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Rechercher : Rémi Hugues. histoire & action française. Rétrospective : 2018 année Maurras

  • Washington : mutation du Pentagone, pouvoir réel

    Par  Xavier Raufer 

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    La myope « société de l'information » se vante d'accéder au savoir suprême par l' « intelligence artificielle », mais dans les faits, réagit plutôt comme ces requins qui perçoivent juste ce qui s'agite et saigne.

    Ainsi, les médias voient-ils Washington comme le lieu d'une simple bagarre de chiffonniers entre Donald Trump et la nomenklatura locale, quand, dans le silence de l'Amérique profonde, le contrôle du pouvoir réel connaît d'inquiétantes péripéties.

    Voici ce qui perturbe désormais les experts de Washington : à l'anomie et au narcissisme de la population, répond la militarisation, la prussianisation du sommet, au classique sens du terme : le Pentagone (ministère de la Défense) contrôle en fait la politique étrangère du pays, naguère dirigée par le State Department, ministère oblitéré par le président Trump.

    architecture-building-monument-america-landmark-facade-1108837-pxhere.com_-e1519899073228.jpgUn Pentagone qui, en outre - toujours en silence et dans l'ombre - mute désormais en tout autre chose qu'un simple « complexe militaro-industriel » :  - la « guerre des drones » menée sous les présidents Obama et Trump, - la fusion avec les industries de défense (Boeing, General Atomics, Lockheed Martin, Northrop Grumman, etc.) et du savoir (son armée de «consultants»), - l'addition au tout de la proliférante communauté du renseignement,  font désormais du Pentagone un immense « complexe de la guerre perpétuelle ».  Or, fait inouï dans l'histoire, les décisions prises par ce complexe dépendent désormais autant des actionnaires de l'occulte partenariat-public-privé, Pentagone-armement-consultants, que de l'intérêt public de la nation américaine.

    160223_aila.jpgCe méga-Pentagone est-il cependant efficace, d'abord dans cette « Guerre à la Terreur » qu'il mène inlassablement dans le monde depuis le président Bush ? Pas vraiment. Une crédible étude (du Center for Strategic and International Studies) montre qu'à garder son chiffrage minimal, le monde compte fin 2018 trois fois plus de terroristes djihadistes (±100 000) qu'en 2001, lors des attentats du 11 septembre (±37 000). Ce piètre résultat a coûté à Washington $ 5 900 milliards. Et même si la guerre s'achevait aujourd'hui, resterait pour 2019-2023, une facture de 808 milliards de dollars de dépenses induites. L'Amérique profonde, Donald Trump, voient l'aspect intenable de cette fuite dans la guerre perpétuelle ; la Chine et la Russie espérant le crash d'une Amérique déchirée et ruinée. Mais face à l'écrasante puissance du néo-Pentagone, comment reprendre la main ?  

    Xavier Raufer 
    Docteur en géopolitique et criminologue.
    Il enseigne dans les universités Panthéon-Assas (Paris II), George Mason (Washington DC) et Université de Sciences politiques et de droit (Pékin) 
  • Où est le peuple ?

     

    par Gérard Leclerc

     

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    Emmanuel Macron, dans ses vœux à la nation, a fait part d’une volonté (il l’avait déjà exprimée durant sa campagne) : « Je veux que nous puisions apporter un toit à toutes celles et ceux sans abri. Il y a encore beaucoup de situations que je n’accepte pas plus que vous. Comptez sur ma détermination entière. » Mais de l’expression d’une volonté à la solution d’une difficulté pratique il y a une certaine distance, d’autant qu’il faut reconnaître cette contradiction constante qui consiste à demander simultanément à l’État un surcroît d’aides sociales et une baisse drastique de ses dépenses. Mais que deviendrait la politique si elle perdait le souci de la justice et de la solidarité ? Ne risquerait-elle pas de perdre aussi le peuple, dont elle entend suivre les vœux, puisqu’elle entend se fonder sur son pouvoir ?

    Il est vrai qu’il y a, depuis un certain temps, une crise de la démocratie, qui tient à l’éloignement graduel d’une bonne partie de la population avec ses élites dirigeantes. Un certain nombre de scrutins en Europe ont révélé au grand jour un divorce qui n’a fait que s’accroître. La victoire d’Emmanuel Macron souffre quand même d’une grave faiblesse. Elle n’a pas bénéficié, notamment aux élections législatives, d’un large soutien populaire. La France périphérique, décrite par Christophe Guilluy, n’a pas du tout participé à l’enthousiasme qui a accompagné le triomphe du jeune président. Les témoignages sur le terrain font le bilan de la désertification industrielle qui a ravagé certaines régions, alors que la mondialisation favorisait les grandes concentrations urbaines. Gérald Andrieu, enquêteur pugnace, a visité les régions frontalières. Il constate : « Plus on veut effacer nos frontières nationales, plus en apparaissent de nouvelles, peut-être plus hermétiques encore. Frontières nulles part, séparatisme partout. » [1]

    Mais il n’y a pas que le macronisme, si j’ose dire, qui supporte le procès d’une classe politique en rupture de peuple. Il y a aussi une bonne partie de la gauche. Dans son dernier livre [2], Jacques Julliard est sévère à l’égard « de l’intelligentsia, des apparatchiks du socialisme et des théoriciens du capitalisme qui considèrent le peuple comme une masse inerte, entièrement déterminée par sa place dans la production ». Le peuple, proteste-t-il, « a sa propre intelligence de l’Histoire et sa propre conscience morale. » Serait-il le grand oublié d’aujourd’hui ?  

    [1Gérald Andrieu, Le peuple de la frontière : 2000 km de marche à la rencontre des Français qui n’attendaient pas Macron, Éditions du Cerf.

    [2Jacques Julliard, L’esprit du peuple, Bouquins, Robert Laffont.

    Gérard Leclerc

    Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 3 janvier 2018

  • Cinéma • Patients

     

    Par Guilhem de Tarlé 

    Patients, un drame réalisé par Grand Corps Malade et Mehdi Idir, avec Pablo Pauly, Soufiane Guerrab, Moussa Mansaly et Nailia Harzoune ; adapté du roman autobiographique éponyme de Grand Corps Malade.

    Vis-je ou vivés-je (comment dit-on ?) sur une autre planète ?  Je n'avais jamais entendu parler de Grand Corps Malade, alias Fabien Marsaud, avant cette séance de cinéma.

    Comme dans Le Grand Jeu, c'est l'histoire d'un sportif qui aurait pu être de haut niveau, dont le tracé professionnel est arrêté brutalement - c'est le terme - par un accident très grave.

    Un bon film, plein d'humour, mais un documentaire épouvantable sur le handicap lourd (paralysie, tétraplégie, etc.)  dans un centre de rééducation.

    On y voit la gentillesse du personnel soignant mais aussi l’infantilisme de certains -  « comment il va, Ben, aujourd’hui ? » ; on ressent surtout l'humiliation de la dépendance pour tous les besoins et les gestes de la vie courante. On s'interroge enfin sur la responsabilité des médecins qui doivent mettre leurs patients en face de leurs réalités, et sur la difficulté que peut avoir le handicapé à accepter, et « adapter  ses espoirs » à sa situation.

    Est-ce un relent de lutte des classes lorsque l’un des protagonistes n’aperçoit, autour de lui, aucun Pierre-Antoine, habitant le XVIe arrondissement ?

    C’est sans doute pour cela, en tout cas, que la langue, en VO, est celle des banlieues et non pas celle des bobos qui cul-de-poulent sur les « personnes en situation de handicap ».

    Oui vraiment , cette fois-ci, j’approuve Télérama d’avoir sélectionné Patients parmi les 16 meilleurs long-métrages 2017.  

    PS : En guise d’étrennes 2018, je vous propose mon blog  Je ciné mate avec déjà une quarantaine de films. Vous pouvez vous y abonner (en bas à droite) pour recevoir automatiquement les mises à jour et surtout y retrouver d’anciennes notices grâce au bouton Recherche (je continuerai de le compléter progressivement, à votre demande, de mes « critiques » 2016 et 2017)Merci, outre vos commentaires éventuels, de m’indiquer les difficultés que vous rencontrez, les corrections nécessaires ou les améliorations à apporter à ce blog.   https://jecinemat.wordpress.com

  • Au Cinéma : Entre ciel et terre, par Guilhem de Tarlé

    1A.jpgArt et Essai : Entre ciel et terre, Un film polonais réalisé par Michal Kondrat et diffusé par SAJE Distribution.

    Entre ciel et terre... Je n'ai pas vu le film franco-americain de 1993, réalisé par Oliver Stone, qui portait déjà ce titre et racontait l'histoire d'une jeune femme "pendant et après la guerre du Vietnam".

    Entre ciel et terre... il y a le Purgatoire, et c'est le sujet de ce nouveau long-métrage.
    Je suis sans doute un mécréant,  je ne suis pas du tout mystique et je n'éprouve aucun attrait pour ce type de documentaire dont le prosélytisme me met même presque mal à l'aise.
    Déjà,  j'avais été très critique à propos de Lourdes, en 2019, même si je m'étais incliné devant l'objectivité et le courage des réalisateurs, Thierry Demaiziere et Alban Teurlay. qui se qualifiaient d'agnostique ou athée. Je m'étais surtout copieusement (co-im-pieusement) ennuyé en allant voir Le Coeur de l'homme, d'Eric Esau, présenté en 2018 par ce même SAJE distributeur, spécialiste de films d'inspiration chrétienne, et j'en ai vu des passionnants et des magnifiques que je ne saurais trop recommander.

    Entre ciel et terre... De ce catéchisme expliqué, et illustré, mais assez brouillon, qui veut peut-être trop en dire, avec une succession de monologues longs et parfois soporifiques, je pense néanmoins avoir retenu l'essentiel, difficile à entendre :
    Ne pas pleurer les morts mais prier pour les âmes du Purgatoire afin de les sauver en même temps qu'on se sauve soi-même, sachant l'obligation du pardon des fautes subies pour bénéficier de la miséricorde divine et du pardon des fautes commises.

    C'est vrai que j'adhère davantage à cette "voie étroite" qu'à celle d'un Christ "copain" et une religion bisounours - Tout le monde, il est beau, tout le monde il est gentil - On ira tous au Paradis.
    Il n'empêche que le cinéma ne me semble pas le média idoine pour transmettre ceguilhem de tarlé.jpg message tellement pessimiste, dénué de toute Espérance.

    D'ailleurs nous avons vu un couple quitter la salle au bout d'un quart d'heure, et encore nos deux voisines, quelques minutes plus tard, lors de la scène de la femme battue qui pardonne à son bourreau.

    Eh bien, moi non plus, ce film ne me sanctifie pas, au contraire, et je pense à Georges Brassens, "Je suis la mauvaise herbe",
    et à La Ballade des pendus de Clément Marot :


    "Mais priez Dieu
    que tous nous veuille absoudre".

  • ”Qui n'a pas lutté n'a pas vécu” : parce que la situation est grave, nos voeux ne peuvent qu'être des voeux de réaction

    8 millions de pauvres, 6 millions de chômeurs, pour ne prendre que deux des chiffres les plus alarmants parmi le flot d'exemples consternants qui montrent, tous, et en tous domaines, l'échec patent du Système. Voilà qui n'inciterait guère à un tonitruant "Bonne année !", ni même à parler d' "espérance", mais plutôt de pessimisme... : oui, mais, à condition qu'il soit actif !

