UA-147560259-1

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Rechercher : qu'est-ce que le Système

  • Idées & Société • Alain de Benoist : Bataille des idées ? La gauche a perdu, mais la droite n’a pas gagné !

    Manuel Valls déclare que « la gauche a perdu la bataille des idées ».  

     

    Par Alain de Benoist

    Cet entretien donné à Boulevard Voltaire [22.07] dit avec justesse, lucidité et pertinence ce qu'il faut savoir de la situation des idées en France, à l'heure actuelle. Nous partageons cette analyse qui met en lumière a contrario le travail restant à accomplir pour qu'il y ait vraiment bataille des idées et qu'elle conduise à une réelle rupture avec la doxa dominante à droite comme à gauche. La première Action française nommait cela contre-encyclopédie. Peut-être devrions-nous parler aujourd'hui d'une anti-doxaLFAR   

     

    3650118671.7.pngManuel Valls déclare que « la gauche a perdu la bataille des idées ». C’est une bonne nouvelle ?

    Quelle bataille ? Il est vrai que la gauche n’a plus rien à dire, mais la bataille des idées dont parle Manuel Valls n’a jamais eu lieu. Non parce que cette gauche devenue muette reste largement hégémonique dans les médias, et qu’elle n’apprécie pas qu’on cherche à la contredire, mais parce que la droite n’avait ni le désir, ni la volonté, ni les moyens de participer à une bataille de ce genre. La droite n’avait tout simplement rien à dire – ou peu s’en faut. Le domaine des idées n’obéit pas au principe des vases communicants. Vous avez vous-même cité François Huguenin : « La droite a refusé le combat des idées car elle n’en a plus. » C’est ce que Pierre-André Taguieff remarquait lui aussi récemment : « La gauche a perdu la bataille des idées, mais la droite ne l’a pas gagnée. »

    On pourrait, ici, faire un parallèle avec la fin du système soviétique. L’URSS ne s’est pas écroulée sous les coups de boutoir du « monde libre » mais sous l’effet de ses propres contradictions internes. Si la gauche n’a plus rien à dire, si elle a perdu son identité en désertant le combat culturel, ce n’est pas que la droite a réfuté ses idées, c’est que ses idées ont épuisé le cycle de leurs virtualités possibles, et surtout qu’elle a délibérément abandonné le socle idéologique qui faisait sa force, et nourrissait son imaginaire, en se ralliant plus ou moins honteusement au libéralisme économique et au système du marché.

    Depuis la Manif pour tous, il y a quand même une indéniable effervescence intellectuelle à droite. Épiphénomène ou lame de fond ?

    Il y a, en effet, quelques ébranlements ici ou là, mais on est loin du compte. Où sont les Taine, les Tocqueville et les Renan du XXIe siècle ? La droite n’aime déjà pas beaucoup les intellectuels, ces coupeurs de cheveux en quatre qui ont la faiblesse de croire que les révolutions culturelles ont des conséquences plus durables que les révolutions politiques. Les partis politiques, eux, pensent que les idées divisent et qu’entretenir le flou est la meilleure manière de rassembler. La droite d’aujourd’hui est idéologiquement déstructurée. Dans le passé, elle s’est laissée gagner par les idées de ses adversaires sans les reconnaître pour ce qu’elles étaient. Elle n’a jamais conçu de stratégie culturelle, car elle ne sait même pas ce que cela veut dire. Elle a cru qu’elle deviendrait « respectable » en multipliant les concessions. Elle cède aujourd’hui plus que jamais aux modes idéologiques qui ont historiquement affaibli toutes ses défenses immunitaires, à commencer par l’universalisme philosophique, l’idéologie des droits de l’homme et l’idéologie du progrès. 

    La recomposition politique à laquelle on assiste actuellement annonce-t-elle aussi une recomposition idéologique ?

    Ce serait une excellente nouvelle, à condition qu’on puisse y croire, mais je doute que la scène politique soit propice à une refondation idéologique. Par nature, elle entretient plutôt la confusion. Il paraîtra sans doute excessif à beaucoup de dire que, lorsqu’on a telle ou telle position politique, on doit savoir aussi comment interpréter les plus récents acquis de la physique théorique ou de la biologique moléculaire. Et pourtant, il n’y a pas de conception du monde qui n’englobe pas tous les domaines de connaissance et de pensée. Mais sans aller si loin, on pourrait au moins exiger qu’en matière anthropologique, on ait un minimum de cohérence. Quelle idée se fait-on de l’homme ? Une idée philosophiquement classique ou une idée idéologiquement moderne ? Celle d’un être politique et social par nature ou celle d’un individu porteur de droits qui ne serait sur terre que pour maximiser son meilleur intérêt ? La société s’explique-t-elle par la sociabilité naturelle de notre espèce ou n’est-elle qu’un agrégat d’atomes individuels régi par le contrat juridique et l’échange marchand ?

    L’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron, qui symbolise la réunification du libéralisme sociétal de gauche et du libéralisme économique de droite, pourrait en principe favoriser une clarification en faisant comprendre une fois pour toutes que le libéralisme est intrinsèquement « progressiste » et non pas conservateur, pour reprendre un mot qui revient à la mode. C’est ce qu’explique très bien Guillaume Bernard : « La combinaison du libéralisme et du conservatisme peut, de prime abord, apparaître séduisante : le libéralisme pour l’économie, le conservatisme pour la société. Mais c’est méconnaître la doctrine libérale, qui s’appuie sur l’individualisme et le subjectivisme. C’est en soi et par soi que chacun détermine son bien. Il n’existe pas de valeur objective, mais uniquement des consensus issus de la rencontre de volontés. Le libéralisme porte en lui la destruction des traditions sociales, alors qu’il n’est nullement nécessaire de s’y adonner pour combattre la spoliation fiscale des familles et des entreprises. » C’est ce qu’il faudrait comprendre si l’on veut gagner la « bataille des idées ». Les Républicains, eux, se veulent les représentants « de la droite et du centre ». Encore un oxymore ! 

    Intellectuel, philosophe et politologue

     
     
    Entretien réalisé par Nicolas Gauthier
  • De l'urgence de restaurer la monarchie

    Au portail de Notre-Dame : La Galerie des Rois

     
    ARGUMENTAIRE. Les bonnes raisons de restaurer une monarchie couronnée ne manquent pas. Cet article en donne quelques-unes avec la force de l'évidence : la monarchie, où le roi au sommet de l'État incarne l'unité historique, sociale et politique de la nation, est sans nul doute le meilleur des systèmes institutionnels. Celui qui redonnerait aux Français confiance et foi en l'avenir ! 

    PAR YVES MOREL

    Deux cent vingt-deux ans après la Révolution, les carences de notre république sont patentes. Des gens de gauche se prennent même à rappeler les mérites de notre ancienne monarchie ! Cela ne laisse d'ailleurs pas d'étonner en des temps où l'on n'a jamais autant exalté la République et les « valeurs républicaines ». Faut-il voir là le chant du cygne d'un régime aux abois ? Nos politiciens louant sans cesse la République ressembleraient alors à l'orchestre du Titanic jouant à pleine puissance pour tenter de conjurer l'angoisse des passagers devant l'imminence du naufrage. Mais on ne colmatera pas les brèches sans changer de cap. Où l'on découvre alors une évidence : le meilleur des systèmes politiques n'est pas forcément celui qu'on croit.

    1765778246.2.jpgLA MONARCHIE PRÉSERVE DU CLIMAT DE GUERRE CMLE DES DÉMOCRATIES PARTISANES.

    L'avènement d'un roi découle de sa qualité d'héritier direct de la couronne dans l'ordre de primogéniture et non d'une lutte électorale entre candidats de partis opposés. Ce mode de dévolution du pouvoir préserve l'État des conséquences néfastes des changements d'orientation politique inspirés par des idéologies, des principes et des programmes opposés. Elle couronne en quelque sorte la vie démocratique du pays. Le pays ne se divise pas en camps ennemis à chaque nouvelle élection et ne s'exténue pas dans des luttes internes, facteurs de haine.

    LA MONARCHIE ÉQUILIBRE LES RAPPORTS DE FORCES.

    Quand elle n'est dépassée par aucun principe supérieur, la démocratie livrée à elle-même contient les ferments de sa perte. Car la loi du nombre lui permet de soumettre les minorités. Lors de l'élection présidentielle, la minorité qui subsiste peut représenter jusqu'à 49 % des Français ! Elle fracture donc le pays en deux et transforme structurellement les citoyens en frères ennemis. À l'inverse, le roi, au sommet de l'échiquier politique, représente l'intégralité de ses sujets, sans clivages.

    LA MONARCHIE EST CONSENSUELLE.

    Élire un président, c'est comme donner le match à arbitrer au capitaine de l'une des deux équipes en lice. On doute forcément de sa partialité. A l'inverse, le roi n'étant pas le chef d'un parti et n'ayant pas conquis le pouvoir à l'issue d'une compétition qui a divisé son peuple, jouit de la confiance spontanée de tous les Français.

    LA MONARCHIE GARANTIT L'UNITÉ DE LA NATION.

    L'existence d'une même famille royale à la tête de la nation renforce puissamment son identité qui, en république, est beaucoup plus abstraite, indistincte et insaisissable. Une dynastie familiale ancre profondément un peuple dans l'histoire et rend sensible sa continuité à travers les siècles.

    LA MONARCHIE RESPECTE L'INTÉGRITÉ DE SES SUJETS.

    Elle permet à chacun de retrouver son unité morale par le sentiment de sa place dans l'histoire et dans sa terre natale, avec et parmi ses compatriotes. En incarnant l'identité de la nation dans sa continuité historique, l'institution monarchique permet à l'individu de préserver ou de retrouver la sienne. Ce qui est impossible avec la mystique républicaine qui donne une vision tronquée de l'histoire de France en faisant remonter toutes ses valeurs à la révolution de 1789, voire à celle de 1793. L'identité de la France est ainsi confondue avec celle de la République, fondée sur la négation du passé monarchique et chrétien de notre pays. La conception de notre identité collective relève ainsi d'une option idéologique et partisane. Elle est donc différente d'un parti à un autre, d'un individu à un autre, susceptible de se modifier suivant l'évolution des idées.

    LA MONARCHIE SAIT D'OÙ ELLE EST ET OÙ ELLE VA.

    Faute d'un symbole charnel et spirituel de la continuité de la nation dans le temps, nos compatriotes ne savent plus ce qu'ils sont, d'où ils viennent, où ils vont, ignorent leur passé ou en ont une idée erronée, se trompent sur leur avenir, se montrent incapables de le préparer et voient dans les évolutions l'occasion d'une révolution culturelle. Ainsi en est-il allé du mariage pour tous conçu en France comme un instrument de subversion morale, ce qu'il n'est pas au Royaume-Uni - bien qu'il y soit condamnable -, ou de notre culte frénétique de la « diversité » et du pluralisme ethnoculturel qui nous ramène à l'Empire romain d'Occident du Ve siècle.

    LA MONARCHIE PRÉSERVE DES DÉRIVES AUTORITAIRES.

    Toutes les républiques européennes proclamées depuis le XIXe siècle ont dégénéré en dictatures : Italie (Mussolini), Portugal (Salazar), Espagne (Franco), Allemagne et Autriche (Hitler), Russie (Staline)... En revanche, aucun des royaumes n'a dérapé de la sorte dans la toute-puissance politique. Étrange, non ?

    LA MONARCHIE A UNE VISION DE LONG TERME DANS TOUS LES DOMAINES.

