Mobilisation spirituelle (Epidémie), par Gérard Leclerc.
Mgr Dominique Rey a béni la ville de Toulon depuis le Mont Faron
Il n’y a plus aucun doute sur la catastrophe sanitaire que constitue la pandémie du coronavirus. Venue de Chine, elle s’est abattue sur l’Europe, développant chaque jour ses effets sur les populations. Singulièrement en Italie, puis en France. L’insouciance qui a prévalu trop longtemps a fait place à l’inquiétude. Il ne faudrait pas qu’elle se transforme en panique. Aussi l’épreuve que vit notre pays, à l’instar des autres nations, a pris une dimension que les chrétiens partagent dans sa profondeur spirituelle. Celle-ci ne les retranche nullement du reste de la population, même incroyante. Elle est d’abord inhérente à notre condition, ainsi que l’attestent les fondements antiques de notre civilisation et de notre culture.
Le tragique grec nous y renvoie avec une acuité que les modernes ont parfois tenté de dépasser sans y parvenir. Il y a quelque chose dans notre monde qui, depuis les origines, se trouve blessé, et qui ne réclame rien moins qu’une Rédemption.
Une espérance invincible
Depuis que le Verbe est venu habiter parmi nous, ceux qui ont reçu le don de la foi savent que Dieu, nullement indifférent à notre condition, a voulu la partager. Ce qui change totalement les perspectives. Ce n’est pas la fin de la Tragédie, comme le voulait George Steiner, en ce sens que le Vendredi saint n’a pas été éludé par Celui qui a versé des larmes de sang. Mais il est vrai qu’avec le Christ, le malheur absolu avec la mort n’est plus le dernier mot de l’histoire. Ainsi, le combat des chrétiens est marqué de façon indissociable par l’affrontement avec les forces du mal et par l’ouverture à une espérance invincible. On ne saurait oublier non plus que l’exigence de la charité imprègne ce combat de toutes les possibilités à servir le prochain.
Deux images inspirantes
Sans doute cet ethos propre aux disciples du Christ peut-il se déployer au cours des siècles de façon très différente. Un saint Charles Borromée à Milan au XVIe siècle, un François-Xavier de Belsunce à Marseille au XVIIIe siècle ont affronté la peste qui a ravagé leur ville avec les moyens qui ne peuvent plus être exactement les nôtres aujourd’hui. Il n’était pas question alors de confinement et de règles hygiéniques rigoureuses. Mais cela n’empêche pas une mobilisation spirituelle aussi intense. Deux images récentes peuvent nous en suggérer l’idée. Celle de notre pape François marchant seul dans les rues désertées de Rome pour aller prier dans les lieux les plus vénérés des fidèles à cause des secours hier reçus et du courage toujours ranimé. Celle aussi de ce prêtre italien portant seul le Saint-Sacrement dans sa ville pour manifester la présence et la sollicitude divine à ses habitants retranchés chez eux. Au-delà de toutes les polémiques, c’est une unité des cœurs qui s’impose pour réconforter tous et chacun, et donner le témoignage de notre foi et de notre espérance.