    Car c'est justement parce qu'elle souffre, à cause du Système, parce que cette souffrance s'amplifie et que le rythme de son abaissement s'accélère, que nos pensées doivent d'abord aller à la France, au cher et vieux Pays. Là où la malfaisance du Système abonde, il faut, pour paraphraser Bernanos, que la réaction et l'engagement "pour que ça change" surabonde...

    prince jean les quatre.jpgParallèllement, nos pensées ne peuvent qu'aller au recours que représente la Famille de France : le Comte de Paris, le Dauphin Jean, duc de Vendôme, le petit Dauphin Gaston. On parlait de Bernanos, parlons comme Bainville : en se fixant sur ce que représente cette Famille de France, ce qu'elle concentre et synthétise, on voit qu'avec le modèle qu'elle incarne, qu'elle perpétue, qu'elle perénnise, le remède est à côté du mal. Le Prince Jean, dans une conférence donnée à des étudiants de plusieurs grandes Ecoles de Commerce, dans plusieurs villes du pays, n'hésitait pas à présenter la façon dont les Capétiens avaient "mené" la France comme un modèle pour une saine direction d'entreprise, et à parler, en ce sens, de "management capétien". Ce langage, audacieux et inattendu, est heureux : ce n'est pas d'un changement de personnel politique, ni d'un changement de Système dont nous avons besoin, mais d'un changement de Régime, passant par un véritable ré-enracinement, qui nous libérerait de l'idéologie, et nous re-grefferait aux sources vives de nos origines. "Retrouvez les intuitions de vos origines", avait l'habitude de dire Jean-Paull II : "Héritier des siècles" (selon la formule de Chateaubriand), qui, mieux que le Prince peut représenter une réelle vision d'espoir et d'avenir, dans l'échec apocalyptique du Sytème, et l'effondrement absolu des immenses espoirs qu'il avait fait naître ?...

    Car le déracinement des Français continue, par un "changement de peuple", un métissage idéologiquement voulu, prôné et présenté comme "le" modèle idéal, comme la France de demain, mais dont le but réel est de créer des "êtres nouveaux", sans racines ni traditions, ni repères ou attaches bien définies, puisque, en mélangeant plusieurs, ils ne "seront" plus d'aucune, ils ne "sauront" plus véritablement d'où ils viennent. Du moins, c'est ce qu'espèrent et attendent ceux qui poursuivent ce but, en imposant, par un bourrage de crâne quotidien, leur mensonge sur une France qui serait issu d'un métissage permanent, alors qu'elle était, et l'est encore en bonne part, "la plus cohésive", pour reprendre l'expression de Léon Daudet, dont la devise personnelle, "Qui n'a pas lutté n'a pas vécu" sert de titre à ces voeux pour temps de grande crise...

    Or, sur ce point comme sur d'autres, des volontés et des capacités de réaction sont possibles, et sont même à l'oeuvre, aujourd'hui, en France. C'est la raison pour laquelle nous avons volontairement fait suivre ces voeux de deux notes déjà parues sur notre quotidien, mais qui sont - et parce qu'elles sont - des signes de quelque chose d'encourageant, d'un sursaut à épauler et conforter, à amplifier, venu des profondeurs du pays réel :

    manif-pour-tous_440x260.jpg1. le "pourquoi" de notre participation à la prochaine manifestation du 13 janvier, à Paris, pour la défense de la famille contre l'idéologie folle de ceux qui veulent dénaturer ce socle fondamental de notre société;

    2. et la note publiée sitôt après l'excellente "Répliques" de Finkielkraut, où ses deux invités ont souligné que "le vrai clivage est entre une France totalement oubliée (en fait, la "vraie") et celle des bobos-idéologues de Paris et des médias comme Canal + qui confondent volontairement peuple et banlieue, ricanent de tout ce qui, pour eux, n'est que "franchouillardise", prônent le métissage non comme un droit mais comme un devoir et favorisent une hyper-réglementation (normes d'hygiène, de construction, etc.) destructrice et paralysante; ils remarquent que le rejet de la seconde (celle des idéologues) par la première (celle des "pays") est fort, qu'il va en s'accroissant au point d'être dominant dans certains "territoires" et ils semblent penser qu'à l'actuel sentiment de révolte pourrait bien succéder une sorte de lame de fond (qu'on pourrait, en l'occurence, qualifier à juste titre de "réactionnaire")."

    Dans notre Catégorie "Lire Jacques Bainville", la note 35 est consacrée à un article qu'il a écrit dans l'Action française du 31 octobre 1912, il y a donc exactement cent ans, La revanche de Kossovo; dans cet article remarquable, il montre comment, malgré les apparences qui peuvent être - et sont, pour nous, ici et maintenant - contraires; malgré les humiliations, malgré les tragédies, malgré les défaites, les choses peuvent toujours changer, si les hommes le veulent, car, disait-il, "ce qui a été conservé et sauvé ne l'a pas été en vain... Il est toujours des mains pour recueillir et transmettre le flambeau. Et pour les renaissances, il est encore de la foi". En voici deux courts extraits, évidemment applicables, dans leur esprit, à notre aujourd'hui d'inquiétudes:

    "Aux nations qui prennent leur revanche, il faut d'abord des esprits nobles et désintéressés, mainteneurs de la tradition, qui ne laissent pas succomber l'idée. Il faut ensuite que des poètes, des écrivains capables de susciter cette élite enthousiaste qui arrache les peuples à leur torpeur, recueillent l'idée conservée dans les sanctuaires et lui rendent la vigueur de la nouveauté et de la jeunesse. Ni l'un ni l'autre de ces deux éléments n'a fait défaut à la Serbie..."

    Feront-ils défaut à la France ? 

    "Au temps où les vieux rois serbes couvraient le pays de monastères, ils ne se doutaient guère qu'ils élevaient des refuges aux débris de leur nation et qu'en assurant à leur dépouille mortelle un abri contre le vandalisme des siècles, ils assuraient aussi la survivance de leur race. A côté de la lampe qui devait brûler nuit et jour au-dessus de leurs tombeaux, l'Eglise serbe a pieusement entretenu le foyer d'où a jailli l'étincelle patriotique : sous son toit, la vie nationale, à l'abri de la tourmente, a pu se sauvegarder proscrite, mais intacte. C'est elle qui, malgré la servitude et l'ignorance obligatoire, a preservé la patrie serbe de la mort politique et morale."

    Là aussi, "l'étincelle patriotique", la "vie nationale", ce qui a fait notre grandeur et qui est aujourd'hui "proscrit mais intact" feront-elles défaut à la France ? La Serbie, sous le joug, n'a recouvré son indépendance qu'après plusieurs siècles d'humiliation et de servitude, pendant lesquelles cette indépendance non seulement paraissait mais était bel et bien morte. Qui peut dire qu'il ne se passera pas - mutatis mutandis... - la même chose avec la France, et qu'après 137 ans de République idéologique, qui l'ont mise dans l'état critique où elle est à présent, elle ne sera pas sauvée de "la mort politique et morale" ?...

    Puisse lafautearousseau avec vous tous, ses amis, ensemble tout au long de l'année, travailler de plus en plus et de mieux en mieux, "malgré la servitude et l'ignorance obligatoire", en vue de cette évolution des choses, qui serait une vrai révolution; en vue du seul Bien commun, et de cette seule espérance : une France libérée du Système qui l'entrave, de l'idéologie qui l'abaisse, d'un pays légal qui la ruine; et qui pourra, alors, remettant enfin ses pas dans les pas de ceux qui l'ont faite - et faite grande et belle... - reprendre sa marche en avant, en renouant avec l'esprit de ceux qui l'ont créée et ont fait sa grandeur. 

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  • Le problème Macron

     

    Par François Marcilhac

     

    364574047.jpgEmmanuel Macron serait-il déjà en train de perdre le crédit très relatif qu’il avait auprès des Français ?

    En tout cas, l’affaire Pierre de Villiers laissera des traces. Et pas seulement auprès de l’armée, envers laquelle, pourtant, Macron avait entamé un travail de séduction dès son intronisation, lorsqu’il avait remonté les Champs-Élysées sur un véhicule militaire. Non, auprès des Français aussi, qui voient progressivement apparaître le vrai visage de leur nouveau président. Dans les média serviles, c’était à qui verrait, chez Macron, le retour du sens de l’État, une attitude gaullienne, une posture régalienne… Cette « verticalité » du pouvoir – mot à la mode pour ne pas dire transcendance – que Sarkozy et Hollande, le premier par sa vulgarité, le second par sa normalité, avaient abolie, Macron l’avait de nouveau investie, au sens premier du terme, c’est-à-dire en revêtant le costume de la fonction, par une attitude ferme et pleine de hauteur, comprenant que les Français, qui sont restés profondément monarchistes et donc attachés à la dignité de la fonction suprême, n’avaient pas pardonné à leurs deux prédécesseurs leur médiocrité. On est allé jusqu’à évoquer Louis XIV : vainqueur de la Fronde, celui-ci ne s’était-il pas fait représenter par Charles Poerson avec les attributs de Jupiter ? Soit, mais en sachant toujours « raison garder ». Il est vrai qu’après l’avachissement de la fonction présidentielle durant dix années, voire quinze, Chirac ayant joué au roi fainéant durant son second mandat, il n’était pas difficile pour Macron de faire illusion. Même si, s’agissant de salir la France, ses propos indignes lors de la commémoration de l’horrible rafle du Vel d’Hiv, voulue par l’occupant allemand, se sont inscrits, eux, dans la plus indigente continuité. Mais, devait-il penser, par la jeunesse, une certaine prestance physique, des mises en scène soignées, des entretiens accordés ici ou là rompant habilement avec une pratique du pouvoir rejetée par les Français, il serait facile de leur faire prendre des vessies pour des lanternes et la manifestation d’un ego démesuré pour une posture royale. Dans notre précédent éditorial, nous nous inquiétions, après le discours de Versailles, de savoir si le nouveau président de la République avait le sens de la mesure. Nous constations que le vernis commençait de craquer. Nous ne pensions pas que les faits allaient nous donner raison si vite.

    N’est pas Jupiter qui veut

    Car n’est pas le Roi-Soleil, ou Jupiter, qui veut. D’autant que le chef d’État-Major des armées (CEMA) n’avait organisé nulle fronde – ni nulle tentative de putsch ! Il a, comme c’était son droit, et plus encore son devoir dans un régime de séparation des pouvoirs, informé à huis-clos la commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale de l’état réel de celles-ci et donc de l’impossibilité dans laquelle il était de cautionner un nouvelle baisse de leur budget que, du reste, le président de la commission, un macroniste, a lui aussi déplorée. Mais avec Macron, c’est bien Bercy, et non l’Olympe, qui a pris le pouvoir. La décision, dont le comte de Paris a dénoncé « l’éternelle courte vue », de soustraire 850 millions d’euros aux armées, soit 20 % de l’effort demandé, comment la justifier, d’autant que certains ministères sont touchés bien plus que d’autres ? Ainsi, Bercy ne l’est qu’à hauteur de 268 millions. Ne faut-il pas, il est vrai, financer la dotation de 100 millions que va recevoir le parti du président, ainsi que le futur budget de Madame ? Une baisse en tout cas insupportable pour la Défense qui augure mal de la volonté réelle de Macron de porter à 2 % du PIB le budget des armées d’ici à 2025. Surtout qu’il ne s’est pas contenté de cette première faute morale, doublée d’une « faute politique majeure » (Jean-Dominique Merchet à 20 Minutes), qu’a été ce « recadrage médiatique » consistant à désavouer publiquement le CEMA, le 13 juillet, devant le gratin de l’armée rassemblé à l’Hôtel de Brienne : il a récidivé dans Le Journal du dimanche, à la suite de la dernière « lettre à un jeune engagé », publiée le 14 juillet par le CEMA, dans laquelle ce grand soldat écrit : « Méfiez-vous de la confiance aveugle ; qu’on vous l’accorde ou que vous l’accordiez. Elle est marquée du sceau de la facilité. Parce que tout le monde a ses insuffisances, personne ne mérite d’être aveuglément suivi. La confiance est une vertu vivante. Elle a besoin de gages. Elle doit être nourrie jour après jour, pour faire naître l’obéissance active, là où l’adhésion l’emporte sur la contrainte. » Des propos admirables.

