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  • Alain de Benoist a raison : « Pour les libéraux « occidentalistes », c’est plus que jamais la Bérézina »

     

    Par Alain de Benoist

    TRAVAUX DIVERS - Largeur +.jpgCet entretien donné à Boulevard Voltaire [26.03] est intéressant à divers titres. Notamment parce qu'il traite de plusieurs sujet avec justesse, lucidité et pertinence. Il relève à juste titre la généralisation des régimes autoritaires, nationalistes et en un sens traditionalistes. Chacun selon sa tradition, naturellement. Et ceci, parmi les pays les plus puissants du monde. Les systèmes politiques faibles et sans réel soutien populaire d'Europe de l'Ouest - dont le nôtre - font seuls exception, ce qui explique leur déclin. Nous partageons globalement l'analyse d'Alain de Benoist sur ce point. Reste sa prise de position in fine pour l'indépendance de Mayotte. Au risque de choquer certains lecteurs, nous dirons que ce n'est pas pour nous une solution frappée d'interdit. Le patriotisme français a aujourd'hui de tout autres priorités que la défense de Mayotte. Donc, selon nous, cela se discute. LFAR   

     

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    Une fois n’est pas coutume, il s’agit d’un tour d’horizon de l’actualité et non point d’un sujet spécifique. Que penser de la triomphale réélection de Vladimir Poutine, avec 76,6 % des voix dès le premier tour ?

    Je m’en réjouis, bien entendu. Mais le plus important, c’est de constater que les seuls concurrents de Poutine étaient les communistes de Pavel Groudinine (11,7 % des voix) et les ultra-nationalistes de Vladimir Jirinovski (5,6 %), tandis que l’unique candidat libéral, Ksenia Sobtchak, a décroché le score mirobolant de 1,6 % des suffrages : à peu près le score de Philippe Poutou à la présidentielle de 2017 ! Pour les libéraux « occidentalistes », c’est donc plus que jamais la Bérézina. Emmanuel Macron (24 % des voix au premier tour, trois fois moins que Poutine) se trouve maintenant face à un nouveau tsar en Russie, à un nouvel empereur en Chine, à un nouveau sultan en Turquie, tous trois au summum de leur popularité. Partie inégale.

    La tentative d’assassinat de l’ex-agent double Sergueï Skripal, dont les Anglais, immédiatement soutenus par Macron et par Donald Trump, ont immédiatement attribué la responsabilité à la Russie, n’a apparemment pas nui au maître du Kremlin ?

    Elle a, au contraire, encore renforcé sa popularité. Les Russes savent mieux que personne que si Poutine a sans doute des défauts, il est difficile de le considérer comme un idiot. J’ai, pour ma part, beaucoup de mal à imaginer que Vladimir Poutine n’avait vraiment rien de plus pressé, à la veille d’une élection présidentielle (pour ne rien dire de la Coupe du monde de football), que d’aller faire tuer un individu inactif depuis plus de cinq ans, en utilisant un gaz neurotoxique pointant vers le Kremlin. Comme l’a écrit Slobodan Despot, autant laisser sur place sa carte d’identité ! Je comprends, en revanche, fort bien comment pareil coup monté pouvait être utilisé contre lui, afin de servir la russophobie des gouvernements et des médias. Quant au sort de Sergueï Skripal, il m’indiffère : je n’ai pas de sympathie pour les traîtres.

    Nicolas Sarkozy mis en examen dans l’affaire d’un présumé financement libyen de sa campagne électorale ?

    Sarkozy s’est, à mon avis, déjà déshonoré deux fois : la première en réintégrant la France dans le giron de l’OTAN, dont le général de Gaulle l’avait fait sortir, la seconde en déclenchant contre la Libye une guerre criminelle dont nous n’avons pas fini de subir les conséquences. Sur l’affaire dont vous parlez, je ne suis pas dans le secret de l’instruction. Je ne ferai donc de procès d’intention à personne, non par respect de la présomption d’innocence (ainsi dénommée par antiphrase, puisque c’est au contraire quand on est suspecté d’être coupable que l’on est mis en examen), mais parce que je n’ai qu’une confiance très mesurée dans la Justice de mon pays. En tout état de cause, si les charges étaient avérées, ce serait un scandale d’État sans précédent.

    Le projet de réforme de la SNCF, incluant la remise en cause des privilèges des cheminots, et l’imposant programme de grèves annoncé par les syndicats ? 

    Les grèves des transports ne sont jamais très populaires, ce que l’on peut comprendre. Mais arrêtons de prendre pour boucs émissaires des cheminots dont les « privilèges » ne sont qu’une goutte d’eau face à ceux des grands patrons du CAC 40 ! Ce n’est pas la faute des cheminots si les trains n’arrivent plus à l’heure et si les lignes de chemin de fer ne sont plus entretenues. Ce ne sont pas eux qui sont responsables de la gestion désastreuse qui a transformé la SNCF en tonneau des Danaïdes (47 milliards de dettes). La seule vraie question qui se pose dans cette affaire est de savoir si la SNCF va rester un service public au service de tous les usagers, où qu’ils habitent, ou si l’on va s’orienter progressivement vers une privatisation dont les conséquences inéluctables seront une hausse des tarifs (+27 % en Angleterre depuis dix ans) et la suppression programmée de centaines de petites lignes à la rentabilité insuffisante, ce qui accentuera encore la coupure entre les métropoles et la France périphérique. 

    Macron n’aurait jamais été élu sans le soutien massif des retraités et des fonctionnaires, deux catégories l’une et l’autre protégées jusqu’ici des effets de la mondialisation. Dès son élection, il s’est attaqué aux premiers, il s’attaque maintenant aux seconds, qui représentent 22 % du salariat. Il scie donc lui-même la branche sur laquelle il est assis. Le jour où la classe moyenne, qui se trouve déjà en état d’insécurité culturelle, se retrouvera en état d’insécurité sociale, les choses basculeront.

    Les dernières élections italiennes ont vu la victoire massive des populistes de tous bords. Pour le moment, seule la France semble « résister » à cette vague en Europe. Pourquoi ?

    Elle n’y résiste pas tant que ça, puisque les grands partis de gouvernement ont déjà presque disparu, et que c’est pour faire face à la déferlante populiste que Macron a saisi cette occasion d’engager une recomposition générale du paysage politique. Mais vous avez raison : la déferlante en question pourrait être plus ample. Ce qui manque, c’est un homme (ou une femme) susceptible de l’incarner.

    Mayotte se trouve en première ligne face à l’immigration clandestine. Que faire ?

    L’indépendance me semble être une bonne solution.  

    Intellectuel, philosophe et politologue

     
     
    Entretien réalisé par Nicolas Gauthier

    A lire aussi dans Lafautearousseau ...

     

  • Des succès en trompe-l'oeil

     

    Par Pierre Marchand 

    Les bonnes nouvelles économiques s’accumulent pour le nouveau gouvernement, mais elles relèvent surtout – pour l’instant du moins – d’une communication bien maîtrisée.

    Chômage, taxation des GAFA, travail détaché… Les victoires économiques, qu’elles soient partielles ou ponctuelles, semblent déjà ponctuer les premiers pas du nouveau président dans la voie toute tracée de la prospérité promise par Bruxelles et la BCE à qui se pliera à leurs injonctions. Victoires saluées par une majorité de médias qui manquent plus que jamais de recul et d’analyse lorsqu’il s’agit de commenter les faits d’armes du président jupitérien. Il ne faudrait pas oublier que Jupiter, si elle est la plus grosse planète du système solaire, est avant tout une planète gazeuse. Tout ce qu’on trouve à sa surface, c’est, en quelque sorte, du vent.

    Un vent d’optimisme

    Celui qui souffle actuellement sur l’économie est un vent d’optimisme, alimenté par les derniers chiffres de l’emploi  : soixante-cinq mile chômeurs de moins au mois de septembre. Pour être encourageants, ces chiffres n’en sont pas moins à circonstancier. Depuis le début du quinquennat, le chômage est resté stable (quatre mille demandeurs d’emploi en plus au total), sans qu’on ait vraiment l’impression d’avoir entendu parler des hausses des mois de mai, juillet et août. Comme il s’y était engagé, le ministre du Travail ne commentera ces chiffres que chaque trimestre, en analysant pas moins de quarante indicateurs qui lui permettront, au choix, de mieux illustrer les mécanismes qui auront entraîné la baisse du chômage ou de trouver des explications à sa hausse ponctuelle ou persistante. Autre nouveauté, ce ne sont plus les chiffres de Pôle emploi qui seront retenus mais ceux de l’Insee, puisque ce sont les seuls qui répondent à la définition du chômage au sens du BIT (Bureau international du travail). Quelle différence  ? Pôle emploi publie les chiffres mensuels des demandeurs d’emplois inscrits quand l’Insee réalise des sondages trimestriels auprès d’échantillons de centmille personnes environ. À terme, l’impact sera nul, puisque ce n’est qu’une question de thermomètre. Cependant, depuis le début de la décennie, les courbes ont eu tendance à s’écarter significativement (voir graphique)  ; effet d’optique assuré.

    Unanimisme médiatique

    Le deuxième succès que s’attribue le Gouvernement concerne la taxation des géants de l’économie numérique (Google, Apple, etc.) Nous avons déjà montré dans nos colonnes (voir le numéro du 21-23 septembre 2017) à quel point les gesticulations européennes de Macron avaient une probabilité infime d’aboutir, alors qu’une action législative nationale permettrait de poser les bases solides d’une «  fiscalité réelle pour un monde virtuel  ». Là encore, l’unanimité médiatique aidant, seule la performance macronienne est restée dans les esprits.

    Le travail détaché perdure

    Plus récemment, c’est sur la question du travail détaché que notre président s’est illustré. C’est d’ailleurs un sujet que nous avons également traité à plusieurs reprises tant il est révélateur de la doctrine européenne et dévastateur pour l’emploi et le tissu économique français. Annoncé depuis plusieurs semaines, l’assaut a été donné le 23 octobre et aura duré pas moins de douze heures. Il en ressort notamment que le revenu minimum ainsi que les primes prévues par les conventions collectives du pays d’accueil s’appliqueront, mais les cotisations sociales resteront celles du pays d’origine. Le prétendu tour de force de Macron consiste à avoir obtenu la réduction de la durée maximale de détachement de de vingt-quatre à douze mois – avec prolongation possible de six mois. Or, la durée moyenne d’un détachement est de trois mois environ (moins de neuf mois pour les pays les plus pourvoyeurs de travailleurs détachés comme la Lituanie ou l’Estonie). De plus, la durée du détachement s’entend a priori de celle de la mission confiée par une entreprise  ; elle peut donc facilement être contournée par alternance des structures employeuses ou des travailleurs… Pour arriver à ce résultat, une concession a été faite sur le secteur du transport, exclu du texte. Macron a donc cédé là où il aurait dû frapper, et il a frappé là où c’était le moins utile. Cerise sur le gâteau, il a été prévu dans le texte que celui-ci n’entrerait pas en vigueur avant 2022.

    Méthode Coué  ?

