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  • Avortement : Le cap du totalitarisme barbare est-il dépassé ?, par Jean Pierre Denis.

    1A.jpgSource : https://www.actionfrancaise.net/

    La réponse de Jean Pierre Denis à la censure arbitraire.

    «  Les chrétiens de gauche qui se sont toujours tenus pudiquement à l’écart des courants pro-vie dont ils parlent en ce pinçant le nez, (car pour eux ils représentent l’abomination de la désolation) sont rattrapés par la patrouille pour avoir seulement nuancé leur approbation de l’ivg. Libé ce journal connu pour son objectivité, incapable de porter des jugements définitifs sur ceux qui ne s’inscrivent pas dans sa propre mouvance idéologique, a été choisi par les GAFA pour exercer le contrôle de l’expression publique sur les réseaux sociaux. «  Libé  » est pris en flagrant délit de «  flinguage  » à vue sans sommation.

    Il faut dire que la loi bioéthique votée en catimini pendant que les français, dont la majorité s’en fiche royalement, sont sur les plages, atteint des sommets  : Il ne s’agit plus d’avortement, mais d’infanticide.

    Jean Pierre Denis, n’est pas le dernier perdreau de l’année, on peut contester ses prises de position de chrétien démocrate, mais on doit respecter sa profondeur spirituelle et son honnêteté intellectuelle, ce qui fait que ce journaliste et écrivain, ne peut être combattu autrement qu’avec des armes loyales, celles de l’honnête controverse chère à l’Action française.

    On pourrait s’amuser de voir ceux qui nous ont toujours traités comme des ennemis du genre humain, se voir eux-mêmes ravalés au rang de l’obscurantisme réactionnaire cloué au banc de la société.

    Mais nous aurions tort, car cela signifie que les masques souriants de la mondialisation heureuse avec son cortège d’idéologies mortifères, deviennent grimaçants. Cela veut dire que la culture de mort s’affiche sans complexes désormais et que nous sommes maintenant acculés et dos au mur. Et que toutes les prises de consciences, même tardives, même issues de notre exact opposé, sont les bienvenues. Nous devons fédérer toutes les forces de vie pour l’ultime combat.  »(ndlr,O.Perceval)

    ” Chers amis, il m’est arrivé une drôle d’histoire. Une histoire qui m’a complètement stupéfait, au point que j’ai mis plusieurs jours à réagir, alors même qu’elle vient confirmer tout ce que je redoute depuis des années. Je vous raconte… Et pardon si c’est un peu long, je crois que chaque détail est important.

    1/ Tout a commencé le plus tranquillement du monde. Samedi, j’ai posté une petite photo. Pornographique ? Violente ? Choquante ? Pas du tout ! J’ai simplement diffusé … un document officiel. Il s’agit d’un article de la loi dite de bioéthique que l’Assemblée nationale venait d’adopter nuitamment. Ce minuscule bout de travail législatif serait passé inaperçu si Pierre Jova ne l’avait mentionné dans La Vie et… si je n’avais fait mon post. Il s’agit en fait d’un « cavalier », un de ces texticules que des groupes de pression, ou parfois le gouvernement lui-même, rajoutent en marge de tel ou tel projet de loi bien qu’il n’entre pas vraiment dans l’objet de celle-ci. En l’occurrence, l’amendement socialiste inscrit la « détresse psycho-sociale » comme motif légal d’interruption médicale de grossesse.

    2/ Mon post était assorti d’un petit commentaire. Je disais craindre que l’inscription dans la loi d’une notion aussi vague ne permette progressivement de contourner le délai légal de l’IVG en passant par la voie de l’interruption médicale de grossesse, qui peut avoir lieu jusqu’au terme. On peut ne pas partager mon inquiétude, mais elle était exprimée en termes particulièrement modérés et en tous cas elle relève de la libre opinion.

    3/ Par un canal que je ne connais pas et sans que j’en sois averti, mon post a été dénoncé à Libération par un courageux anonyme, effrayé que je révèle la vérité. Il faut savoir que cet ancien quotidien libertaire, n’étant pas à un reniement près, exerce désormais un service de censure mercenaire appelé pompeusement et en bon français « Checknews » (sic). Le fait est que tous ceux qui ont partagé mon post ont reçu un avertissement de Facebook en forme de marque d’infamie gravée au fer rouge : « Information partiellement fausse – vérifié par des médias de vérification (re-sic) indépendants (re-re-sic). On les invite à « en savoir plus » en lisant… Libération !

    4/ C’est d’ailleurs ainsi que je l’ai appris lundi dernier, par des lecteurs indignés. Car sur ma page, Facebook ne m’a averti de rien. Et Libération, qui a une curieuse conception de la vérification, s’est bien gardé de me contacter avant de commettre son forfait. Passons sur ce journalisme « indépendant » stipendié par les GAFA et sur ces « vérificateurs de vérification » qui jugent « partiellement faux »… le cliché d’un texte de loi qui se trouve sur le site de l’assemblée nationale.