    Un profond aveu de faiblesse

    En revanche, cette façon compulsive qu’a Macron de rappeler à tout bout de champ qu’il est le « chef », qu’est-elle d’autre qu’un profond aveu de faiblesse ? Et cette double faute morale et politique, humiliante par ailleurs pour une ministre de la Défense vouée à l’inexistence par le « chef », que traduit-elle d’autre que la profonde fêlure intérieure d’un Emmanuel Macron ressentant sa légitimité incertaine de président mal élu comme une offense à son ego ? « Il n’est pas digne d’étaler certains débats sur la place publique » : cette phrase lui revient en boomerang. Car c’est Macron qui sort diminué de sa piteuse remontrance. Un chef s’impose de lui-même, dans la dignité marmoréenne, et donc économe de mots, de son autorité. Celle-ci est déjà atteinte s’il croit devoir rappeler qui il est. Comment ne pas penser à Chirac, le 14 juillet 2004, à propos, déjà, du budget de la Défense ? Mais il s’agissait alors de l’augmenter – une augmentation que contestait Sarkozy, le ministre des Finances : « je décide, il exécute », avait rugi le chef de l’État, avouant ainsi que les rôles n’étaient plus clairement définis. Mais Sarkozy n’était que ministre. En désavouant son CEMA, c’est à l’autorité même de cette fonction qu’il s’attaque, et donc à la cohésion et au moral de l’armée, prouvant qu’il a d’autant moins et le sens de l’État et celui de sa fonction de chef des armées, que des soldats français risquent leur vie tous les jours, et meurent trop nombreux, sur des théâtres d’opération à travers le monde. Quant à récidiver quarante-huit heures plus tard, c’est montrer qu’on laisse son amour-propre dicter définitivement sa loi. Affirmer, enfin, qu’on n’a besoin de « nuls commentaires », n’est-ce pas reconnaître qu’on ignore ses propres insuffisances ? « Le roi en ses conseils », disait l’adage. Le roi connaissait, lui, ses insuffisances. Une supériorité fondamentale sur notre Jupiter autoproclamé.

    La méthode immature du chef de l’État

    N’écouter que soi et risquer d’aller au clash pour affirmer son ego, telle semble être la méthode immature du chef de l’État. Il en est de même avec les collectivités territoriales. S’imposant le lundi 17 juillet au Sénat derrière Philippe, comme si celui-ci ne servait décidément à rien, Macron a confirmé la disparition totale, à terme, de la taxe d’habitation et des coupes sombres dans le budget des collectivités territoriales (13 milliards d’euros) tout en annonçant une refonte de la fiscalité locale, mais sans redéfinir le périmètre des charges qui leur sont dévolues. Or, l’État s’est désengagé sur elles depuis plusieurs années de nombreuses politiques en matière de solidarité ou d’éducation… Le satisfecit du Fonds monétaire international (FMI), qui vient de saluer sa politique économique et sociale (les ordonnances en cours), semble manifestement lui suffire. Pour la finance mondiale, ce roi sans majesté est, comme on dirait dans sa langue, « the right person in the right position at the right time »… Il n’est pas certain, toutefois, que, décevant déjà les Français, il ne déçoive également bientôt ses maîtres… Le problème Macron ne fait que commencer. 

  • Législatives : en marche fatale

     
     
    Par François Marcilhac
     

    4115840658.jpgSi Emmanuel Macron n’obtient pas la majorité absolue, le 18 juin prochain, au soir du second tour des législatives, ce ne sera pas la faute des média de l’oligarchie, qui n’ont jamais autant invoqué l’« esprit des institutions » pour vendre aux Français leurs candidats.

    Certes, Macron ne bénéficie pas de ce qu’on appelle un état de grâce, mais, tout de même, 58 % des Français verraient aujourd’hui en lui un bon président, surtout à gauche en raison, bien sûr, de la totale déconfiture du candidat socialiste à la présidentielle. Il faut néanmoins comparer ce chiffre aux 66 % qui ont porté Macron à l’Élysée. Comparaison qui montre bien qu’il a surtout été élu par défaut. Et explique pourquoi la droite modérée voit elle aussi en lui l’homme de la situation, celui qui réussit d’autant mieux, selon Gaël Sliman, président de l’institut Odoxa, à réaliser « le consensus gauche-droite » qu’il s’agit d’une droite et d’une gauche également édulcorées.

    Du machin électoral au parti

    Quant à Édouard Philippe, l’ex-LR et ex-maire du Havre devenu Premier ministre, avec 55 % d’opinions favorables, il est loin de susciter l’adhésion des foules – l’incolore Ayrault faisait en 2012 dix points de plus. Le couple exécutif bénéficie donc d’une popularité de circonstance, sans laquelle l’ambivalence de la majorité des électeurs, chez qui désir et crainte du changement s’équilibrent, apparaîtrait comme une simple et pure contradiction. Or le suffrage universel a toujours raison : qu’il ait pris des vessies pour des lanternes et Emmanuel Macron pour le messie de la rénovation de la vie politique est donc d’une logique imparable.

    Ceux qui ont, dès 2016, prétendu que Macron n’était qu’une bulle médiatique ne se sont pas trompés. Et n’ont donc pas à faire amende honorable. Ils auraient simplement dû ajouter que sous la Ve République, une bulle médiatique peut accéder à la présidence de la République, surtout lorsque la finance apatride et les média qui sont ses courroies de transmission la protègent suffisamment pour l’empêcher d’éclater trop tôt. C’est ici que nous retrouvons le fameux « esprit des institutions »…

    Ne faisant jamais tourner les tables, je suis rarement entré en contact avec lui. Mais il doit bien exister puisqu’on ne cesse de l’invoquer pour s’assurer (et en même temps se rassurer) que les Français accorderont bien une majorité à Macron, même si le cas de figure n’est pas exactement le même que celui des précédentes présidentielles où l’élu l’avait été pour lui-même et pour son programme et non pas par défaut (le cas hors norme de 2002 ne pouvant être comparé à 2017). Mais en transformant immédiatement son machin électoral en parti, Macron a voulu également transformer une adhésion par défaut en une adhésion à sa personne et à son programme, le gouvernement, à tous points de vue hybride, qu’il a nommé visant à rassembler cette masse centriste des Français qui voit dans Macron le totem incarnant leur désir ambivalent de changement que nous évoquions à l’instant. « Lui donner sa chance » est donc la formule qui revient le plus souvent : ce que les électeurs désabusés ou en colère disaient de Marine Le Pen pour justifier leur vote FN – « elle, on ne l’a jamais essayée » –, les réformistes-conservateurs qui constituent la base électorale de Macron le disent de lui, qui joue auprès de ces électeurs bon chic-bon genre un rôle analogue à celui de la candidate FN auprès de l’électorat populaire. Le malheur est qu’en présentant mieux que sa concurrente, en jouant sur une (im)posture régalienne – ce qui n’est pas difficile après cinq années de présidence normale – et en ayant surtout déjà pour lui l’appareil d’État, l’Or et l’Intelligence soumise à l’Or, il risque d’obtenir cette majorité conforme à l’« esprit des institutions » qui voudrait, depuis le passage au quinquennat et l’« inversion » du calendrier électoral en 2002, que les Français donnent au président qu’ils viennent d’élire les moyens parlementaires de gouverner.

    La matrice de nos maux principaux

    Qu’en sera-t-il cette année ? Nous le verrons bien mais cessons de réduire l’esprit des institutions, si esprit il y a, à de la cuisine électorale. Et d’enfermer la Ve République dans une logique parlementaire que le dernier quinquennat fut loin de vérifier : le phénomène des frondeurs a limité – doit-on s’en plaindre ? – la portée des réformes qu’Hollande voulait engager… et que Macron ne fera que reprendre, voire aggraver notamment en matière européenne. Laquelle est primordiale : la mal nommée Europe est en effet la matrice de nos maux principaux. Or Macron a donné les signes les plus délétères, son gouvernement ne faisant que renforcer les craintes qu’on pouvait avoir, qu’il s’agisse de la nomination d’une fondamentaliste de l’Europe aux Armées ou d’une eurobéate aux Affaires européennes, ou de la création d’un ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, qui acte la disparition de toute diplomatie indépendante.

    Ce qui importe, ce n’est donc pas le prétendu esprit des institutions – dont la logique voudrait d’ailleurs que les Français ne soient plus moralement libres de leur vote aux législatives. Et si la Ve République a pu avoir son utilité pour consolider un pays affaibli par l’instabilité des deux républiques précédentes, il ne faudrait pas que l’invocation de son esprit serve à donner sa chance à Macron qui, lui, n’en donnera aucune à la France. Alors que, sous la Ve, la légitimité du chef de l’État relève théoriquement de sa rencontre avec le peuple lors de la présidentielle, il serait paradoxal de voir Macron, qui a été élu par défaut, acquérir sa légitimité aux législatives, qui est le champ clos des luttes partisanes. Rien ne serait pire, bien sûr, pour le pays, puisque ce semblant de légitimité, il l’emploierait à réaliser un programme qui, sur tous les plans, est funeste à la France. Il y aura, pour nuire aux intérêts de la nation, suffisamment d’accommodements, en cas d’assemblée sans majorité absolue, entre les députés macronistes, la gauche des LR et la droite du PS pour fournir à Macron des majorités de circonstances sans qu’il faille favoriser l’émergence d’un bloc « progressiste » – celui que Valls a échoué à constituer –, qui arguera du suffrage populaire pour réaliser son seul dessein : la normalisation de la France par l’Union européenne, au sens où, en 1968, la Tchécoslovaquie fut normalisée par l’Union soviétique après le printemps de Prague, Bruxelles et Berlin jouant le rôle du Kremlin.

    Si, comme Pierre-André Taguieff l’écrivait récemment dans Le Figaro, « la soumission joyeuse à la marche fatale du monde, tel est l’horizon indépassable de l’ère Macron qui s’ouvre », alors il faut tout faire pour éviter la constitution à l’Assemblée d’une majorité macroniste en favorisant tout d’abord les candidats patriotes, non seulement au premier tour, mais également, lorsque ce sera possible, au second. Si malheureusement un tel choix n’est pas possible, il faudra alors se soucier du seul intérêt national en évitant à tout prix de donner à Macron une majorité pour détruire la France. Certes, le vote en faveur de certains caciques des LR ou du PS est impossible, et profitons-en pour les renvoyer dans les cordes. Nul besoin de donner des noms : ils ont été de tous les mauvais coups, contre la France, contre le pays réel ou contre la famille. Pour Bruxelles, pour l’invasion migratoire ou pour les prétendues avancées sociétales. D’ailleurs, ils seraient les premiers à collaborer avec Macron. Mais le plus important est d’être soi-même convaincu qu’aucun « esprit des institutions » ne prévaut sur l’intérêt national ! Et d’en convaincre ses plus proches voisins. Car la réussite de Macron signerait la défaite de la France.   