    «  Si étant malade, nous nous imaginons que la guérison va se produire, celle-ci se produira si elle est possible. Si elle ne l’est pas, nous obtiendrons le maximum d’améliorations qu’il est possible d’obtenir  » C’est ainsi qu’Émile Coué synthétisait la méthode qui porte son nom, dont nous avions déjà eu un aperçu sous Hollande – «  ça va mieux  ». Ainsi pourrait-on appréhender la méthode Macron, dont l’obsession de «  restaurer la confiance  » est l’illustration (la con-fiance étant certes un élément déterminant de la santé économique d’un pays). Si Macron n’a pas encore gagné la bataille de l’emploi, il est bien parti pour gagner celle de la communication. Et de la communication à la manipulation de la confiance, de la méthode Coué à la «  doublepensée  », il n’y a qu’un pas.  

    L'Action Française 2000 du 2 Novembre 2017

  • Anniversaire du 13 novembre : génération Bataclan ou l'identité malheureuse

     

    Par Alexandre Devecchio

    A l'occasion du deuxième anniversaire des attentats du 13 novembre, Alexandre Devecchio revient sur cette nuit tragique et ses conséquences pour la jeunesse française. Il constate que, s'il y a bien une génération Bataclan, celle-ci n'a rien à voir avec la génération « morale » décrite dans les médias. Cette remarquable chronique [Figarovox, 13.11] qui dépeint une jeunesse qui est celle de l'identité malheureuse, intéressera les lecteurs de Lafautearousseau.   LFAR

     

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    « C'est pour la jeunesse de notre pays que je veux présider la France. Si je reçois le mandat du pays d'être le prochain président, je ne veux être jugé que sur un seul objectif (...) : est-ce que les jeunes vivront mieux en 2017 qu'en 2012 ? », avait déclaré le candidat Hollande lors de son discours du Bourget.

    Sans doute n'imaginait-il pas l'effroyable scénario qui allait suivre. Les cris et les larmes, le sang répandu sur les trottoirs de Paris, les destins brisés dans la fleur de l'âge. Le grand Vendredi prédit par Hegel est advenu, mais en lieu et place du couronnement dialectique annoncé, il a consisté en cet infernal 13 novembre 2015 qui a marqué, comme l'a écrit Alain Finkielkraut, « la fin de la fin de l'Histoire ».

    Le délire meurtrier des djihadistes n'a pas seulement emporté sur son passage des vies, des corps et des âmes, mais également le monde d'hier. Le Bataclan restera comme le tragique tombeau de la génération soixante-huitarde en même tant que celui de l'« antiracisme » institutionnel. Daniel Cohn-Bendit et ses camarades rêvaient d'une société où il serait interdit d'interdire et où l'on jouirait sans entraves. Julien Dray et ses potes de « SOS », de diversité heureuse et de métissage universel. Leurs enfants ont payé du prix de leur vie la facture de leur utopie. « Le multiculturalisme est une blague, une blague sanglante », résumera de manière cinglante Jacques Julliard.

    Le 13 novembre, les Xe et XIe arrondissements, terre promise d'une jeunesse libertaire, ont été touchés en plein cœur. Face aux kalachnikovs des djihadistes, les habitués de La Bonne Bière, de La Belle Équipe, du Carillon ou du Petit Cambodge étaient armés de leur bienveillance et de leur art de vivre.

    Après les attentats de janvier, nous avions voulu croire que badges, slogans et marches blanches suffiraient à conjurer le mal. Moins d'un an plus tard, lors de cette nuit d'épouvante, cette jeunesse a découvert de la plus cruelle des façons la violence du siècle en marche. Le surlendemain, Libération titrait « Génération Bataclan ». Le quotidien exaltait une jeunesse « festive », « ouverte », « cosmopolite » et voulait croire en la naissance d'une nouvelle « génération morale » qui résisterait à l'islamisme en proclamant « je suis terrasse » un verre de mojito à la main. Une volonté d'exorcisme qui éludait le fait que les bourreaux des attentats de Paris avaient le même âge que leurs victimes et qu'ils formaient ensemble une même génération.

    De surcroît, les nouveaux barbares ne venaient pas d'un lointain pays étranger, mais des territoires perdus de la République situés à seulement quelques kilomètres à vol d'oiseau des quartiers branchés de la capitale. Les assassins n'étaient pas Charlie. Ils n'avaient pas marché dans Paris le 11 janvier.

    Une jeunesse épanouie dans l'individualisme occidental est tombée sous les balles d'une jeunesse enfiévrée par l'islamisme. Cette dernière est en partie le produit de l'antiracisme différentialiste des années 1980. En troquant le modèle traditionnel d'assimilation contre le système multiculturaliste anglo-saxon, l'égalité contre la diversité et la laïcité contre l'identité, cette idéologie a fait le lit du communautarisme et de l'islamisme.

    Déculturée, déracinée, désintégrée, une partie des jeunes de banlieue fait sécession et se cherche une identité de substitution dans une oumma fantasmée. L'enquête de l'Institut Montaigne sur les musulmans de France, publiée en septembre 2016 et basée sur un sondage de l'Ifop, révèle que près de la moitié des 15-25 ans sont partisans de la charia et se placent en rupture totale de la République.

    Tandis que la jeunesse issue de l'immigration se réislamise, les « petits Blancs » et même « les petits Juifs », victimes de l'insécurité au quotidien à l'école ou dans les transports en commun, n'ont aucun complexe à reprendre le slogan des soirées électorales du FN, « on est chez nous ! ». Ils quittent les métropoles pour des raisons économiques, mais fuient également de plus en plus la proche banlieue où ils se font traiter de « sales Français » et se sentent en exil dans leur propre pays.

    Les tragédies du Stade de France et du Bataclan ont bien révélé une génération, mais celle-ci n'a rien à voir avec ce qu'était la « génération morale » des années 1980. La vérité est que les nouveaux enfants du siècle sont le miroir des fractures françaises.

    Notre jeunesse a perdu son insouciance et s'attend à chaque instant à voir revenir le cauchemar du 13 novembre.

    S'il y a bien une génération Bataclan, elle est celle de l'identité malheureuse.   

    Alexandre Devecchio est journaliste au Figaro, en charge du FigaroVox. Il est l'auteur des Nouveaux enfants du siècle, enquête sur une génération fracturée (éd. du Cerf, 2016) ).

    Alexandre Devecchio

  • Un coup de chapeau à Stéphane Bern pour son courage dans la défense du patrimoine !

     

    Par Pierre de Meuse
     

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    Nous connaissons tous Stéphane Bern. Ses reportages sur les familles royales sont souvent objet de discussions au sein du royalisme, une sensibilité à laquelle il appartient, sans pour autant que cette affection se traduise par un véritable engagement.

    Ce professionnel de la chose médiatique sait trop bien que sa renommée n’y résisterait pas. Pourtant, cet habitué des caméras de télévision vient de donner une preuve de son amour des héritages du passé qui mérite un coup de chapeau. En effet, et alors que Macron lui avait confié quatre mois après son arrivée à l’Elysée la mission de « défenseur du patrimoine en péril », Stéphane Bern annonce qu’il abandonnera son poste s’il continue à être traité comme une marionnette, « pour l’image » par le pouvoir « marchorépublicain ».

    L'animateur de France 2 et de RTL reproche en effet d’abord au gouvernement de ne pas lui donner les moyens d’accomplir sa tâche. A quoi bon alerter sur les châteaux qui menacent ruine, comme celui d’Osthouse, sur les églises romanes au bord de l’effondrement ou les hôtels particuliers délabrés, s’il ne peut mobiliser des fonds pour encourager les restaurations ? Bern dénonce l’accaparement des crédits par des chantiers pharaoniques :  ainsi 450 millions d'euros sont budgétés pour le Grand Palais à Paris. Une fois de plus, Paris prive la province du nécessaire au profit de son superflu. Surtout que les chiffres sont sans rapport : Bern n’a pas obtenu le déblocage des 20.000.000 d’euros nécessaires pour sauver 270 monuments !

    80c3ac97e4ec9fa251766baab9fb79a5-patrimoine-je-ne-veux-pas-etre-un-cache-misere-stephane-bern-menace-de-quitter-sa-mission.jpgMais il y a beaucoup plus grave que l’illustration de cette tare chronique du jacobinisme dans les finances publiques, et Stéphane Bern a eu le courage de le mettre en lumière, en dénonçant (photo) la loi en voie de promulgation, sur les aménagements du parc immobilier dite « loi Elan».            

    De quoi s’agit-il ? Cette loi fourre-tout (loi sur l'évolution du logement, de l'aménagement et du numérique !) a pour but de permettre aux élus locaux de décider la construction de logements sociaux permettant d’améliorer la salubrité et la « mixité sociale » et de lutter contre les inégalités. Apparemment rien de nouveau, mais le ministre de la « cohésion sociale », Jacques Mézard, un personnage emblématique du sud-ouest radical socialiste, a tenu à faire sauter tous les verrous qui préservaient les habitants des communes contre l’arbitraire communal et le vandalisme municipal. Et notamment les oppositions des défenseurs des monuments anciens que sont les architectes des monuments historiques. Le ministre se défend de vouloir « la peau » des architectes des bâtiments de France, et use d’une argutie dérisoire. Il évoque deux cas « extrêmement réduits » dans lesquels leur avis ne sera plus pris en compte :

    1. « les antennes de téléphonie mobile », en attendant l'arrivée de la fibre sur tout le territoire, ainsi que  

    2. « habitat indigne » qui « met en danger la santé ou la sécurité des habitants ».

    En ce qui concerne le premier point, c’est une nouvelle entorse à la règle de l’environnement protégé des monuments historiques, qui avait pour but d’empêcher l’édification de bâtiments parasites et qui se trouve ainsi privée de toute portée. D’autant que cet article 15 de la loi ne se limite pas aux antennes, mais concerne aussi les pylônes, ateliers et constructions techniques construits à proximité des monuments protégés, dans des quartiers historiques, sur des églises ou des châteaux.                                                             

    Le second point est encore plus lourd de conséquence : la loi, dans son préambule, entend lever « les verrous et les freins qui contribuent à immobiliser le système. Cela passe par la libération du foncier et la simplification de l’acte de construire, l’accélération des procédures administratives et l’encadrement des recours abusifs. Le texte promeut aussi des opérations d’urbanisme ambitieuses et partenariales pour tous les territoires. » En fait avec l'article 15, il suffira que des immeubles soient délabrés ou insalubres pour qu'ils puissent être rasés, quel que soit leur intérêt historique, sans que personne puisse s’y opposer. Il faut ici souligner ce que cette nouvelle règle a de destructeur. En effet, chaque fois qu’un bâtiment ancien remarquable est détruit, c’est systématiquement en raison de son caractère vétuste. Il n’y a pas d’exception à cette réalité. D’ailleurs, les municipalités qui veulent détruire un château, une église, un hospice ou une grange dîmière usent d’un procédé infaillible : il suffit de ne pas le réparer, de rendre impossible sa vente, d’interdire toute remise en état. Ainsi la seule voie restante est la démolition. Cela fait cent cinquante ans que ces techniques hypocrites et scélérates sont utilisées et le sont toujours. Chaque semaine, des monuments sont ainsi rasés pour laisser la place à des constructions indignes, tout simplement parce que les édiles sont trop incultes pour envisager la perte que représente la disparition des témoins du passé. Citons la magnifique tour templière de Vaour, détruite par la municipalité alors qu’une subvention totale de restauration était en cours d’émission immédiate, ou le château de la Rochette, ou le grenier d’abondance de Colmar, un bâtiment du XVIII° démoli par un maire ignare et vindicatif pour édifier..un parking. Il est bien évident que c’est exactement l’inverse qu’il faudrait faire : sanctionner lourdement les maires qui ne respectent pas les décisions des Bâtiments de France, et non pas abolir leur verdict.                             