    5/ A ce stade, comme ce post sera partagé, il n’est peut-être pas inutile de rappeler qui je suis et quelles sont mes positions. Formé spirituellement chez les cathos de gauche et politiquement dans le moule rocardien, je suis intellectuellement quelqu’un de modéré, autrefois on aurait dit social-démocrate, peut-être un peu démocrate-chrétien sur les bords quand je suis pris d’incontrôlables démangeaisons conservatrices. Par ailleurs, comme la plupart des catholiques je ne suis pas opposé à la loi Veil. En revanche, je juge que son équilibre a été perdu au fil des réformes successives, et j’ai combattu comme une inquiétante censure la création du « délit d’entrave ». De « moindre mal » à l’époque de Simone Veil, l’avortement est devenu progressivement à la fois un totem et un tabou. Enfin, loin d’être un idéologue commentant ce qu’il ignore, je sais de quoi je parle, connaissant très bien, personnellement et professionnellement, la problématique de l’IMG.

    6/ Devant la vague d’indignation sur les réseaux sociaux, et au bout de 48 heures particulièrement pénibles pour moi, Facebook vient et de retirer son avertissement, me rendant ainsi justice et raison. Mais toujours sans m’avertir. Et sans avertir non plus les internautes qui avaient reçu le message diffamatoire. Et sans s’excuser du tort qui a été fait à ma réputation. J’attends aussi, bien évidemment, les excuses de Libération, qui pour l’instant ne reconnaît qu’une « maladresse » et me le fait courageusement savoir par un webmaster anonyme. Titulaire de la carte de presse n° 75770 depuis environ 27 ans, directeur d’un grand hebdo pendant quatorze ans, je me suis senti sali. La diffusion de l’avertissement de Facebook auprès des personnes qui avaient partagé mon post est attentatoire à ma réputation et je pourrais envisager de demander réparation. Que ces mercenaires de la censure se disant journalistes se contentent pour l’instant de mon confraternel mais insondable mépris.

    8/ A tous ceux qui m’ont spontanément soutenu depuis deux jours, un immense merci. Il va falloir se battre. La liberté d’expression va de moins en moins de soi, et pas seulement dans les « démocraties illibérales », cet improbable et inquiétant oxymore. Désormais, même l’énoncé de faits exacts, assortis le cas échéant d’un commentaire très modéré, peut vous exposer à de réels ennuis. Dans l’un des pays les plus démocratiques qui soit, la France. Et avec la complicité de certains médias, ce qui est proprement atroce. J’observe depuis plusieurs années, et je l’ai souvent écrit dans mes éditos de La Vie, la montée de cette double pulsion liberticide. Les Torquemada et les Tartuffe d’aujourd’hui ne sont plus dans l’Eglise. Hélas, ils n’ont pas disparu. Les voici qui officient dans les médias ou sur les réseaux sociaux. D’un côté, le trumpisme, cette horreur. De l’autre, une censure par intimidation, au nom de la pureté d’opinion ou du politiquement correct, et ce bien au-delà des cercles gauchistes.

    Nos libertés sont désormais prises en étau. Ecrasées par les Poutine, les Xi Jimping, les Erdogan, elles sont désormais minées au nom du progrès. Dans beaucoup de grands journaux, le résultat se fait sentir, comme le dit avec lucidité Bari Weiss, une journaliste centriste comme moi, qui a dû démissionner d’un grand quotidien réputé libéral, le New York Times. https://www.lexpress.fr/…/demission-fracassante-au-new-york… « L’autocensure est devenue la norme » explique-t-elle à propos des Etats-Unis, et je pense que la France n’échappe pas à ce danger.

    Ceci alimente évidemment le scepticisme du public, qui se défie de plus en plus des médias et tombe dans les pièges du populisme. Spirale dramatique. Pressés d’agir contre « la haine » les réseaux sociaux tapent désormais à tort à travers. J’en ai fait les frais. C’est sidérant mais c’est ainsi. Le coup tombera sur d’autres. Des jours difficiles attendent les amis de la liberté. Courage et amitié à tous.

    Pour finir, je vous invite à lire le long mais remarquable post d’Erwan Le Morhedec, dont je partage chaque mot : http://www.koztoujours.fr/mon-opinion-en-liberte-conditionn…”

  • Série : Le legs d'Action française ; rubrique 10 : Nécessité d’un examen critique rigoureux en vue de l’avenir, par Géra

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

    Voi­ci la dixième et der­nière rubrique de Gérard Leclerc sur « Le legs de l’Action fran­çaise ». Il nous invite à un exa­men cri­tique rigou­reux des crises qui ont secoué le mou­ve­ment néo-roya­liste. Cet exa­men cri­tique exclut toute ten­ta­tion de vou­loir plai­der sa « non-culpa­bi­li­té » auprès des idéo­logues de la pen­sée domi­nante. Ce serait recon­naitre la légi­ti­mi­té de l’hégémonie idéo­lo­gique en place. Notre exa­men cri­tique doit expli­quer le sens d’une posi­tion en fonc­tion du contexte qui a sans doute chan­gé, mais sans prendre les cri­tères de nos adver­saires idéo­lo­giques.