  • Enfumage

     

    Par François Marcilhac

     

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    Emmanuel Macron serait-il en passe de réussir son pari et de «  modifier les choses  » en profondeur  ? Pourtant, les sondages, qui valent ce qu’ils valent, c’est vrai, ne semblent pas le confirmer. Et il a beau multiplier ce qu’il croit être de beaux coups médiatiques, notamment à l’international, ou donner dans une prétendue solennité à l’américaine en signant, lundi 30 octobre, de son bureau présidentiel, devant les caméras, entouré de Castaner, le porte-parole du Gouvernement, et de Collomb, le ministre de l’Intérieur, la loi «  renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme  » – il avait fait de même avec la loi de moralisation de la vie politique –, toutes ces pitreries médiatiques ne le font pas progresser dans l’estime des Français qui n’ont pas mis longtemps à percer l’arrogant mépris du personnage à leur endroit. Les médias et le pays légal dans son ensemble ne sont pourtant pas en reste pour faire son éloge. L’enfumage a même dépassé tout ce qu’on pouvait imaginer s’agissant de la directive européenne sur les travailleurs détachés, dont Macron avait fait du «  durcissement  » son cheval de bataille durant l’été, allant jusqu’à insulter les Polonais. Européiste fanatique, il veut faire de sa politique européenne le grand marqueur de son quinquennat. En l’occurrence, montrer que l’Europe saurait aussi protéger. C’est en gardant en tête cet axe qu’il faut juger sa prétendue victoire sur le sujet. Or, s’il est vrai que, désormais, le travailleur détaché devra recevoir une rémunération égale à celle de ses collègues locaux, selon les termes de l’accord trouvé à Luxembourg le 23 octobre dernier, il ne faut pas oublier que les cotisations sociales et retraites – du salaire différé – seront toujours celles du pays d’origine ou encore que Macron a dû jeter du lest concernant la durée des détachements (non pas six mois, mais douze, voire dix-huit). On dira que ce dernier point est symbolique, puisque en France – deuxième pays d’accueil derrière l’Allemagne –, la durée moyenne d’un détachement est de trente-cinq jours  ? Macron, d’un côté, ne fait donc que dans le symbolique et, de l’autre, n’a rien cherché à obtenir concernant les grosses entreprises du BTP, qui continueront toujours à avoir intérêt à embaucher des salariés qui socialement ne leur coûteront rien et dont ils pourront indéfiniment répéter les détachements. Quant aux transporteurs routiers, pourtant un gros morceau, ils échappent au «  durcissement  » de la directive, alors que le transport routier français a été divisé par trois en quinze ans en raison de la concurrence déloyale des pays de l’Est et des pays ibériques – qui auraient rejoint les premiers si Macron s’était entêté. Enfin, ces mesures entreront en vigueur, après l’accord du Parlement européen, au plus tôt en… 2022  ! Et la création d’une «  autorité européenne du travail  » permettant de contrôler leur application est renvoyée aux calendes grecques au profit d’une coopération administrative entre États… qui n’a jamais fonctionné jusque-là. On comprend immédiatement le caractère pernicieux de cet accord  : invalider dans l’œuf toute nouvelle critique de la directive en prétextant que son durcissement a réglé tous les problèmes. Ce qui est évidemment faux, comme on vient de le voir. Mais le but de Macron – comme de sa fausse opposition, de droite et de gauche, qui ne peut donc le critiquer sur ce point – est d’édifier une Europe sociale à bas coût, sur le modèle allemand dans un premier temps – il l’a explicitement annoncé à la Sorbonne – avant d’imposer une précarité encore plus grande. Alors qu’une vraie politique de protection de l’économie et des travailleurs français aurait été de contester le principe même de cette directive ou d’imposer, par exemple, sur les chantiers, la clause Molière. Mais Macron ne pense pas français. Macron thinks European

    Pour en finir avec le tirage au sort

    Les nouvelles mesures annoncées ce 30 octobre par le Gouvernement pour mettre fin au scandale – notamment l’ubuesque tirage au sort – de l’inscription des néo-bacheliers dans le premier cycle universitaire participent du même enfumage. Elles ont beau constituer pour le Premier ministre «  une réforme profonde du premier cycle universitaire  » assortie d’«  un contrat pédagogique  », elles trahissent le piège dans lequel se trouve pris tout gouvernement qui n’entreprendra pas une refonte totale du système. D’ailleurs, Édouard Philippe d’ajouter piteusement, comme pour plaire à tout le monde – et on sait que dans ce cas, on ne plaît à personne  : «  Je n’ai pas et je n’ai jamais eu peur du mot sélection, mais ce n’est pas ce que nous proposons. L’objectif n’est pas que l’université dise non. Dans la plupart des cas, elle dira oui, et dans certains cas elle dira oui si.  » Et les organisations étudiantes et lycéennes d’appeler à une mobilisation le 16 novembre contre une sélection qui ne dirait pas son nom, le «  oui si  », voire un «  non  » rarissime pour des potaches qui n’auraient décidément pas le profil des études envisagées leur paraissant encore trop sélectif. Mais comment leur donner tort  ? Et oublier que l’entrée à l’université est déjà soumise à une sélection, qui a pour nom, précisément, le baccalauréat, qui est non pas, comme on le croit ordinairement, un examen de fin de cycle mais le premier grade universitaire  ? Aussi le pouvoir se trouve-t-il coincé par plusieurs décennies de démagogie ayant abouti à priver le bac, désormais donné à tous, de sa raison d’être. Pourtant, dès les années 1970, le sociologue Raymond Boudon, dans L’Inégalité des chances, avait montré le caractère pervers, pour les élèves les plus défavorisés, de la massification des diplômes, qui les prive de toute valeur. Aussi les mesures prévues – outre le «  oui si  » des universités, un dispositif spécifique pour les filières en tension, l’avis des professeurs de terminale, la nécessité d’un prérequis pour les étudiants ayant reçu un avis sous condition ou encore des stages de prérentrée ou des cours renforcés (donnés par qui, où, avec quel argent  ? ) – seront-elles inefficaces et coûteuses tout en ne faisant qu’aggraver la situation, puisque Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, a annoncé que 500 millions d’euros seraient investis dans le but de créer de nouvelles places dans les filières les plus demandées par les étudiants, sans même que soit étudié le besoin social et économique auquel répondent ces filières. Comme si c’était à la société – l’université étant gratuite en France – de financer des études dans des filières dont le seul débouché est le chômage.

    Une impasse républicaine

    Oui, le pouvoir est coincé  : soit il restaure le bac dans sa plénitude de premier grade universitaire, ce qui impliquerait de le rendre à nouveau sélectif et de ne plus le donner à 80  % d’une classe d’âge, soit il en fait un simple diplôme de fin de cycle, et autorise les universités à organiser leur propre sélection. Avec la fac pour tous, nous sommes aujourd’hui dans le pire des scénarios, celui qui refuse tout sélection, la fac servant seulement à soulager Pôle emploi. Mais quelle serait l’acceptabilité sociale d’une de ces deux réformes auprès des familles, alors même qu’avoir le bac, et donc entrer à l’université, est devenu un droit  ? Et que faire des jeunes qui seraient refoulés  ? On voit bien qu’il faut reprendre le problème de l’orientation dès le collège… et celui de l’apprentissage des fondamentaux, parfois ignorés des étudiants de première année, dès l’école primaire. Tout en prévoyant des filières professionnelles valorisantes… Mais comment la République, qui repose sur le mythe incapacitant de l’égalité, pourrait-elle entreprendre une telle refonte  ?   

  • Sauver 863 emplois à Béthune, et plus encore..., par Jean-Philippe Chauvin.

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    La liste des entreprises mondialisées qui ferment leurs usines en France pour se redéployer (beaucoup) plus loin vient de s’allonger un peu plus encore avec l’annonce, brutale et par vidéo interposée, de la fermeture complète et définitive de l’usine de pneumatiques Bridgestone (multinationale japonaise) installée à Béthune, dans une région très éprouvée par la désindustrialisation depuis une bonne trentaine d’années déjà et au fil de la mondialisation et de son imposition aux économies nationales.

    jean philippe chauvin.jpgCe sont 863 emplois qui, d’un clic d’ordinateur, peuvent ainsi disparaître au printemps 2021, selon le bon plaisir d’une entreprise qui, en 2017, profitait allégrement des aides de l’État, au titre du CICE (Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi) et avait alors touché 1,8 million d’euros. 863 emplois, sans compter les sous-traitants et ceux qui vivent de l’installation des familles de cadres et d’ouvriers sur place ou dans les environs de Béthune… En somme, une nouvelle catastrophe sociale s’annonce pour la région et ses habitants, si rien n’est fait pour l’empêcher !

     

    Ce n’est pas la première fois et ce n’est sans aucun doute pas la dernière non plus qu’une entreprise mondialisée, à la recherche de profits pour les actionnaires qui participent à son financement et, en retour, « en veulent pour leur argent » (et pour leur « confiance » sur laquelle repose en grande partie leurs propres investissements), agit de la sorte : la violence de l’annonce, quelques mois après avoir affirmé à l’État ne pas avoir l’intention de fermer ce site industriel (affirmation faite à Bercy, devant le ministre de l’Économie et le président de la région Hauts-de-France, en novembre 2019 !), se conjugue avec un cynisme certain et confirme la mauvaise impression que, depuis quelques années déjà, les acteurs locaux mais aussi l’État pouvaient avoir devant l’absence d’investissements de l’entreprise sur le site et le refus récent de profiter des aides de l’État dans le cadre du plan de relance post-covid, comme pour sembler ne rien devoir désormais à la France. Il semble bien que, en définitive, Bridgestone ait laissé pourrir la situation pour légitimer son attitude présente, faisant ainsi peu de cas des emplois locaux et rassurant ses actionnaires qui souhaitent de meilleurs dividendes sans se soucier des moyens utilisés pour les obtenir… C’est là où l’on touche du doigt toute l’injustice d’un système qui sépare le travail (des ouvriers et des cadres) de l’argent au lieu de conjuguer les deux dans une « communauté de destin » professionnelle. L’argent « libéré du travail » devient vite ce tyran qui soumet les travailleurs à son bon plaisir et à ses créances

    Devant l’indignation provoquée par l’annonce de la fermeture du site, l’État n’a pas pu se défausser et il est fort possible que M. Le Maire, comme le président de la République lui-même, ne soit pas insensible à cette violence économique et sociale. L’intervention rapide du politique face au risque de fermeture du site a au moins permis de lancer un cycle de négociations entre les différents partenaires sociaux, mais aussi régionaux et étatiques, et la direction européenne de la firme japonaise, cycle qui devrait durer cinq mois et, officiellement, chercher des pistes pour éviter le drame social et l’accentuation de la désindustrialisation locale. Mais, n’est-ce pas simplement le moyen pour la multinationale de gagner du temps en espérant que l’émotion s’apaise et que la fatigue des opposants à la fermeture du site désarme toute réaction trop brutale ou dangereuse pour l’image ou les intérêts de la firme et de ses actionnaires ? Il n’est pas interdit de le craindre, au regard des précédents trop nombreux et peu encourageants pour les travailleurs…

     

    Alors, que faire ? La tentation est grande de se contenter de quelques slogans anciens et réducteurs sur la logique capitaliste qui ne serait rien d’autre que la seule recherche du profit par des classes dominantes égoïstes au détriment des classes laborieuses forcément exploitées et maltraitées en ces temps déjà peu sympathiques. Non que cela soit forcément faux, d’ailleurs, si l’on en croit quelques uns des laudateurs mêmes de ce système et si l’on observe les mentalités capitalistiques contemporaines, fort peu portées sur la générosité et la compassion à l’égard des travailleurs (cadres comme ouvriers), et encore moins sur le partage des profits et la pourtant si nécessaire justice sociale. Je n’ai guère d’illusions sur l’état d’esprit des féodaux d’aujourd’hui pour lesquels l’argent est la seule aune de la valeur des hommes, et sur leur capacité (très faible voire nulle, en fait) à entendre la souffrance des « sans-dents », et La Tour du Pin, catholique fervent et royaliste lucide autant que social, avait déjà de son temps des mots très durs à l’égard des financiers et des patrons qui oubliaient, trop souvent et trop naturellement, leurs devoirs sociaux