    Francoise-Nyssen-et-Stephane-Bern-Le-patrimoine-merite-des-idees-neuves_article.jpgPour l’instant le gouvernement s’est contenté de paroles lénifiantes, telle Françoise Nyssen (photo), la tristement célèbre ministre de la Culture, qui déplore les attitudes de Stéphane Bern, jugées « peu constructives ». A l’Elysée, on espère que le défenseur du patrimoine se montrera soumis comme les godillots de LREM, une fois sa colère passée. Au besoin, on accordera une publicité supplémentaire à son Loto du patrimoine, dont le bilan est modeste :1,3 million d'euros récoltés.

    Pourtant le patrimoine n’est pas une cause perdue. Chaque année, plus de 12 millions de Français visitent des sites riches de la culture et de l'histoire, à l’occasion des Journées du patrimoine. C’est une chance de communier dans le passé glorieux de notre pays, de nos provinces et de nos rois. Un sentiment plutôt inopportun dans cette dictature du prosaïque dirigée par Macron.     

    Pierre de Meuse
    Docteur en droit, conférencier, sociologue et historien.
  • Société & Immigration • Et il a menacé sa femme de lui couper les pieds… Logique !

     

    Par Catherine Rouvier

    Voici une intéressante et pertinente chronique de Catherine Rouvier, [Boulevard Voltaire, 4.09] qui, sur fond d'intelligence, de subtilité et d'humour, comme à son ordinaire, dévoile et rappelle bien des vérités sur les conséquences de l'immigration islamique massive en France tirant tout le parti qu'il est possible du laxisme de notre système politico-judiciaire. 

    Catherine Rouvier a participé à plusieurs de nos réunions en Provence. Et nous gardons un très bon souvenir de sa présence parmi nous ...  LFAR 

     

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    Faut-il, comme le Comité des droits de l’homme des Nations unies nous le demande si gentiment dans son avis à la France sur l’affaire Baby Loup, faire droit aux demandes de la minorité musulmane ? 

    Sachons bien qu’elles forment un tout qui, dans une affaire jugée actuellement à Aix-en-Provence, montre le bout de son nez, ou plutôt le bout de ses pieds.

    Sabri est musulman, et très logique : puisque la charia condamne les voleurs à avoir les mains coupées, les fugueurs, comme sa femme, doivent être condamnés à avoir les pieds coupés, ce dont il l’a, du coup, menacée si elle persistait à vouloir le quitter.

    Il était également très logique pour lui qu’ayant épousé sa femme alors qu’elle n’avait que treize ans en Turquie, il se soit énervé qu’elle ne lui donne pas d’enfants dès cet âge tendre, et ait pris une seconde épouse.

    Logique, enfin, que, finalement nanti de six enfants – trois avec la seconde… et trois finalement avec la première -, il supporte mal que la première fuie ses mauvais traitements en prétendant emmener la moitié de sa progéniture. Surtout si l’un des trois est un fils.

    Il a donc menacé de lui couper les pieds quand elle a voulu quitter le domicile bi-conjugal le 14 août, et retenu le petit troisième de force.

    aix_palaisjustice03b.jpgLe tribunal d’Aix-en-Provence (photo) l’a condamné à 18 mois, dont la moitié avec sursis. 

    Mais par-delà le délit de violence conjugale, la question de la polygamie est de nouveau posée.

    En avril 2017, au Canada, les juges ont décidé de poursuivre la polygamie. Il s’agissait de mormons : Winston Blackmore, 24 épouses et 146 enfants, et James Marion Oler, 4 femmes, qui comparaissaient pour « négligence » envers une jeune fille de 13 ans.

    Jusque-là, les juges étaient du même avis que l’ONU : interdire la polygamie enfreignait le droit à la liberté de religion. Jusqu’à ce qu’en 2014, la Cour suprême de la Colombie Britannique reconnaisse que poursuivre la polygamie était conforme à la Constitution. 

    En France, Code civil et Code pénal sont très laconique sur la question, n’évoquant que la bigamie. L’article 433-20 dispose sobrement : « Le fait, pour une personne engagée dans les liens du mariage, d’en contracter un autre avant la dissolution du précédent, est puni d’un an d’emprisonnement et de 45.000 euros d’amende. » Et l’article 147 du Code civil, héritier de la loi du 27 mars 1803, dispose encore plus sobrement : « On ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du premier. »

    La loi Pasqua de 1993 a bien tenté de bloquer l’immigration de familles polygames, et le Conseil constitutionnel, dans sa décision de 1993, à propos des étrangers vivant en France, a validé cette démarche, estimant que « les conditions d’une vie familiale normale sont celles qui prévalent en France, pays d’accueil, lesquelles excluent la polygamie »

    Mais, depuis, les situations de polygamie de fait comme celle de Sabri se sont multipliées. 

    On souhaiterait donc que le Conseil constitutionnel soit aussi clair sur la polygamie qu’il l’a été dans sa décision du 7 octobre 2010 relative à la loi interdisant la dissimulation du visage. 

    Il y avait, alors, approuvé le législateur qui « estimait que les femmes dissimulant leur visage, volontairement ou non, se trouvent placées dans une situation d’exclusion et d’infériorité manifestement incompatible avec les principes constitutionnels de liberté et d’égalité ».
     
    D’autant que, par sa décision toute récente du 6 juillet 2018, il inclut dans l’aide aux étrangers en situation irrégulière, au nom de la fraternité, les « familles ». ■  


    Docteur d'Etat en droit public, avocat, maitre de conférences des Universités

     
  • Société & Actualité • Les tueurs en série des États-Unis (et d'ailleurs)

      

    Par  Xavier Raufer 

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    Le concept de tueurs en séries « serial-killers » tel qu'on le connaît actuellement vient des Etats-Unis. Pourquoi ce pays a-t-il connu une telle flambée de tueurs en série ?

    Ce concept vient des Etats-Unis - et pour cause, car ce phénomène affecte et ne peut affecter qu'un pays-continent, immense et aussi morcelé (50 États...) que désorganisé (pourvoir central « fédéral » faible en interne). Les États des États-Unis sont très jaloux de leurs droits - dont le pénal fait partie. Tout existe en matière de police et de justice dans la fédération américaine, du plus répressif au plus laxiste. Et des lois fort différentes. Plus d'innombrables forces de police. Chaque année, le FBI, police fédérale, publie I'Uniform Crime Report, qui donne les statistiques criminelles nationales des Etats-Unis : les données lui proviennent de plus de 14 000 polices diverses !

    Jusque vers 2000, divaguer d'Etat en Etat et y assassiner qui on voulait était enfantin. Car l'individu américain voyage à son gré dans tout le pays, mais la police urbaine s'arrête aux city limits et la police, disons, du Kansas, stoppe net à la frontière du Missouri - d'autant plus que ces deux États se haïssent depuis la Guerre de sécession.

    Ainsi, un rodeur pouvait trucider cent personnes dans l'Amérique profonde avant d'être repéré et - parfois - arrêté. Notons aussi les plus de 40 (à ce jour) tueurs en série jamais identifiés, désignés par un sobriquet, genre Boston strangler, Zodiac killer, etc.

    Quant au pouvoir central-fédéral faible, songez qu'il a fallu le choc des attentats du 11 septembre 2001 pour qu'on crée à Washington un ministère de l'Intérieur à l'européenne, Homeland Security. De 1800 à 2000, n'existait dans la capitale américaine qu'un Department of the Interior, gérant les parcs nationaux et les réserves indiennes...

    p1017753a.jpgPreuve de l'importance du maillage policier : le Canada est un peu plus grand que les États-Unis mais n'a qu'un nombre de tueurs en série « à l'européenne », dû à l'efficace maillage de la Royal Canadian Mounted Police (RCMP). A un cas près, ces tueurs en série canadiens sont arrêtés après quatre-cinq homicides, d'usage moins de dix, comme en Europe.

    Une situation à l'américaine est bien sûr impossible dans les États-nations européens, au maillage de police-gendarmerie bien plus resserré et réactif. Un tueur en série américain, c'est 40 à 100 victimes, et son homologue européen, dix ou moins. Peut être y a-t-il des tueurs en série aussi prolifiques dans d'autres pays-continents type Russie ou Chine - mais là, la censure veille. Et dans l'Inde au désordre pire encore, hormis les familles, nul ne doit s'en inquiéter la plupart du temps - voire, s'en apercevoir.

    L'article de la BBC pointe du doigt un fort pic du nombre de tueurs en série dans les années 80. Quel contexte a pu favoriser cette « épidémie » ?

    Ca correspond à un nomadisme accru à l'intérieur des Etats-Unis (boom économique... bougeotte des Hippies après le triomphe de Sur la route de Jack Kerouac...) sans accroissement comparable de la police fédérale. Songez qu'aujourd'hui encore, le FBI ne compte que 36 000 personnels, du big boss au dernier balayeur, pour une population de 326 millions d'habitants, un policier fédéral pour plus de 9 000 américains. En France, à la louche, c'est un policier (police nationale) pour 450 habitants.

    Avec une Amérique alors chaotique (agitation des droits civiques... émeutes des ghettos... manifestations anti-guerre du Vietnam... Terrorisme interne du Weather Underground (sorte de Brigades rouges locales) ou de la Symbionese Liberation Army; sans oublier les Black Panthers. Ajoutons-y l'explosion criminelle du début de la décennie 80, due au crack (cocaïne-base à fumer-inhaler) où des centaines de gangs s'entretuaient pour contrôler les territoires stratégiques du nouveau deal. De 1984 à 1991, les homicides connus aux Etats-Unis bondissent d'à peu près 8/100 000 à 10/100 000. Ainsi, la police avait d'autres chats à fouetter que de traquer d'évanescents tueurs en série.

    Le cas de la France est-il comparable ? Les tueurs « français » sont-ils les mêmes que les Américains ?

    Chaque tueur en série a son délire, ses caractéristiques - mais a en commun avec l'ensemble des criminels de ne s'arrêter que quand on l'arrête. Si vous laissez courir un tueur en série, il tuera tant et plus - ceux qui s'arrétent spontanément sont rares. Comme déjà dit, les Etats-nations européens unitaires et quadrillés par une police efficace comptent peu de tueurs en série. Exception l'Allemagne dont le système fédéral fragile laisse passer nombre de tueurs en série (en gros, le double de la France) et d'ailleurs de mafieux. Mais la mafia, c'est une autre histoire...     

