Pour réintégrer Maurras dans le paysage politique français : réponse à quatre reproches (III/V)
2. Le Nationalisme
Le nationalisme, autre zone d’ombre" ? Être nationaliste, un motif d'opprobre, de rejet moral ? Non, s'il s'agit d'un nationalisme quelconque à travers le monde. Oui - pour la bien-pensance - s'il s'agit du nationalisme français.
Maurras l'avait défini comme "une douloureuse obligation" dont la cause et le contexte sont historiques, bien plus qu’idéologiques : l'humiliante défaite de 1870 et l'affrontement franco-allemand qui ne cessera jamais vraiment entre 1870 et 1945.
"Douloureuse obligation" créée aussi par l'absence de roi, laissant la France aux mains, pour ne pas dire à la merci, d'un régime faible divisé et imprévoyant, qui la plaçait en situation d'infériorité face à l'Allemagne impériale. Plus tard, face à l'Allemagne nazie...
Au cours de chacune des deux avant-guerres, Maurras avait vécu dans l'angoisse de l'impréparation où nous maintenait l'État républicain, laquelle devait rendre la guerre à la fois inévitable et terriblement meurtrière. Avant 1914, il avait eu la vision tragique de ce qui se préparait : "Au bas mot, en termes concrets, 500 000 jeunes français couchés froids et sanglants sur leur terre mal défendue" (dans Kiel et Tanger, 1910)
On sait ce qu'il en fut, qui fut bien pire ; ce furent un million et demi de jeunes français qui périrent.
Entre 1935 et 1939, l'on eut la reproduction du même scénario. La trahison de Blum refusant d'armer la France face au nazisme en même temps qu'il menait une politique étrangère belliciste irresponsable, les agissements du Parti Communiste, aux ordres de Moscou, comme Blum l'était de la IIème Internationale, allaient rendre le futur conflit mondial inévitable.
"Pourquoi faut-il de tels retours ?" écrira alors Maurras. Dans la douleur, nous dit Boutang. On sait qu'il vécut cette période dans la certitude de la guerre et de la guerre perdue. Le "miracle de la Marne" qui avait sauvé la France en 1914, ne se renouvellerait pas...
Tel fut, au-delà du simple patriotisme, le nationalisme maurrassien.
Nationalisme non de conquête ou d'expansion mais de défense d'un pays menacé. Menacé de l'extérieur et de l'intérieur, car le danger allemand n'était pas le seul qui pesât sur la France. Son désarmement mental, social, politique et culturel, ses divisions, étaient à l'œuvre comme elles peuvent l'être encore aujourd'hui pour diverses raisons supplémentaires dont certaines - comme l'invasion migratoire ou le mondialisme - que Maurras n'eut pas à connaître. Elles justifient, elles aussi, la persistance de la "douloureuse obligation" d’un nationalisme français.
(à suivre demain)