     

    Mais au-delà de ce constat sur la dureté des méthodes et de l’idéologie capitaliste elle-même, il faut bien proposer quelques pistes pour, dans le cadre d’une mondialisation imposée et trop souvent intériorisée comme « obligatoire » par les populations (1), sauver ce qui peut l’être sans oublier ce qui doit l’être, c’est-à-dire la possibilité pour ceux qui vivent du travail chez Bridgestone de continuer à travailler et à vivre dignement, même sans (ou après) Bridgestone. En ce sens, il est nécessaire d’appuyer notre soutien aux salariés de cette firme, y compris pendant les cinq mois de médiation et de négociations, non pour bloquer la situation mais pour peser dans ce qui est, d’abord et toujours, un rapport de forces : se désintéresser de cette double cause de l’activité industrielle et de l’emploi à Béthune au sein et autour de Bridgestone serait affaiblir la position des salariés autant que celle de notre pays. En ce sens, et sans tomber dans le mythe d’une « union sacrée » sociale, il faut renforcer la position de l’État, non par amour pour M. Le Maire mais parce que, sans le politique, rien ne pourra se faire ni être garanti pour l’emploi dans la région ; idem pour le Conseil régional, dirigé par un potentiel candidat à la présidentielle dont il faut souhaiter que son ambition lui permette d’être le plus efficace possible, et qu’il soit un éternel aiguillon pour rappeler l’État à ses devoirs si ce dernier venait à fléchir face au géant japonais du pneumatique…

     

    Que peut devenir l’usine de Béthune ? Un rachat par une autre société (Michelin ?) peut être envisagé mais Bridgestone acceptera-t-il cette option qui pourrait entraîner une nouvelle concurrence pour ses propres produits ? Alors, en faire une usine dédiée au recyclage des pneus usagés, dans le cadre de la transition écologique française et de la mise en place progressive d’une économie circulaire ? Ou moderniser l’outil industriel et l’adapter aux nouvelles tendances du marché du pneumatique ? D’autres propositions seront évidemment avancées et devront être discutées, défendues aussi près des autorités et de la direction de la firme mondialisée qui, pour l’heure, reste campée sur son intention de fermeture définitive du site. Quoi qu’il en soit, la première des priorités est de montrer la détermination de tous à sauver « Béthune », et « la rue » sera, sans doute, aussi utile que « les pouvoirs publics » et la négociation entre les différents acteurs du dossier. C’est une bataille sociale qui s’engage et qui, après tant de défaites récentes, doit, cette fois, être victorieuse…

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    Bien sûr, cela n’est qu’une étape dans ce long processus, nécessaire, de « nouvelle industrialisation » : retrouver l’indépendance économique de notre pays et « faire de la force » sur ce terrain comme sur les autres, voilà qui doit motiver l’action et les propos de tous, en France, car la mondialisation ne doit pas dicter sa loi aux États ni aux travailleurs qui, trop souvent, en sont les victimes expiatoires…

     

     

    Notes : (1) : Ce qui n’empêche pas, pour autant de dénoncer la mondialisation et d’en évoquer et d’en préparer une sortie en bon ordre, dans le cadre d’une internationalisation des échanges fondée, non sur « la concurrence de tous contre tous » (seule valorisée aujourd’hui) mais sur l’équilibre et sur l’équité sans tomber dans l’illusion d’une égalité des échanges qui n’aurait ni sens ni raison.

    Source : https://jpchauvin.typepad.fr/jeanphilippe_chauvin/

  • Sauver 863 emplois à Béthune, et plus encore..., par Jean-Philippe Chauvin.

    Notre cama­rade Jean Phi­lippe Chau­vin appelle à une mobi­li­sa­tion face à ce que l’on nous pré­sente comme une fata­li­té, et qui n’est en fait que l’expression de la désin­vol­ture des admi­nis­tra­teurs d’une mul­ti­na­tio­nale qui ne se sentent aucu­ne­ment enga­gés par l’avenir de plus de 800 familles de France tom­bant dans la pré­ca­ri­té. Non seule­ment l’État fran­çais, pas plus que le pou­voir de Bruxelles, ne semblent concer­nés par cette ultime catas­trophe, mais il appa­rait que les médias et donc l’opinion publique, se détournent éga­le­ment, COVID oblige, du sort de nos com­pa­triotes. Nous repro­dui­sons ici son appel du mois de juin der­nier. (NDLR)

    jean philippe chauvin.jpgLa liste des entreprises mondialisées qui ferment leurs usines en France pour se redéployer (beaucoup) plus loin vient de s’allonger un peu plus encore avec l’annonce, brutale et par vidéo interposée, de la fermeture complète et définitive de l’usine de pneumatiques Bridgestone (multinationale japonaise) installée à Béthune, dans une région très éprouvée par la désindustrialisation depuis une bonne trentaine d’années déjà et au fil de la mondialisation et de son imposition aux économies nationales. Ce sont 863 emplois qui, d’un clic d’ordinateur, peuvent ainsi disparaître au printemps 2021, selon le bon plaisir d’une entreprise qui, en 2017, profitait allégrement des aides de l’État, au titre du CICE (Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi) et avait alors touché 1,8 million d’euros. 863 emplois, sans compter les sous-traitants et ceux qui vivent de l’installation des familles de cadres et d’ouvriers sur place ou dans les environs de Béthune… En somme, une nouvelle catastrophe sociale s’annonce pour la région et ses habitants, si rien n’est fait pour l’empêcher !

     

    Ce n’est pas la première fois et ce n’est sans aucun doute pas la dernière non plus qu’une entreprise mondialisée, à la recherche de profits pour les actionnaires qui participent à son financement et, en retour, « en veulent pour leur argent » (et pour leur « confiance » sur laquelle repose en grande partie leurs propres investissements), agit de la sorte : la violence de l’annonce, quelques mois après avoir affirmé à l’État ne pas avoir l’intention de fermer ce site industriel (affirmation faite à Bercy, devant le ministre de l’Économie et le président de la région Hauts-de-France, en novembre 2019 !), se conjugue avec un cynisme certain et confirme la mauvaise impression que, depuis quelques années déjà, les acteurs locaux mais aussi l’État pouvaient avoir devant l’absence d’investissements de l’entreprise sur le site et le refus récent de profiter des aides de l’État dans le cadre du plan de relance post-covid, comme pour sembler ne rien devoir désormais à la France. Il semble bien que, en définitive, Bridgestone ait laissé pourrir la situation pour légitimer son attitude présente, faisant ainsi peu de cas des emplois locaux et rassurant ses actionnaires qui souhaitent de meilleurs dividendes sans se soucier des moyens utilisés pour les obtenir… C’est là où l’on touche du doigt toute l’injustice d’un système qui sépare le travail (des ouvriers et des cadres) de l’argent au lieu de conjuguer les deux dans une « communauté de destin » professionnelle. L’argent « libéré du travail » devient vite ce tyran qui soumet les travailleurs à son bon plaisir et à ses créances

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    Devant l’indignation provoquée par l’annonce de la fermeture du site, l’État n’a pas pu se défausser et il est fort possible que M. Le Maire, comme le président de la République lui-même, ne soit pas insensible à cette violence économique et sociale. L’intervention rapide du politique face au risque de fermeture du site a au moins permis de lancer un cycle de négociations entre les différents partenaires sociaux, mais aussi régionaux et étatiques, et la direction européenne de la firme japonaise, cycle qui devrait durer cinq mois et, officiellement, chercher des pistes pour éviter le drame social et l’accentuation de la désindustrialisation locale. Mais, n’est-ce pas simplement le moyen pour la multinationale de gagner du temps en espérant que l’émotion s’apaise et que la fatigue des opposants à la fermeture du site désarme toute réaction trop brutale ou dangereuse pour l’image ou les intérêts de la firme et de ses actionnaires ? Il n’est pas interdit de le craindre, au regard des précédents trop nombreux et peu encourageants pour les travailleurs…

     

    Alors, que faire ? La tentation est grande de se contenter de quelques slogans anciens et réducteurs sur la logique capitaliste qui ne serait rien d’autre que la seule recherche du profit par des classes dominantes égoïstes au détriment des classes laborieuses forcément exploitées et maltraitées en ces temps déjà peu sympathiques. Non que cela soit forcément faux, d’ailleurs, si l’on en croit quelques uns des laudateurs mêmes de ce système et si l’on observe les mentalités capitalistiques contemporaines, fort peu portées sur la générosité et la compassion à l’égard des travailleurs (cadres comme ouvriers), et encore moins sur le partage des profits et la pourtant si nécessaire justice sociale. Je n’ai guère d’illusions sur l’état d’esprit des féodaux d’aujourd’hui pour lesquels l’argent est la seule aune de la valeur des hommes, et sur leur capacité (très faible voire nulle, en fait) à entendre la souffrance des « sans-dents », et La Tour du Pin, catholique fervent et royaliste lucide autant que social, avait déjà de son temps des mots très durs à l’égard des financiers et des patrons qui oubliaient, trop souvent et trop naturellement, leurs devoirs sociaux

     

    Mais au-delà de ce constat sur la dureté des méthodes et de l’idéologie capitaliste elle-même, il faut bien proposer quelques pistes pour, dans le cadre d’une mondialisation imposée et trop souvent intériorisée comme « obligatoire » par les populations (1), sauver ce qui peut l’être sans oublier ce qui doit l’être, c’est-à-dire la possibilité pour ceux qui vivent du travail chez Bridgestone de continuer à travailler et à vivre dignement, même sans (ou après) Bridgestone. En ce sens, il est nécessaire d’appuyer notre soutien aux salariés de cette firme, y compris pendant les cinq mois de médiation et de négociations, non pour bloquer la situation mais pour peser dans ce qui est, d’abord et toujours, un rapport de forces : se désintéresser de cette double cause de l’activité industrielle et de l’emploi à Béthune au sein et autour de Bridgestone serait affaiblir la position des salariés autant que celle de notre pays. En ce sens, et sans tomber dans le mythe d’une « union sacrée » sociale, il faut renforcer la position de l’État, non par amour pour M. Le Maire mais parce que, sans le politique, rien ne pourra se faire ni être garanti pour l’emploi dans la région ; idem pour le Conseil régional, dirigé par un potentiel candidat à la présidentielle dont il faut souhaiter que son ambition lui permette d’être le plus efficace possible, et qu’il soit un éternel aiguillon pour rappeler l’État à ses devoirs si ce dernier venait à fléchir face au géant japonais du pneumatique…

     

    Que peut devenir l’usine de Béthune ? Un rachat par une autre société (Michelin ?) peut être envisagé mais Bridgestone acceptera-t-il cette option qui pourrait entraîner une nouvelle concurrence pour ses propres produits ? Alors, en faire une usine dédiée au recyclage des pneus usagés, dans le cadre de la transition écologique française et de la mise en place progressive d’une économie circulaire ? Ou moderniser l’outil industriel et l’adapter aux nouvelles tendances du marché du pneumatique ? D’autres propositions seront évidemment avancées et devront être discutées, défendues aussi près des autorités et de la direction de la firme mondialisée qui, pour l’heure, reste campée sur son intention de fermeture définitive du site. Quoi qu’il en soit, la première des priorités est de montrer la détermination de tous à sauver « Béthune », et « la rue » sera, sans doute, aussi utile que « les pouvoirs publics » et la négociation entre les différents acteurs du dossier. C’est une bataille sociale qui s’engage et qui, après tant de défaites récentes, doit, cette fois, être victorieuse…

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    Bien sûr, cela n’est qu’une étape dans ce long processus, nécessaire, de « nouvelle industrialisation » : retrouver l’indépendance économique de notre pays et « faire de la force » sur ce terrain comme sur les autres, voilà qui doit motiver l’action et les propos de tous, en France, car la mondialisation ne doit pas dicter sa loi aux États ni aux travailleurs qui, trop souvent, en sont les victimes expiatoires…

     

    Notes : (1) : Ce qui n’empêche pas, pour autant de dénoncer la mondialisation et d’en évoquer et d’en préparer une sortie en bon ordre, dans le cadre d’une internationalisation des échanges fondée, non sur « la concurrence de tous contre tous » (seule valorisée aujourd’hui) mais sur l’équilibre et sur l’équité sans tomber dans l’illusion d’une égalité des échanges qui n’aurait ni sens ni raison.