    Xavier Raufer 
    Docteur en géopolitique et criminologue.
    Il enseigne dans les universités Panthéon-Assas (Paris II), George Mason (Washington DC) et Université de Sciences politiques et de droit (Pékin) 
  • Soljenitsyne, le Vendéen [4]

    25 septembre 1993, Les Lucs-sur-Boulogne

     

    par Dominique Souchet

    2293089609.14.jpgComment commémorer plus dignement qu'il n'a été fait à ce jour le centenaire du grand Soljenitsyne ? Et comment évoquer en même temps  l'écrasement de la Vendée par la fureur révolutionnaire autrement que par les indignations faciles et les formules toutes faites cent fois répétées ? Le superbe récit des relations entre Alexandre Soljenitsyne et la Vendée de Dominique Souchet que le dernier numéro de la Nouvelle Revue Universelle vient de publier répond à ce souci de façon passionnante. On a là un récit précis mais aussi une réflexion à l'altitude qui convient pour évoquer en les reliant Alexandre Soljenitsyne, la révolution russe et le massacre de la Vendée. L'horreur révolutionnaire en soi-même d'un siècle l'autre. Du XVIIIe au XXe. Nous avons entrepris dimanche dernier la publication de ce récit qui s'étendra aux jours suivants. En remerciant Dominique Souchet et la N.R.U. de nous l'avoir donné.  LFAR 

     

    Le récit

    4273640-6459671.jpg

    GÉNÉALOGIE DE LA TERREUR

    Aux yeux de Soljenitsyne, la Vendée, comme laboratoire de la première Terreur idéologique, a incontestablement un caractère matriciel. Pour lui, les deux Terreurs s'emboîtent. 

    Lénine sera hanté par la nécessité d'éviter à tout prix Thermidor — d'où la suppression de toute assemblée, au profit d'un organe au fonctionnement secret, le parti. Et par la nécessité de susciter sans cesse de nouvelles Vendées, pour alimenter en continu le processus révolutionnaire et entretenir l'indispensable surenchère. Dès 1905, il a reconnu dans « les Vendéens » les adversaires les plus redouta­bles de l'idée révolutionnaire. Soljenitsyne le souligne aux Lucs : Thermidor fut la chance de la France, en empêchant le régime terroriste de déployer ses conséquences dans le temps long, en privant le moment Robespierre de la possibilité de se pérenniser en système durable. (Robespierre et Lénine, photo ci-dessous)

    lenine-que_faire-7862b.jpgPourtant, s'exclame Soljenitsyne, « l'expérience de da Révolution française aurait dû suffire. » Mais non, l'horreur de la Terreur jacobine n'a pas suffi à dissuader les repreneurs : « Nos organisateurs rationa­listes du "bonheur du peuple" », comme il les définit, vont en déployer les déclinaisons « à une échelle incomparable. »

    À partir de cette même expérience vécue par les Vendéens et par les Russes, Soljenitsyne en vient à définir le processus révolu­tionnaire lui-même, qu'il caractérise comme intrinsèquement des­tructeur : « Jamais, à aucun pays, lance-t-il aux Lucs, je ne pourrais souhaiter de "grande révolution". Il veut dire qu'il n'y a pas de « grande » révolution.

    Au terme du XXe siècle — « de part en part un siècle de terreur » on peut faire le bilan, et il est temps de le faire. Il est temps, dit-il, d'arracher à la Révolution « l'auréole romantique » dont l'avaient parée les Lumières et les artisans autoproclamés du « bonheur du peuple » au XVIIIe siècle. Il est temps de traiter lucidement de la question des origines des régimes terroristes : la Terreur du XXe siècle est l'accom­plissement, « l'effroyable couronnement, dit Soljenitsyne — ce sont les der­niers mots de son discours —, de ce Progrès auquel on avait tant rêvé au XVIIIe siècle » et qui a débouché sur les charniers de l'avenir radieux et la liquidation de ceux qui ont refusé de devenir des « hommes nouveaux ».

    C'est une véritable description clinique de la désarticulation des sociétés par le processus révolutionnaire, que Soljenitsyne effectue aux Lucs : « Les hommes ont fini par se convaincre, à partir de leurs propres malheurs, que les révolutions détruisent le caractère organique de la société et qu'elles ruinent le cours naturel de la vie... Toute révolution déchaîne chez les hommes les instincts de la plus élémentaire barbarie, les forces opaques de l'envie, de la rapacité et de la haine... »

    Mais les malheurs générateurs de lucidité s'oublient. L'aspiration utopique demeure comme une tentation sans cesse renaissante. La Révolution, sous quelque avatar que ce soit, est toujours prête à prendre la place du souci du bien commun. Alors quels garde-fous Soljenitsyne propose-t-il ? Il préconise, aux Lucs, un double contre­poison.

    D'une part, il ne faut pas cesser, il ne faut jamais cesser de regarder la réalité de la Révolution, là où elle a sévi, comment elle a effective­ment fonctionné, comment elle a broyé les hommes et les sociétés. C'est ce que fait aujourd'hui la Vendée, constate-t-il. Il vient le ratifier en espérant que la Russie sera capable demain d'en faire autant.

    D'autre part, il faut mettre en œuvre ce qu'il appelle « un déve­loppement évolutif normal » de la société. Au processus infernal de la « Roue rouge », il oppose une ligne empreinte de sagesse. Une ligne qu'il proposera à la Douma un an plus tard, pour permettre à la Russie de sortir de « 70 ans d'extermination spirituelle » : « Il faut savoir, dit-il aux Lucs avec beaucoup d'humilité et de modestie, améliorer avec patience ce que nous offre chaque "aujourd'hui". »

    Soljenitsyne est stupéfait par cette « révérence » persistante à l'égard de la Révolution qu'il observe avec consternation au sein de l'élite française. Elle crée chez lui un véritable malaise. Pourquoi, demande-t-il, règne-t-elle toujours en maître dans l'intelligentsia et les médias, alors que les travaux des historiens ont mis à nu les mécanismes de l'extermination ? Pourquoi, s'étonne-t-il, l'écrivez-vous toujours, cette Révolution, avec une majuscule, ainsi d'ailleurs que la Terreur ? Il aurait certainement approuvé les propos tenus à l'Ices lors de la Nuit de l'Histoire par Stéphane Courtois, montrant à quel point la France demeurait le conservatoire, non seulement du communisme, mais de l'idée révolutionnaire.

    145949321-612x612.jpgLors de son passage à Paris, Soljenitsyne, invité à l'émission Apostrophes, a été profondément choqué que Bernard Pivot tente de le dissuader de se rendre en Vendée. Outré que l'on ne comprenne pas l'importance qu'il attache au geste qu'il vient y accomplir, il répond avec vigueur devant les caméras : « Je n'ai pas eu le moindre doute, la moindre hésitation quand j'ai reçu l'invitation à me rendre en Vendée. Au contraire, j'ai estimé que c'était un honneur pour moi. » Fermez le ban.

    Pour lui, le sens de sa venue est clair et non dissimulé. Il se rend dans un lieu-origine, un lieu-source. Il vient saluer une terre de résis­tance. Il vient rendre hommage, sur les lieux mêmes où il a surgi, à ce « premier sursaut de liberté », qui fit que la Terreur, la première terreur idéologique, ne put l'emporter impunément, longuement, définitivement. Et il écrira plus tard : « Je mesure à présent combien mon projet de voyage en Vendée était exaspérant pour les cercles français de gauche, si aveugle est leur admiration, encore aujourd’hui, pour leur cruelle révolution. » Un cercle, en réalité, plus large encore qu'il ne le pensait...   ■  

    A suivre, demain jeudi.

    Lire les articles précédents ... 

    Soljenitsyne, le Vendéen [1]

    Soljenitsyne, le Vendéen [2]

    Soljenitsyne, le Vendéen [3]

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  • Sommes-nous dans les années trente ?

    Edouard Daladier et André François-Poncet, ambassadeur à Berlin (années trente)
     
    Par Jean-Philippe Chauvin
     

    1262631406.jpg

    Les vives polémiques sur les propos et les attitudes de l'actuel président, conjuguées avec les débats non moins vifs sur ce que l'on a le droit ou pas de dire, et qui a le droit, ou non, de s'exprimer, sont la manifestation de cette « dissociété » qui a pris l'avantage sur la communauté nationale (que certains voudraient résumer à un « vivre-ensemble » qui n'existe pas, ou plus) et sur l'agora intellectuelle que d'autres nommaient jadis « la république des lettres ».

    L'hystérisation contemporaine, qui se répand plus vite que du temps de l'imprimé grâce aux réseaux sociaux numériques, est parfois désespérante et elle nuit à la véritable discussion qui nécessite du temps et de la réflexion, ainsi qu'elle autorise la possibilité de se tromper ou d'être convaincu par d'autres arguments que les siens propres. Aujourd'hui, les délateurs, jadis félicités sur les assignats républicains des années 1790, sont les maîtres de jeux de plus en plus sombres et violents. 

    une-plaque-de-nom-de-rue-en-francais-pour-rue-de-la-republique-byb67h.jpgQuand, dans la lignée des inquiétudes « de gauche » médiatisées, quelques historiens et « Insoumis » évoquent les « funestes années trente », je pense pouvoir leur rétorquer quelques choses simples, et ouvrir, au sens noble du terme, la discussion sans préjugé : 

    1. Ces fameuses années furent d'abord, avant de sombrer dans la tragédie, des temps de recherche et de débats intellectuels dont les revues de l'époque, qu'elles se nomment RéactionEsprit,L'Ordre Nouveau ou La Revue du XXe siècle restent les preuves imprimées : les nouvelles pistes de la pensée antilibérale ; la critique de l'Argent et, pour certains, de la Technique ; la réflexion permanente sur les institutions et, au-delà, sur l'esprit du politique ; etc. Tout cela mérite le détour, et les partisans actuels de la décroissance y trouvent certaines de leurs références utiles à la compréhension du monde contemporain, de Georges Bernanos à Jacques Ellul, entre autres. 

    2. La liberté d'expression y était, en France, plus reconnue que dans nombre de pays limitrophes, même si cela s'accompagnait d'une violence de ton et, parfois, d'action, et que la République n'aimait pas toujours la contradiction, au point de faire assassiner, en son nom propre ou par d'autres qu'elle, quelques opposants trop virulents, comme au soir d'émeute du 6 février 1934... 

