UA-147560259-1

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Denis Tillinac : « la triste rançon du conformisme »

 

Comme souvent, ici, Denis Tillinac parle d'or

 

2594939590.jpgSi la presse régionale s’émancipait de la monochromie gauchisante, elle perdrait sans doute moins de lecteurs !

Chaque fois que je fais escale dans une de nos provinces, je me plonge dans le quotidien local. Les noms de lieux et l’intitulé des rubriques m’intronisent peu ou prou dans un terroir ; il est question de pêche dans Presse Océan, de rugby dans Sud Ouest, c’est instructif et dépaysant. Mais je constate que partout les plumes des localiers sont trempées dans la même encre.

Que les médias nationaux, écrits ou audiovisuels, soient très majoritairement d’imprégnation gauchisante, nul ne l’ignore. Que leurs réflexes, leur sémantique, leurs partis pris moralisants soient repris à l’identique dans la presse régionale, c’est plus choquant, car ces journaux, souvent en situation de monopole, affectent une neutralité de façade. Seule la Dépêche du Midi, où j’ai fait mes débuts, annonce la couleur : historiquement, elle est radsoc et entend le rester. Rien à redire, donc.

Mais dans un pays où, tout de même, le champ des idées n’est plus monochrome, comme l’atteste entre autres symptômes la bonne santé de… Valeurs actuelles, on s’étonne de n’en trouver aucun reflet dans la presse quotidienne régionale. Les scores électoraux des Républicains et du FN ont beau être supérieurs à ceux du PS et de ses alliés, les tournures d’esprit des localiers restent alignées sur des clichés soixante-huitards.

Mimétisme de provinciaux toujours fascinés par les éditorialistes de la capitale ? Sans doute. Mais ces trentenaires ou quadras qui récitent benoîtement le catéchisme au demeurant fort respectable du Monde, de Libé, de l’Obs, de Télérama ou de France Info sortent des différentes écoles de journalisme. Il faut croire que leurs enseignants ont tous été formatés par la Rue de Solferino, la Fondation Jean-Jaurès ou le think tank Terra Nova.

Lors du dernier scrutin présidentiel, on invita les étudiants des trois principales écoles à émettre un vote. Au premier tour, Hollande obtint une franche majorité, le reste des bulletins se dispersant entre les autres candidats de gauche. Au second tour, 100 % de voix pour Hollande (sic). Or, on se souvient que dans la France “réelle”, Sarkozy recueillit presque la moitié des suffrages. Conclusion : les journalistes de la nouvelle génération sont calibrés comme des soldats sous l’uniforme. Le pluralisme démocratique n’y trouve pas son compte.

C’est fâcheux pour ces jeunes, condamnés à regarder les choses de la vie, jusqu’à leur retraite professionnelle, avec des lunettes de vieux, et des oeillères en prime. C’est dangereux pour cette presse de province, jadis florissante et où, dans les salles de rédaction, de vifs débats opposaient conservateurs et progressistes, libéraux et dirigistes, souverainistes et européistes, jacobins et girondins, gaullistes et parlementaristes. Désormais, elle perd des lecteurs, et au train où elle relaye des postures idéologiques obsolètes, elle risque le décrochage.

Renseignements pris, Libé demeure la référence dans ces écoles où les idées de droite n’ont pas droit de cité. Le Libé de Sartre et de Serge July fut pendant trente années le vade-mecum de notre intelligentsia après sa longue compromission avec le stalinisme. Le monde a changé, les maîtres à penser de cette époque ont perdu leur crédit : Libé n’incarne plus qu’une sensibilité politique marginale. C’est une constatation.

En endoctrinant les futurs journalistes, on les prive de la capacité d’interpréter les réalités d’un monde en perpétuelle métamorphose. Par voie de conséquence, on prive le citoyen provincial de l’opportunité de retrouver dans son quotidien les débats qui agitent la conscience nationale. Du coup, il est tenté de les chercher sur les sites Internet, refuges équivoques du pluralisme.

Ayant biberonné la presse écrite, je déplore que les générations montantes s’en détournent. Mais quand j’ouvre le quotidien de ma région, ça m’agace de subodorer, même dans les pages locales, même dans les pages sportives, un fumet idéologique désuet autant que lourdingue. On voudrait supplier ces Rouletabille juvéniles d’ouvrir leurs écoutilles et d’être moins dociles aux injonctions du cléricalisme rose ou rouge. On voudrait, s’il n’est pas trop tard, qu’ils s’énamourent d’une égérie exigeante mais délectable : la liberté de penser. 

 

Denis Tillinac Valeurs actuelles   

Commentaires

  • Tout à fait d'accord, Monsieur Tillinac, avec vos propos pourtant très modérés dans leur grande justesse. Ils s'appliquent parfaitement, entre autres, au Midi Libre, faux journal d'information mais vrai journal d'opinion très orientée dès qu'il aborde les sujets politiquement sensibles. J'ai décidé depuis quelque temps de ne plus l'acheter et j'espère que beaucoup font ou feront comme moi.

  • Je viens de terminer le petit ouvrage que Me tilliez a publié l'année derniére : "du bonheur d'être réac", J'y ai trouvé beaucoup d'esprit, de finesse, en d'autres termes, beaucoup d'intelligence et de lucidité, sans oublier le courage, des qualités pourtant centrales, dont semblent dépourvus nombre de journalistes totalement inféodés à l'employeur qui les rémunère.

Les commentaires sont fermés.