    Sources : https://jpchauvin.typepad.fr/jeanphilippe_chauvin/

    https://www.actionfrancaise.net/

  • Jean-Christophe Buisson : « Le but des Turcs – et les Azéris sont des turcophones -, c’est d’effacer les Arméniens ».

    Jean-Christophe Buisson, directeur adjoint du Figaro Magazine, est un des rares journalistes français à s’être intéressé de très près à la guerre au de 2020, conflit qui a opposé la République autoproclamée du Haut-Karabagh – aussi appelé Artsakh -, soutenue par l’, et l’Azerbaïdjan, soutenu par la Turquie. Au micro de Boulevard Voltaire, il lance un cri d’alarme sur ce qu’il se passe dans cette région.


    Vous êtes directeur adjoint à la rédaction du Figaro Magazine. Vous avez été un des rares journalistes à couvrir de manière passionnée, presque obstinée, cette guerre atroce qui s’est déroulée entre l’Arménie et la République de l’Artsakh et l’Azerbaïdjan. Pourquoi vous êtes-vous intéressé particulièrement à ce conflit ?

    Disons que j’ai un tropisme vers l’est de l’Europe et au-delà, vers le monde slave et au-delà, vers le Caucase du Nord où je me suis rendu à plusieurs reprises. Ces dernières années, je me suis rendu en Arménie, pas pour des reportages politiques, mais des reportages de découverte. Je m’y suis, d’ailleurs, fait quelques amis. J’ai éprouvé un peu la même sensation que j’ai éprouvée dans la Serbie que j’ai beaucoup couverte, ces dernières années. J’éprouve un attachement soudain assez irrationnel, spirituel, physique, tellurique et humain. Je suis la situation géopolitique de cette région et je suis particulièrement les avancées de la Turquie et de M. Erdoğan parce qu’en m’intéressant à la Serbie et aux Balkans, je me suis évidemment intéressé au monde ottoman et, par conséquent, à la Turquie. La Turquie est l’héritière naturelle, qu’elle soit kémaliste ou d’Erdoğan, de l’Empire ottoman et des souffrances qu’ont subies de nombreux peuples de l’occupation ottomane jusqu’au début du XXe siècle, y compris l’Arménie.

     

    Pourquoi l’Azerbaïdjan a réussi à littéralement écraser l’armée arménienne ?

    L’Azerbaïdjan ne s’est pas battue seule, dans cette guerre. Elle a bénéficié d’un encadrement militaire turc très avancé dans le commandement, avec trois généraux turcs. Ces derniers ont remplacé le ministre de la Défense azerbaïdjanais qui était en place jusqu’à fin septembre et qui a disparu du jour au lendemain. Il se trouve qu’il était plutôt hostile à un conflit et hostile au fait que la Turquie participe de trop près, et était plutôt pro-russe. Il avait tous les défauts. Nous n’avons eu aucune nouvelle de lui depuis le 27 septembre. De fait, il a été remplacé par trois généraux turcs qui ont pris en main les opérations. Des forces spéciales turques ont participé, ainsi que des mercenaires djihadistes venant de Idleb par la Turquie. Cela a donné une supériorité, et une supériorité technologique. Les Turcs ont acheté un certain nombre de drones de surveillance et d’attaque. Ils ont utilisé des satellites pour repérer les positions arméniennes. Et ils ont gagné cette guerre par l’aérien. Ils ont très vite dominé le ciel, réduisant à néant toute la défense d’artillerie antiaérienne arménienne un peu obsolète, russe pour la plupart, mal équipée et mal entretenue. Très vite, la guerre a consisté en une invasion de l’Artsakh et des districts entre l’Artsakh et l’Arménie qui, de fait, n’appartiennent pas à l’Artsakh mais à l’Azerbaïdjan. L’Azerbaïdjan était, de fait, occupé par les Arméniens comme une zone tampon de protection quasiment pas habitée et pas repeuplée, mais qui sont des terres arméniennes parce qu’avant le découpage de 1921 de Staline, il y avait beaucoup d’églises, de monastères et de cimetières. On voyait bien que ces zones avaient longtemps été arméniennes et avaient été donnés à l’Azerbaïdjan. Elles ont ensuite été reprises par l’Arménie, mais reste un flou administratif et juridique. L’Azerbaïdjan a commencé sa reconquête par le sud et par l’est. Lorsqu’elle a vraiment empiété sur l’Artsakh, la Russie s’est réveillée et a dit stop à un massacre. La supériorité était telle que les morts commençaient à s’accumuler par milliers du côté arménien.

     

    D’un point de vue stricto sensu du droit international, l’Azerbaïdjan était dans son droit…

    Ce sont les mêmes histoires que les Balkans. On peut remonter à chaque fois à l’antériorité. Encore une fois, lorsque vous avez une terre qui a été, pendant 1.900 ans, arménienne et qui a été octroyée à l’Azerbaïdjan par une décision du plus grand criminel du XXe siècle, Staline, on peut considérer que ce droit-là est discutable. Vous allez me dire « à ce moment-là, on discute de tout », il me semble qu’on a donné l’indépendance du Kosovo en piétinant allègrement le droit international puisque le Kosovo était une région de la Serbie. Il y a quand même un deux poids deux mesures.
    On s’arrange comme on veut avec le droit international. L’Azerbaïdjan crie aujourd’hui à la défense du droit international parce que cela l’arrange, mais on voit bien que ce sont les grandes puissances qui décident du droit international et qui décident de le respecter ou de ne pas le respecter.

     

    Pour revenir à ce sujet scandaleux, des exactions ont été commises par les soldats azéris sur les sols prisonniers arméniens et sur les populations civiles. N’importe quel journaliste un tant soit peu intéressé ou opiniâtre a pu consulter ces vidéos et voir la véracité de ces vidéos. Comment expliquer que personne ne se soit scandalisé ?

    Je crois qu’on s’attache à ce qui s’est passé là-bas en allant là-bas. Il n’y a pas 36 solutions, c’est d’ailleurs pour cela qu’on choisit souvent ce métier de journaliste de terrain qui n’est plus le mien depuis vingt ans. J’ai arrêté de couvrir les conflits. Un sentiment d’injustice s’est rallumé chez moi qui a fait que j’y suis quand même allé. Quand on est là-bas, on comprend ce qui se passe et on vit ce scandale. J’ai découvert les vertus que pouvaient avoir les réseaux sociaux. J’ai fait du journalisme Twitter, chose qui ne m’était jamais arrivée. Je confesse que cela a une certaine efficacité. Quelques autorités, y compris arméniennes, m’ont confié combien ces messages venant d’un journaliste français donnent l’impression de ne pas être totalement isolé et abandonné. La diplomatie est une chose et l’information en est une autre.
    Quand on revient avec ces images et ces témoignages dans la tête, on ne peut qu’entretenir et continuer à partager ces souffrances, ces scandales et ces douleurs.
    Comme très peu de journalistes s’y sont rendus, j’ai l’impression qu’ils ne prennent pas la dimension humaine, charnelle et spirituelle de ce qui se passe là-bas. Il faut aller chercher les vidéos un peu cachées sur des réseaux. Ce sont des vidéos d’exactions, comme on en voit quasiment tous les jours, qui ont encore lieu alors qu’il y a un cessez-le-feu depuis le 9 novembre. Cela fait maintenant deux mois que la guerre est terminée, et pourtant, il y a encore des prisonniers de guerre qui se font tuer ces derniers jours. Ces images-là sont d’ailleurs diffusées par les Azéris eux-mêmes, qui sont très fiers de ce qu’ils font. Ce ne sont pas des montages, mais bien des choses revendiquées.
    Vu de loin, on voit cela comme un massacre comme un autre. C’est presque devenu une habitude de voir ce type de massacre. Comme le conflit était peu traité et peu couvert, il n’y a pas de grands intellectuels. Michel Onfray est arrivé là-bas après la guerre. Il a ressenti des choses, ça s’est d’ailleurs vu dans son film. Aujourd’hui, c’est un peu tard puisque nous n’avons plus accès à ces régions. Sur ce sujet-là, Bernard-Henri Lévy a été présent au début et il a fait plusieurs interventions et plusieurs articles. Une fois cette guerre éteinte, il a un peu disparu. On peut accorder à Bernard-Henri Lévy le défaut de s’attacher à une cause et de passer à une autre. C’est comme cela qu’il couvre beaucoup de zones, mais parfois, il oublie un peu ce qu’il s’est passé et ses engagements. Il y revient quelques mois ou quelques années plus tard. Dans ce conflit, toutes les aides étaient bonnes à prendre pour les Arméniens.

     

    Boulevard Voltaire avait couvert la première manifestation des Arméniens de France devant l’ambassade azérie. On a l’impression que ce lien entre l’Arménie et la France est réel, profond et sincère. Pourquoi la France n’a rien pu faire pour empêcher ce massacre?

    La France était diplomatiquement coincée par le fait qu’elle appartenait au groupe de Minsk qui est chargé de surveiller le cessez-le-feu depuis 1994 dans la région. Le groupe de Minsk est coprésidé par la France, la Russie et les États-Unis. Comme je vous l’ai dit tout à l’heure, aux États-Unis, il ne se passait rien jusqu’à l’élection de Biden. Le groupe de Minsk était bloqué par l’immobilité des États-Unis. Du côté de l’Union européenne, il y a un grand non-dit dans cette histoire. Angela Merkel dirige l’Union européenne et elle a six millions de Turcs sur son territoire. Par ailleurs, l’Union européenne est victime, depuis des années d’un chantage, par Erdoğan. Des millions de migrants sont présents sur son territoire et il menace de les laisser venir en Europe si on n’est pas gentil avec lui et si on ne le paye pas. Ce n’est donc pas le moment de se disputer avec Erdoğan. C’est d’ailleurs pour cela qu’Erdoğan se permet d’insulter Emmanuel Macron, sans qu’il y ait une réaction très violente. Il se permet de menacer une frégate de l’armée française, car il a ce moyen de pression. Le discours officiel était « on doit être neutre ». C’est cela qui m’a vraiment scandalisé.

