Feuilleton : "Qui n 'a pas lutté n'a pas vécu"... : Léon Daudet ! (186)
(retrouvez l'intégralité des textes et documents de ce sujet, sous sa forme de Feuilleton ou bien sous sa forme d'Album)
Douzième partie : De Paris à Paris, en passant par la Belgique !
Aujourd'hui : L'assassinat de Philippe Daudet (I)...
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ndlr : ce sujet a été réalisé à partir d'extraits tirés des dix livres de souvenirs suivants de Léon Daudet : Paris vécu (rive droite), Paris vécu (rive gauche), Député de Paris, Fantômes et vivants, Devant la douleur, Au temps de Judas, l'Entre-deux guerres, Salons et Journaux, La pluie de sang, Vers le Roi...
Le jeune Philippe Daudet - quatorze ans et demi l'année de son assassinat - était un pré-adolescent comme tous les autres pré-adolescents; il était simplement d'une extrême sensibilité, et d'une fragilité nerveuse et psychologique certaine ("...étant atteint d'une maladie nerveuse..." dit Massis), sujet à des angoisses régulières, et habité par un besoin périodique et irrépressible "d'aller voir ailleurs", en clair, de fuguer...
Toutes ses fugues se terminèrent "bien", par un retour chez ses parents, et la ferme décision de ne plus recommencer; jusqu'à la survenue d'une nouvelle pulsion irrépressible...
Parti une fois en Normandie, une autre à Bordeaux, une autre à Marseille, il revenait toujours chez lui, au bout de quelques jours...
Aussi, ce mardi 20 novembre 1923, lorsque Philippe ne rentre pas, le soir, ses parents s'inquiètent-ils, mais pas plus que d'habitude; les jours passent, et l'inquiétude augmente; le samedi 24, un adolescent mourant est transporté à l'Hôpital Lariboisière et, le dimanche 25, "Le Petit Parisien" publie un entrefilet sur le "suicide d'un adolescent" : sa mère, alors, a un pressentiment...
De "Député de Paris", début du Chapitre VI, "La deuxième année du Cabinet Poincaré - L'occupation de la Ruhr - L'assassinat de Plateau et de Philippe Daudet (1923)", pages 148/149 :
"L'année 1923 - la deuxième du cabinet Poincaré - fut celle de l'occupation de la Ruhr, décidée à notre instigation, et qui aurait mis l'Allemagne à genoux, si elle avait été menée à son terme.
Elle fut aussi, concurremment, celle de l'assassinat de notre collaborateur et bien cher ami Marius Plateau, tué dans les bureaux de notre journal, 12, rue de Rome, le 22 janvier 1923, vers deux heures de l'après-midi, par la fille de police Germaine Berton, laquelle, le même jour, avait tenté de tuer Maurras à la messe anniversaire du roi Louis XVI à Saint-Germain-l'Auxerrois.
L'avant-veille, samedi 20 janvier, également dans la matinée, cette indicatrice était venue à mon domicile, 31, rue Saint-Guillaume, pour me tuer.
Elle avait demandé à être reçue, me faisant remettre une lettre où elle me dénonçait un prétendu complot dirigé contre l'Action française.
C'est le truc classique.
Soupçonnant je ne sais quoi, en raison de notes bizarres et comminatoires parues dans "L'Oeuvre" de Téry et "L'Ère Nouvelle" de Dubarry, les jours précédents, j'éconduisis cette émule de la femme Caillaux (1).
Neuf mois plus tard, le samedi 24 novembre 1923, notre petit Philippe, encore un enfant (quatorze ans et demi) était assassiné à son tour par un commissaire de la Sûreté générale, dans un guet-apens organisé chez le marchand de livres obscènes et indicateur de police, officiel et émargeant, Flaoutter, amant de la Berton.
Les deux crimes, étroitement connexes, avaient eu lieu à l'instigation de Lannes, beau-frère de Poincaré et contrôleur à la rue des Saussaies.
Mais nous ne sûmes le fond de l'affaire que par la suite, après une longue enquête et des évènements retentissants..."
(1) Qui avait assassiné Gaston Calmette, directeur du Figaro, à l'instigation de son mari Joseph Caillaux, en mars 1914.