    3. Si les extrêmes ne sont guère recommandables, il n'y a néanmoins pas de « fascisme français » malgré les pâles copies de l'Italie mussolinienne chez les partisans du « Faisceau » (disparu dès 1927) de Georges Valois ou les « francistes » de Marcel Bucard, plus groupusculaires et mythomanes que vraiment actifs. Sans doute le traditionalisme moderne de Maurras, si critiqué et parfois fort critiquable par ailleurs, a-t-il empêché, et c'est tant mieux, l'éclosion d'un jacobinisme fasciste ou d'un totalitarisme hexagonal. 

    maulnier songeur.jpg4. Les problèmes contemporains, et le contexte général, sont-ils semblables à ceux d'hier ? C'est sans doute là qu'il y a, effectivement, le plus de similitudes avec les années trente : une ambiance délétère sur la scène internationale et une montée des exaspérations populaires dans nombre de pays, y compris en France, avec la rupture entre élites mondialisées et classes populaires et moyennes, entre les métropoles et les périphéries, en particulier rurales ; le retour de la question sociale, très souvent couplée à la nationale ; les « questions sociétales » qui ne sont que l'autre formulation de la crise de civilisation évoquée jadis par Thierry Maulnier (photo), Emmanuel Mounier et Jean de Fabrègues, entre autres. Mais les réponses d'aujourd'hui sont-elles forcément celles d'hier ? 

    Sans doute peut-on constater que les « non-conformistes » des années trente (dont Maulnier et Fabrègues furent « les lys sauvages ») ont échoué à imposer leurs idées à la tête de l’État avant 1958, même si de Gaulle, en bon lecteur des « néo-41U3SlEZAbL._SX235_BO1,204,203,200_.jpgmaurrassiens » (sans en être lui-même, malgré une légende tenace véhiculée par les hommes de Monnet, et reprise par Mauriac), en reprendra ensuite les grandes lignes dans sa Constitution de la Cinquième République et dans sa tentative (avortée) de résolution de la question sociale : l'inachèvement du règne gaullien et ses limites bien réelles, en renvoyant les principales idées des revues « hors-système » aux catacombes, ont enterré presque (ce « presque »qui laisse encore un espoir, n'est-ce pas ?) définitivement les espérances de ceux qui les animaient. Si les royalistes peuvent en concevoir quelque amertume, cela ne doit pas être une excuse pour déserter le combat intellectuel et politique et, au-delà, civilisationnel... « L'espérance, c'est le désespoir surmonté », clamait Bernanos. 

    Alors, que les royalistes de bonne volonté s'engagent, pour que ces nouvelles ou fantasmées « années trente » d'aujourd'hui ne débouchent pas sur le pire comme en 40, mais sur le Roi, « possibilité du Bien commun effectif », tout simplement ! Ce serait bien, tout compte fait, « la revanche de Maulnier », ou celle d'un autre « M » célèbre et controversé...   

    Le blog de Jean-Philippe Chauvin

  • Le Prince Jean de France dans Le Figaro pour les 60 ans de la Constitution de 1958 : elle n'est pas à abolir mais est in

    Jean de France, Duc de Vendôme MELANIE FREY/Le Figaro Magazine

     

    blue-wallpaper-continuing-background-wallpapers-bigest-images - Copie.jpgLe Duc de Vendôme a publié un article dans le Figaro du 7 octobre qui mérite de notre part toute notre attention, car il  s’intéresse dans ce texte aux institutions actuelles de la France.

    Nul n’est mieux placé que lui pour aborder ce sujet et c’est pour nous une bonne nouvelle que de voir notre Dauphin faire connaître sa pensée en termes mesurés mais pleins de sens. Il rappelle que la Constitution de 1958 avait été rédigée pour revenir à un modèle parlementaire équilibré dans la ligne de la Charte de 1815 : un régime doté d’une représentation permanente, mais dans lequel le chef de l’Etat ne soit pas seulement un symbole mais un arbitre, « garant de la continuité et de l’indépendance nationale ». Une définition à la quelle la monarchie traditionnelle correspond parfaitement. La permanence du Souverain, en cas de désaccord avec les assemblées, était assurée par le recours au référendum dont il gardait l’initiative.

    Malheureusement, comme le montre le Prince, le Général de Gaulle institua l’élection du président au suffrage universel ce qui accentua le caractère partisan du régime, dans lequel le président devient l’élu « des uns contre les autres » et « le chef du parti majoritaire ». Ainsi nous dit le Dauphin, « le caractère arbitral n’est plus assuré ». De plus ajouterions-nous, l’absence de soutien populaire a conduit à renoncer au référendum.  Le régime est donc gravement bloqué.

    Le Prince conclut en envisageant l’hypothèse où la Constitution pourrait être réformée pour accomplir pleinement les buts pour lesquels elle avait été rédigée, qui est la perpétuation de la France dans son indépendance retrouvée. Nous connaissons les conditions nécessaires pour que notre pays retrouve sa voie naturelle.  LFAR

     

    TRAVAUX DIVERS - Largeur +.jpgLa Constitution de 1958 fête ses 60 ans.

    Dans notre pays, qui a adopté puis rejeté rapidement beaucoup de textes constitutionnels, cette longévité, qui fait de la Vème République le régime le plus long de notre histoire moderne après la IIIème République, est très appréciable. Surtout, les institutions approuvées par le peuple français le 28 septembre 1958 s'inscrivent dans la longue durée du régime parlementaire, fondé sous la Restauration, renforcé par la Monarchie de Juillet et qui avait été rétabli après le Second Empire dans l'attente du comte de Chambord. Le «grand refus» du prétendant et les circonstances politiques qui ont suivi, ont déséquilibré le régime que la monarchie royale devait équilibrer et le régime parlementaire s'est mué en régime d'assemblée sans que la IVème République ne parvienne à donner de la force aux gouvernements qui se succédaient. 

    En 1958, la Constitution de la Vème République a offert à la France ce qui lui manquait depuis 1877: un chef d'État arbitral, garant de la continuité et de l'indépendance nationale, véritable clef de voûte des institutions. Cette Constitution demeurait fondamentalement parlementaire puisque le principe de la responsabilité du Gouvernement devant l'Assemblée nationale était réaffirmé. Mais elle renforçait la démocratie en prévoyant le recours au référendum. D'éminents juristes ont considéré que la nouvelle Constitution instituait une monarchie démocratique et parlementaire, d'inspiration orléaniste - une Constitution devenue monarchie élective depuis que le Président est élu au suffrage universel.

    Jusqu'en 1969, le système institutionnel de notre pays impressionne par sa cohérence - même si l'autorité judiciaire reste par trop soumise aux injonctions de l'exécutif. La Constitution politique est adossée à une organisation administrative, héritage de l'Ancien régime, du Consulat et de la Restauration puisque Louis XVIII avait décidé de conserver l'acquis napoléonien. Cette administration forte, mais soumise au pouvoir politique, appuie le projet économique et social conçu pendant la Résistance et mis en œuvre à la Libération.

    Cependant, notre Constitution a révélé ses failles après le départ du général de Gaulle.

    La première tient au fait, déjà établi lors de l'élection présidentielle de 1965, que le président de la République est l'élu des uns contre les autres. Certes, le chef de l'État peut se hausser à la hauteur de sa fonction et incarner l'unité de la nation, mais en de trop rares moments de crise et sans jamais parvenir à se libérer de ses amitiés partisanes. La clef de voûte établie par la monarchie élective est fragile.

    La seconde résulte de la rivalité qui s'installe entre les deux pôles du pouvoir exécutif. Confit entre Jacques Chaban-Delmas et Georges Pompidou, entre Jacques Chirac et Valéry Giscard d'Estaing, entre Michel Rocard et François Mitterrand: hors des périodes de cohabitation, qui montrent la souplesse des institutions et rappellent leur nature parlementaire, ces guerres intestines ont gravement nui au fonctionnement régulier des pouvoirs publics.

    Ces failles n'ont pas été comblées par l'élection quinquennale du président de la République. Au contraire, un déséquilibre profond s'est installé dans nos institutions, aggravé par le fait que les élections législatives se déroulent immédiatement après l'élection présidentielle. Le temps du chef de l'État se confond avec le temps du Premier ministre et avec celui de l'Assemblée nationale, et il est scandé par les mêmes échéances électorales. Selon une logique implacable, le président de la République a pris en charge toute la politique de la nation au détriment du Premier ministre en titre et le chef de l'État est devenu, plus directement que jamais, le chef du parti majoritaire. La fonction arbitrale, qui se confond avec celle de chef de l'État dans notre tradition millénaire, n'est plus assumée de manière effective. Dès lors, il n'est pas étonnant que les Français, attachés à la symbolique politique, se prononcent à chaque élection présidentielle par des votes de rejet plus que d'adhésion.

    Malgré ses failles et ses dérives, notre Constitution n'est pas à abolir mais à transformer et à accomplir dans la perspective, inaboutie, que le général de Gaulle avait tracée au cours de son long dialogue avec mon grand-père. Je souhaite, dans la continuité des déclarations de mon grand-père et de mon père, que l'État soit, à nouveau, rétabli dans son indépendance selon sa vocation arbitrale afin qu'il soit pleinement au service de la France et des Français.  

    Jean de France, Duc de Vendôme

    Domaine Royal, Dreux, le 7 octobre 2018

  • Comment peut-on être Français ?

     

    Par Jean Viansson Ponté

    457372439-612x612.jpgLa France est un pays bizarre autant qu’étrange.

    Elle reste une des premières nations du monde, ce qui est en soi un sujet d’étonnement. Car, dans la période récente, le peuple a porté à la fonction suprême successivement un nerveux hyperactif, un cauteleux cynique, puis un adepte solennel du Tout et Son Contraire. Leurs efforts conjoints permettent, aujourd’hui, de dresser un état des lieux impressionnant : on peine à résumer les « avancées » qui ont bouleversé les règles et les usages sur lesquels avaient été fondés les rapports sociaux et la prospérité des temps anciens ! La France, dans le concert des nations occidentales vassalisées par l’empire américain, s’est distinguée par le zèle de ses dirigeants à la transformer en modèle exemplaire de cette révolution lourde et molle. Politique Magazine analyse, commente et scrute ces transformations depuis seize ans. Ce numéro d’octobre est un anniversaire. Une nouvelle équipe dirigeante prend les rênes ; mais votre magazine ne changera pas. Il restera ce magazine que vous aimez et qui tentera toujours de répondre, chaque mois, à cette question cruciale qui est plus que jamais la nôtre : comment être Français ?

    Comment être Français quand le Français est réputé coupable, encore coupable, toujours coupable. Pour les « crimes » de ses parents et de ses aïeux, et pour sa difficulté congénitale à comprendre le bien-fondé des pensées « nouvelles ». « Réfractaires », dit la plus haute autorité !

    Coupable d’avoir fait des guerres, de les avoir gagnées, et sans doute encore plus de les avoir perdues. Coupable d’avoir imposé sa férule à des peuples qui jusque là vivaient dans l’état d’innocence et de bonté propre à la nature selon Jean-Jacques, coupable de leur avoir apporté ses maladies et ses mauvais sujets en même temps que ses hôpitaux et ses infrastructures, ses techniques et sa langue. Coupable d’avoir pratiqué un temps l’esclavage, qui n’avait perduré depuis la fin de l’empire romain – faut-il le rappeler ? – que dans les sociétés orientales, et coupable d’être l’un des premiers pays à l’avoir abrogé ! Coupable d’avoir tardé à admettre que les textes fondant le droit de la famille devaient valoriser au premier chef les pratiques minoritaires en-dehors de toutes contraintes naturelles ou culturelles. Coupable de ne pas aimer les éoliennes, ni les systèmes d’échange de taxes carbone, si pratiques, pourtant, pour justifier en même temps des investissements colossaux et des profits si faciles. Coupable de ne pas s’enthousiasmer à aimer un « art » qui ne recherche pas le Beau, et qui pourtant permet un stockage de valeur presque plus aérien que les mécaniques boursières automatisées. Bref, coupable de ne pas aimer le Progrès, y compris dans ses aspects les plus déroutants et les plus destructeurs.

