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Bioéthique : La France confrontée à une culture de mort (22), par François Schwerer. Annexes (4/6)...

L'étude de notre ami François Schwerer s'est donc achevée ce vendredi dernier, 3 février .

Cet ensemble constitue une véritable somme, aussi bien par son importance que par son intérêt.

Nous en avons commencé la publication le vendredi 10 janvier, et l'avons poursuivie du lundi au vendredi inclus, comme nous l'avons fait, par exemple, pour l'étude de Pierre Debray, Une politique pour l'an 2000.

Pour suivre et retrouver ces textes plus commodément, nous avons regroupé la totalité de cette étude, vu son importance, dans une nouvelle Catégorie : François Schwerer - Bioéthique : culture de mort : vous pourrez donc retrouver donc l'ensemble de cette chronique en cliquant sur le lien suivant :

François Schwerer - Bioéthique : culture de mort...

Nous avons redonné chaque jour le plan de l'étude, afin que le lecteur puisse correctement "situer" sa lecture dans cet ensemble; voici maintenant le plan des Annexes et textes divers, que nous publierons jusqu'à vendredi prochain, inclus, date finale de la publication de cet importante contribution :

Annexe 1 : Les lois de bioéthique.

Annexe 2 : Le projet de loi bioéthique : une horreur peut en cacher une autre.

Annexe 3 : La loi de bioéthique est essentiellement une loi discriminatoire.

Annexe 4 : Bioéthique : on a ouvert la boîte de Pandore...

Annexe 5 : La loi de tous les dangers.

Annexe 6 : Sondage IFOP pour les AFC / Prière de Jean-Paul II /Quelques statistiques / Lettre pastorale de l'évêque de Bayonne.

Schwerer.jpg4. Bioéthique : On a ouvert la boite de Pandore (1)

 

En imposant la discussion du projet de loi de bioéthique dont la mesure la plus emblématique est l’ouverture de la PMA aux couples de femmes et aux femmes seules, le gouvernement a ouvert la boite de Pandore. Et, il l’a fait consciemment, contre l’avis qui ressortait des Etats généraux de la bioéthique et contre ce que dicte la raison, uniquement pour satisfaire quelques espoirs lucratifs (2) qui se cachent derrière des intérêts individuels égoïstes et bruyants ; quelles qu’en soient les conséquences.

 

Une procédure extraordinaire

 

Il est à noter que ce projet de texte ne suit pas une procédure normale et qu’il n’a pas été discuté au sein d’une ou plusieurs des commissions ordinaires de l’Assemblée nationale. Une commission spéciale a été constituée pour ne connaître que de ce seul texte. La commission n’a pas désigné un seul rapporteur pour présenter le projet aux députés mais en a désigné sept, comme pour faire croire qu’il règne un certain consensus pour dire que ce texte va dans le bons sens. Autre anormalité, l’examen en commission a été précédé par l’audition d’une quantité d’« experts ». Cette mise en scène semble n’avoir eu pour seul but que de faire croire que les représentants du peuple avaient décidé d’écouter tout le monde et que le rapport final tiendrait ainsi compte de toutes les sensibilités. Mais, il s’agissait en fait de rejouer le scénario des Etats généraux de la bioéthique : les avis recueillis sont trop divergents pour que l’on puisse s’y référer et il convient donc de revenir au seul texte gouvernemental.

Lors de l’examen du projet proprement dit, les amendements de surenchère se sont succédés à un rythme peu commun. On peut se demander à quoi correspond cette volonté de provocation. S’agit-il de commencer à préparer les esprits aux « avancées » suivantes que l’on cherchera à introduire lors de la prochaine révision de la loi d’ici cinq ans ? S’agit-il, plus simplement de faire apparaître le texte gouvernemental comme modéré et raisonnable ? Le gouvernement n’a pas répondu à toutes les attentes des associations LGBT, dès lors les défenseurs de la famille traditionnelle doivent se montrer apaisés devant la sagesse ( !) du gouvernement.

 

(1) : Cet article, achevé le 18 septembre, c’est-à-dire juste avant que ne commence la discussion de la loi en séance plénière, était destiné à être publié dans le numéro d’octobre 2019 de Politique Magazine (après la discussion en première lecture).