    gerard leclerc.jpgOui, il nous faut faire la cri­tique des armes sans pour autant désar­mer. Oui, il nous faut trou­ver de nou­velles armes et écar­ter celles qui ne sont plus effi­caces. C’est pour cela que Gérard Leclerc pro­pose, aux mili­tants et cadres du mou­ve­ment, des pistes pour inven­ter un futur qui ne sera pas une morne répé­ti­tion, mais une aven­ture pour la France des temps pro­chains. (ndlr)

    Le legs de l’Ac­tion fran­çaise est quelque chose d’impressionnant, qui doit être reçu avec toute la recon­nais­sance, et même toute la pié­té néces­saires, mais aus­si avec l’es­prit de ce que Maur­ras appe­lait «  la tra­di­tion cri­tique » .

    C’est le contraire, je l’ai mon­tré, d’un « long fleuve tran­quille  ». L’histoire de l’Action fran­çaise s’a­na­lyse comme une longue suite d’é­preuves, elle ne sau­rait échap­per à des crises qui sont le reflet de diverses évo­lu­tions his­to­riques. De telles crises, qui ont mar­qué la vie du mou­ve­ment depuis ses ori­gines sont, à vrai dire, inévi­tables. Sans doute fau­dra-t-il ana­ly­ser les plus impor­tantes d’entre elles. Je pense notam­ment à celles-ci :

    - l’exclusion d’Henri Lagrange (Cercle Prou­dhon) en 1913 ;

    - la condam­na­tion par Pie XI en 1926 ;

    - la rup­ture de Ber­na­nos en 1932 ;

    - le désastre de 1940, Vichy, la Résis­tance et la Libé­ra­tion ;

    - la rup­ture de Pierre Bou­tang en 1955 ;

    - la rup­ture de la Nou­velle Action fran­çaise, en 1971, à laquelle j’ai été per­son­nel­le­ment asso­cié.

    Par­mi les crises catas­tro­phiques subies par l’Action fran­çaise, j’ajouterai la mort de Jacques Bain­ville en 1936. Il m’est arri­vé d’affirmer que c’était la plus grave d’entre elles. Durant la Seconde Guerre mon­diale, la luci­di­té de l’auteur des Consé­quences poli­tiques de la paix a fait tra­gi­que­ment défaut au jour­nal, au mou­ve­ment et à Maur­ras lui-même. À par­tir de la cer­ti­tude que le maré­chal Pétain était l’unique pro­tec­teur de la France acca­blée face à la vic­toire écra­sante de l’Allemagne nazie, Maur­ras s’est arc-bou­té sur une adhé­sion qui, à par­tir de novembre 1942, a per­du à nos yeux sa cré­di­bi­li­té. Son neveu et fils adop­tif, Jacques Maur­ras, était d’avis qu’il aurait fal­lu sus­pendre alors la publi­ca­tion du quo­ti­dien. L’échec de Vichy a été cruel pour l’Action fran­çaise et celui qui l’incarnait, mais aus­si pour la cause qu’ils ser­vaient. Il importe pour l’avenir de faire de cette période un exa­men cri­tique authen­tique : ni condam­na­tion sans appel récu­sant l’objectivité, ni ten­ta­tive apo­lo­gé­tique pour ten­ter d’excuser et, du coup, fuir l’analyse par­fai­te­ment rigou­reuse qui s’impose.

    Cela n’est pas seule­ment vrai pour cette période cru­ciale. C’est l’ensemble d’une his­toire qu’il s’agit d’envisager dans toute son ampleur et sa com­plexi­té. Loin de tout déni­gre­ment, il s’agit de recon­naître en quoi l’Action fran­çaise a pu éclai­rer l’opinion pen­dant un demi-siècle, en quoi elle a failli. Ce qui est cer­tain, c’est qu’en dépit de ses défauts, elle demeure une des écoles poli­tiques les plus mar­quantes du XXe  siècle. Sa fécon­di­té s’est avé­rée avec les figures de pre­mier plan, celles d’un Pierre Bou­tang et d’un Pierre Debray qui ont su assu­mer l’héritage et le faire fruc­ti­fier. Aux nou­velles géné­ra­tions de reprendre la tâche, avec la gra­ti­tude néces­saire et l’acuité du regard. Mais aus­si avec toutes les audaces pour inven­ter un futur qui ne sera pas une morne répé­ti­tion, mais une aven­ture pour la France des temps pro­chains.

    Gérard Leclerc ( confé­rence au CMRDS 2019 )

    Retrou­vez les rubriques de l’été mili­tant 2020, sur le site de l’Action fran­çaise.