    Compte tenu de son histoire et de ses engagements, y compris en ce moment contre l’islamisme au Mali où on perd des soldats, la France ne peut pas être neutre dans un conflit où un des belligérants utilise des mercenaires djihadistes qui sont nos ennemis et les ennemis de tout le monde. C’est ce deux poids deux mesures qui est absolument honteux et scandaleux, et encore plus honteux pour l’Arménie qui est un pays et un peuple amis historique depuis des siècles et des siècles et pas seulement depuis le génocide et ses rescapés. C’est le plus vieux peuple chrétien et, quoi qu’on en dise, la France est une vieille nation chrétienne, qui a certes évolué, mais qui est tout de même une vieille nation chrétienne. Il y a une alliance, une amitié et 600.000 Français d’origine arménienne en France. Rien que pour tout ce que les Arméniens ont apporté à la France, on leur devait d’être beaucoup plus présents pendant le conflit et après le conflit. En termes humanitaires, on l’est un peu. Les Arméniens sont touchés, mais c’est insuffisant, notamment pour ce fameux patrimoine spirituel, religieux arménien qui se trouve aujourd’hui dans des zones contrôlées par l’Azerbaïdjan. Le but des Turcs et des Azéris est d’effacer les Arméniens et toutes traces d’arménité dans cette région. Ils ont commencé à le faire en 1915. Savez-vous comment on appelle les Arméniens, quand on est Turc ? Les restes de l’épée. Cela veut dire que l’on n’a pas tout à fait fini le travail. C’est peut-être ce qui est en train de se jouer, là-bas, et c’est pour cette raison qu’il faut au moins alerter. Il faut terminer le travail entamé par Enver Pacha. Il est d’ailleurs célébré à Bakou, le 10 décembre, par Erdoğan et par Aliyev comme étant un héros de la Turquie. Enver Pacha est un des trois organisateurs du génocide arménien. Là encore, la diplomatie se tait. C’est proprement scandaleux. C’est peut-être compréhensible par les raisons que j’évoquais tout à l’heure, mais je crois que l’on ne peut pas rester insensible et muet. À sa petite échelle, les uns et les autres, on essaie tous de rappeler ces vérités et ces scandales, comme par exemple Bernanos. Il y a 80 ans, il essayait aussi de dénoncer les scandales de la vérité.

     

    Jean-Christophe Buisson

    directeur-adjoint du Figaro Magazine
  • « Le terrorisme islamiste n'est pas soluble dans le bien-être matériel »

     

    Par Guillaume Perrault 

    « Après des décennies de mauvaise conscience, la France doit retrouver l'estime de soi et se sentir légitime à assumer des décisions » : Malika Sorel-Sutter a donné au Figaro un nouvel entretien [18.07] très intéressant suite à la tragédie de Nice. « Est-ce un état d'esprit qu'il faut changer ? Oui » nous paraît être l'essentiel de cet entretien. Et l'essentiel tout court.  LFAR

     

    XVM82f302c6-4cf5-11e6-b862-dbb9db7f780e.jpgQue penser de l'identité du terroriste présumé, un Tunisien vivant à Nice, délinquant de droit commun mais inconnu, semble-t-il, des services de renseignements ?

    La nationalité n'est plus une donnée suffisante, ni même pertinente, pour comprendre ce qui se produit. Ce même individu aurait pu être tout aussi bien franco-tunisien, ou franco-ce-que-l'on-veut, ou même français de souche récemment converti puis radicalisé sous l'effet d'un prosélytisme soutenu. Le virage amorcé par les principaux pays sources de l'immigration en vue de renouer avec leurs fondamentaux religieux aussi bien que l'évolution géopolitique des dernières décennies incitaient à la plus grande prudence. Or, partout en Europe, ce n'est pas cette option qui a été choisie. Les sociétés occidentales, devenues temples de la consommation, se sont laissé convaincre par les faiseurs d'opinion que le bien-être matériel était la clé de tous les problèmes ou presque. Nice, après d'autres terrifiants événements, y apporte un cinglant démenti.

    Quelles politiques de fond vous semblent urgentes ?

    Vaste programme! Il faut déployer, simultanément, l'ensemble des actions qui s'imposent. Dès 1981, Georges Marchais réclamait de « stopper l'immigration officielle et clandestine ». C'est une nécessité. En effet, l'importance des flux migratoires a fini par rendre quasi impossible l'intégration culturelle d'une partie de ceux qui se trouvaient déjà sur le sol européen et entraîné la régression du niveau d'intégration d'une partie des enfants de l'immigration. Par ailleurs, une réforme du Code de la nationalité doit être menée pour que les élites ne puissent plus s'affranchir du Code civil, qui ordonne que « nul ne peut être naturalisé s'il ne justifie de son assimilation à la communauté française ». L'octroi de la nationalité française doit être une mesure individuelle, en aucun cas groupée et encore moins automatique. Affubler un être humain d'une identité qu'il n'a pas pleinement faite sienne peut engendrer souffrance et, en cas de dissonance identitaire, violence retournée contre soi ou les autres. Le droit du sol doit être aboli, ainsi que l'acquisition de la nationalité française par mariage. La carte d'identité française, rappelons-le, outre qu'elle confère le statut d'architecte du projet de société, constitue également un titre de propriété sur une terre.

    Est-ce un état d'esprit qu'il faut changer ?

    Oui. En dépit des moyens considérables que la France consacrait au volet immigration-intégration, les élites, plutôt que d'en faire état, ont persisté dans la politique de la culpabilisation-repentance et de la « lutte contre les discriminations », qui aboutit à faire passer chaque Français pour un raciste potentiel. Comment espérer une cohabitation harmonieuse après avoir semé tant de graines de ressentiment? Il doit être mis un terme à toutes les actions politiques qui ont pour fondement ces idéologies, à commencer par la discrimination positive que les élites s'appliquent à déguiser sous de nobles appellations. Faire tomber les masques est le chemin obligé pour restaurer notre démocratie. L'éducation des jeunes générations est le nerf de la guerre. Une partie de ce qui a été fait devra être repensée, et parfois défait, à commencer par la dernière réforme du collège ou l'introduction des langues d'origine à l'école primaire. La langue est un enjeu décisif. Enfin, il faut restaurer et sanctuariser la liberté d'expression. Seul un langage de vérité permettra une large prise de conscience de la vulnérabilité de la France.

    Peut-on prendre des mesures plus contraignantes que celles qui existent déjà sans que le Conseil constitutionnel les déclare contraires à la Constitution ?

    Le défi que les Français doivent relever est celui de la continuité historique de la France et de son peuple. Le général de Gaulle, qui «était d'un réalisme froid», selon l'expression de l'historien François Kersaudy, serait-il resté passif ou aurait-il brisé ses fers pour prévenir l'irrémédiable ? Pour de Gaulle, « un homme peut avoir des amis ; une nation, jamais ». Un homme d'État ne perd jamais de vue l'intérêt supérieur de la nation. Par la gravité extrême de la situation dans laquelle elle se trouve, la France a besoin d'hommes et de femmes de cette trempe. Les autres pourront revenir amuser la galerie quand la paix sera revenue.

    Si nous sommes en « guerre », comme l'assure le premier ministre, doit-on renoncer à certaines activités du temps de paix comme les rassemblements de masse, cibles de choix pour des carnages ?

    Le président aussi dit que nous sommes en guerre, et tous deux répètent en boucle qu'il nous faut rester unis. Unis sans condition? Pour ce qui est des rassemblements de masse, à moins de considérer que notre pays doit cesser de vivre, nous ne pouvons pas tout interdire. Les annulations ou interdictions ne doivent être prononcées qu'au cas par cas, sur la foi de renseignements faisant état de menaces précises ou de suspicions fortes. Une interdiction globale n'écarterait pas la menace. C'est le fond du sujet qui doit être traité. Nous payons ici le prix de l'impéritie de notre classe politique, dont le renouvellement ne se fait plus qu'à la marge. Les Français ont accepté ce qu'ils n'auraient jamais dû : être dépossédés de leur liberté d'être français. Ils auront à cœur de reconquérir ce droit. 

    Dernier ouvrage publié: « Décomposition française. Comment en est-on arrivé là ? » (Fayard, novembre 2015), prix littéraire « honneur et patrie de la société » des membres de la Légion d'honneur.

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    Guillaume Perrault    

    Grand reporter au Figaro et à FigaroVox       

  • Gens de France : de l'Assemblée générale 2010 à l'Assemblée générale 2011...

            On s'en souvient, l'an passé - année Henri IV oblige - le Prince avait choisi de présenter l'oeuvre de son ancêtre - y compris dans des aspects parfois méconnus... - et avait choisi de dialoguer avec un journaliste de Radio Notre Dame; puis un petit clip vidéo nous avait montré les progrès du prince Gaston; Lorant Deutsch, absent, était cependant présent sous forme d'un clip, lui aussi...

             Cette année, le Prince - qu'Emmanuel Le Roy-Ladurie et Mgr Brizard sont venus saluer - a choisi de reprendre un thème qui lui est cher : l'action sociale. Et c'est avec Frédéric Rouvillois - qui vient de donner une contribution signalée au Cahier de l'Herne - qu'il a dialogué....

            Comme toute Assemblée générale, la soirée a débuté par les habituels rapports "techniques" (financiers...) et moraux : le rapport moral  a, justement, permis à Christian Franchet d'insister sur "le lien social" et l'activité sociale, axe fort de l'action du Prince Jean.

             On se souvient de la visite de Saint Denis, mais il y a eu aussi cette autre visite à Reims, où le Prince a emmené 60 enfants, de 5 à 15 ans, visiter la cathédrale des Sacres. Ces enfants viennent du quartier de Clignancourt, dans le XVIIIème arrdt. de Paris, donc d'un quartier souvent qualifié de "difficile", et n'avaient jamais entendu parler de ce dont le Prince les a entretenus ce jour-là....

             Christian Franchet a également rappelé l'action du Prince en ce qui concerne les PME (à travers le Comité Vauban) ses conférences sur le Management capétien : bref, des actions concrètes pour un prince qui se veut sur le terrain....

             Ensuite, il y a eu ce dialogue entre le Prince et Frédéric Rouvillois, dont l'humour et la profondeur ne furent pas absents : le Prince avait choisi, cette année de présenter les grandes figures des Rois à travers les siècles, de Clovis jusqu'à Louis-Philippe; puis celle des Princes, jusqu'à son grand'père, le Comte de Paris. Mais, toujours, en montrant combien fut fort chez eux le désir de justice (Saint Louis rendant la justice à Vincennes), de proximité avec les humbles et les pauvres (Louis XVI distribuant des aumônes au cours d'un hiver rigoureux), bref, ce lien social, indissociable de la durée, que les Rois ont tissé durant mille ans avec le peuple : "la royauté est populaire dans son essence" dit le Prince, et les exemples qu'il a choisis le montrent bien. Cette tradition ne s'est pas interrompue : les temps changent, mais ce souci de justice, de proximité avec les humbles ne change pas....

             Très prochainement sera postée, sur le Site du Prince, une vidéo dont on a pu voir quelques extraits hier....

              Puis le buffet, très chaleureux et très fourni, comme l'annnée dernière, a permis à tous de se retrouver (on était venu de la France entière...), d'entourer un Prince et une Princesse qui ont su - comme d'habitude - se rendre présents et accessibles à tous, et, tout en se restaurant, d'en profiter pour parler de mille et une choses avec... et d'évoquer les progrès accomplis depuis l'année dernière. On pouvait croiser Gérard Leclerc, Jean Sévillia, Yvan Aumont, Jacques Trémollet de Villers... au milieu des amis retrouvés d'un peu partout 

               Car, si beaucoup reste à faire, beaucoup a été fait, et des progrès, il y en a eu, et les bonnes nouvelles n'ont pas manqué...

               Tout le monde se souvient avec quelle allure et quelle distinction la Princesse Philoména a représenté non seulement la Famille de France mais, de fait, la France tout court lors des obsèques d'Otto de Habsbourg, à Vienne. On pouvait être fier, et on l'était, de dire aux gens : Voyez notre Famille, voyez la Princesse, le petit Prince, comme ils nous renvoient une image positive et saine - et même joyeuse, malgré les circonstances... Dans cette actualité et ce monde politique si souvent moroses, au mieux, repoussants, au pire.....