    Vaut-il mieux dépenser l'argent public en bâtissant des châteaux comme Versailles ou en commandant des sondages d'opinion mesurant la cote d'impopularité dun président ? Le temps paraît donner raison à la première option.
    Sans cette clef de voûte indispensable qu'est la monarchie, notre pays dérive à tous les vents, à la manière d'un bateau démâté. La Révolution et la République ont transformé le majestueux navire de la France en radeau de la Méduse transportant une population perdue, hagarde et dépenaillée. Et le fait est d'autant plus remarquable que la monarchie française, de par l'absolue continuité familiale qui la caractérisait (la race capétienne régna sans discontinuité pendant près de mille ans) et ses origines nationales (les Français ne prirent jamais leur roi à l'étranger) était plus qu'aucune autre adaptée à sa fonction symbolique et unitaire. Oui, il est urgent de la restaurer.
     

    « La Révolution et la République ont transformé le majestueux navire de la France en radeau de la Méduse. »

     

    Repris du numéro de juillet-Août de Politique magazine - Dossier : Le royalisme aujourd'hui >  Commander ou s'abonner ici !

  • Jean-Louis Harouel : « Les femmes qui portent le burkini sont des militantes »

     

    Par Alexandre Devecchio           

    ANALYSE - Jean-Louis Harouel démontre ici [Figarovox, 16.08] que l'interdiction du burkini sur certaines plages est parfaitement conforme au droit. Mais qu'au delà, le port du vêtement islamique traduit une volonté politique d'imposer une culture et des modes de vie contraires à notre histoire et nos valeurs. Nous partageons pleinement cette analyse.  LFAR

     

    Jean-Louis-Harouel-678x381.pngLa justice a validé ce week-end l'arrêté municipal interdisant le port du burkini à Cannes. Des associations « anti-islamophobie » réclamant en urgence la suspension de l'arrêté municipal cannois du 28 juillet se sont vues déboutées par le tribunal administratif de Nice. Cette décision est-elle surprenante ? Vous semble-t-elle conforme au droit français ?

    Cette décision n'est aucunement surprenante car parfaitement conforme à la jurisprudence du Conseil d'État, sachant que celle-ci n'a pas été statique à travers le temps mais a évolué en fonction du contexte politique et social. Dans des périodes relativement apaisées, cette jurisprudence était résolument libérale et faisait passer les libertés avant les soucis de l'ordre public, comme en témoigne le célèbre arrêt Benjamin de 1933. Cependant, dans la seconde moitié des années 1930, les passions politiques s'exacerbant et l'ordre public étant sans cesse plus menacé, intervient en 1936 le tournant de l'arrêt Bucard, par lequel le Conseil d'État a abandonné cette jurisprudence libérale pour faire prévaloir les impératifs de l'ordre public. Et il faudra attendre 1953 pour que s'opère avec l'arrêt Naud un retour au libéralisme de la jurisprudence Benjamin.

    Aujourd'hui, dans le contexte d'un affrontement de civilisations donnant lieu à un conflit armé ayant fait en un an des centaines de victimes sur le territoire national, il est logique que reviennent au premier plan les exigences de l'ordre public, et le juge des référés a d'ailleurs invoqué « le contexte de l'état d'urgence et des récents attentats » pour justifier sa décision en la fondant sur « un risque de troubles à l'ordre public ».

    Le juge note en outre que « sont respectées les dispositions de l'article 1er de la Constitution (« La France est une République laïque »), qui interdisent à quiconque de se prévaloir de ses croyances religieuses pour s'affranchir des règles communes régissant les relations entre collectivités publiques et particuliers. »

    Certes, mais en l'occurrence, il ne s'agit pas d'un service public, mais d'une plage…

    Le fait d'administrer et gérer au bénéfice des usagers une portion du domaine public affectée à l'usage du public constitue une activité exercée dans l'intérêt général, et relève donc de la notion de service public.

    Est-ce un premier pas vers l'interdiction de tous les signes religieux dans l'espace public ? N'est-ce pas une vision de la laïcité excessive ? Cette dernière sert-elle de cache-sexe à un combat plus spécifique contre l'islam politique ?

    L'islam est, par nature, politique. On ne saurait trop le rappeler : l'islam est un système total qui mêle le religieux, le politique, le juridique, la civilisation. L'islam est un code de droit qui prétend remplacer le droit du pays d'accueil. Si bien que toute concession faite à l'islam comme religion est un abandon consenti à l'islam comme système politico-juridique ainsi qu'à la civilisation islamique.

    Face à l'islam, la laïcité conçue comme neutralité ne suffit pas. Le cas de figure n'est pas le même qu'avec le catholicisme. Notre laïcité s'est certes construite contre l'Église, mais en accord avec les paroles fondatrices du christianisme : rendre à César et à Dieu ce qui leur revient respectivement. L'islam est au contraire l'anti-laïcité par excellence, si bien que notre État laïque devrait le combattre beaucoup plus durement qu'il n'a combattu le catholicisme.

    Ainsi que je le préconise dans mon récent livre Les droits de l'homme contre le peuple, il faut pour l'islam un régime dérogatoire comme en Suisse où la construction de minarets est interdite alors qu'on peut bien sûr y construire des clochers.

    Cela vient après l'affaire du parc aquatique privatisé pour les salafistes dans les Bouches-du-Rhône. Ce genre de pratique est tolérée dans certaines villes pour la communauté juive par exemple. Que répondez-vous à ceux qui dénoncent le « deux poids, deux mesures » ?

    Peut-on citer le nom de quelqu'un ayant opéré un massacre en France au nom d'une quelconque mouvance du judaïsme ?

    En Corse, la baignade de jeunes filles en burkini a provoqué une violente rixe entre jeunes corses et jeunes d'origine maghrébine. Que cela vous inspire-t-il ?

    C'est un exemple des troubles à l'ordre public que peut entraîner cet étalage sur les plages françaises des pratiques identitaires islamiques. Surtout dans le contexte des récents massacres commis par des islamistes au nom de leur dieu.

    Par ailleurs, il est clair qu'en Corse où la population est restée plus près de son sol, plus ancrée dans ses villages, elle se montre plus réactive face au processus de la conquête islamiste non dite mais bien réelle dont l'Europe occidentale est l'objet. Cependant, même dans l'Hexagone, de plus en plus de gens ont conscience du lien qui existe entre les carnages des terroristes islamistes et le folklore identitaire arabo-musulman qui est le terreau où se nourrit le djihadisme.

    Après l'arrêté de Cannes, pris le 28 juillet, une autre commune des Alpes-Maritimes interdit la baignade en burkini : Villeneuve-Loubet. Cela est-il le signe d'une prise de conscience face au danger de l'islam politique, au-delà de la menace terroriste ?

    On peut l'espérer. Notre pays est actuellement en guerre, et s'il ne veut pas être vaincu dans cette guerre, il doit savoir contre qui et contre quoi il se bat. Pour ne pas perdre une guerre, il faut impérativement nommer l'ennemi. Or, en l'espèce, celui-ci est double : d'une part les djihadistes violents qui massacrent dans notre pays; et d'autre part, les djihadistes « civilisationnels », qui œuvrent inlassablement à rendre toujours plus présents sur notre sol leur civilisation, leurs règles et leur mode de vie.

    À moyen et long terme, le plus grand danger pour les Français est la conquête feutrée de la France par le djihadisme civilisationnel, conquête qui s'opère au nom des droits de l'homme. Les femmes qui portent des vêtements de bain islamiques sont des militantes de la conquête de notre pays par un groupe humain porteur d'une civilisation antagoniste. Cet été, les plages sont la nouvelle partie de notre territoire que visent à s'approprier les islamistes. 

    Jean-Louis Harouel est professeur agrégé de droit à Paris II et auteur de «La grande falsification. L'art contemporain», «Le vrai génie du christianisme» et «Revenir à la nation» (Editions Jean-Cyrille Godefroy). Son dernier ouvrage Les droits de l'homme contre le peuple est paru aux éditions Desclée de Brouwer.  

    picture-2540921-61yhv5dr.jpgEntretien par Alexandre Devecchio

    Journaliste au Figaro et responsable du FigaroVox. Twitter : @AlexDevecchio

              

  • Face au terrorisme islamiste, savoir ce que nous voulons défendre

     Aux sources de notre civilisation, le Trésor des Athéniens à Delphes

     

    Par Mathieu Bock-Côté

    Les Européens ne donneront le meilleur d'eux-mêmes contre la menace djihadiste qu'en étant fiers de leur héritage, expose ici Mathieu Bock-Côté*. [Figarovox, 8.08]. Ainsi poursuit-il sa réflexion, à laquelle Lafautearousseau fait régulièrement écho parce qu'elle s'inscrit nettement en opposition à la société postmoderne, antinationale, antihistorique, que la pensée dominante et le Système tentent encore d'imposer à la France, à l'Europe et au monde, malgré la montée universelle des résistances. En vérité, ce n'est pas tant des djihadistes que nous devons nous sauver que de nos propres abandons et reniements. Du moins est-ce ce que nous disons ici jour après jour.  LFAR   

     

    3222752275.jpgIl faut défendre notre civilisation contre ses ennemis. Alain Finkielkraut le disait récemment dans Le Figaro Magazine. Mais la formule est bien plus ambiguë qu'on ne le croit.

    Qui sont ses ennemis ? Sous prétexte de ne pas faire d'amalgame, on s'obstine à ne pas les nommer et à présenter le terrorisme islamiste comme une force désincarnée. La volonté de certains médias de ne plus dévoiler l'identité des djihadistes, sous prétexte de ne pas leur faire de publicité, contribuera aussi à la déréalisation des attentats. Il faudrait pourtant penser ensemble les massacres soigneusement planifiés tels Charlie Hebdo et le Bataclan, les tueries organisées comme à Nice et les actes plus ou moins spontanés comme en Allemagne quand un réfugié pakistanais a commis des agressions à la hache dans un train. Prendre en compte les agressions sexuelles massives comme celles de Cologne le 31 décembre est aussi une nécessité.

    De façon plus générale, on redécouvre que les peuples ne sont pas des populations interchangeables et indéfinies qu'on pourrait se contenter de réguler en multipliant les incantations républicaines. L'immigration massive a créé en Europe des territoires « dénationalisés » que les islamistes rêvent de maîtriser, en les poussant à la sécession culturelle ou à la guerre civile.

    Une fois le terrorisme islamiste nommé comme notre ennemi, au nom de quoi le combattre ? Que voulons-nous défendre ? L'Occident ne sait plus ce qui le caractérise. Depuis quarante ans, il s'est livré aux délices de l'expiation pénitentielle et à l'inversion généralisée des valeurs. De la théorie du genre au multiculturalisme, en passant par la sociologie victimaire et la consommation frénétique, il semble aujourd'hui se définir en adhérant à ce qui le nie. On ne voit plus au nom de quoi les hommes transformés en individus hors-sol consentiraient aujourd'hui au sacrifice.

    La question des limites de l'État de droit est aussi éclairante. Tous s'enorgueillissent, avec raison, des libertés fondamentales garanties par nos démocraties. Mais un certain fondamentalisme droit-de-l'hommiste en est venu à paralyser l'État, qui ne dispose plus des moyens politiques nécessaires pour conserver son peuple et protéger sa population. On se demande encore comment Adel Kermiche, un des deux terroristes de Saint-Étienne-du-Rouvray, qui avait cherché à rejoindre la Syrie et était fiché, pouvait être en liberté. Combien sont-ils dans la même situation que lui ? Si les attentats indignent toujours autant, ils surprennent de moins en moins.

    Ce n'est pas trahir la démocratie que de lui donner les moyens de se défendre contre ceux qui instrumentalisent les droits de l'homme pour faire la promotion de l'islamisme. Réduite à la seule figure d'un État de droit autoréférentiel, la civilisation occidentale se condamne à l'impuissance et à l'autodestruction. La démocratie se réduit au néant en se définissant seulement comme un système de règles abstraites déconnectées de ses racines identitaires, historiques et spirituelles.