    Il vous suf­fit de cli­quer sur le lien sou­li­gné. Elles sont pro­po­sées dans l’ordre de publi­ca­tion.

    Par Chris­tian Fran­chet d’Esperey

    1 – Est-il oppor­tun de s’accrocher à un homme aus­si décrié ?

    2 – Les posi­tions les plus contes­tées de Maur­ras ne doivent plus faire écran à ses décou­vertes majeures

    3 – maur­ras­sisme intra-muros et maur­ras­sisme hors les murs

    4 – Une demarche d’aggiornamento cest-a-dire de mise au jour

    Par Phi­lippe Lal­le­ment

    Le maur­ras­sisme est-il deve­nu un simple objet d etude his­to­rique

    Par Gérard Leclerc

    1. Le legs d’Ac­tion fran­çaise
    2. Maur­ras huma­niste et poete
    3. L homme de la cite le repu­bli­cain
    4. Un mou­ve­ment dote dune sin­gu­liere force d attrac­tion
    5. Crise de 1926 un nou­veau Port-royal
    6. Traces de guerre civile les quatre etats confe­deres – l anti­se­mi­tisme
    7. Bou­tang et Debray renouent avec la seduc­tion intel­lec­tuelle du maur­ras­sisme
    8. Bou­tang la legi­ti­mite revi­si­tee et l anti­se­mi­tisme aban­donne
    9. Le catho­lique pro sovie­tique Pierre Debray conver­ti au roya­lisme
  • Série : Le legs d’Action française ; rubrique 3 : L’homme de la cité, le « républicain », par Gérard Leclerc.

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

    «  Voici la troisième rubrique de Gérard Leclerc sur «  Le legs de l’Action française  ». Elle nous explique comment les deux évènements du Ralliement des catholiques à la République et ensuite celui de l’Affaire Dreyfus, ont suscité le basculement de nationalistes vers la proposition monarchique, mais aussi du royalisme vers le nationalisme. Charles Maurras en fut la cheville ouvrière.

    gerard leclerc.jpgDécouvrons la fondation de notre Action française qui perdure depuis 120 ans. Ne nous trompons pas  ; il ne s’agit pas de nous complaire dans les origines de notre mouvement-école, mais au contraire d’utiliser ce passé pour que l’Action française reste une pensée vivante pour mieux répondre aux défis d’une société démocratique de plus en plus déshumanisante.

    Ceux qui voudront allez plus loin dans la compréhension de la violence polémique au temps de l’Affaire Dreyfus, peuvent lire les articles de Maurras publiés dans la Gazette de France et mise en annexe du maitre ouvrage de Pierre Boutang  : Maurras, la Destinée et l’œuvre, Plon, 1984 ; La Différence, 1993. (ndlr, P Lallement)  »

    Enfin Maurras va être, de plus en plus, l’homme de la cité. Je dirais presque, si vous voulez, le républicain, au sens premier du terme, l’homme de la “chose publique”, de la “res publica“. C’est un homme qui va se sentir de plus en plus investi de responsabilité civique, de responsabilité vis-à-vis de la France, celle d’après 1870, quand, après avoir subi une terrible défaite, elle se trouve confrontée à une Europe instable et dominée par les ambitions allemandes. Le “républicain” Maurras, l’homme de la chose publique, va de plus en plus se distinguer par ce que Léon Daudet appelait l’angor patriæ – l’angoisse de la patrie – qui va en faire un citoyen de premier ordre, un citoyen qui va vouloir à tout prix éclairer ses contemporains, pour permettre à la France de surmonter sa défaite et affronter les étapes nouvelles de son histoire.

    Pour comprendre ce Maurras-là, le politique, le républicain, il me faut parler de deux événements fondamentaux qui sont à l’origine de l’histoire personnelle de Charles Maurras  : le Ralliement, et l’Affaire Dreyfus.

    Le premier événement, antérieur à la fondation de l’Action française date, de 1892  : dans une encyclique rédigée en français, le pape Léon XIII demande aux catholiques français de se rallier au régime républicain. Jusqu’alors, ils étaient réticents ou hostiles, l’épiscopat en tête, à l’idée d’accepter les institutions républicaines. Or le pape demande de jouer le jeu institutionnel de la IIIe République dans l’espoir de les conquérir. Maurras collabore alors à des journaux catholiques soutenant le Ralliement  : il considère la monarchie comme une institution complètement dépassée. Au début, il est, si j’ose dire, rallié au Ralliement… Ce n’est qu’après quelques années de réflexion politique intense qu’il va découvrir que, pour pouvoir surmonter la défaite de 1870 et affronter une Allemagne toujours menaçante, la monarchie est le régime qui convient le mieux à la France. Il réalise que la faiblesse structurelle de la République la rend incapable de mener, d’une manière continue, une politique étrangère cohérente. C’est là l’origine de son livre fondamental, Kiel et Tanger, qui constitue une analyse extrêmement précise de l’état des relations internationales et de la politique étrangère de la France face à l’Allemagne.