(2) : Dans le numéro de Marianne du 4 au 10 octobre 2019, Géraldine Meignan explique qu’en Espagne, il s’agit d’« un business ultrarentable que se disputent des groupes privés lancés dans une corse débridée à coups de rachats, de fusions et d’acquisitions. Pas plus tard que cet été, l’allemand Nextclinics a mis la main sur deux banques espagnoles de sperme et d’ovocytes à Grenade et à Séville. En 2015, Eugin, un établissement fondé par deux médecins il y a vingt ans, est tombé dans l’escarcelle de NMC Healthcare, un groupe hospitalier d’Abou Dhabi coté à la Bourse de Londres, après avoir été racheté cinq ans plus tôt par le fonds d’investissement espagnol Proa Capital. Mais le géant incontesté en Espagne s’appelle Instituto Valenciano de Infertilidad (IVI) : plus de 20 000 traitements de reproduction assistée au compteur en 2018, 65 cliniques dans 11 pays, jusque dans les Emirats arabes unis, et 210 millions d’euros de chiffre d’affaires ». Les « dons » de gamètes donnent lieu à  des « compensations » financières : « 1 500 dollars pour un don de sperme et de 5 000 à 10 000 dollars, selon les cas et la qualité, pour un don d’ovocytes ».

Dans le même numéro, on apprend aussi que la GPA est nettement plus lucrative : « Aux Etats-Unis, où elle est autorisée dans 45 Etats sur 50, les tarifs dépassent 100 000 € (contre 50 000 environ en Ukraine, par exemple). Les mères porteuses reçoivent en moyenne 30 000 €. Le reste va aux cliniques et aux intermédiaires – des avocats. Les commerciaux de certaines agences haut de gamme peuvent vous conseiller des mères porteuses sans mutuelle, c’est plus rapide. A côté de ce marché haut de gamme, existe le hard discount. Au Nigéria, par exemple, où il n’existe aucune loi, des femmes louent leur ventre pour moins de 5 000 € ».

 

Des amendements provocateurs

 

Celui qui a le plus sonné la charge lors de l’examen du projet de loi en commission en est le rapporteur général, Jean-Louis Touraine. Il a proposé des amendements qu’il savait irrecevables dont on ne présentera ici que quelques-uns des plus symptomatiques, que ce soit en raison de leur portée ou de leur rédaction.

Le premier de ceux-ci visait à remplacer les mots « homme » et « femme » par l’expression « une personne en capacité de porter un enfant » et, dans l’exposé des motifs il était bien spécifié : « cet amendement vise d’ouvrir l’accès aux techniques d’AMP (assistance médicale à la procréation) aux hommes transgenres qui ont obtenu le changement de leur sexe à l’état civil et qui sont en capacité de porter un enfant ». Un autre amendement proposait d’ouvrir le recours à une PMA « post mortem ». L’exposé des motifs, qui ne manque pas de logique, montre en fait combien le texte ouvre sur une série de problèmes impossibles à résoudre humainement : « Maintenir l’interdiction de la procréation post mortem aux couples engagés dans une AMP alors qu’est parallèlement ouverte la possibilité aux femmes seules d’accéder à ces techniques de procréation est proprement contradictoire et injuste. Au décès de l’autre membre du couple devra s’ajouter, si la femme le souhaite, l’obligation d’engager un nouveau parcours avec un tiers donneur alors qu’elle dispose des gamètes de son conjoint décédé ou des embryons in vitro ».

Ce qu’il convient de souligner en plus ici c’est que le terme « possède » utilisé à propos des gamètes et des embryons montre bien que, pour le rapporteur, les gamètes et les embryons ne sont que des « choses » que l’on peut s’approprier et donc que, demain, l’on pourra vendre. Le troisième amendement que l’on peut encore citer est celui qui voulait que « lorsque l’assistance médicale à la procréation implique un couple formé de deux femmes, la réception des ovocytes d’un membre du couple par l’autre membre du couple peut être autorisé ». Une autre rapporteuse, Madame Bertha avait aussi proposé un amendement visant à se prémunir du risque de « déremboursement de tous types d’AMP » puisque la technique n’aurait plus pour but de remédier à une pathologie et de soigner les cas d’infertilité.

Un amendement qui a été refusé aurait pu montrer que le projet de loi va à l’encontre du principe de précaution que Jacques Chirac avait pourtant fait inscrire dans la Constitution. Cet amendement était le suivant : « Une étude de suivi peut être proposée au couple receveur ou à la femme receveuse qui y consent par écrit ». L’exposé des motifs était un aveu de l’ouverture de la boite de Pandore : « Malgré trente ans de recul, la France ne dispose pas de données scientifiques consolidées sur l’assistance médicale à la procréation, le devenir des receveurs, des enfants issus du don ». On ne connaît pas les effets, on le fait quand même et le refus de l’amendement signifie simplement : on ne veut pas connaître les conséquences.