    Ce n'est pas à cet Occident pénitent que songent ceux qui veulent se porter à sa défense. Le patriotisme occidental se réfère à une civilisation plus profonde, délivrée de ses complexes culpabilisants. Encore faut-il la redécouvrir en dissipant le brouillard idéologique qui l'a rendue invisible. L'attentat contre l'église de Saint-Étienne-du-Rouvray a marqué une nouvelle étape dans l'horreur et peut, étrangement, servir de révélateur.

    L'égorgement du prêtre Jacques Hamel pendant sa messe avait quelque chose d'un sacrifice rituel. La France était frappée dans son identité la plus intime, celle qui vient du fond des âges, pour emprunter la formule du général de Gaulle. Cette vieille nation de marque chrétienne se voyait paradoxalement rappelée à une part d'elle-même dont elle ne sait plus trop quoi faire. Pourtant, la France de la première moitié du XXe siècle avait beau être laïque, elle s'est néanmoins libérée en brandissant la croix de Lorraine. Le gaullisme assumait toute l'histoire de la France et sacralisait la nation, à la manière d'un être historique doté d'un génie propre.

    C'est à travers la nation que les démocraties occidentales font l'expérience de la liberté démocratique et de la part sacrée du politique. Et c'est dans ce qu'on pourrait appeler leur identité civilisationnelle que les nations occidentales sont aujourd'hui attaquées. Une civilisation se définit tout autant par ses mœurs, son architecture, ses institutions politiques et son sens de la transcendance, qui irrigue toutela vie collective. En renouant avec une certaine idée de leur héritage, ces nations retrouveront le désir de se défendre. 

    * Sociologue, chargé de cours à HEC Montréal, il est chroniqueur au « Journal de Montréal ». Collaborateur régulier du site FigaroVox, il a récemment publié « Le Multiculturalisme comme religion politique » (Éditions du Cerf, 2016, 368 p., 24 €).

    Mathieu Bock-Côté           

  • Trêve de notations, palmarès et classements !

    Le taureau new-yorkais de Wall-Street

     

    Par Péroncel-Hugoz

    Pour son centième « coup de dent » sur « le360 », notre chroniqueur a choisi de s’en prendre aux « classements internationaux » - en fait anglo-américains - qui tombent dru à longueur d’année sur les pays d’autres cultures …

     

    peroncel-hugoz 2.jpg« L’agence de notation B.and B. décide de dégrader la France », « le Maroc recule d’un point en matière de développement humain », « les universités françaises perdent une place dans le classement de Pékin », « la Ligue des droits humains met en garde Amman », « Paris recule dans le classement Bertelsmann sur la gouvernance », « l’agence X de Londres pointe la hausse de la dette marocaine », «  le palmarès de Philadelphie (ou de Toronto, ou de Seattle, au choix) déclasse l’Espagne et le Portugal » etc. etc. Sans parler de la Russie ou de la Turquie, ces « cancres » par nature … 

    LES CINQ YEUX

    Chaque jour que Dieu fait, ou presque, les dépêches apportent à la Terre entière leur lot de « mauvaises nouvelles » pour les « vilains élèves » des classements, palmarès et autres notations lancés comme des roquettes contre certaines catégories de pays, et aussitôt, à Madrid, Milan, Athènes, Tunis, Paris, Casablanca, Ankara, Dakar, Abidjan, etc.etc., politiciens, économistes et industriels prennent des mines catastrophées, refont leurs comptes, promettent de « s’amender » mais rien ne change : les gronderies continuent de fuser depuis les Cinq-Yeux, les « Five Eyes » comme ils se nomment eux-mêmes entre Anglo-saxons : Etats-Unis, Angleterre, Canada anglais, Australie, Nouvelle-Zélande. 

    Vous savez, les cinq Etats anglophones qui posent à la « conscience » du monde occidental voire du monde tout court et qui surveillent l’Humanité entière grâce à un système d’écoutes pancontinental. 

    ONG ET FONDATIONS

    Eh ! bien les pauvres pays latins, arabes, africains visés par toutes ces appréciations négatives et qui, du coup en perdent le moral ou le sommeil, ont bien tort de s’en faire et d’abord de prendre au sérieux toutes ces mises en demeure, dégradations et autres notations, lesquelles, en général, si on gratte un peu dessous, proviennent des mêmes jurys, associations, organisations non gouvernementales (le fameux sigle ONG qui fait trembler la moitié de la planète…) et autres fondations privées (type Soros, ce milliardaire international et « bienfaiteur humanitaire » auto-proclamé, qui adore semer le trouble dans les sociétés dont le comportement lui déplaît…).

    Tous ces « tribunaux » auto-érigés sont divinisés par des médias complices, formés de « grandes consciences » en général anglo-américaines, même si pour donner le change, elles s’adjoignent là un Sud-Coréen ou un Finlandais, ailleurs une « experte » (en quoi ?) singapourienne ou un avocat de Papouasie-Nouvelle-Guinée ? 

    FEU LA RESISTANCE GAULLIENNE

    Toute cette engeance « humanitaire », « droitdelhommiste » et ultra « politiquement correcte » ne vise qu’à maintenir en respect les pays du Sud, y compris la rive latine de la Méditerranée, qui fut naguère gaullienne, c’est à dire rétive à toute tutelle extérieure. En France, il ne reste que quelques souvenirs nostalgiques de cette période faste où Paris refusait de suivre Washington dans ses aventures internationales.

    Le discours contre la guerre du Vietnam prononcé par le général de Gaulle, à Phnom-Penh, le 1er septembre 1966, sous les applaudissements du roi Norodom–Sihanouk du Cambodge et de la quasi-totalité du « Tiers-Monde », comme on disait alors pour le Sud, fut le zénith de cette résistance à l’uniformisation de la planète.

    Le discours du ministre français Dominique de Villepin (né au Maroc, dont il se flatte d’être l’ami), aux Nations-Unies, à New-York, le 14 février 2003, refusant d’aller guerroyer en Irak pour les Anglo-Américains, fut le chant du cygne de cette diplomatie indépendante à laquelle renoncèrent ensuite successivement les présidents Chirac, Sarkozy et Hollande, empressés de renfourner la France dans cette alliance de l’Atlantique Nord, pourtant inutile dès lors que le danger communiste s’était évaporé de lui-même, avec la chute définitive du système marxiste soviétique, en 1989. 

    FRENCH YOUNG LEADERS AND FBI

    Des aides multiformes ont été généreusement allouées aux « French Young Leaders » de diverses associations dont l’actuelle « French American Foundation » ; elles avaient dans la plus grande discrétion préparé cette mutation politico-culturelle qui fait qu’à présent la majorité des décideurs français, de droite ou de gauche, sont d’actifs militants de ce « club de l’élite transatlantique » (« Le Figaro » du 10 octobre 2014) : citons entre autres, MM Juppé, Kouchner, Trichet, Moscovici, Minc, Colombani, Joffrin, Montebourg, etc.etc.

    Les dames ne sont pas en reste avec les Lauvergeon, Lagarde, Parisot, la plus « américanomane » de toutes étant une certaine Pécresse, nouvelle présidente sarkozyste de la puissante région Ile-de-France, et qui reçoit toujours la presse devant une affiche de superproduction hollywoodienne, comme un clin d’œil à ses maîtres à penser d’Outre-Atlantique… Quand Mme Pécresse était ministre des Universités du régime Sarkozy, les gens de son cabinet, pourtant triés sur le volet pour leur « correction politique », avaient surnommé leur patronne FBI, c’est-à-dire … Fausse Blonde Infiltrée … 

    CONTINUER SON BONHOMME DE CHEMIN

    Toutes ces notations et gronderies qui ciblent des nations comme le Maroc ou la France, et bien d’autres, il faut les examiner évidemment mais continuer son bonhomme de chemin comme si de rien n’était, jusqu’à que cette « puissance abusive » (Hubert Védrine, ex-ministre socialiste français des Affaires étrangères et ami proclamé du Maroc), s’efface d’elle-même comme tous les empires hypertrophiés, colosses aux pieds d’argile, ainsi que l’Histoire ancienne ou récente l’a montré 100 fois …  

    « ... les empires hypertrophiés, colosses aux pieds d’argile, ainsi que l’Histoire ancienne ou récente l’a montré 100 fois … »  

    Péroncel-Hugoz

    Repris du journal en ligne marocain le 360 du 26.08.2016

  • Chevènement au Figaro : « La supranationalité européenne a échoué, faisons confiance aux nations »

     

    TRIBUNE - « Le principe d'une autorité supérieure aux États membres de l'Union européenne est désormais rejeté par les peuples du Vieux Continent ». Tel est l'argument des auteurs de cette tribune* pour tenter de refonder l'Europe sur les nations. Ce qui devra être, selon nous, en partenariat avec la Russie. Telle est ici, aussi, notre ligne politique, conforme aux intérêts et à la vocation de la France. Ne nous cachons pas toutefois que même ainsi redéfinie, les divergences d'intérêt, de visées politiques et géostratégiques, sans compter la médiocrité d'une bonne part des dirigeants européens et les réticences désormais installées des peuples, continueront de rendre l'entreprise difficile et aléatoire.  LFAR 

     

    Nous avons connu l'Europe balbutiante, puis l'Europe triomphante, le temps est maintenant venu de l'Europe affaissée que même les coups de boutoir d'un Trump ne réveillent pas. À ces phases d'une « construction » dont le ciment est aujourd'hui irrévocablement fissuré ont correspondu de la part des peuples d'abord l'indifférence, puis la résignation (« c'est l'Europe »), enfin le rejet. Une seule certitude aujourd'hui : l'Europe ne va plus de soi. Trente années de dérégulation sur le marché et de mise sous contrôle des politiques nationales ont rendu ce constat aveuglant.

    Le plus préoccupant dans l'affaire est l'incapacité de la classe politique dans son ensemble à répondre à cette nouvelle « crise de la conscience européenne ». Les principaux partis de gouvernement se taisent ; ils ont enfin compris que l'invocation à « l'Europe mieux expliquée », à « l'Europe des projets », à l'Europe à laquelle « il faut redonner du sens », tout cela est dépassé. Mais ils n'osent franchir le pas vers une vision nouvelle.

    En face d'eux, les casseurs d'Europe prédisent un avenir de tumulte : dénonciations désordonnées et improductives, confondant dans un même opprobre le tout marché et l'immigration incontrôlée, chez le Front national. Insoumission fondée sur la révolte des peuples chez Jean-Luc Mélenchon comme si la seule désobéissance aux règles et directives les plus choquantes tenait lieu en soi d'horizon politique.

    Dans un appel lancé il y a quelques mois à la suite du Brexit, nous avions appelé à la réunion d'une conférence sur le modèle de la Conférence de Messine en 1955. Nous rappelions ce simple fait que, à la faveur de la crise, les peuples se réveillent d'une longue duperie politique. Nous disions que l'Europe ne suit pas un rêve de puissance politique et d'indépendance stratégique. Depuis ses débuts, elle nourrit à l'endroit des peuples une méfiance hautaine et fait de la Commission son auxiliaire technocratique, son agent réfrigérant des passions démocratiques. Aujourd'hui, six décennies plus tard, le vice contractuel entre les peuples d'Europe et les institutions apparaît dans sa vérité crue. Il faut donc revoir de fond en comble le contrat. Il faut le faire en gardant à l'esprit le triple objectif que dessine en creux le rejet populaire : une Europe démocratique, prospère, indépendante.

    Union nouvelle

    Comment y parvenir ? Nous appelons aujourd'hui les chefs d'État et de gouvernement élus d'ici à la fin de l'année en France, en Allemagne, en Italie à lancer une invitation aux pays constituant le nouveau cercle fondateur : il serait composé des principaux pays membres en population et en PIB. Il s'agirait de réunir une conférence refondatrice - pourquoi pas à Rome ? - qui poserait le socle de l'Union nouvelle. Son objet serait de redéfinir les principes essentiels fondant les institutions et les compétences de cette Union, principes qui seraient ensuite soumis au vote populaire par référendum - pourquoi pas le même jour ? - dans chaque pays refondateur.

