Trump veut embraser l’Orient
Par Antoine de Lacoste
Trump ose tout, et c’est à ça qu’on le reconnaît.
Sept pays ont signé en 2015 un accord empêchant l’Iran de poursuivre ses recherches nucléaires, en échange d’une levée des sanctions économiques. Le monde entier, excepté Israël, s’en est réjoui. En Iran, le clan des durs était furieux et Rohani, qui veut ouvrir son pays, en était sorti conforté.
Mais tout cela a été balayé par le Président américain qui a donc annoncé le 8 mai, avec 4 jours d’avance sur la date prévue, que les Etats-Unis se retiraient de l’accord. Israël a bruyamment applaudi, le reste du monde est consterné.
Que va-t-il se passer maintenant ?
L’Iran a réagi avec modération, indiquant qu’elle allait consulter les autres signataires afin de savoir si l’accord tenait toujours ou s’il était caduc. Mais il est certain que la position de Rohani est fragilisée. Coincé entre une partie de la population qui ne supporte plus le régime des mollahs et une autre partie, plus religieuse, qui lui reproche d’avoir fait confiance à l’Amérique, il va connaître des heures difficiles.
Pour la France, l’Angleterre et l’Allemagne, c’est une déconvenue. Jusqu’au bout, les trois puissances se sont relayées pour faire fléchir Trump. En pure perte. Emmanuel Macron connait là son premier échec diplomatique qui est d’autant plus cuisant que ce qu’il croyait être « d’excellentes relations personnelles » avec Trump, ne pesait finalement pas lourd face à la réalité. Les démonstratives embrassades et accolades n’ont servi à rien : c’est comme ça qu’on apprend le métier. Diplomatie et sentiment ne font pas bon ménage et Macron va devoir comprendre que le charme ne sert à rien lorsqu’on parle à la première puissance mondiale.
Mais que veut Trump finalement ?
C’est simple : un changement de régime en Iran. En sortant de l’accord et en annonçant de probables nouvelles sanctions contre l’Etat chiite, Trump espère aggraver la situation économique et susciter l’exaspération de sa population contre le régime. Au-delà du cynisme, vieille marque de fabrique américaine, ce calcul semble bien aléatoire. Rien ne dit que la population se soulèvera et, si c’était le cas, les dizaines de milliers de gardiens de la révolution ne se laisseront pas faire. Cela risque de tourner à un bain de sang stérile, permettant aux durs de renforcer leur pouvoir.
Les Américains ont l’habitude d’embraser l’Orient mais avec des succès très relatifs. Ils ont détruit l’Irak en renversant un dictateur sunnite mais laïque, pour donner le pouvoir à des chiites alliés aujourd’hui à l’Iran… Ils ont soutenu des islamistes syriens, accélérant l’intervention russe qui a sauvé le régime alaouite, allié de l’Iran. Ils entretiennent une armée kurde en Syrie, se fâchant de ce fait avec la Turquie qui s’est alors rapprochée de Moscou.
Tout cela n’est guère brillant.
En attendant la tension est montée d’un cran dans toute la région et il faudrait peu de choses pour un embrasement général.
Poutine, lui, ne dit rien et, comme toujours, prendra son temps pour agir…ou pas. •
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Commentaires
A chaque fois , on apprécie les analyses claires et limpides d' ADL . Excellent aussi le titre résumant bien ce qu' est D.Trump tout en restant poli .
E.Macron , c'est autre chose : après avoir été grugé par Trump , il repart avec une ardeur nouvelle essayer de manœuvrer Poutine ; pour l' Europe , pour " la bonne auberge du cheval blanc " . Bon courage !
il est vrai que les Américains sont cyniques et dangereux mais cette fois ci avec Trump cela sent fort le roussi hélas .
En 1979 l'idiot CARTER a laissé tomber le SHAH , ami de l'Occident, et aujourd'hui, les Américains sont incapables d'avoir une politique réaliste. Cela dit, si ces mesures peuvent faire tomber ce régime d'agités bocal eh bien, tant mieux ou tant pis.