    Maurras pense que ce qui manque à la France, c’est une institution stable, permanente, ayant l’avenir devant elle, et capable de dépasser les querelles partisanes dans le souci prioritaire de protéger les Français de toutes les menaces. Un régime indépendant des partis, donc, et pouvant concevoir et conduire – c’est aussi un grand souci de Maurras – une politique militaire. Pierre Debray a consacré un certain nombre de cours aux analyses de Maurras sur la faiblesse militaire de la France face à l’Allemagne avant la Première Guerre mondiale. Il y a donc chez Maurras ce double souci d’une politique militaire forte, accompagnant une politique diplomatique intense.

    Deuxième événement capital à l’origine de l’Action française et du rôle que va jouer Maurras  : l’Affaire Dreyfus. Je ne peux malheureusement pas entrer dans les détails, mais l’Affaire Dreyfus va être un événement fondateur, avec tous les risques inhérents à une telle affaire. En deux mots, vous savez que l’officier français d’origine juive Alfred Dreyfus est accusé d’avoir livré à l’Allemagne des informations majeures sur l’armement français. Condamné par un tribunal militaire, il est déporté en Guyane. Commence alors une véritable guerre civile entre ceux qui jugent Dreyfus innocent, et ceux qui estiment que toute remise en cause de sa condamnation affaiblirait terriblement l’armée française face à la menace militaire allemande.

    Pour cette raison, Maurras va s’engager à fond dans le camp antidreyfusard. On le lui reproche ardemment aujourd’hui, l’historiographie moderne étant favorable à l’innocence de Dreyfus. Mais il faut bien voir que les choses sont loin d’être aussi simples que. Si vous voulez vous en faire une idée, je vous conseille de lire, non pas la littérature d’Action française sur le sujet, mais Notre jeunesse de Charles Péguy. C’est un livre facile à lire et très éclairant, car à l’époque, Péguy appartient au camp dreyfusard et s’est battu violemment contre les antidreyfusards.

    Que dit Péguy ? Dans ce pamphlet qu’est Notre jeunesse, il reproche à ses anciens amis dreyfusards leur antimilitarisme et leur antipatriotisme. Il est particulièrement sévère à l’égard d’un des principaux meneurs du dreyfusisme pour avoir trahi la cause de l’innocent en y associant sa passion antipatriotique et son aversion pour l’armée. Quand on ajoute au témoignage de Péguy celui de Daniel Halévy, lui aussi dreyfusard, mais qui avait exprimé très tôt ses doutes à ce sujet, on comprend la difficulté. On voit que la question ne se ramène pas à une pure confrontation entre, d’un côté, des salauds qui s’en prennent à un innocent et, de l’autre, des justes courant au secours de cet innocent.

    Mais ce n’est pas mon sujet aujourd’hui. Mon sujet, c’est que, si l’engagement antidreyfusard de Maurras est fondateur, c’est parce qu’il sera l’occasion pour lui de greffer la cause royaliste sur le nationalisme. Ce qui n’avait rien d’évident  : le mouvement nationaliste, avec Barrès, Déroulède et d’autres, s’est formé dans un climat, un milieu, une culture qui n’avaient rien de royalistes. C’est Maurras, et c’est Maurras seul, qui va imposer à la réaction nationaliste de l’époque de se faire monarchiste. C’est en observant les suites du Ralliement qu’il a réfléchi à la question institutionnelle et finalement compris la modernité et l’impérieuse nécessité de cette monarchie que jusque là il rejetait. Il va dès lors s’en faire le défenseur inconditionnel, et cela jusqu’au bout de son existence terrestre. C’est dans ce but qu’il va fonder l’Action française.

    *

    * *

    Retrouvez les rubriques de l’été militant sur le site quotidien de l’Action française (Direction Olivier Perceval)

    Par Christian Franchet d’Esperey

    1 – Est-il opportun de s’accrocher à un homme aussi décrié ?
    2 – Les positions les plus contestées de Maurras ne doivent plus faire écran à ses découvertes majeures
    3 – maurrassisme intra-muros et maurrassisme hors les murs
    4 – Une demarche d’aggiornamento cest-a-dire de mise au jour

    Par Philippe Lallement

    Le maurrassisme est-il devenu un simple objet d’étude historique

    Par Gérard Leclerc

    1. Le legs d’Action française
    2. Maurras humaniste et poète
  • Les dangers de la gentrification du catholicisme.

    Yann Raison du Cleuziou © E. Marchadour

    Source : https://lanef.net/

    Yann Raison du Cleuziou, maître de conférences en science politique à l’université de Bordeaux, s’intéresse à la sociologie du catholicisme français contemporain ; il est l’auteur de deux livres remarqués : Qui sont les cathos aujourd’hui ? (Desclée de Brouwer, 2014) et Une contre-révolution catholique. Aux origines de La Manif pour tous (Seuil, 2019). Entretien.