                Pendant ce temps, le Prince Jean était, pour un long voyage de onze jours, en Asie centrale, au Tadjikistan. Il a, évidemment, pu nouer de nouveaux contacts, tisser de nouveaux liens, compléter et parfaire sa connaissance des problèmes, étudier de nouvelles thématiques, dominer de nouveaux dossiers... Rencontrer des militaires, des diplomates, des économistes, des scientifiques et des chercheurs, mais aussi des petites gens, des gens de la base, si l'on peut dire, ces rencontres-là étant aussi indispensables que les autres si l'on veut appréhender vraiment les choses dans leur infinie complexité...

             La liste des pays que le Prince a visités s'allonge, donc, et parallèlement, en sillonnant ainsi et le monde et la France, sa connaissance des choses et des réalités, des gens et de leurs problèmes : le Prince poursuit, améliore, approfondit, parfait sa préparation. Il devient chaque jour un peu plus ce qu'il est : un recours, qui se prépare et qui se forme... Une chance pour la France....

             On a aussi appris avec joie la bonne nouvelle : cette Famille de France, qui nous sourit déjà de ses trois visages, va bientôt s'agrandir et nous offrira très vite - pour janvier... - un quatrième sourire. Une Famille heureuse déjà forte et unie, qui se renforce : beau symbole pour nos temps troublés....

             Mais il y a eu aussi une quatrième "grande" chose cette année : ce nouveau Site du prince, un outil indispensable, qui sert déjà beaucoup le Prince, en lui donnant une notoriété et une crédibilité plus grandes. Et ce n'est qu'un début, car le dynamisme entraîne le dynamisme, et le mouvement démultiplie le mouvement : il suffit de consulter les statistiques que fournit le site Viméo - qui héberge les vidéos du Site du Prince - pour voir l'intérêt que suscitent, justement, ces vidéos, de plus en plus regardées et de plus en plus téléchargées. Et, plus encourageant, un intérêt qui ne faiblit pas, mais qui au contraire va croissant....

            Encore à ses débuts, ce Site, par sa qualité et par l'image de sérieux - bien méritée - qu'il donne du Prince est indéniablement un plus pour lui : pour son action, pour se faire toujours plus et toujours mieux connaître, mieux comprendre et, finalement, mieux apprécier et mieux accepter....

           Après cette AG et cette soirée d'hier, il nous reste donc à repartir de plus belle pour la tâche qui reste à accomplir : tâche immense et difficile, ne nous leurrons pas, mais, quand les choses ont-elles été faciles ? Pendant la Guerre de Cent ans ? Pendant les Guerres de Religion ? Pendant et après la Révolution ?

            Nous savons, avec Bainville, que tout a toujours très mal marché, et que tout a toujours été très difficile : "Les temps sont durs, mais ce sont nos temps" dit le Prince.

            Et nous sommes résolus, aujourd'hui plus qu'hier, à marcher avec lui, à le suivre, à l'aider et à soutenir son action : une action pour le Bien commun, une action pour la France, autour de notre Famille de France, autour du Prince Jean !.....

  • A propos de Mayotte, Yves Jégo se dit ”perplexe” : on le comprend.....

                En mars prochain, un référendum devrait avoir lieu à Mayotte, dans la perspective de sa départementalisation. Mais l'affaire est loin d'être simple, et s'annonce plutôt mal (très mal...) engagée.

                Et l'on hésite entre amusement et franche inquiétude lorsqu'on parcourt les dépêches d'agence, dont voici un petit florilège.

                Instructif, et.... consternant !

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                Plusieurs députés soulignent la nécessité pour la collectivité départementale de Mayotte de disposer d'un état civil fiable dans la perspective de sa départementalisation, qui fera l'objet d'un referendum en mars : "La départementalisation est impensable, je répète, impensable, si l'on n'a pas préalablement établi un état civil fiable", a mis en garde début novembre le député (app. PS) René Dosière, lors de l'examen du budget de l'outre-mer à l'Assemblée nationale.

               "Entre la réalité qui existe sur le terrain et la perception que l'on a de cette réalité à Paris, il y a un gouffre. Si nous faisons la départementalisation de Mayotte sans avoir réglé au préalable le problème de l'état civil, nous irons à la catastrophe", a-t-il averti.

               La ministre de l'Intérieur et de l'Outre-mer Michèle Alliot-Marie a reconnu le 21 octobre devant la commission des Lois que "l'état civil n'est valablement établi que pour environ la moitié de la population", ajoutant que le gouvernement allait "essayer d'accélerer le travail de la commission de révision de l'état civil". Or, souligne Didier Quentin (UMP), dans un rapport pour avis, la commission de révision de l'état civil ne dispose que d'une quarantaine de rapporteurs et d'un secrétariat de "cinq agents". Selon Victorin Lurel (PS), "25.000 actes seulement ont été produits depuis 2000", dans un territoire où coexistent deux types d'état civil, un musulman et un classique.

               "L'Insee nous dit que Mayotte compte 190 000 habitants. Mais on se demande comment on peut recenser la population de Mayotte", a relevé M. Dosière, qui a présidé une mission d'information sur l'immigration à Mayotte en 2005. Selon lui, "dès qu'un fonctionnaire ou quelqu'un représentant l'ordre public met les pieds dans les bidonvilles ou les favelas, tout le monde fuit partout". En réalité, affirme M. Dosière, le nombre de clandestins, dont la plupart viennent de l'île voisine d'Anjouan (Comores) "augmente chaque année". Il représente "en gros un tiers de la population".

               Lorsque l'on compare le nombre d'électeurs inscrits avec la population, le rapport se situe à 34%, alors que ce taux est compris entre 60% et 70% dans tous les autres départements français, y compris ceux d'outre-mer. Un député a raconté l'histoire savoureuse d'un Mahorais voulant se faire naturaliser français dont l'acte de naissance présenté à un magistrat le faisait apparaître comme "plus âgé que sa mère". "Quelques jours après, l'intéressé est revenu avec un acte de naissance parfaitement bien fabriqué et qui lui permettait de pouvoir acquérir la nationalité française".

                "Dans ces conditions, le problème n'est pas tellement de savoir si les papiers sont vrais ou faux -on a le sentiment que la plupart sont faux- mais de savoir s'ils sont vraisemblables ou pas", a-t-il dit, sans rire.

               Laissons le mot de la fin (?) à Yves Jégo : "La commission de révision de l'état civil obtient des résultats qui me laissent perplexe", a affirmé le secrétaire d'Etat à l'Outre-mer Yves Jégo, qui a demandé au nouveau préfet de Mayotte un rapport avant la fin de l'année. 

               Ouf, on respire, on est sauvés ! Le Pays Légal a demandé un rapport !..... En attendant, la situation, à Mayotte comme ailleurs dans notre République fille des Lumières, se rapproche largement plus de la pétaudière et du foutoir intégral, que de quelque chose venu de la Raison (fut-elle déesse....)

  • Mai 68, l'analyse d'Eric Zemmour...

               Voici le texte du très intéressant et très pertinent article dans lequel Eric Zemmour a évoqué Mai 68, dans Le Figaro Magazine du 10 mai 2008.

               Fin et profond, comme d'habitude, Eric Zemmour va une fois de plus au fond des choses, non sans humour.

               Dans un article où tout est intéressant, bien vu et bien analysé, on notera entre autre qu'il a très bien saisi l'importance de la dissolution du peuple ("...il faudra dissoudre le peuple...."), que nous avons mainte fois évoquée; ainsi que de cette sorte de "classe ouvrière bis" formée d'immigrés sous-payés, qui joue directement contre l'économie nationale et contre les intérêts des travailleurs eux-mêmes.....

     

    Du col Mao au Rotary.

    La vague hédoniste de Mai 68 a favorisé la société de consommation. Et l'idéal libéral-libertaire a permis à certains soixante-huitards de faire carrière.

     

              Karl Marx nous avait prévenus. Les évènements historiques se répètent deux fois, la première en tragédie, la seconde en farce. Les enragés de Mai 68 avaient l'impression d'ajouter une page à celles, déjà glorieuses, des révolutions françaises: 1793, 1848, la Commune. En face, le général de Gaulle les avait précédés: Mai 58 fut un Brumaire parfait. Et le voyage à Baden-Baden sera une fuite à Varennes réussie.

              Un Mai 68 peut en cacher un autre: le combat décisif se déroule au sein de la gauche entre gauchistes et communistes, pour le contrôle de la classe ouvrière. Tout pousse communistes et gaullistes à une alliance objective: les souvenirs de la guerre; la prédilection du grand frère soviétique pour la politique d'indépendance du Général; et, plus profondément, une même conception du monde, qui repose sur le respect des hiérarchies, la famille patriarcale, le patriotisme. En face, les "gauchistes"sont de farouches internationalistes, les dirigeants étudiants, qu'ils soient libertaires ou révolutionnaires puritains, croient encore pouvoir concilier les revendications sociales et sociétales. Leur rêve est d'entraîner la classe ouvrière derrière eux. Ce que ne tolèrent pas les communistes.La CGT leur ferme les portes de Renault Billancourt. Cette rencontre manquée est une des scènes fondatrices de notre modernité politique. Dépités, les chefs du mouvement étudiant conserveront un ressentiment profond, aggravé lorsque les ouvriers finiront par accepter les généreuses augmentations de salaires accordées par les accords de Grenelle. Les ouvriers ne seront plus, à leurs yeux, que des petits bourgeois. Ils avaient manqué à leur destin révolutionnaire . Il faudrait "dissoudre le peuple". Les uns tourneront leurs regards (ils avaient déjà commencé lors de la Guerre d'Algérie) vers le sud de la Méditerranée, et ces nouveaux "damnés de la terre"; les autres se tourneront vers les femmes, "l'opprimée de l'opprimé".Karl Marx -encore lui !- avait jadis analysé le rôle de "l'armée de réserve du capitalisme" qui accepte un salaire inférieur pour un travail similaire, et permet au patronat de contenir les revendications salariales des ouvriers en place. A partir des années 70, l'entrée massive des femmes et des immigrés sur le marché du travail tiendra ce rôle-là.

              Mais les soixante-huitards n'en avaient cure. Ils étaient passés à autre chose. Les plus farouches, sans doute les Saint Just ou les Baader qu'on n'aurait pas, s'en allèrent quérir auprès de Dieu la quête d'absolu que la politique n'avait pu leur donner. Les plus stratèges se convertirent à la religion des droits de l'homme, et, au nom de la lutte antitotalitaire, passèrent d'un maître à l'autre, d'un empire à l'autre, de l'URSS (avec un intermède chinois) à l'Amérique. Leur seule constante fut l'aversion pour la France, jetée aux poubelles de l'Histoire. Les plus talentueux, les plus soucieux de reconnaissance sociale, réussirent dans la publicité, les médias, la communication.

     

              Le triomphe du narcissisme.

              Ils furent les fers de lance du nouveau capitalisme, qui reposait sur la consommation, et non plus sur l'épargne, l'hédonisme et non le puritanisme, l'individualisme et non plus la famille. Dès les années 60, l'américain Christopher Lasch avait bien montré comment le narcissisme individualiste servait les intérêts de la nouvelle aliénation capitaliste. Dès 1978, Régis Debray montrait comment les libertaires soixante-huitards, en détruisant la famille patriarcale, la Nation, l'État, les frontières, avaient abattu les derniers remparts à la domination du marché.

              Avec beaucoup plus d'efficacité que les révolutionnaires soixante-huitards, les patrons du CAC 40 et leurs délocalisations, les technocrates de Bruxelles et de l'OMC, imposeraient partout la mort des frontières et l'affaiblissement des États. Et rétabliraient ainsi des profits minés par l'inflation et la hausse des salaires.

              C'est ainsi que nos "enragés de Mai" jouèrent le rôle finalement peu enviable - mais très profitable à la carrière de ses figures les plus médiatiques- "d'idiots utiles" du capitalisme.