    Cette conférence des refondateurs redéfinirait en profondeur la vocation des principales institutions actuelles de l'Union européenne : un Conseil des chefs d'État et de gouvernement, seule autorité chargée des grandes décisions avec droit de veto de chaque membre, un Parlement composé de délégations de parlementaires de chaque pays, une Commission chargée de la seule exécution des décisions du Conseil et du Parlement, une Cour de justice chargée d'arbitrer non d'imposer. La conférence déciderait aussi des domaines dans lesquels les compétences de l'Union seraient exercées : politique agricole, énergétique, recherche… La question de l'Europe de la défense serait quant à elle subordonnée à la ferme volonté d'une indépendance de l'Europe. À défaut de ce choix commun, devraient être envisagées des alliances partielles au cas par cas.

    À l'issue des référendums approuvant cette refondation, des conventions composées de membres de gouvernements et parlements nationaux déclineraient le traité nouveau, en prévoyant le passage du système ancien avec sa réglementation foisonnante au système nouveau.

    Ne nous résignons pas à laisser la crise de l'Europe faire de celle-ci un continent à la dérive dans un monde où se nouent les grands enjeux de demain. Ne laissons pas la génération qui vient dans un bateau ivre, conduit par des courants venus d'ailleurs. Est-ce trop demander à l'heure où la France va décider pour cinq ans de son destin ? 

    « Depuis ses débuts, l'Union européenne nourrit à l'endroit des peuples une méfiance hautaine et fait de la Commission son auxiliaire technocratique, son agent réfrigérant des passions démocratiques »

     

    * Jean-Pierre Chevènement, Marie-Françoise Bechtel, Éric Conan, Franck Dedieu, Coralie Delaume,Éric Delbecque, Estelle Folest, Jean-Pierre Gérard, Christophe Guilluy, Emmanuel Lévy, Michel Onfray, Jean-Philippe Mallé, Natacha Polony, Jean-Michel Quatrepoint, Claude Revel et Paul Thibaud.

    Article publié dans le Figaro du 24.03.2017

  • La présidentielle, et après ?

     

    par Hilaire de Crémiers

    Les candidats font comme si tout se jouait dans leurs discours. La question est autrement plus difficile.

     

    Mon bureau 3 Lucs.jpgLa France a devant elle encore deux mois de luttes électorales pour la présidentielle, plus de trois pour les législatives. La violence qui se déchaîne n’en est qu’à ses débuts. Celui qui sera élu à la présidentielle sortira d’un champ de bataille si chaotique et si fumeux qu’il lui sera impossible, malgré toutes les prétentions, de rassembler les Français. C’est à ce moment-là qu’il convient de se placer pour mieux évaluer les conséquences de cette élection.

    Ni les ordonnances ni les référendums ne suffiront à régler les problèmes. Le général de Gaulle qui y eut abondamment recours et qui avait pris soin, de plus, dans la Constitution de 1958, de restreindre le domaine de la loi au profit de la décision réglementaire, avait pourtant à sa disposition une majorité parlementaire : il en avait besoin, ne serait-ce que pour les lois de finances.

    Quelle majorité pour quel président ?

    Même si l’élection présidentielle entraîne les élections législatives, il est à prévoir que, dans les circonstances actuelles, l’effet d’entraînement aura une moindre portée. Et pour cause : les Français régleront leurs comptes. Seul le candidat dit de droite et du centre, s’il en est encore un, pourrait se constituer avec quelque assurance une majorité ; et encore serait-elle friable et incertaine, tant elle aurait accumulé de vindictes et de rancœurs.

    Que faire ? Et comment faire ? « Faire » est, d’après le titre de la plaquette de Fillon et les dires de chacun des candidats, leur préoccupation première. Comme si tous admettaient implicitement que l’inertie était la loi propre du régime. Et de fait ! Tous sont donc dans l’urgence et prétendent agir et vite ; à les entendre, les milliards vont valser dans un sens ou dans l’autre avec beaucoup d’énergie ; rien ne leur fait peur.

    Sur leur tribune, dans leur programme, ils décident de tout : du revenu de chacun, de la feuille de paie, des impôts, des assurances et des mutuelles, du travail, de la formation depuis la petite enfance jusqu’à la vieillesse, de la santé, de la vie, de la fin de vie, de la mort, du nombre de fonctionnaires, du licite et de l’illicite, de ce qu’est la République et de ce qu’elle doit assurer à chaque Français. Ils parlent et, dans leur esprit, c’est déjà fait ; tant qu’il s’agit de discours, il est vrai, c’est si facile de faire ! Certes, à pareil compte, il s’en écrira encore des pages et des pages de lois, d’ordonnances, de décrets, de règlements, de circulaires et d’articles de codes !

    Toutefois, les candidats ont beau développer en ce moment avec lyrisme et conviction leur projet ou leur apparence de projet, celui qui gagnera la présidentielle l’emportera dans de telles conditions qu’une fois élu et les élections législatives passées, il risque fort de se heurter très vite à l’impossibilité pratique de gouverner. Comment s’opérera le report des voix au second tour ? Comment voteront les mêmes électeurs aux législatives de juin ? Hamon le sait-il ? Et Macron, le discoureur qui dit n’importe quoi et que Bayrou rallie ? Et Fillon lui-même ? Et Marine Le Pen ? Qui a conscience du problème ?

    Quoi qu’il en soit, le gagnant sera de toute façon mal élu, n’ayant comme seul appui populaire que la minorité du corps électoral qui l’aura choisi au premier tour. Le choix du second tour sera passionnel et s’effectuera fondamentalement par opposition. Le président ainsi désigné ne sera pas en mesure de donner à l’État un prestige suffisant pour lui permettre d’exercer son autorité. Élu par défaut, par hasard, par humeur, par consigne, par refus, par obstruction, quelle politique pourra-t-il mener ?

    La crise de régime

    Le plus terrible est que tout le monde le sait, au moins en son for intérieur. Mais personne ne veut en tirer les conséquences. Chacun poursuivra son jeu, comme si de rien n’était. Le même régime avec les mêmes protagonistes pour continuer sur la même fatale déclivité, sans qu’aucun « volontarisme », pour reprendre leur jargon, puisse améliorer une mécanique institutionnelle détestable en elle-même. Comme sous la IIIe, comme sous la IVe République, et pour finir comment ?

    Car le drame arrive : à l’intérieur, parce que la nation française éclate, parce que les zones dites de non-droit, c’est-à-dire de trafics en tous genres et de salafisme actif se comptent maintenant par centaines et qu’un rien peut déclencher l’explosion, parce que le pays, en raison de politiques idiotes, s’appauvrit de jour en jour, parce que l’État prélève plus de la moitié de la richesse nationale (57 %) sans plus rendre de services équivalents et qu’il est endetté sans mesure et avec des risques considérables, parce que les ménages normaux et les entreprises qui font vivre le pays sont pressurés, parce que l’École n’éduque ni n’instruit plus, parce que l’esprit public est corrompu et que la France n’intéresse plus ni les dirigeants ni les médias. Qui peut prétendre agir dans un tel cadre ? La crise de régime est là, c’est évident ; elle ne fait que commencer.

    Et le drame est d’autant plus inquiétant que le monde alentour change : les billevesées mondialistes se dissipent. L’Amérique pense d’abord à elle, de même l’Angleterre ; les prochaines élections européennes révèleront les mêmes tendances. L’Europe institutionnelle n’existe plus que comme une superstructure insupportable. Elle vient encore de céder avec le CETA aux pressions des multinationales sous couvert de traité avec le Canada. Au prochain sommet européen, la Grèce sera une fois de plus éreintée. L’euro ne sert plus que l’Allemagne qui le quittera quand il ne la servira plus. Les faits s’imposent, les uns après les autres, durement.

    Il ne sert à rien de mépriser les réactions populaires en les qualifiant de « populismes », mot facile de technocrates installés et d’économistes sûrs de leur expertise qui vivent du système. Nicolas Baverez qui décrit par ailleurs parfaitement le mal économique français, déclare a priori que tout protectionnisme est « inintelligent », tout ça pour fustiger le Front national. Il serait aisé de lui répliquer que tout libre-échangisme décrété de manière absolue peut aussi être parfaitement absurde, quand tous les pays du monde, obéissant à la plus élémentaire règle de survie, cherchent évidemment à protéger leur peuple, leur économie, leur société. Pourquoi la France serait-elle le seul pays au monde à devoir se sacrifier au dogme du libre-échange ?

    Et, plus simplement, le libre-échange est-il un dogme ? Pourquoi ces vaines querelles entre Français, aimant la France, voulant sincèrement le bien commun, sur cette question du protectionnisme et du libéralisme, entendu au sens économique du terme. Colbertisme ou libéralisme à la Say ou à la Bastiat ? C’est une vieille dispute. Elle a son intérêt.

    L’État national n’a pas à trancher ; il fait du Colbert quand c’est nécessaire ; et autant que nécessaire ; la France s’en est bien portée. Et, s’il le faut, il ouvre son commerce et son économie quand il y voit un moyen de progresser, un avantage à se procurer. Bref, il n’est pas idéologue. Il n’est pas prisonnier d’un système ; il ne durcit pas ses positions de principe comme le fait automatiquement tout parti qui simplifie et dialectise. L’État doit être au-dessus ; il transcende. La France ne s’en sortira que quand le chef de l’État sera au-dessus des partis, transcendera tous les clivages pour incarner la France.

    C’est de souveraineté dont la France a besoin et non de partis. Elle aspire à ce pouvoir « régalien » qui lui fait défaut : « La souveraineté, disait Jean Bodin, est le pouvoir de commander et de contraindre sans être commandé ni contraint ». Telle est la première des libertés politiques.  

    Politique magazine mars 2017 -  Consulter ... S'abonner ...

  • Alain de Benoist : Emmanuel Macron - tout le contraire d’un populiste !

     

    Alain de Benoist

    En peu de mots, quelques phrases, une brève analyse, Alain de Benoist dit au fil de l'entretien qui suit, [Boulevard Voltaire, 23.02] ce qu'il convient de penser d'Emmanuel Macron, du moins selon lui comme selon nous. Chacun sait que nous avons ou avons eu avec ce brillant intellectuel, de fort anciens débats et certains points de divergence. En tout cas, face à l'imminence de dangers très évidents et très certains, pour la France, comme, en général, pour la civilisation européenne, nous partageons les mêmes points de vue sur un certain nombre de sujets essentiels. Ces convergences méritent, nous semble-t-il, d'être signalées et utilisées.  Lafautearousseau 

     

    Benoist2.jpgEmmanuel Macron comme Donald Trump : le phénomène est plus intéressant que le personnage lui-même. Comment expliquer l’actuel phénomène Macron, qui se veut candidat hors système, alors qu’il est justement un pur produit du système ?

    On peut facilement ironiser sur le personnage. Le petit Mickey travesti en Rastignac, la petite chose qui veut se faire aussi grosse qu’un président, le Micron transformé en Maqueron, le Ken du couple Ken et Barbie, le télévangéliste christique débitant à chacun les niaiseries qu’il veut entendre. Mais tout cela ne cerne qu’imparfaitement le phénomène. Ce qui frappe d’abord, c’est qu’Emmanuel Macron est le premier candidat postmoderne que l’on ait jamais vu se présenter à l’élection présidentielle. Les arguments raisonnés, les promesses lyriques, les démonstrations destinées aux électeurs, tout cela faisait encore partie de la modernité. Avec la postmodernité, on est dans l’affect à l’état pur, dans l’émotion, l’amour, l’extase. Le sentiment submerge tout, comme dans le discours des gourous.