    La Nef – Dans vos enquêtes vous évoquez plusieurs profils de catholiques en fonction de leur foi, de leur engagement et de leurs opinions à l’égard de l’Église catholique. Dans quelle mesure pouvez-vous aussi dresser une classification sociale des catholiques français ?


    Yann Raison du Cleuziou
    – L’enquête que j’ai dirigée avec Philippe Cibois pour Bayard en 2016 montre que le catholicisme a une structuration pyramidale. Au sommet, une minorité de catholiques à la fois militants, messalisants réguliers, intellectuellement formés par la lecture de l’édition ou de la presse religieuse. Ils sont clivés entre conciliaires qui pensent qu’à la suite de Jésus, il faut inclure les exclus de la société, et observants qui pensent que le Salut offert par Jésus impose un effort ascétique de rectification qui nécessite de prendre ses distances avec « le monde ». À la base, des masses quasi indifférentes à l’égard de la messe, sans culture religieuse, très faiblement engagées, car leur catholicisme repose principalement sur la demande de rites de passage (baptême, mariage, funérailles). Ils sont clivés entre ceux qui pensent qu’être catholique c’est assumer des « valeurs », d’ouverture, de tolérance, de partage, et ceux qui pensent que c’est hériter d’une identité culturelle. Dans la mesure où le catholicisme traverse depuis la seconde moitié du XXe siècle une période d’effondrement statistique, on retrouve toutes les catégories sociales dans les masses catholiques de la base de la pyramide. En revanche, la minorité de pratiquants et de militants à un profil élitiste et dispose tendanciellement de capitaux culturels et économiques au-dessus de la moyenne. C’est ce qui explique que dans certains diocèses, le nombre de donateurs au denier du culte baisse sans que le montant chute d’une manière correspondante. Autre exemple a contrario, vous savez qu’en 2018 le niveau du don a bien des associations catholiques a chuté en raison de la réforme de l’ISF. Tout cela témoigne d’un catholicisme qui est en voie de gentrification.

    La Manif pour tous, au-delà des convictions liées à la doctrine sociale de l’Église qui l’animent, ne repose-t-elle pas sur un même creuset social ?


    Ce mouvement a une histoire et sa composition, au début relativement large, a évolué. À partir du vote de la loi Taubira, la mobilisation s’est de plus en plus limitée à ceux que je qualifie de catholiques observants. Ceux-ci se pensent comme une minorité active en charge de restaurer la pleine catholicité de l’Église et, au-delà, de reconstruire la société française par sa base. Sur ces deux fronts, le bastion à partir duquel ils déploient leur action est la famille. C’est en son sein qu’ils estiment pallier la faillite de la catéchèse paroissiale ou scolaire. C’est aussi parce qu’ils constatent que leurs couples résistent mieux au divorce, que l’agencement des sexes y est conforme à la nature, ou que leurs enfants réussissent mieux, qu’ils pensent devoir exercer une autorité sociale et morale en donnant l’exemple. L’ouverture du mariage aux personnes de même sexe et la promotion de l’homoparentalité contribuent directement à saper cette prétention parce que le modèle de la famille hétérosexuelle qu’ils incarnent se trouve disqualifié comme un archaïsme sans valeur propre. Si ces catholiques se sont mobilisés contre la normalisation de l’homosexualité, plus qu’ils ne l’ont jamais fait pour la défense de l’embryon, c’est pour résister à ce déclassement. La pluralisation des manières de « faire famille » dévalue le capital d’exemplarité à partir duquel ils revendiquent être l’authentique élite du pays.

    Dans quelle mesure cette homogénéité sociale est-elle une contrainte ou un avantage ou bien encore une nécessité dans le paysage catholique français ?


