Le système est condamné mais, nonobstant l’Italie, n’explosera pas dans l’immédiat !, par Marc Rousset.
Alors qu’en février, le taux officiel de chômage était de 3,5 % aux États-Unis, 6,65 millions de personnes se sont inscrites du 21 au 28 mars, contre 3,3 millions la semaine précédente, ce qui porte le nombre des nouveaux chômeurs à 10 millions de personnes en deux semaines : du jamais-vu dans l’histoire économique des États-Unis, puisque le record hebdomadaire de 2008 était de seulement 665.000. Il semble que l’on se rapproche des projections les plus pessimistes de la Banque de Saint-Louis, soit très rapidement 47 millions de chômeurs, c’est-à-dire un taux de chômage de 30 % pour une population américaine active d’environ 160 millions de personnes.
Goldman Sachs évalue le taux de chômage à seulement 15 %, d’ici le milieu de l’année. 40 % des Américains sont déjà incapables de couvrir une dépense inattendue de 400 dollars sans emprunter. La Maison-Blanche estime les victimes de la maladie dans une fourchette entre 100.000 et 240.000 morts.
En France, comme a pu dire la virologue Christine Rouzioux, citée dans un article du Monde, « ça ne sert à rien de dire que l’on n’était pas prêt pour une pandémie, on n’était prêt à rien ». Le ministre du Travail Muriel Pénicaud a annoncé, vendredi, après trois semaines de confinement, cinq millions de travailleurs concernés par le chômage partiel.
L’Union européenne se dirige vers un « plan Marshall européen » par le biais du Mécanisme européen de stabilité (MES), doté de 410 milliards d’euros disponibles, un FMI européen qui emprunte l’essentiel de ses ressources avec la garantie des États, ce qui est une forme de mutualisation. Une ligne de crédit de 240 milliards d’euros pourrait être ouverte à certains pays. La Banque européenne d’investissement (BEI) pourrait donner sa garantie pour financer 200 milliards d’euros d’investissements des PME. 100 milliards de la Commission pourraient aider à financer le chômage partiel. Reste à en fixer les conditions, ce qui ne réjouit pas l’Italie. Si l’on additionne les mesures au plan national et les 870 milliards d’euros de rachats de titres par la BCE, cela représente plusieurs milliards d’euros. L’Union européenne et les nations européennes font tapis, comme les États-Unis.
Avec un endettement actuel de 135 % du PIB, le risque de voir Rome faire défaut est dans toutes les têtes. Les « corona bonds » sont refusés à juste titre par l’Allemagne et l’Europe du Nord, sous peine de voir s’enclencher la démagogie de l’endettement irresponsable sans fin, avec la mutualisation des dettes et la faillite de l’Allemagne à la clé. En 2010-2012, le taux italien avait bondi jusqu’à 7 %. Il est actuellement de 1,52 % contre -0,48 % pour le Bund allemand à 10 ans.
Alors que Janet Yellen avait osé dire que regarder diminuer l’encours des titres du QE américain « sera[it] aussi ennuyeux que de regarder de la peinture sécher », l’encours de la Fed augmente à la verticale et atteint déjà 5.500 milliards de dollars ! Il y a pénurie d’or aux États-Unis et en France avec des primes stratosphériques, 1 vendeur pour 99 acheteurs, et certains analystes évoquent un cours de 2.500 euros l’once pour le troisième trimestre 2020.
Il est probable que les Bourses vont s’orienter vers « une deuxième jambe de baisse », une rechute qui pourrait se rapprocher, en France, des 3.000 points, les marchés n’étant pas rassurés. La reprise ne sera pas en V mais en U, s’il n’y a pas d’explosion en L du système, ce qui est probable, tant les moyens investis sont colossaux partout dans le monde. La Chine repart, mais tout comme pour le prix du pétrole, des doutes sont permis, avec une croissance nulle, selon la Banque mondiale, dans le scénario le plus noir. L’effondrement économique est mondial, systémique, Afrique et pays émergents inclus.
Les fondations du système financier se fissurent dangereusement. L’explosion finale, nonobstant l’Italie, ne sera probablement pas pour 2020, mais tous les pays du monde seront, d’ici la fin de l’année, le dos au mur après avoir tout mis sur la table, avec un hyperendettement monstrueux et des banques centrales bourrées de créances irrécouvrables. Si une dépression s’installe en 2021, une explosion générale du Système, avec une montée lente de l’inflation jusqu’à une hyperinflation généralisée et incontrôlable, est alors fort possible, car la marche arrière, après la fuite en avant, comme on le voit actuellement avec la Fed, le Japon et la BCE, ne peut d’ores et déjà plus être enclenchée.