    Certains reprochent à Macron de n’avoir pas de programme et de multiplier les déclarations contradictoires. Mais on perd son temps à s’indigner ou à vouloir lui répondre. En régime postmoderne, les contradictions n’ont aucune importance, et ce n’est pas avec des programmes que l’on conquiert l’opinion. C’est avec des postures et des incantations. Ce ne sont pas les mots qui comptent, mais le métalangage, pas le réel mais le plus-que-réel, pas le textuel mais l’hypertextuel. En recourant à des stratégies narratives, à des mécanismes persuasifs fondés sur ce que lui indiquent les algorithmes, Macron ne cherche à convaincre que d’une chose : qu’il faut communier avec lui, fusionner avec lui, qu’il faut l’aimer autant qu’il s’aime lui-même (« Parce que je veux être Président, je vous ai compris et je vous aime ! »). Il est plein de vide, mais ce vide le remplit mieux que tout autre contenu. Une bulle, certes, mais qui continue à enfler.

    Un mutant politique, un phénomène typiquement postmoderne. 

    Dans L’Obs, le philosophe Michel Onfray – qui faisait récemment la une de votre revue, Éléments – assure qu’Emmanuel Macron « est en réalité l’autre nom de l’ubérisation de la société ». Vous confirmez ?

    Bien sûr. Au-delà des banalités et des platitudes qu’il accumule avec un aplomb que rien ne vient entamer, Macron se situe dans une perspective bien précise qu’on peut résumer de la façon suivante : la mondialisation heureuse, l’ubérisation de la société et la précarité pour tous. De ce point de vue, Macron est un libéral au sens complet du terme : libéral en économie, libéral en matière « sociétale », libéral en tout. C’est pourquoi il séduit à la fois la gauche « branchée », les économistes hors-sol et les centristes fascinés par la Silicon Valley, Jacques Attali et Bernard Kouchner, Alain Minc et Corinne Lepage, Renaud Dutreil et Pierre Bergé. Nathalie Kosciusko-Morizet ne déparerait pas dans ce paysage !

    Macron se dit au-delà de la droite et de la gauche. Vous venez vous-même de publier un livre intitulé Le Moment populiste – Droite-gauche, c’est fini ! (Pierre-Guillaume de Roux). Ce positionnement apporte de l’eau à votre moulin ? 

    La grande caractéristique du populisme est de substituer au clivage horizontal droite-gauche un clivage vertical entre le peuple et les élites (« ceux d’en haut » contre « ceux d’en bas »). Mais l’effacement du clivage droite-gauche ne se constate pas seulement à la base. Par réaction, il se retrouve aussi dans la classe dominante, avec l’idée d’une « union nationale » destinée à faire barrage au populisme et à neutraliser les « récalcitrants » des deux bords. Il y a, là, une certaine logique : en même temps qu’il coalise à la base un électorat venu de la gauche et un électorat venu de la droite, le populisme suscite à la tête un regroupement de factions hier encore antagonistes, mais qui n’ont pas de mal aujourd’hui à réaliser que rien ne les sépare vraiment.

    Cette nouvelle stratégie était déjà présente dans l’idée de « troisième voie » théorisée par Anthony Giddens à l’époque de Tony Blair, dont l’objectif avoué était de contribuer au « renouveau » de la social-démocratie dans le sens d’une fusion assumée avec la logique libérale. C’est elle que l’on retrouve en France chez Emmanuel Macron, véritable héritier du blairisme, quand il assure que « le vrai clivage dans notre pays […] est entre progressistes et conservateurs », ou chez le libéral Guy Sorman, pour qui « le récent référendum britannique sur la sortie de l’Union européenne n’a pas opposé la droite conservatrice à la gauche travailliste, mais les partisans de l’ouverture à ceux de la fermeture ». La « fermeture » étant censée désigner le « tribalisme » et le « repli sur soi », il faut comprendre que l’« ouverture » signifie l’adhésion à tout ce qui transcende les frontières, à commencer par les marchés financiers. La position de Macron représente donc le symétrique inverse du populisme. Elle cherche à unifier les élites mondialisées au-delà des étiquettes, tout comme les populistes essaient d’unifier le peuple.

    Personne ne semble réaliser que, dans cette optique, un second tour de l’élection présidentielle opposant Marine Le Pen et Emmanuel Macron, où ne serait donc présent aucun représentant des deux grands partis de gouvernement qui ont en alternance gouverné la France pendant trente ans, représenterait un véritable tournant historique. 

    Entretien réalisé par Nicolas Gauthier

    Intellectuel, philosophe et politologue 

    Revue Eléments

  • Au-delà de l'élection présidentielle : les lendemains sans joie.

     

    Par Jean-Philippe Chauvin

     

    1345578492.2.jpgL'élection présidentielle a montré, une fois de plus, la grande division des Français : « la France écartelée », titrait Politique Magazine il y a quelques semaines, et ce titre résume tout, en définitive, d'une situation politique qui n'est jamais rien d'autre que la conséquence d'un système électoral mais plus encore, d'un régime qui livre la « première place », la magistrature suprême de l’État, aux jeux électoraux et de clientèles. Ainsi, à chaque soirée électorale, l'on assiste aux mêmes scènes, l'allégresse des uns nourrissant le désespoir des autres, voire la colère. Hier, les libéraux de Droite se trouvaient dans la pire des situations, et il leur fallut boire un breuvage bien amer, avant que la coupe de ciguë du « ralliement » ne vienne achever leurs dernières espérances d'une cohabitation qui, pourtant (si elle a lieu, ce que rien ne laisse présager en ce moment), aggravera plus encore l'affaiblissement d'un État déjà bien amoindri dans son autorité par quelques décennies de renoncement et d'indécision. Mais les antilibéraux de Gauche n'étaient guère à la fête non plus, ayant cru en une élection dont ils condamnaient pourtant le système et la finalité mis en place par le fondateur de la Cinquième République, et se trouvant réduits désormais à ne devoir plus être considérés que comme une force d'appoint pour un candidat qui représente l'exact inverse de ce pour quoi ils se battent depuis tant d'années... On peut comprendre que ce rôle écrit d'avance et imposé par une oligarchie plus européenne que spécifiquement française ne leur convienne pas et qu'ils rechignent, à la suite de leur candidat, à se rallier au « candidat de l'Europe » comme le nomment, pour mieux le louer et le vendre à l'électorat, les grands médias du pays et de l'Occident, de New-York à Bruxelles, de Berlin à Francfort. 

    Cette élection, quoiqu'il arrive le 7 mai et lors des législatives suivantes, fera plus de mécontents que d'heureux, et la « démocratie des satisfaits » entraînera plus de frustrations et de colères encore qu'auparavant : les réactions au soir du vote du 23 avril le démontrent à l'envi, en particulier si l'on prend le temps d'écouter la parole des cafetiers et de leurs clients, travailleurs du matin, commis voyageurs ou retraités, celle de ce « pays réel » dont certains se moquent ou, même, nient l'existence... 

    L'élu du 7 mai prochain, quel qu'il soit, ne connaîtra sans doute pas d'état de grâce, et c'est bien l'instabilité et la colère permanente qui risquent de dominer le prochain quinquennat, avec une Union européenne qui, déjà, réclame des réformes « adaptées à l'intégration européenne » (selon les termes des membres de la Commission européenne et de la BCE) encore plus libérales, toujours au nom de la réduction des déficits, de cette immense dette publique dont notre pays ne sait comment se débarrasser, faute d'une stratégie économique et sociale de long terme. « L'Europe intrusive » ne pense désormais plus que les pays qui la composent, dont de vieilles nations historiques comme la France, puissent s'émanciper, et elle insiste, d'ailleurs, pour que cela ne soit plus possible, y compris à rebours de l'opinion des peuples et de la simple liberté des États pourtant nécessaire à toute harmonie politique et géopolitique. Or, cette forme de suzeraineté européenne, qui va à l'encontre des souverainetés, qu'elles soient dites nationales ou populaires, n'est pas satisfaisante ni saine, et elle est grosse de conflits, sociaux comme politiques, qui pourraient bien même remettre en cause l'Union européenne, ses pratiques comme ses formes, voire sa « légitimité » (mais existe-t-elle vraiment ?) et son existence. « Tout empire périra », nous rappelle l'histoire, et cette construction qui se fait (ou se veut) impériale (M. Dominique Strauss-Kahn parlait, en 2005, de « l'empire européen ») risque bien de connaître le sort de ses prédécesseurs, de l'empire romain au COMECON, cette « autre construction européenne » qui a disparu en même temps que l'Union soviétique... 

    incident1-1.jpgJe ne me satisferai pas du résultat du 7 mai, et je ne peux être satisfait de cette République qui, aujourd'hui comme depuis si longtemps, sacrifie les intérêts de notre pays et de ses citoyens pour des chimères et des causes qui ne sont pas nôtres ni, même, proprement européennes au sens politique du terme. L'alternance qui nous a été tant vantée ces dernières années n'aura pas lieu mais sans doute aussi n'était-elle pas l'alternative à cette politique qui ne fonctionne plus depuis des décennies... 

    Il faudra bien, un jour, repenser la politique et préparer une alternative qui ne soit pas le simple négatif de ce qui est aujourd'hui : en ce sens aussi, la Monarchie active pour laquelle je milite me semble la seule alternative crédible et efficace, pour « le moins mauvais des régimes », alternative royale à laquelle je travaille avec d'autant plus d'ardeur qu'elle me paraît nécessaire, mais aussi urgente...

    Le blog de Jean-Philippe Chauvin

  • Eté 2017 : Les souffrances du jeune Macron

     

    En deux mots.jpgAprès sa fulgurante conquête du pouvoir, balayant les caciques et les candidats du Système, les vieilles structures partisanes, ce dont personne ne s'est plaint et que nul ne regrette, en tout cas pas nous, voici déjà pour Emmanuel Macron le temps de la défiance et du déclin.

    Nul ne peut se hasarder à dire s'ils sont ou non irréversibles, sauf l'expérience des derniers mandats, où malgré d'éphémères rebonds, ils furent tels. Impitoyablement.

    Ainsi, dans notre République, Jupiter est-il voué à descendre assez vite de l'Olympe et c'est ce qui est arrivé à Macron, et été.

    Cent jours auront suffi - le temps qui fut accordé à Napoléon pour aller de Golfe-Juan à Waterloo, qui fit perdre à la France sa position de 1ère puissance européenne - pour que tombe via les sondages le verdict des Français : 60% de mécontents. Dont 20% de très mécontents. 24 points se sont vite envolés en juillet et août. C'est le sujet omniprésent de cette rentrée. Et c'est aussi, en quelque manière, la vengeance des médias, qui avaient tant fait pour son élection, et que Macron voulut, à juste titre, remettre à leur place, aussitôt qu'il l'eût obtenue.

    On a qualifié cette élection de « triomphale ». On sait bien, pourtant, qu'elle ne l'a pas été. D'abord par le trop petit nombre de voix obtenues au premier tour, puis au second, où l'abstention, comme elle le sera aux Législatives, fut considérable. Parce que, d'autre part, le vote Macron, fut, comme pour ses prédécesseurs, sans véritable adhésion. Adhésion à quoi, d'ailleurs ? Pour la plupart des gens, y compris parmi ses pairs, Macron était d'abord une énigme ; son programme était inexistant ou indéchiffrable ; sa personnalité peu connue et, de toute façon, étrange. Il n'était - il n'est toujours - pas évident que la « pensée complexe » ni le fameux « en même temps » soient à la portée, ou du goût, de la plupart des Français. Il y eut surtout, à vrai dire, une curiosité bienveillante pour ce jeune-homme dynamique et charismatique, ou même christique dans ses moments les plus intenses d'exaltation et de romantisme et qui, par surcroît, promettait un « dégagisme » des plus sympathiques. Dans le fond, pourtant, comme ses prédécesseurs [Chirac, Sarkozy, Hollande], Emmanuel Macron a d'abord été élu « contre » : contre les « extrêmes » et contre le Système, bien que, selon toute évidence, il en fût, par excellence une émanation.