    Et comment être Français sous le joug d’une triple contrainte étouffante ? Contrainte légale, contrainte sociale, contrainte morale.

    Contrainte légale : lorsque les choses traînent, quand non seulement les citoyens mais aussi les parlementaires rechignent à « progresser », les juges se chargent alors de remédier à la situation, en toutes matières. Et la plus haute juridiction de l’État, le Conseil constitutionnel, sorti des limites de son pouvoir, n’hésite pas à l’ouvrage. Le tout sous la tutelle des institutions et juridictions européennes, dont l’action réduit le rôle des gouvernants nationaux à une gestion sans vision et sans ambition, même dans les domaines les plus essentiels.

    Contrainte sociale : lorsque des voix discordantes expriment une divergence par rapport à l’opinion « dominante », habilement fabriquée, elles sont rappelées aux « fondamentaux » de la démocratie programmée et obligatoire, la liberté ayant quand même des limites ! Si ces voix persévèrent dans la défense de valeurs, et surtout d’intérêts, qui se révèlent contraires à la croyance dominante et surtout aux intérêts des dominants, elles sont mises au rancart. Le conformisme est de rigueur.

    Contrainte morale : comme dans toute classe, il faut faire régner la discipline, désapprendre les mauvaises habitudes et valoriser les bases de la nouvelle sociabilité. Et, pour cela, les « grands » médias, écrits, parlés et audiovisuels sont requis. L’esprit critique n’est plus la valeur de référence. Ce qui compte, c’est de respecter « les codes ». Et surtout « le nouveau code », qui n’est pas de gouverner en cherchant à faire valoir ce qui relève du bien commune et de l’intérêt national. Non, mais de gouverner en désignant les méchants, nation ou famille, Russie ou Syrie, et de faire silence sur les sujets qui fâchent, Chine et Turquie, islam et islamisme, violences et pauvretés, peuple et libertés. La règle est de proclamer la vision universelle et de ne plus traiter du réel national, ce bagage encombrant.

    Politique magazine est un mensuel d’information et d’opinion. Il ne joue pas sur des manichéismes faciles. Il s’attache à analyser des faits et des situations pour contribuer à éclairer ses lecteurs, dans la période de périls qui se précise. En faisant appel à leur jugement, à leur intelligence, à leur curiosité ; afin de rechercher ce qui peut contribuer à construire un avenir pour la France et les Français ; en n’écartant ni les véritables novations, ni la véritable tradition. En n’écartant que les contraintes étouffantes.

    Politique magazine est un espace de liberté qui a été pensé et construit par une équipe fondatrice. C’est dans cette voie que nous poursuivons maintenant la publication, après une phase économiquement difficile qui est sans doute la rançon de l’indépendance. Faites connaître Politique magazine, envoyez-nous vos commentaires, ensemble nous ferons grandir ce nécessaire espace de liberté.  

    Jean Viansson Ponté
    Politique magazine - Octobre 2018
  • Au-delà des affaires, la question institutionnelle

     

    Par Jean-Philippe Chauvin

     

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    L'affaire Benalla a largement empoisonné l'été présidentiel et montré quelques failles du système de M. Macron : l'absence de relais véritablement enracinés dans le pays ; un personnel politicien et parlementaire macronien peu efficace, voire trop arrogant pour être entendu par l'opinion publique ; une communication élyséenne maladroite ; la fragilisation de l'image d'autorité du président, soupçonné d'autoritarisme et sa dégradation aux yeux des États étrangers, certains trop heureux de voir les difficultés de la magistrature suprême française occulter leurs propres faiblesses... 

    Il faut pourtant replacer cette affaire dans son contexte et ne pas en faire ce qu'elle n'est pas, dans une dérive qui reste une tendance lourde et facile des médias et des oppositions en régime démocratique d'opinion. L'affaire Benalla est un scandale qui touche la magistrature suprême de l’État, mais ce n'est pas, pour autant, une crise d’État comme certains ont pu le dire ou l'écrire : le régime ne va pas s'effondrer et la République n'a pas tremblé sur ses bases, qu'on le regrette ou non. En revanche, c'est bien plutôt une « crise d'état d'esprit », et, en cela, elle dépasse largement les seuls protagonistes de cette affaire : c'est aussi ce que voulait signifier le slogan popularisé par le Groupe d'Action Royaliste cet été : « Le Roi avait d'Artagnan, le Président a Benalla ! ». La comparaison entre les deux noms et les deux régimes a, d'ailleurs, fait mouche dans la rue et parmi ceux qui ont aperçu cette formule au hasard de leurs déplacements estivaux... 

    Un de nos interlocuteurs résumait par une autre formule (approchante) cette affaire : « Quand la Monarchie suscite le service et la fidélité, la République, elle, valorise les grands principes... et favorise les opportunistes ». Cela n'a pas empêché la Monarchie de connaître aussi des scandales et des courtisans, mais sa nature même empêchait les dérives inhérentes à la logique propre et à la pratique des institutions républicaines, et pouvait préserver l'autorité de l’État qui, non élu en sa magistrature suprême, ne dépendait pas des coteries ou des arrangements entre les plus puissants : un Nicolas Fouquet fit d'ailleurs les frais de cette politique d'indépendance de la Monarchie à l'égard des féodalités de l'Argent, et c'est d'Artagnan lui-même qui, sur ordre du roi Louis XIV, se chargea de l'arrêter au sortir d'un conseil des ministres. Cela paraît inenvisageable dans la République actuelle, et, au regard de l'histoire des cinq Républiques françaises, cela semble bien une constante depuis Danton, corrompu au plus haut point et qui, exception marquante et néanmoins sinistre, le payera de sa tête au nom d'une vertu républicaine que Robespierre incarnera dans le sang et qui fera regretter l'ancienne justice royale, plus mesurée en comparaison. 

    danton.jpgNéanmoins, la pression de l'opinion publique ou, plutôt, celle des médias et des réseaux sociaux, se fait désormais derrière des écrans, ce qui évite à la République d'avoir à affronter des manifestations de rue comme celles, tragiques en leur terme, des mois de janvier et février 1934, initiées et emmenées par l'Action Française et ses Camelots du Roi dont plusieurs seront alors tués par une République aux abois et toujours scandaleuse. Soyons précis : les affaires actuelles, pour ce que l'on en sait et ce qu'en feuilletonne Le Canard enchaîné avec gourmandise, sont bien mineures au regard de l'affaire Stavisky, du nom de cet autre « Monsieur Alexandre », ou de celles qui concernent les multinationales de la chimie (Monsanto, Bayer), de l'agroalimentaire ou des « GAFAM » états-uniens, celles-ci privant le budget de l’État de plusieurs milliards d'euros chaque année  ! En fait, Benalla, Kohler ou Nyssen, au-delà de leurs fautes respectives et évidemment condamnables, au moins politiquement et moralement, ne sont que des leurres qui, parfois, nous empêchent de voir le plus grave et le plus inquiétant, cette main-mise des féodalités financières et économiques sur nos sociétés et sur les États politiques contemporains, ce que dénonçait, dans une scène d'anthologie, le « Président Beaufort » (Jean Gabin) devant un parlement houleux et furieux de voir sa proximité avec les milieux d'affaires ainsi mise en lumière par celui qui paraît bien le seul homme libre de l'assemblée, ce que la République parlementaire ne peut, d'ailleurs, longtemps supporter... Que dirait-il aujourd'hui ! 

    Le-président.jpgDepuis ses origines tumultueuses, la République a un vrai problème avec l'Argent, une forme d'addiction qui est la règle quand la Monarchie, elle, cherchait et réussissait souvent à ne pas en être dépendante, aidée en cela par le principe de la transmission héréditaire : « la naissance ne s'achète pas », diront les théoriciens royalistes du XXe siècle, ce qui assure, d'office, une véritable indépendance de la magistrature suprême de l’État à travers la personne du roi qui s'est « contenté » de naître « fils de roi » et qui doit attendre l'événement le plus triste qui soit, la mort de son prédécesseur, de son propre père le plus souvent, pour monter sur le trône. Cet avantage de la Monarchie repose aussi sur une approche liée à sa tradition plus politique que financière, et à sa compréhension de la fameuse formule issue de l'Antiquité romaine : « L'Argent est un bon serviteur mais un mauvais maître ». Le général de Gaulle avait, sous son règne présidentiel, traduit la citation par « L'intendance suivra » qui remettait l'Argent à sa place, qui ne doit pas être la première, mais cela ne dura que le temps des fondateurs de la Cinquième République. 

    Ce qui manque à la magistrature suprême de l’État aujourd'hui en République (même cinquième et malgré de Gaulle), c'est cette indépendance véritable à l'égard des puissances d'argent et cet enracinement dans le temps et l'histoire qui permettent la fidélité à l'Auctoritas et le service désintéressé de l’État : en cela, la République, hors quelques idéalistes, hommes d'honneur ou honnêtes commis, ne peut susciter ces d'Artagnan qui, pourtant et en ces temps de mondialisation déstabilisante, seraient fort utiles à la France...    

    Le blog de Jean-Philippe Chauvin

  • Mathieu Bock-Côté : « Racisme anti-Blancs, le déni »

     

    blue-wallpaper-continuing-background-wallpapers-bigest-images - Copie.jpgLe rappeur Nick Conrad, et son clip PLB, pour « Pendez les blancs », s'inscrit dans la longue liste des provocations antifrançaises. Mais pour Mathieu Bock-Côté, cela ne suffit pas à ébranler la certitude de ceux qui ont décidé une fois pour toutes que le racisme était à sens unique.   [Le Figaro, 28.09].  LFAR

     

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    Le rappeur Nick Conrad était à peu près inconnu il y a quelques jours, jusqu'à ce qu'on découvre son clip PLB, où il en appelle à « pendre les Blanc s». La formule, d'une violence extrême, a provoqué sans surprise une vive polémique, qui s'inscrit dans la longue liste des provocations antifrançaises caractérisant l'histoire d'un certain rap. On se souvient de Monsieur R qui, en 2005, disait « baiser la France », voulait la traiter comme « une salope » en plus de « pisser sur Napoléon et le général de Gaulle », de Rohff dans Dirty Hous qui disait : « J'baise l'État depuis tout petit, j'ai pas encore craché » ou de Médine, plus récemment, qui s'enthousiasmait à l'idée de crucifier les « laïcards comme à Golgotha ». On pourrait en évoquer bien d'autres.