Au total, le seul amendement accepté – après avoir été refusé dans un premier temps – est celui qui autorise le « double don de sperme et d’ovocyte ». Comme l’a expliqué le rapporteur général du texte : le double don s’apparente au don d’embryon. C’est un double don. A partir du moment où l’on accepte le don d’embryon, on doit accepter le double don ». Le  seul résultat concret sera de rendre encore plus difficile pour les enfants ainsi venus au monde, l’accès à la connaissance de leurs origines.

 

Des questions juridiques inextricables

 

Alors que la loi n’est pas encore votée, de nombreuses affaires judiciaires, tant en France qu’à l’étranger, montrent combien cette libéralisation de la PMA est porteuse de difficultés et de souffrances nouvelles. Citons simplement quelques exemples d’actualité.

C’est d’abord la Cour de cassation française qui a eu à trancher l’affaire d’un enfant commandé par un couple d’homosexuels, dont l’un des deux a fourni son sperme, à une mère porteuse. Celle-ci ayant trouvé pour l’enfant un couple prêt à payer plus cher le leur a vendu à la naissance. Six ans après le père biologique qui a découvert qu’il avait été « escroqué » a voulu récupérer son enfant. La Cour de cassation qui, à la suite des tribunaux judiciaires a accepté d’entendre l’affaire, n’a pas voulu lui donner satisfaction au motif qu’il était de l’intérêt de l’enfant de rester dans sa famille d’accueil. En décidant ainsi, la Cour de cassation a donc fait dépendre sa solution, non d’un texte législatif régulièrement adopté ni d’une réalité naturelle, mais d’un principe philosophique fondamental, en soi convenable, mais hautement subjectif (1). Ce faisant elle met à mal l’objectivité même du droit en France. Pouvait-elle faire autrement ?

(1) : En fait, la Convention internationale des droits de l’enfant, ratifiée par la France, affirme que « l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale » (art. 3). Mais les juristes se sont toujours refusé à définir ce qu’il fallait entendre par « droits de l’enfant ».

Si la Cour de cassation s’est ainsi trouvée devant un dilemme insoluble, la Cour européenne des Droits de l’homme (CEDH) va être amenée à se prononcer sur une série d’affaires aberrantes. La première concerne un Française qui attaque le gouvernement car la loi lui interdit de transférer les gamètes de son défunt mari en Espagne où la PMA post mortem est autorisée. Chacun choisit ainsi le droit qu’il veut se voir appliquer. La deuxième est le fait d’une transsexuelle allemande qui attaque le gouvernement de son pays car elle voulait être reconnue à l’état civil comme le « père » de l’enfant conçu avec un don anonyme de sperme : comme le changement de sexe à l’état civil n’est pas subordonné à un changement morphologique, rien ne peut empêcher une mère de se prétendre le père ! Une autre allemande attaque l’Etat car elle ne bénéficie pas d’une « présomption de maternité » de l’enfant porté par sa compagne lesbienne ayant eu recours à une PMA ; au même titre que le conjoint (mâle) d’une femme enceinte bénéficie de la présomption de paternité ! Il est inutile de poursuivre la litanie de ces affaires sordides qui ont toutes en commun d’attaquer les Etats (outre la France et l’Allemagne, sont notamment visées l’Autriche et la Pologne) pour les forcer à modifier leur législation.

Fin septembre 2019, une nouvelle affaire est venue d’Angleterre. Un pompier, qui « avait donné son sperme à deux amies lesbiennes » a été condamné à payer une pension alimentaire aux deux enfants ainsi conçus après la séparation dudit couple. Pour sa défense, il a fait valoir qu’en étant condamné à payer ainsi une telle pension alimentaire, il n’a plus les moyens d’avoir des enfants avec son épouse légitime ! Deux jours plus tard, aux Etats-Unis, un couple de lesbienne demandait des dommages et intérêts à une clinique qui s’était trompée dans le sperme « donné » à l’une d’entre elles qui avait alors accouché d’une petite fille métisse. Mais le site américain Slate qui relate l’affaire a aussitôt traité la mère de « raciste ».

Avec ces nouvelles affaires, on encombre les tribunaux et on surcharge les magistrats. Or ceux-ci sont déjà occupés par les emplois fictifs dont sont accusés les représentants du peuple, les corruptions passives ou actives et prises illégales d’intérêt dont ils sont soupçonnés, les fraudes fiscales auxquelles ils se seraient livrés… Ils vont désormais découvrir de nouveaux problèmes juridiques inextricables, au moment où ils devront aussi traiter les affaires qui résulteront de la loi sur les « fake news ». On se demande s’ils auront encore le temps de juger les assassins, les violeurs et les voleurs, c’est-à-dire de protéger les citoyens. 

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