    Si peu démocrates que nous soyons, du moins au sens français, nous sommes d'avis qu'on ne gouverne pas bien ni très longtemps un grand peuple comme le peuple français, sans consentement ni adhésion.

    Les deux manquent depuis longtemps aux Chefs de l'Etat successifs de la Vème République. Si monarchique que soit la mécanique des actuelles Institutions et même si elles permettent au Chef de l'Etat de se maintenir contre vents et marées le temps de son mandat et de gouverner tant bien que mal, le manque de consentement et d'adhésion à leur personne comme à leur politique, ne leur permet aucune action, aucune réforme, d'envergure.

    Ce vice institutionnel profond, ce manque d'adhésion au Régime, qu'il avait perçu et exprimé du temps qu'il était ministre, comment Emmanuel Macron y réagira-t-il, y parera-t-il, maintenant que les vents lui sont contraires ?

    Ce peut être d'abord comme par une sorte de colère, de réprobation à l'endroit des Français, ainsi qu'il les a exprimées l'autre jour à Bucarest, pestant contre ce pays qui est incorrigiblement « inréformable », ces Français qui « détestent les réformes ». C'est à dire, en l'occurrence, malencontreusement, sa politique.

    Les biographes d'Emmanuel Macron le présentent volontiers comme cet « enfant gâté », selon l'appréciation d'Attali, à qui, depuis l'enfance, rien n’est refusé, tout réussit, qui s'est habitué de longue date à l'admiration de son entourage - famille, professeurs, condisciples - à ce que rien ne résiste à son charisme, rien à sa puissance de travail et de séduction, à sa faculté de convaincre. Par intelligence et empathie. 

    Mais le peuple français est autre chose que le cercle de famille, le petit monde des grandes écoles, le cercle des poètes disparus, autre chose que les « vieux » cultivés, influents ou très fortunés qu'il aime et, selon ses amis, qu'il excelle à « draguer », tels, chacun en son temps, Michel Rocard, Jacques Attali, David de Rothschild, Paul Ricoeur, Alain Minc et quelques autres, « parrains et grands frères ».

    Mais le Kairos, qu'il aime invoquer, dont il se croit bénéficiaire, ce temps favorable, ce temps de Dieu, ce temps de « la vie opportune » selon Verlaine, qui autorise tous les espoirs et garantit le succès des entreprises les plus hardies, semble en cette fin du mois d'août avoir plus ou moins abandonné notre Rastignac un peu illuminé. Pompidou disait de De Gaulle à Peyrefitte : « Vous savez, le Général est spécial ». Et c'était en un sens fort. Mais, à maints égards - sa vie singulière, sa psychologie souvent inquiétante...- Emmanuel Macron ne l'est pas moins.

    Comment surmontera-t-il l'épreuve politique et personnelle de l'impopularité que tous les Hollande, tous les Juppé, tous les Attali du microcosme se hâtent déjà d'exploiter.

    Alors Macron éprouvera peut-être combien il avait eu raison, du temps où il était ministre, de méditer sur l'incomplétude de notre démocratie, de constater que ce qu'il manque à la France c'est un roi et, à cet égard, de déplorer le grand vide de l'Elysée, qu'il n'aura pas comblé. Peut-être s’apercevra-t-il alors que l’élection ne confère pas la Royauté.

    Fini le Kairos, le temps favorable, le temps de Dieu. En cette fin d'été, pour Emmanuel Macron voici revenir Chronos qui dévore les heures et les jours, l'Histoire et les hommes.  

    Retrouvez l'ensemble de ces chroniques en cliquant sur le lien suivant ... :

    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Idées & Société • Alain de Benoist : Bataille des idées ? La gauche a perdu, mais la droite n’a pas gagné !

    Manuel Valls déclare que « la gauche a perdu la bataille des idées » 

     

    Publié le 23 juillet 2017 - Actualisé le 13 août 2017 

    Par Alain de Benoist

    Cet entretien donné à Boulevard Voltaire [22.07] dit avec justesse, lucidité et pertinence ce qu'il faut savoir de la situation des idées en France, à l'heure actuelle. Nous partageons cette analyse qui met en lumière a contrario le travail restant à accomplir pour qu'il y ait vraiment bataille des idées et qu'elle conduise à une réelle rupture avec la doxa dominante à droite comme à gauche. La première Action française nommait cela contre-encyclopédie. Peut-être devrions-nous parler aujourd'hui d'une anti-doxa.  LFAR   

     

    3650118671.7.pngManuel Valls déclare que « la gauche a perdu la bataille des idées ». C’est une bonne nouvelle ?

    Quelle bataille ? Il est vrai que la gauche n’a plus rien à dire, mais la bataille des idées dont parle Manuel Valls n’a jamais eu lieu. Non parce que cette gauche devenue muette reste largement hégémonique dans les médias, et qu’elle n’apprécie pas qu’on cherche à la contredire, mais parce que la droite n’avait ni le désir, ni la volonté, ni les moyens de participer à une bataille de ce genre. La droite n’avait tout simplement rien à dire – ou peu s’en faut. Le domaine des idées n’obéit pas au principe des vases communicants. Vous avez vous-même cité François Huguenin : « La droite a refusé le combat des idées car elle n’en a plus. » C’est ce que Pierre-André Taguieff remarquait lui aussi récemment : « La gauche a perdu la bataille des idées, mais la droite ne l’a pas gagnée. »

    On pourrait, ici, faire un parallèle avec la fin du système soviétique. L’URSS ne s’est pas écroulée sous les coups de boutoir du « monde libre » mais sous l’effet de ses propres contradictions internes. Si la gauche n’a plus rien à dire, si elle a perdu son identité en désertant le combat culturel, ce n’est pas que la droite a réfuté ses idées, c’est que ses idées ont épuisé le cycle de leurs virtualités possibles, et surtout qu’elle a délibérément abandonné le socle idéologique qui faisait sa force, et nourrissait son imaginaire, en se ralliant plus ou moins honteusement au libéralisme économique et au système du marché.

    Depuis la Manif pour tous, il y a quand même une indéniable effervescence intellectuelle à droite. Épiphénomène ou lame de fond ?

    Il y a, en effet, quelques ébranlements ici ou là, mais on est loin du compte. Où sont les Taine, les Tocqueville et les Renan du XXIsiècle ? La droite n’aime déjà pas beaucoup les intellectuels, ces coupeurs de cheveux en quatre qui ont la faiblesse de croire que les révolutions culturelles ont des conséquences plus durables que les révolutions politiques. Les partis politiques, eux, pensent que les idées divisent et qu’entretenir le flou est la meilleure manière de rassembler. La droite d’aujourd’hui est idéologiquement déstructurée. Dans le passé, elle s’est laissée gagner par les idées de ses adversaires sans les reconnaître pour ce qu’elles étaient. Elle n’a jamais conçu de stratégie culturelle, car elle ne sait même pas ce que cela veut dire. Elle a cru qu’elle deviendrait « respectable » en multipliant les concessions. Elle cède aujourd’hui plus que jamais aux modes idéologiques qui ont historiquement affaibli toutes ses défenses immunitaires, à commencer par l’universalisme philosophique, l’idéologie des droits de l’homme et l’idéologie du progrès. 

    La recomposition politique à laquelle on assiste actuellement annonce-t-elle aussi une recomposition idéologique ?

    Ce serait une excellente nouvelle, à condition qu’on puisse y croire, mais je doute que la scène politique soit propice à une refondation idéologique. Par nature, elle entretient plutôt la confusion. Il paraîtra sans doute excessif à beaucoup de dire que, lorsqu’on a telle ou telle position politique, on doit savoir aussi comment interpréter les plus récents acquis de la physique théorique ou de la biologique moléculaire. Et pourtant, il n’y a pas de conception du monde qui n’englobe pas tous les domaines de connaissance et de pensée. Mais sans aller si loin, on pourrait au moins exiger qu’en matière anthropologique, on ait un minimum de cohérence. Quelle idée se fait-on de l’homme ? Une idée philosophiquement classique ou une idée idéologiquement moderne ? Celle d’un être politique et social par nature ou celle d’un individu porteur de droits qui ne serait sur terre que pour maximiser son meilleur intérêt ? La société s’explique-t-elle par la sociabilité naturelle de notre espèce ou n’est-elle qu’un agrégat d’atomes individuels régi par le contrat juridique et l’échange marchand ?

    L’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron, qui symbolise la réunification du libéralisme sociétal de gauche et du libéralisme économique de droite, pourrait en principe favoriser une clarification en faisant comprendre une fois pour toutes que le libéralisme est intrinsèquement « progressiste » et non pas conservateur, pour reprendre un mot qui revient à la mode. C’est ce qu’explique très bien Guillaume Bernard : « La combinaison du libéralisme et du conservatisme peut, de prime abord, apparaître séduisante : le libéralisme pour l’économie, le conservatisme pour la société. Mais c’est méconnaître la doctrine libérale, qui s’appuie sur l’individualisme et le subjectivisme. C’est en soi et par soi que chacun détermine son bien. Il n’existe pas de valeur objective, mais uniquement des consensus issus de la rencontre de volontés. Le libéralisme porte en lui la destruction des traditions sociales, alors qu’il n’est nullement nécessaire de s’y adonner pour combattre la spoliation fiscale des familles et des entreprises. » C’est ce qu’il faudrait comprendre si l’on veut gagner la « bataille des idées ». Les Républicains, eux, se veulent les représentants « de la droite et du centre ». Encore un oxymore !  

    Intellectuel, philosophe et politologue

     
     
    Entretien réalisé par Nicolas Gauthier
  • Du dégagisme macronien à la Monarchie royale ?

     

    Par Jean-Philippe Chauvin

     

    1345578492.5.jpgA la fin des années 1980, lors d'une campagne cantonale à laquelle la Fédération Royaliste de Bretagne participait par la présentation de trois candidats (dont moi-même en Ille-et-Vilaine), nous placardions une affiche sur laquelle était dit, en lettres capitales : « Pourquoi élisez-vous toujours les mêmes ? ».

    Trente ans après, il semble que les électeurs nous aient soudain pris au mot en exécutant, électoralement parlant, nombre de notables des anciens grands partis : les Républicains, donnés faciles vainqueurs durant les années précédant 2017 et jusqu'aux premiers jours du printemps, sont déroutés tandis que les Socialistes, qui avaient une très large majorité dans la Chambre issue de 2012, semblent condamnés à disparaître, au moins pour un temps, à la ressemblance du PASOK grec dans les années 2010... 

    Ainsi, le mouvement de « dégagisme », annoncé en ses discours par M. Mélenchon, bat son plein mais pas forcément au profit de ceux qui l'espéraient ou l'avaient théorisé : le Front National et la France Insoumise eux aussi souffrent de ce grand courant d'air qui ressemble désormais à une véritable tempête et Éole a pris le visage de M. Macron, nouveau « maître des horloges », au moins pour un temps... Bien sûr, l'abstention est forte et dépasse le nombre d'électeurs déplacés, mais que pèse-t-elle ? Cela fait des années qu'elle prospère, en particulier aux élections européennes, et cela n'a jamais rien changé, ni même influé sur les décisions prises au Parlement européen : dans un système de démocratie représentative, elle « n'existe pas », politiquement parlant, puisqu'elle est la « non-participation », ou le « retrait » (volontaire ou distrait) de la scène politique. Il n'est pas dit que, dans une Monarchie active, elle ne soit pas, d'une manière ou d'une autre, prise en compte, par exemple par un certain nombre de sièges vides dans l'assemblée concernée par le vote du moment ou par une tribune offerte, dans le cadre des débats parlementaires, à des acteurs minoritaires ou marginaux de la vie politique : il n'est pas interdit de faire preuve d'imagination en politique, et la Monarchie pourrait ouvrir de nouvelles voies de réflexion et d'action en ce domaine comme en bien d'autres. Aujourd'hui, en République, l'abstention nourrit le discours de l'opposition sans pour autant la rejoindre ou la légitimer...En somme, c'est un avertissement sans exigence ! 