    Mais on passe ici du racisme pur et simple à l'appel au meurtre, ce qui pourrait suffire pour clore un procès qui n'est pas celui d'un genre musical mais d'une aversion pour la France qui vire à la haine raciale. L'abjection est totale lorsque est célébré l'assassinat des « bébés blancs ». Il y a là manifestement une quête de transgression qui doit aller jusqu'au bout d'elle-même et qui pourrait quitter un jour le simple domaine de la représentation « artistique ». On ne se vautre pas dans la tentation du mal radical sans réveiller la part la plus sombre du cœur humain. La civilisation construit des digues contre elle, mais certains font tout ce qu'ils peuvent pour les faire céder. Mais cela n'a pas suffi à ébranler la certitude de ceux qui ont décidé une fois pour toutes que le racisme était à sens unique et que les Blancs en étaient toujours coupables, et jamais victimes : c'est même un élément central du dogme multiculturaliste.

    À la télévision comme à la radio, les militants communautaristes, déguisés ou non en universitaires, expliquent inlassablement que le racisme est un système d'exploitation lié à l'expansion européenne et qu'on ne saurait l'en dissocier. En gros, le racisme anti-Blancs serait une impossibilité logique à démonter. On comprend le message : le mâle blanc disposerait ainsi du triste monopole du mal structurel dans l'histoire. Les médias accordent à cette thèse tordue un écho indéniable, comme s'ils souhaitaient la normaliser. Dans cet esprit, la haine raciale contre les Blancs, même si elle est condamnable, ne serait plus qu'un réflexe de survie, ou encore, pour ceux qui ont le plus de culot dans le déni, une manière d'appeler à l'aide contre une civilisation injuste envers ses minorités. C'est d'ailleurs la ligne de défense adoptée par Nick Conrad, qui a présenté sa chanson comme une entreprise pour réveiller les consciences devant le malheur historique du « peuple noir ». La racialisation des appartenances entretenue par une sociologie simpliste venue des États-Unis est désormais banalisée au nom de l'insurrection des banlieues. La France n'est plus une nation mais un territoire qu'on veut pousser vers la guerre des races.

    Nick_Conrad-PLB-400x330.jpgPuisqu'un tel clip est indéfendable et qu'il y a des limites à prendre n'importe quoi pour de l'art, le parti diversitaire et les spécialistes du déni à son service ont misé sur une autre ligne de défense: Nick Conrad serait un rappeur inconnu et il aurait eu vocation à le rester. Comme d'habitude, c'est la supposée « fachosphère » qui est accusée d'avoir sorti des marges une chanson qui aurait dû y demeurer pour monter de toutes pièces une controverse excitant ses obsessions idéologiques. Derrière la colère contre PLB, il n'y aurait rien d'autre qu'une xénophobie mal cachée, fouillant dans l'actualité pour trouver des faits divers l'alimentant. Nick Conrad ne serait qu'un pion dans la stratégie machiavélique de «l 'extrême droite ». C'est moins ce clip qui devrait inquiéter que la réaction qu'il suscite. C'est le même argument qui est utilisé après chaque attentat islamiste : une fois l'attentat condamné de manière plus ou moins rituelle, on s'inquiète surtout de la réaction qu'il pourrait susciter dans la population.

    Irebeus-renois.jpgl faudrait dire clairement ce qu'on se contente généralement de chuchoter : il y a dans une certaine jeunesse issue de l'immigration une haine de la France qui s'inscrit dans une mouvance plus générale de partition du territoire, où se multiplient les zones se dérobant à la fois à la souveraineté nationale et à l'identité française. Et ceux qui en appellent à la reconquête des territoires perdus de la France sont accusés de vouloir soumettre les banlieues au communautarisme majoritaire. Traditionnellement, le colonialisme consistait à vouloir imposer sa culture chez les autres. Dans la logique indigéniste et postcoloniale, cela consiste désormais à vouloir imposer sa propre culture chez soi. Le sens des mots est inversé. Dans cet esprit, la décolonisation n'arrivera à son terme que lorsque les Français seront considérés comme une communauté étrangère chez eux. 

    Mathieu Bock-Côté        

    Le-nouveau-regime.jpgMathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (éd. VLB, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (éd. Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille (éd. Boréal, 2007). Ses derniers livres : Le multiculturalisme comme religion politiqueaux éditions du Cerf [2016] et le Le Nouveau Régime (Boréal, 2017)
  • Le Lancet : l’Oligarchie, fin de partie ?, par Christian Vanneste.

    Veran contre Raoult, c’était la carte contre le territoire, le médecin socialiste ambitieux devenu ministre contre un infectiologue de renommée mondiale mais anticonformiste à la tête de l’IHU marseillais. Le premier s’appuyait sur les institutions et les instances qui constituent le microcosme médical, composé de spécialistes qui, à force de courir d’une réunion à l’autre, ne voient plus guère de malades. Le second, c’était le terrain, les patients en direct, et près de 4000 personnes testées et soignées, mais en dehors des règles académiques.

    christian vanneste.jpgLe premier, et son Cerbère Salomon, égrenaient les chiffres, dessinaient les cartes des zones les plus touchées et de celles qui l’étaient moins. Le second administrait aux volontaires infectés par le Covid-19 des doses d’hydroxychloroquine et d’azythromycine pendant quelques jours avec des résultats positifs, puisqu’on ne constatait que 0,5 % de décès parmi eux.

    Cette apparence du sérieux institutionnel contre une sorte de braconnage médical était renforcée par le style volontiers provocateur du « druide » marseillais qui ne cessait de rappeler son audience internationale et son niveau scientifique dont il affichait si peu les signes ostentatoires. Mais la carte sûre d’elle s’est assez vite fissurée, crevassée : pourquoi l’Etat avait-il, au mois de Janvier, classé parmi les produits toxiques cette chloroquine utilisée depuis près de 80 ans contre le paludisme et nécessaire aux malades du lupus ? Pourquoi le ministre Veran avait-il réservé son usage aux malades gravement atteints par le Covid-19, et sans l’antibiotique préconisé dans le protocole Raoult ? Ce dernier avait pourtant insisté sur la nécessité d’en user précocement pour diminuer la charge virale, ce qu’il constatait à Marseille, et sur son inutilité dès lors que les problèmes respiratoires aigus, qui allaient entraîner la mort, ne dépendaient plus du virus. La thérapeutique du professeur marseillais était mise en oeuvre dans de nombreux pays dans le monde, en France, elle suscitait une véritable guerre civile médicale. Mais, derrière Raoult, soutenu en France par Onfray, et à l’étranger par Trump, se profilait l’ombre du populisme. L’infectiologue de réputation mondiale devenait alors un charlatan ! Aussi, lorsque la revue de référence, The Lancet, publia une étude portant sur 96 000 cas et concluant à la nocivité de l’hydroxychloroquine, un cri de triomphe parcourut le microcosme de la bienpensance, dont les vecteurs médiatiques, pavoisèrent et jubilèrent. La bête était morte, les institutions internationales et nationales, l’OMS et l’ANSM, l’agence française du médicament française, suspendaient les essais cliniques de la molécule dans le cadre de l’épidémie actuelle. Le ministre Veran se mettait au niveau de Cohn-Bendit pour demander aux partisans de Raoult de « fermer leur gueule ».

    Cette danse sur un cadavre n’a duré que quelques jours. De nombreuses personnalités scientifiques, y compris des opposants à la thérapie marseillaise, ont décelé la supercherie : la revue de référence avait publié sans véritable contrôle un article manifestement fallacieux, bourré d’erreurs factuelles, et fondé sur des sources incertaines. Trois des quatre signataires, dont le principal, Mandeep Mehra, se désolidarisaient du quatrième, le meneur de l’opération, Sapan Desai, dirigeant de Surgisphère, la société d’analyse, opératrice de la collecte et de la présentation des « données ». The Lancet lui même mettait en garde, et on assista alors à la pantalonnade du ministre Veran allant demander des explications au Lancet qui l’avait amené un vendredi soir à interdire l’emploi du médicament contesté, même dans le protocole inopérant dans lequel il l’avait d’abord autorisé. Ainsi, une revue étrangère avait conduit le ministre d’un grand pays soi-disant doté du meilleur système de santé du monde, bardé d’autorités, d’agences, de conseils destinés à conforter le ministère dans la sûreté de sa politique… à prendre une décision précipitée d’ignorant pressé, comme si d’autres motifs avaient agi aussi. A quoi sert l’ANSM qui va revoir sa copie ? A quoi sert le Haut Conseil de la Santé Publique qui au lieu de conseiller le ministre de façon autonome joue les girouettes selon que le vent souffle dans le sens du Lancet ou contre lui ? A quoi sert la Haute Autorité de la Santé, cette autorité administrative indépendante chargée précisément de faire prévaloir l’intérêt public ? On sait que son ancien président, Jean-Luc Harousseau était favorable l’introduction de la thérapeutique à l’hôpital. A quoi sert le Conseil Scientifique que Raoult a quitté ? Le Comité Analyse Recherche et Expertise qui s’y est ajouté ? A rien, sinon à dépenser de l’argent public, à créer des emplois inopérants qui mobilisent des ressources qui seraient plus utiles auprès des malades ?

    L’éthique et le bon sens ont conduit Didier Raoult à préconiser une méthode : dépister les personnes infectées, les isoler, les soigner. Il a su se procurer les tests auprès notamment d’un laboratoire vétérinaire auquel le gouvernement ne daignait pas répondre. Il n’a pas, comme le conseillait Veran, renvoyé les gens chez eux avec du Doliprane… pour contaminer leurs proches. Il les a soignés avec une thérapeutique hors-AMM, en prenant les précautions nécessaires. C’est ce que doit faire un médecin devant un malade dès lors qu’il n’est pas un Diafoirus prêt à voir mourir ses patients selon les règles de la médecine au terme d’essais « randomisés ». C’est ce que devaient pouvoir faire tous les médecins, ces médecins de ville qu’on a méprisés jusqu’à les priver des moyens matériels indispensables à l’exercice de leur métier, comme les masques. L’expérience du Covid devrait ouvrir les yeux des Français sur le microcosme qui les dirige et les informe, sur son incompétence, sur cette armée de colonels qui n’ont jamais livré la moindre bataille, et dont les décisions ne sont pas exemptes de copinage, de calculs intéressés voire de corruption. Il est plus que temps de faire tomber cette oligarchie qui, elle, est vraiment inutile et même nocive à la France.

  • Municipales : carnage démocratique et peinture verte pour le Président, par Natacha Polony.

    Source : https://www.marianne.net/

    On voit venir la suite. Pour retrouver un souffle, Emmanuel Macron se repeint en vert. On s'accroche à la seule bouée qui surnage. Le « nouveau chemin » sera « écologique, social et solidaire » . Avec pour point d'appui les propositions de la convention citoyenne sur le climat...

    À partir de quel pourcentage d'abstention considérerons-nous que nos représentants sont illégitimes ? Parmi les maires qui ont été élus dimanche dernier, un grand nombre n'avait pas obtenu 10 % des inscrits au premier tour. Beaucoup n'ont finalement pas réuni 20 % des inscrits à l'issue du second. Le maire de Lyon - troisième ville de France, 516 000 habitants -, Grégory Doucet, qui incarne désormais la « vague verte » décrite à l'envi par les médias, a recueilli 53 000 voix.