    Comme je le montre dans mon dernier livre, il faut tout d’abord reconnaître que si les observants ont une importance croissante dans le catholicisme contemporain, c’est parce qu’ils parviennent mieux à transmettre la foi à leurs enfants que les autres univers de sensibilité catholique. Ce succès dans la perpétuation de leur groupe, de sa foi et de sa culture, est en partie un savoir-faire « bourgeois ». Comme le reconnaissait récemment un de mes enquêtés : « Si dans ma famille la foi se transmet, c’est aussi très probablement parce que de manière générale, la transmission est une préoccupation majeure, que ce soit pour la commode Louis XVI ou l’argenterie de tante Guyonne. » Bien sûr, c’est caricatural, mais j’observe que les familles observantes sont souvent soucieuses de conserver les traces de leur histoire, souvent pensée comme un « âge d’or ». La noblesse est emblématique de cette culture et je crois d’ailleurs que le nombre important de patronymes nobles dans le clergé résiduel est assez emblématique des dynamiques actuelles de la recomposition du catholicisme.
    Pierre Bourdieu a bien montré à quel point la hantise du déclassement économique ou culturel conduit les élites sociales à contrôler très finement les conditions de leur reproduction. C’est manifeste chez les observants. Ils cherchent le quartier et la paroisse où ils se retrouveront entre pairs, n’hésitent pas à créer des écoles hors contrat pour esquiver la mixité et la « tiédeur » des écoles catholiques sous-contrat, choisissent le meilleur mouvement scout pour trier les fréquentations de leurs enfants, etc. Ces stratégies guidées par le souci de la transmission contribuent à un phénomène de fermeture sociale de ce groupe qui fonctionne comme un milieu de famille caractérisé par un haut niveau d’endogamie.
    Cette dynamique de ghettoïsation est un phénomène paradoxal, car c’est à la fois une résistance à la sécularisation de la société française et une contribution majeure à celle-ci. En effet, en se protégeant d’une société qu’elles jugent décadente, ces familles privent leurs concitoyens de la ressource qu’ils peuvent représenter et participent à ce que Danièle Hervieu-Léger appelle l’exculturation du catholicisme. Pour la plupart des Français, le catholicisme s’identifie de moins en moins à un fonds commun et de plus en plus à la culture particulière de la vieille bourgeoisie des « beaux quartiers ».
    Par ailleurs, en se coupant de leurs contemporains, les observants se privent aussi des ressources culturelles et de la familiarité qui sont nécessaires à l’évangélisation. Les prêtres-ouvriers n’ont jamais été aussi nécessaires ! Et ce ne sont pas un ou deux ans passés en banlieue par les jeunes couples catholiques en volontariat qui suffiront à combler ce fossé social grandissant. Heureusement, il reste des catholiques convaincus appartenant aux milieux populaires, ce sont très souvent des migrants, venus d’outre-mer, d’Afrique ou d’Asie. Eux sont de plain-pied dans la culture populaire, mais ils ont parfois du mal à trouver leur place dans l’Église de France et peuvent regarder du côté des Églises évangéliques.

    Notre pays a moins que d’autres conservé un catholicisme populaire, comme c’est le cas encore en Italie, par exemple : comment expliquez-vous cette « spécificité » française de l’éloignement des classes populaires de l’Église ?


    C’est une question complexe et un sujet de controverse entre historiens. Sans en faire une cause exclusive, je voudrais insister sur le rôle des avant-gardes cléricales à la fin des années 1960. Le catholicisme populaire a été disqualifié comme une norme « sociologique », une forme d’instrumentalisation païenne du christianisme. Le dominicain Serge Bonnet, dont j’ai réédité les travaux sur cette question (1), a bien montré à quel point le baptême des nouveau-nés ou la communion solennelle étaient devenus des objets de suspicion. Le jeune clergé a voulu une Église de militants et rejeté les intermittents demandeurs de rites de passage. Au sens que le sociologue Ernst Troeltsch donne à ce mot, il s’agit d’une dynamique « sectaire » : la construction d’une communauté religieuse reposant sur un engagement total et volontaire de ses adeptes. Ce type de stratégie ne peut qu’aboutir à l’échec, car les groupes sociaux, quels qu’ils soient, ne peuvent se perpétuer qu’en entretenant une large marge de membres moins engagés parmi lesquels le « noyau dur » peut se renouveler. Une Église peut être majoritaire dans la mesure où elle n’est pas trop exigeante sur la moralité de ses membres. Si elle le devient, elle se transforme en secte et se condamne à un destin minoritaire. Aujourd’hui, les jeunes observants, eux aussi, prennent le risque d’un devenir sectaire en ne cessant de disqualifier comme « tiède » la foi des générations qui les précèdent.

    Propos recueillis par Pierre Mayrant

    (1) Serge Bonnet, Défense du catholicisme populaire, Cerf, 2016.

    © LA NEF n°322 Février 2020, mis en ligne le 31/07/2020

     

    Pierre Mayrant

    collaborateur de La Nef.

  • Marseille prête à ouvrir son port, par Laurence Mildonian (avec A.Mt).

    Après les gardes-côtes italiens, le "Sea Watch 4" est venu à la rescousse du "Louise-Michel", en récupérant 150 rescapés. PHOTO AFP

    Source : https://www.laprovence.com/

    Réagissant à des navires de sauvetage appelant à l'aide en Méditerranée, la Ville a déclaré être prête à les accueillir

    C'est une première qui n'a pas manqué de faire réagir. Alors que samedi soir, le Louise-Michel, navire de sauvetage en mer affrété par l'artiste Bansky, lançait un appel à l'aide internationale après avoir secouru 219 migrants en Méditerranée, le premier adjoint Benoît Payan, puis la maire de Marseille Michèle Rurbirola, annonçaient sur Twitter que "Marseille, ville d'accueil et solidaire ouvrira son port" si le navire en faisait la demande, appelant au passage l'État à "prendre ses responsabilitésOn ne quitte jamais son pays par plaisir, ajoutait hier matin Michèle Rubirola. Il faut entendre le désespoir des gens et on ne peut pas accepter que des personnes continuent à mourir en Méditerranée, donc j'en appelle à l'État."