    La vague macroniste, dont il faudra mesurer l'ampleur véritable au soir du second tour, est surtout révélatrice d'un besoin de renouvellement et de l'élan présidentiel qui ressemble bien à un état de grâce comme, dans le même temps, à une exigence de réussite : c'est aussi le vote pluriel de toutes les espérances, au-delà du grand système partisan qui, jusqu'aux derniers temps, dominait le monde politique et, d'une certaine manière, encageait le « pays réel ». La fin d'un ancien « pays légal » n'est pas pour autant la fin du « pays légal » lui-même, mais sa mutation, et une nouvelle identité de celui-ci, peut-être plus enraciné dans un « pays réel », ici principalement identifié à des classes moyennes et supérieures, mondialisées et connectées, qui ne sont pas forcément tout le « pays réel », mais sa pointe urbaine et progressiste, avec tous les risques que cela comporte pour les autres catégories d'icelui. Pierre Debray, le théoricien royaliste des années 1960-80, y verrait sans doute le triomphe d'une forme avancée de la bureau-technocratie (qu'il dénonçait) alliée au monde de la libre-entreprise, voire du Travail (qu'il comprenait et, pour la dernière catégorie, soutenait). 

    Il y a aussi un autre facteur qui a sans doute contribué au succès de M. Macron et de ses candidats : c'est le besoin de « passer à autre chose », de se rassurer et de retrouver une certaine quiétude (mais n'est-elle pas, aussi, une manière de fuir un réel inquiétant plutôt que de l'affronter et de le surmonter ?) après le temps des attentats et devant les craintes suscitées par une mondialisation dont beaucoup rêvent qu'elle redevienne ce qu'elle apparaissait hier, cette domination de « notre monde » sur ceux des autres ? En somme, la volonté de croire que la croissance reviendrait conforter un mode de vie auquel nos sociétés contemporaines occidentales se sont accoutumées, au risque, d'ailleurs, de perdre toute mesure environnementale et tout esprit de tradition, fut-il « critique » : la « croyssance » (selon la belle perle d'un élève peut-être plus révélatrice que beaucoup de vérités orthographiques) est une sorte d'espérance matérialiste qui trouve, qu'on le regrette ou pas, un vaste écho dans les générations contemporaines et M. Macron l'a bien compris, qui en est issu et s'adresse à elles avec des mots qu'elles comprennent, au moins pour les plus jeunes et les plus aisées. 

    La donne a changé en quelques semaines, et, pour ceux qui pensent la politique concrète, il faut bien en tenir compte, ce qui ne signifie pas se contenter de quelques constats mais réfléchir à partir de ses nouvelles réalités à leurs conséquences et aux moyens de préserver ce qui doit l'être, de critiquer « ce qui nous tue » et de préparer « l'avenir que tout esprit bien-né souhaite à sa patrie » : si les royalistes oublient cette règle simple que Maurras avait qualifié d'empirisme organisateur, ils ne seront rien d'autres que les témoins effarés d'une cathédrale effondrée. Or, la Monarchie, dont M. Macron connaît les avantages et qu'il mime au lieu de la rétablir en ses formes traditionnelles et dynastiques, est plus que jamais nécessaire même si elle apparaît malheureusement trop lointaine au regard de nos contemporains. Nécessaire parce qu'elle enracine profondément la magistrature suprême au lieu de la laisser soumise sans défense aux vents violents des temps et aux aléas de la mondialisation et de l’Économie sauvage, et parce qu'elle permet que la verticalité du Pouvoir d’État n'empêche pas l'existence de pouvoirs horizontaux, du moment comme des communautés naturelles et professionnelles : « Sub rege, rei publicae* » , disait-on au Moyen âge, et la Monarchie réalise ce que la République, par essence centralisatrice, n'autorise pas. 

    Oublier que la Monarchie n'est pas qu’un simple moment de « verticalité » et d'arbitrage mais qu'elle est, d'abord et toujours, « le temps long » de la continuité sans la rigidité, celui de la « verticalité incarnée en une suite familiale », c'est commettre une erreur qui, à terme, pourrait être mortelle pour notre pays et sa pérennité : c'est une erreur qu'il faut dénoncer, et corriger... 

    * Une formule que l'on peut traduire par « Sous le patronage du roi, les libertés publiques, ou les républiques communales, sociales, professionnelles »...

    Le blog de Jean-Philippe Chauvin

  • Denis Tillinac : « Il n’en faut pas beaucoup pour que la France sorte de ses gonds, tant la légitimité du pouvoir est su

    « Des plus nobles aux plus inavouables, les raisons de vouloir tout faire valser sont légion ! »

    Excellent, Denis Tillinac, une fois encore dans Valeurs actuelles. Sa critique ne porte pas sur la Gauche plus que sur la Droite, mais sur l'ensemble. Sur le Système.  Nous ne disons rien d'autre, ici, dans Lafautearousseau, depuis sa création, il y a maintenant huit ans. Les choses ont changé, depuis. Ils sont légion aujourd'hui ceux qui mettent en doute la légitimité d'un tel régime. Comme Houellebecq le fait dire au héros de son dernier roman : « nous n'aurons pas à le regretter ». 

      

    2594939590.jpgLes penseurs libéraux ont souvent ce travers de postuler que les choix politiques sont motivés exclusivement par l’intérêt économique. Pourtant leur maître, Tocqueville, avait prédit qu’à l’ère de la démocratie de masse, l’envie serait un mobile déterminant. La fascination pour la gloire en est un autre. Elle permit à Napoléon de sacrifier impunément des Français par centaines de milliers et ceux qui en réchappaient, plus ou moins éclopés, s’enorgueillissaient d’avoir été de la chair à canon à Austerlitz, à Wagram, à Friedland, à Moscou.

    Le sentiment de l’ennui fut à l’origine des événements de Mai 68 si l’on en croit l’éditorial célèbre de Viansson-Ponté au mois de mars de la même année, dans un pays libre, respecté et prospère. « La France s’ennuie », écrivait-il. L’ennui, la peur, la colère, la honte, la hantise du déclassement, la « fatigue d’être soi » diagnostiquée par le sociologue Ehrenberg, la soif d’aventure peuvent également inciter un peuple à ruer dans les brancards au mépris de ses intérêts. Ou de ce qu’il croit être ses intérêts.

    Par les temps qui courent, un désir politique semble habiter à des degrés divers l’inconscient des Français, et peu à peu gagner leur conscience : l’appel de la catastrophe. Du grand chambardement. Du coup de pied dans la fourmilière. Ce désir, aucun sondage ne le détectera. Il a des précédents historiques. L’événement le plus imprévisible, le fait divers le plus anodin peuvent l’embraser, et gare à l’incendie !

    C’est un désir presque invincible, car enfanté dans les fors intimes par un mélange d’exaspération et d’incrédulité. On ne supporte plus l’état des lieux et on ne croit plus qu’un remède proprement politique soit susceptible de le modifier. À la limite on veut le pire, il aura au moins le mérite de surprendre en rompant la monotonie. De rebattre les cartes, et rabattre les caquets en prime.

    Ici et là, des gens raisonnables et pas forcément miséreux, habitués à voter pour les partis dits de gouvernement — UMP, PS, MoDem —, avouent en privé leur aspiration au désordre. Il en sortira, estiment-ils, quelque chose d’inédit. Quoi ? Ils l’ignorent. Ils s’en fichent : tout ou son contraire plutôt que ce statu quo nauséeux. Brûler les cartouches est un sport qui a partie liée avec la transgression, ça les érotise. Ils en escomptent au minimum le plaisir d’assister en live à la trouille des gouvernants et de leur valetaille.

    Mille raisons peuvent expliquer l’essor du FN dans les urnes et, certes, on ne peut nier une part d’adhésion aux thèses de ce parti. Mais on aurait tort d’occulter cette évidence que la peur du FN, la violence de son rejet par les politiciens, les intellos et les médias nourrissent un désir de FN en phase avec le désir plus profond d’en découdre avec le « système ». Avec des moeurs combinardes maquillées en « démocratie » dans le vase clos de partis démonétisés. Avec un langage politico-mondain dont les mots sont pipés par le cynisme des communicants.

    Quand la charmante Marion Maréchal-Le Pen, du haut de ses 25 printemps, apostrophe sans ménagement le premier ministre à l’Assemblée, une France frondeuse se réjouit à coeur ouvert et ses contours vont très au-delà des sympathisants du FN. Le pauvre Valls incarne moins le PS, le gouvernement, l’autorité publique que l’usure d’une machinerie respectée par personne.

    Quand les crimes des terroristes islamistes font l’objet immédiat d’une récupération partisane aussi grossière, avec l’aval de l’opposition officielle (« esprit du 11 janvier », « Je suis Charlie », etc.) et la rengaine sémantique de socio-culs sur le « vivre-ensemble » le respect n’est plus de mise. Les Français subodorent qu’on les manipule et très logiquement, ils prennent la mouche.

    Je ne prêche pas une sédition à bien des égards proche du nihilisme, j’essaye juste d’interpréter un état d’esprit qui manifestement prend de l’ampleur. Les historiens à venir pèseront la part de responsabilité respective d’une gauche aux abois et d’une droite aux abris.

    L’histoire nous enseigne qu’il n’en faut pas beaucoup pour que la France sorte de ses gonds, tant la légitimité du pouvoir est sujette à caution, et presque naturelle, depuis la Révolution, la quête de l’homme providentiel. Faute d’un Bonaparte ou d’un de Gaulle, elle peut s’offrir au premier démagogue venu. On en est presque là. 

  • Un mathématicien égaré en économie, par François Reloujac *

    599541714.jpg

    Le 13 octobre dernier, l’académie Nobel a attribué le prix d’économie au chercheur français Jean Tirole. Une manifestation de « la France qui gagne » aussitôt saluée par le président de la République et par le Premier ministre. Mais personne ne s’est véritablement interrogé sur la raison qui permet d’affirmer que les travaux de Jean Tirole illustrent la pensée économique française, même si, officiellement, celui-ci a été récompensé pour ses travaux sur « le pouvoir de marché et la régulation ».

    Jean Tirole est un ancien élève de l’école polytechnique. Il est allé mettre en œuvre ses acquis théoriques d’exploitation des statistiques économiques au Massachusetts Institute of Technology, le fameux MIT. C’est là qu’il s’est familiarisé avec la théorie des jeux, un ensemble d’outils qui analyse les situations dans lesquelles l’action optimale pour un agent dépend des anticipations qu’il forme sur la décision d’un autre agent. étant entendu que cet agent peut être aussi bien une personne physique qu’une entreprise.

    S’il n’a pas pris la nationalité américaine – contrairement à un autre prix Nobel d’économie « français », Gérard Debreu – c’est qu’il est revenu en France pour y créer, sur le modèle des universités américaines, la « Toulouse School of Economics » (TSE). Cette dernière est uniquement financée par des grandes entreprises. Les cours y sont dispensés en anglais à des étudiants qui, pour 60 % d’entre eux sont étrangers, par des professeurs dont bien peu sont de nationalité française.

    Rien d’étonnant, donc, dans le fait que cette école soit soutenue par des grandes entreprises ouvertes à l’international et ayant sur leurs marchés respectifs une position de monopole ou de quasi-monopole. La théorie des jeux et les études statistiques pointues qui sont développées à l’école toulousaine leur sont très utiles : elles leur permettent d’améliorer continuellement leur capacité à analyser toutes les combinaisons possibles des réactions de leurs « partenaires » (administration, fournisseurs, consommateurs). Le jeu est d’autant plus « payant » qu’un joueur principal – une entreprise en position de force sur un marché – est mieux « informé » que les autres. C’est pourquoi cette école cherche à tempérer cet avantage que possède le plus fort par un mécanisme dit de « régulation » dont le but avoué est de maintenir une apparence de libre concurrence.

