Clasico, olympico and co… par Noël Noizet
Bienvenue à Noël qui, à partir de maintenant, et au gré de ses inspirations et disponibilités, vient étoffer l'équipe rédactionnelle de lafautearousseau; il a choisi, pour son premier sujet, de pourfendre les cuistres et jean-foutre qui abiment, notamment dans le domaine du sport, ce trésor que le monde entier nous envie, et sur lequel il faut veiller : notre langue française...
Les journalistes du sport, à l’instar de leurs confrères sévissant dans la politique ou la culture, ont pris la fâcheuse habitude de massacrer allègrement la langue française, socle de notre identité nationale, à longueur de colonne ou à hauteur de micro.
Concernant le football, le terme de « clasico » (prononcer « ssi ») désigne, dans le sabir de nos spécialistes, les rencontres OM-PSG. Il est directement importé d’Espagne, où il qualifie depuis des lustres le sommet d’outre-Pyrénées, Real Madrid-FC Barcelone. Cela tient, sans doute, au fait que le football espagnol domine depuis quelques années la planète du ballon rond; ce qui n’oblige personne à égratigner stupidement notre patrimoine linguistique…mais ça fait tellement plus chic…même si les prestations des joueurs français ne s’en trouvent pas pour autant hissées au niveau de celles des ibères !
Plus récemment, et par une étrange duplication, est apparue l’appellation «olympico » pour les matches Marseille-Lyon, au seul motif que ces deux clubs portent respectivement les noms d’Olympique de Marseille et Olympique Lyonnais.
A quand le « garonnoco » (Bordeaux-Toulouse), ou le chtico (Lille-Valenciennes)…
L’arrivée à Marseille du « bad boy » et touitteur invétéré (mais pas toujours bien inspiré) Joey Barton a été l’occasion de nous expliquer qu’il s’agissait d’un joueur « box to box ». Contrairement à ce que son casier britannique chargé pourrait laisser penser, cela ne signifie pas qu’il se déplace essentiellement de discothèque en discothèque. Non, il s’agit bien du rectangle vert, où l’impétrant va et vient d’une surface de réparation à l’autre, dans la partie centrale de la pelouse : soit tout bonnement le rôle assigné dans toutes les langues à tous les milieux de terrain axiaux du monde.
Notre langue est aussi agressée en matière d’intitulés des coupes européennes de clubs. La compétition phare est très souvent baptisée « Champion’s League » par la presse écrite et parlée. Point n’est besoin pourtant d’être un grand polyglotte pour saisir qu’elle peut (et doit) être désignée, en France, sous le nom de « Ligue des champions ». L’autre coupe, nommée, en étranger, « Europa League » est quasi systématiquement citée en l’état par la même presse sportive française, avec des variantes relevant du salmigondis, comme « Ligue Europa » ou « Europa Ligue ».
Serait-il si difficile (ou si « ringard ») de parler de « Ligue Europe », expression qui a en outre infiniment plus d’allure ?
La mimésis, chère à René Girard, fait que ces dérives, inspirées (si l’on peut dire) par le snobisme, la bêtise et l’inculture, se répandent largement dans le grand public et constituent dès lors autant d’agressions significatives contre notre identité.