel à l’éveil au corps et à l’esprit de la nation réelle. D’où son espoir (qui s’est révélé bien vain) de la nation pour déclasser et fusionner ses partis. C’est ainsi qu‘à ses yeux la France s’en sortira, et que le nationalisme français se reverra par la force des choses. Rien n’est fini. Et si tout passe, tout revient.

    Ne peut-on pas appliquer ces paroles à l’Amérique, la Chine, la Russie, la Pologne, la Hongrie et même plus prudemment à l’Allemagne, alors que dans l’Hexagone, nationalisme, patriotisme   paraissent encore sur la défensive, car portés, par ce que l’on appelle encore les « extrêmes », et non les partis de gouvernement. Andrew A.Michta, doyen du Centre d’ études de sécurité George- C- Marshall, grand éditorialiste à la revue The American Interest, n’a-t-il pas déclaré  dans son interview au Figaro, le 3 juillet dernier : «  Nos élites doivent réapprendre la patriotisme , le sens de l’amour du pays, et surtout, de l’obligation  mutuelle que nous devons ressentir l’un envers l’ autre quand nous appartenons à la même nation ».

     

    Une réflexion actuelle

    Cela ne veut nullement dire que nous faisons nôtres les idées de Maurras. Son royalisme paraît aujourd’hui bien décalé, hors du temps. Mais un aspect le rend moderne, c’est celui de la décentralisation. Certes il ne sera pas facile de restaurer les provinces, de redonner aux villes leur autonomie, de faire des communautés locales des entités indépendantes et vivantes, mais un mouvement en cette direction (esquissés lors du référendum d’avril 1969, rejeté) serait peut -être indiqué. Vaste débat jamais conclu entre un Etat central omnipotent et les autonomies régionales, la pandémie a jeté une nouvelle lueur.

    Les Etats ont besoin de chefs et de guides comme les populations ont besoin de paix, concluait Maurras, dans une formule peu politiquement correcte. Car on constate bien qu’aujourd’hui les « vrais » chefs sont des autoritaires ou des populistes, ou mieux encore les deux à la fois, Poutine, XI Jinping, Erdogan, Modi, Trump, Bolsonaro, et une pléiade d’autres… Comment se fait -il que les Churchill, de Gaulle, Nehru n’ait pas été remplacés et qu’encore une fois nos vieilles nations ne sont capables ni d’en faire ressortir, ni de les maintenir en place. Il se peut que tout gouvernement soit, de sa nature, indigne et mauvais, comme toute chair est coupable, ; mais ce n’est pas de jugement moral qu’il s’agit en politique nationaliste : on s’occupe seulement de pourvoir aux nécessités pratiques, pressantes de l’existence. Prius vivere.  A l’heure du coronavirus, ces nécessités ont-elles jamais été aussi pressantes ?

    Eugène Berg

    Eugène Berg est diplomate et essayiste. Il a été ambassadeur de France aux îles Fidji et dans le Pacifique et il a occupé de nombreuses représentations diplomatiques.