     

    Que récompense le prix Nobel d’économie ?

    Jean Tirole est un grand mathématicien, un excellent professeur et un chercheur consciencieux. Mais sa distinction révèle les limites du prix Nobel qui ne couronne plus des économistes dont les travaux  cherchent à améliorer le système ou le bien commun économique, mais qui distingue désormais uniquement des spécialistes travaillant sur des secteurs particuliers, fussent-ils utiles à tous ou simplement à un petit nombre.

    De fait, pour Jean Tirole comme pour nombre de ses prédécesseurs, l’économie, relevant de la « science », doit toujours l’emporter sur le politique. Il se rattache donc, comme l’a dit le professeur Christian Stoffaes, « à la gauche utopique pré-marxiste et au positivisme » et, comme la plupart des « ingénieurs-économistes », adhère « à l’idéologie du progrès par la science ». C’est pourquoi Jean Tirole a toujours considéré que le « régulateur » économique – en France, l’Autorité de la concurrence – devait être mis à l’abri de toute influence politique. Il a d’ailleurs tiré les conclusions de cette logique pour justifier la création d’une Union bancaire européenne qui ne dépendrait pas des états : « Il ne faut pas, a-t-il dit, que les gouvernements puissent intervenir dans la réglementation prudentielle car les gouvernants ont leurs propres objectifs qui peuvent après entraîner des difficultés importantes pour les banques ».

    Ainsi, depuis plus de vingt ans, le prix Nobel d’économie ne couronne que des spécialistes de micro-économie. D’une part, parce que l’analyse des statistiques individuelles permet de donner une tournure plus scientifique à la recherche que l’étude des statistiques nationales. D’autre part, parce que de telles études ont une apparence plus « démocratique » que les analyses macro-économiques : pour les « démocrates », en effet, l’intérêt général n’est que la somme des intérêts individuels. Si l’on « maximise » le profit de chacun, on « maximisera » le bien-être de tous. Pour le plus grand bonheur des (grandes) entreprises. 

    C’est l’avis de Manuel Valls qui a remis au goût du jour un projet déjà porté par Nicolas Sarkozy mais qui est maintenant revêtu de l’autorité du prix Nobel : la fusion des contrats à durée indéterminée et des contrats à durée déterminée dans un contrat de travail « unique » !

     

    Que penser du contrat de travail unique ? 

    Derrière cette « réforme » se cache en fait la suppression des CDI, accusés de rigidifier le marché du travail en « surprotégeant » ceux qui en bénéficient, et la généralisation du CDD. Elle est bien vue des grandes entreprises multinationales qui y voient le moyen de délocaliser plus facilement leur production vers des pays où les charges sociales sont moins élevées ou de remplacer les travailleurs autochtones par des immigrés moins exigeants, mais elle se heurte, naturellement, à l’hostilité des syndicats de salariés. Avec une telle réforme, on se rapprocherait du système américain. Mais, si le marché du travail américain est plus fluide et moins contraint que le nôtre, cela ne signifie pas obligatoirement que sa fluidité est « la » cause du plein emploi. à l’inverse, les études statistiques relatives à l’activité des multinationales montrent effectivement qu’elles se portent mieux si elles peuvent « presser le citron et jeter la peau ». Autrement dit, remplacer leurs salariés dès qu’ils sont jugés moins performants. On a beau dire que le marché du travail, en France, protège trop l’emploi et pas assez le salarié, ce n’est pas cette mesure qui, à elle seule, changerait la donne en profondeur. Le chômage ne diminuerait pas uniquement du fait d’une telle « réforme ». Il ne diminuera que si les produits fabriqués en France trouvent preneur au prix auquel ils sont obtenus et s’ils correspondent à un besoin réel des consommateurs. Agir uniquement sur la nature juridique des contrats du travail, c’est s’intéresser à un symptôme dans le but de n’avoir pas à affronter les causes du mal. Qu’un mathématicien, égaré dans le monde économique de la grande entreprise se laisse tenter, soit ; qu’un homme politique, responsable du bien commun, lui emboîte le pas, non !   

    Le prix Nobel d’économie 2014 vient donc couronner un Français qui a fait le choix, à un moment crucial de sa carrière, de revenir en France… Mais dont on peut se demander si, même inconsciemment, il n’est pas plus au service des intérêts américains qu’un Français ayant assimilé les acquis intellectuels américains pour les faire servir au rayonnement de la France dans le monde. ♦

     

    Source : Politique magazine

  • Auteurs : Henry Bonnier, « éminence grise » du royalisme international, par Péroncel-Hugoz

    Henry_Bonnier.jpg

    Péroncel-Hugoz consacre ce coup de chapeau - rédigé au Maroc où il réside - à Henry Bonnier, « éminence grise » de la pensée monarchique universelle, prix de l'Académie française pour l'ensemble de son œuvre, qui consacre son trentième livre au Maroc d'hier... Et surtout d'aujourd'hui. Lafautearousseau

     

    Je ne connais Henry Bonnier que par ses livres, nombreux et variés, il est vrai, ou par ceux, idem, qu'il a suscités éditorialement de la part de personnages politico-historiques aussi différents que Mohamed-Réza Chah, Gorbatchev, le comte de Paris, le président turc Ozal et, bien-sûr, le roi Hassan II, avec "Le Défi", ce maître-livre pour tous ceux qui veulent appréhender le Maroc du XXe siècle. Je suis au courant, bien sûr, aussi, du rôle d'« éminence grise » que M. Bonnier JOUE, avec toute la discrétion efficace convenant à ce sobriquet, dans le mouvement, évidemment informel, monarchiste international; dans l'illustration intellectuelle de cette famille politico-spirituelle.


    Certes, le futur Hassan II, en vacances dans le Midi français pendant que son père, le sultan Mohamed ben Youssef, prenait les eaux à Vichy, eut l'occasion de connaître le jeune Henry à Apt (Vaucluse) mais c'est son dévouement désintéressé d'adulte envers l'idée royale qui lui valut, et jusqu'à nos jours, la confiance du Palais chérifien. Bonnier pourrait sans doute reprendre à son compte la fameuse phrase de Lyautey que, du reste, il cite : « J'ai réussi au Maroc parce que je suis monarchiste et que je m'y suis trouvé en pays monarchique. Il y avait le sultan, dont je n'ai jamais cessé de respecter et de soutenir l'autorité. J'étais religieux et le Maroc est un pays religieux.» Sur cette lancée, l'auteur explique très bien pourquoi aucune dynastie, aucun gouvernement ne peut durer, nulle part, sans une part de "sacré", de "mystère", de "silence". Le général de Gaulle pensait exactement la même chose. Sans leur faire l'honneur de les citer nommément, Bonnier vise indirectement cette douzaine de plumes marocaines ou françaises qui, depuis 2000, ont périodiquement lancé des torpilles contre le règne actuel, pratiquant chacune à leur tour un savant et pervers amalgame entre le vrai et le faux, méthode bien connue des systèmes marxistes afin de troubler les esprits mal informés, de désacraliser ce qui doit le rester, de dénigrer le travail accompli.

    Certes, il reste encore beaucoup de bidonvilles en Chérifie, certes la question saharienne n'est pas réglée - mais à côté que de progrès pour une bien meilleure écoute des souhaits populaires, quelle détente du climat politique national, que d'avancées spectaculaires en matière par exemple de communications terrestres ou maritimes, damant le pion sur ces points à la richissime voisine algérienne !... Ses cent séjours au Maroc, sa culture encyclopédique, l'importance qu'il a toujours attachée aux grandes religions révélées, son intimité politico intellectuelle avec des figures marocaines comme Mahjoubi Aherdane ou feu notre confrère Moulay Ahmed Alaoui, ont permis à Henry Bonnier d'accéder à une vision de haut vol, et en même temps détaillée, d'un demi-siècle, à la fois tumultueux et fructueux, d'Histoire du Maroc. Cela donne "Une passion marocaine", essai d'une longueur modérée (257 pages) sans verbiage et sans délayage.

    Chaque mot compte, que ce soit sur Hassan El Dakhil ("L'Entrant"), le premier Alaouite établi au Maroc, sur le ministre déchu Driss Basri (là Bonnier manque un peu de charité), sur l'opposant réhabilité Abraham Serfaty (là Bonnier louange abusivement, selon moi, ce stalinien impénitent...), sur le combat inlassable, loin d'être toujours reconnu, des monarques chérifiens depuis Moulay Youssef jusqu'au Sire actuel, un combat titanesque pour au Maroc marier Authenticité et Efficacité, Modernité et Fidélité. Presque la quadrature du cercle et pourtant aucun de ces princes régnants n'a jeté la cognée, ne s'est laissé décourager par la violence ou la mauvaise foi des attaques, des critiques, même celles venant d'un membre de la lignée alaouite... Bonnier est de ces privilégiés de l'esprit qui ont saisi de longue date que le contraire de "conservateur" n'est pas "progressiste" mais "destructeur" et que c'est "rétrograde" qui s'oppose à "progressiste". Les royautés exemplaires, pérennes, solides de Tokyo à Londres via Rabat, Copenhague ou La Haye ont toujours été des systèmes "conservateurs-progressistes " nimbés de foi sacralisatrice. 

    Oui parfois c'est vrai, Henri Bonnier, ce serviteur universel de la grande idée monarchique, donne parfois l'impression de verser dans la courtisanerie voire le sentimentalisme, mais il se reprend vite... Ce n'était sans doute qu'une ruse pour faire mieux apprécier du lecteur sa philosophie de l'Histoire, sa description des Grandes Nations comme le Japon, l'Angleterre, le Maroc, le Siam, l'Arabie ou l'Espagne qui ont su préserver en elles leur flamme royaliste; c'est ce qui fait leur saveur sans pareille, qu'aucune république ne peut offrir.    

    COUILLARD II.jpg

    En avant-première pour les lecteurs de cette chronique, quelques citations du livre de Bonnier qui ne sortira en librairie que fin janvier. 

    FLORILEGE

    "Pas de civilisation possible sans religion !"

    "Il n'est d'Histoire que de l'âme. Le progrès n'est qu'une technique".

    "Parmi les Etats les plus anciens du monde : Chine, France, Maroc, ce dernier est le seul à ne pas s'être trahi".

    "Grandeur et noblesse faites d'humilité et de servitudes. Ainsi va le rite musulman malékite qui façonne depuis plus de mille ans le cœur et l'âme des Marocains".

    "L'actuel roi du Maroc ne gouverne ni ne préside mais "impulse " les décisions (...). Le jeu est subtil, faisant appel tant au spirituel qu'au temporel".

    "Mohamed VI fait preuve d'une véritable gourmandise envers la lecture. Il dévore plusieurs ouvrages à la fois (...). Essais de stratégie, documents d'actualité, biographies, romans, poésie". 

    - HENRY BONNIER, "Une Passion marocaine", Le Rocher, Monaco et Paris, 2015.

    Le 30ème livre d'un penseur royaliste européen mais connaissant bien la relation fusionnelle entre le Peuple marocain et la Maison alaouite .


    - SOULEIMAN BENCHEIKH, "Le dilemme du Roi", Casa-Express, Rabat et Paris, 2014.

    Essai prometteur d'un jeune journaliste marocain réfléchissant sur la fragile balance entre Tradition et Modernité que doit maintenir quotidiennement la Royauté chérifienne pour la tranquillité du pays. 

    peroncel-hugoz.jpg

    Le360 - Péroncel-Hugoz