    À ce niveau, on peut parler d'un carnage. L'élection dont on nous disait qu'elle marquait l'attachement des Français à leurs élus locaux, la foi en la démocratie de proximité, rejoint toutes les autres dans l'océan de l'indifférence. On peut, certes, tenter de se rassurer en attribuant ce vide au coronavirus. La façon erratique dont s'est décidée l'organisation du premier puis du second tour, la fermeture brutale des restaurants la veille du 15 mars, les hésitations autour de la date du 28 juin… toutes ces aberrations ont finalement jeté le discrédit sur ce scrutin. Mais le mal vient de plus loin.

    Il est d'ailleurs significatif que les commentaires se concentrent sur l'écologie, comme si la dernière idéologie encore vierge pouvait racheter le discrédit des politiques, alors même que, en fait de « vague verte », il n'y a qu'un clapotis dans les métropoles et grandes villes de France. Lyon, Bordeaux, Strasbourg, Tours ou Grenoble, cela n'a rien de négligeable. Mais ce n'est pas la France. Et l'on pourrait en conclure que l'écologie politique séduit essentiellement quand il s'agit d'aménager des pistes cyclables ou d'instaurer des cantines bio. Dans une commune rurale, dans une ville moyenne, les problématiques sont plus complexes. Parce qu'une véritable politique écologique dépasse largement la question des transports. Elle impose un changement de paradigme qui doit impliquer tous les rouages de l'État, pour que le maire qui voudrait par exemple préserver les terres arables et les petits commerces de sa commune ne voie pas ses efforts gâchés par l'élu de la commune voisine ou par un préfet complaisant.

    Se repeindre en vert

    On voit venir la suite. Pour retrouver un souffle, Emmanuel Macron se repeint en vert. On s'accroche à la seule bouée qui surnage. Le « nouveau chemin » sera « écologique, social et solidaire » . Avec pour point d'appui les propositions de la convention citoyenne sur le climat. Celui qui avait refusé en 2017, sur demande de Bercy, un moratoire sur l'extension des grandes surfaces, que demandait pourtant un de ses propres députés, va l'imposer aujourd'hui pour obtenir son brevet de « président vert ». De même que le dépeceur d'Alstom, Technip et Alcatel se fait aujourd'hui le chantre de l'indépendance industrielle, l'ancien ministre de l'Économie et le président de la République qui a signé tous les brevets d'extraction minière, qui a systématiquement arbitré en faveur des lobbys de l'agriculture industrielle et de la grande distribution, qui a signé tous les traités de libre-échange préparant la ruine des éleveurs français, nous parle désormais écologie.

    Avec 17 % des inscrits à Paris, on se demande comment la représentante de la gauche plurielle version « ville monde » et arbres en pot pourrait faire beaucoup mieux que Benoît Hamon en 2017.

    Ce qu'Emmanuel Macron est en train de faire, tous le tenteront : s'inventer en combattant de la cause climatique pour s'éviter de penser globalement une politique cohérente de remise en cause de ce néolibéralisme dont nous voyons les dégâts sociaux et environnementaux. Cette grande foire au verdissement ramènera-t-elle les citoyens vers les urnes ? Rien n'est moins sûr. Si les citoyens ne votent plus, c'est parce qu'ils ont la certitude, après des décennies d'espoir déçu, que leur vote ne permet pas d'infléchir le cours de leur vie. Même les maires, les derniers qui avaient une prise sur le réel, ont vu leurs marges de manœuvre réduites par la fin de la taxe d'habitation et la recentralisation version La République en marche. Et que peut un maire quand la PME locale a déposé le bilan, que le tribunal et l'hôpital ont fermé, et que la grande distribution a ruiné les derniers commerces ?

    Fractures

    L'unique leçon à tirer de ce scrutin est que la fracture territoriale qui dessine à présent la lutte des classes en France est plus profonde que jamais. L'illusion d'optique d'un sursaut à gauche masque difficilement le désenchantement des territoires abandonnés. Certains commentateurs paresseux en sont à prédire à Anne Hidalgo, après son « triomphe », un destin national. Avec 17 % des inscrits à Paris, on se demande comment la représentante de la gauche plurielle version « ville monde » et arbres en pot pourrait faire beaucoup mieux que Benoît Hamon en 2017.

    Restent des citoyens excédés, qui ont prouvé, une fois encore, qu'ils ne concevaient pas le moindre enthousiasme pour le RN. Utiliser un gourdin pour cogner sur le système ne signifie pas qu'on soit « gourdiniste », comme l'écrivait Philippe Muray.

    Les deux années à venir risquent de voir chacun brandir un morceau de la « vraie croix » écologiste, pendant qu'un nombre croissant de Français se diront que tout cela ne les concerne plus. Ainsi meurt la démocratie. Définir un quorum en deçà duquel l'élection est invalidée, prendre en compte le vote blanc pour que les citoyens puissent récuser le choix qui leur est proposé… autant d'éléments qui permettraient de cesser de faire comme si de rien n'était. En attendant des propositions politiques qui puissent enfin changer la vie.

    Natacha Polony

    Directrice de la rédaction de Marianne

    Cet article est à retrouver dans le magazine n°1216 en kiosques cette semaine « Pourquoi les juges cognent », disponible en ligne pour seulement 1,99 euros.

  • Le contre-sens suicidaire de la prétendue « écologie », par Christian Vanneste.

    Le grand paradoxe ou plutôt l’énorme mensonge de « l’écologie » politique repose sur une idée : la vie. La pandémie du Covid-19 a accentué au-delà du raisonnable la peur de la mort. Ni le nombre de morts, ni les tranches d’âge assez logiquement les plus touchées n’auraient du conduire à pareille panique planétaire augmentée dans notre pays par la gesticulation d’un gouvernement dépassé par la question. Sans doute la priorité donnée à la protection de la vie a-t-elle facilité un glissement de l’opinion vers ceux dont le fonds de commerce se confond avec l’exploitation politique de la peur face aux menaces chimique ou nucléaire.

    christian vanneste.jpgEntre pollution et contamination, l’amalgame sémantique a été depuis longtemps utilisé par les marxistes repeints en vert qui se sont emparés de « l’écologie ». Le climat mental créé par la crise sanitaire a donc développé surtout chez les urbains des grandes villes l’idée qu’il fallait améliorer la qualité de l’air, de l’alimentation, et se méfier davantage des produits d’une grande industrie cynique prête à jouer sur notre santé pour augmenter ses profits. Le rôle des grands laboratoires pharmaceutiques dans « l’étrange défaite » de notre système de santé et en particulier dans le navrant débat autour du « protocole Raoult » a donné du crédit à cette hostilité et permis la réunion contre le capitalisme du gauchisme assoiffé de révolution et des bobos soucieux de leur santé. Le taux d’abstention avec sans doute une mobilisation plus sélective des électeurs a fait le reste. On remarquera seulement que l’autre bénéficiaire politique potentiel de la pandémie, le souverainisme, qui dénonce lui de manière plus précise, et l’excessive circulation des biens et des personnes, et la délocalisation de notre production, qui expliquent à la fois la propagation rapide du virus et l’absence des moyens matériels pour le combattre, n’a pas su utiliser cette carte pourtant maîtresse.

    Ce n’est certainement pas en fermant Fessenheim et en diminuant notre production d’électricité nucléaire, en ruinant nos industries automobile et aéronautique par une pluie toxique de taxes et de réglementations que nous vivrons mieux. La France produit peu de gaz à effet de serre : 0,9% du total mondial de CO2, deux fois moins que l’Allemagne. Cette question ne devrait en aucun cas être sa priorité, et on se demande par quelle aberration le président accidentel que nous subissons en fait tout un fromage. Que le confinement ait baissé l’émission du CO2 de seulement 8%, comme il le souligne, est anecdotique par rapport au marasme économique et social que l’incarcération sanitaire des Français va entraîner en raison de l’impréparation de notre pays. ll voulait montrer par là que la décroissance n’améliorerait pas la qualité de notre air de façon significative. Certes, mais elle tuerait à coup sûr notre économie, nos emplois, notre pays. Et c’est dans cette contradiction que réside le grand mensonge vert : sous prétexte de mieux protéger la vie de chacun, sauf les avortés et les euthanasiés, bien sûr, les « verts » veulent surtout tuer notre vieille nation, comme si la survie de celle-ci n’était pas la première protection de la vie de chacun de ses membres, comme si la vie d’une nation ne pouvait pas être prolongée sans limite alors que tel n’est pas le cas pour les individus.

    Zemmour s’est fait brocarder récemment pour un de ses raccourcis tellement rapide qu’il risque de paraître ridicule. « Complotiste » s’est écriée en choeur la « bienpensance »…. Voilà que Zemmour confond le vert écologique, le vert gentil avec le vert islamiste, le vert méchant : aucun rapport, il délire ! Et pourtant non : s’il est vrai que la même couleur est le fruit du hasard, la convergence des luttes, elle, ne l’est pas ! Les ennemis de nos ennemis sont nos amis. Tous ceux qui veulent affaiblir, puis tuer la France, ensevelir son histoire sous un tombereau de honte, remplacer sa population, ravager sa culture, y répandre l’insécurité à force de laxisme, se liguent naturellement contre elle. Peu importent les oppositions cruelles sur les droits des « lgbt », sur l’égalité hommes/femmes, l’immigration africaine et musulmane est bienvenue, le multiculturalisme est l’avenir, le cannabis est bon pour la santé et il fait vivre un certain nombre de quartiers hors-la-loi. Notre société connaît une menace mortelle : c’est l’addition des communautés minoritaires unies pour renverser plus qu’un pays, une civilisation. L’intersectionnalité entre les groupes féministes, lgbt, antiracistes, anticapitalistes, indigénistes, végan, antifascistes, islamistes, antivoitures, écologistes, va faire que malgré les divergences considérables, on ne va pas se combattre, ni se critiquer, qu’on va même parfois défiler ensemble pour défendre la Palestine ou une famille de délinquants. Cette effervescence-là est le côté obscur des tribus d’internautes célébrées par Maffesoli. Comme un canard sans tête qui continue à courir, la gauche, privée du prolétariat ouvrier qui a compris qu’il n’avait rien à attendre d’elle, a choisi la stratégie prônée par les démocrates américains ou par Terra Nova : la majorité de demain sera l’addition des minorités. C’est un choix mortifère qui est celui de nos prétendus écologistes, de nos « pastèques », vertes à l’extérieur et rouges à l’intérieur, d’autant plus dangereusement mortelles qu’elles avancent en prétendant défendre la vie. Un signe ne trompe pas : le fond totalitaire transparaît avec l’intolérance et cette prétention exorbitante d’une politique fondée sur une science, sur une connaissance absolue. Le marxisme se voulait « socialisme scientifique ». Ses orphelins embrassent « l’écologie ». Or la politique n’est pas une science et la science elle-même est fondée sur le doute plus que sur la certitude. Raoult n’a cessé de le répéter à des journalistes obtus dont l’inintelligence et l’inculture sont pour beaucoup dans le suicide de notre pays.