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    Des déclarations qui rompent avec la réserve de la précédente mandature. Silencieux en juin 2018, quand L'Aquarius de l'association SOS Méditerranée cherchait un lieu sûr pour débarquer 600 migrants, Jean-Claude Gaudin avait déclaré en septembre de la même année que "cela ne le gênerait pas d'accueillir" le navire, évoquant la tradition d'ouverture de la cité phocéenne. Un an plus tard, le maire LR écrivait au préfet pour lui faire part de son hostilité au projet faisant de Marseille un port d'accueil pour les migrants étrangers, hostilité partagée par la candidate LR à la mairie, Martine Vassal.

    "Nous sommes très heureux que les collectivités remettent ce sujet à l'ordre du jour, comme des élus corses l'ont fait en 2018", se réjouit Fabienne Lassalle, directrice adjointe de SOS Méditerranée, association dont le navire, l'Ocean Viking, est actuellement bloqué en Sicile (lire ci-dessous). "En réalité, seul un État, à travers son autorité maritime nationale, a le pouvoir de désigner l'une de ses villes comme port d'accueil, et Marseille est très éloignée des deux navires, bien plus que l'Italie et ce ne serait sans doute pas la meilleure des solutions de repli pour eux. Cependant, cela reste extrêmement positif que la Ville se positionne ainsi et interpelle l'État en l'appelant à prendre ses responsabilités en la matière, poursuit la directrice adjointe. Nous devons venir en appui à l'Italie, seule en première ligne dans l'accueil de ces populations migrantes, c'est une question de solidarité envers ces femmes et ces hommesmais aussi entre États européens."

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    À l'automne dernier, l'accord de Malte avait commencé à prévoir une répartition des rescapés entre six pays, incluant la France, l'Allemagne ou le Portugal. "Il fonctionnait jusqu'à ce que la crise du Covid fasse voler cet accord en éclats", poursuit Fabienne Lassalle. Or, malgré la crise sanitaire, les traversées n'ont pas cessé, au contraire. Et alors que du côté du Rassemblement national, le sénateur Stéphane Ravier réagissait hier à la déclaration de Michèle Rubirola en pointant une "déferlante migratoire", la directrice adjointe de SOS Méditerranée rappelait le rôle des navires de sauvetage en mer : "On est loin de l'appel d'air qu'on nous suspecte de créer, nous ne sommes que des citoyens qui avons armé des bateaux pour assister des personnes en danger parce que les États sont défaillants. Que des navires viennent à leur secours ou pas, il faut bien comprendre que si ces personnes se jettent à l'eau, c'est parce qu'elles fuient des tortures et sévices qu'elles subissent dans leurs pays, notamment en Libye." La question de l'accueil et de la répartition de ces réfugiés, "c'est un vrai sujet dont les États doivent se saisir. J'espère que personne n'a en tête que la meilleure façon d'y répondre, c'est de laisser des gens mourir en mer", glisse la responsable. Contactée, la préfecture n'a pas donné suite à nos sollicitations.

     

    Benoît Payan, premier adjoint à la maire de Marseille : "Quand quelqu'un se noie, on ne lui demande pas ses papiers, on le sort de l'eau"

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    Plaidant l'ouverture du port aux navires de sauvetage quand il était élu de l'opposition, Benoît Payan a réitéré son voeu samedi.Ph. G.R.

    Vous avez déclaré, samedi soir sur Twitter, que le port de Marseille serait ouvert au bateau "Louise-Michel" s'il en faisait la demande. Saluée par une partie de la population, l'annonce soulève le débat sur la place de Marseille dans l'accueil des migrants...

    Benoît Payan : C'est une confusion légitime et c'est à nous d'être extrêmement pédagogiques à ce sujet. Il ne s'agit ni de réfugiés, ni de migrants, mais de naufragés à qui on doit porter secours. Nous ne sommes pas Paris, Bourg-en-Bresse ou Grenoble, mais Marseille, capitale de la Méditerranée. Par notre histoire, la ville a le devoir et la responsabilité d'ouvrir son port à toutes les femmes et les hommes qui sont en danger de mort. Quand quelqu'un se noie, on ne lui demande pas ses papiers, on le sort de l'eau. Cela fait fantasmer une partie de la droite et de l'extrême-droite de confondre allègrement porter secours et accueillir les migrants et les immigrés. Et c'est parce qu'ils sont noirs et arabes qu'on veut faire peur à la population. Si ces femmes et ces hommes étaient blancs, on dirait qu'ils se noient et qu'on doit les aider.

    Si le navire venait accoster à Marseille, qu'adviendrait-il de ses occupants ?

    Benoît Payan : On commencerait par soigner ceux qui sont entre la vie et la mort. Ensuite, c'est un autre sujet, qui relève de la politique d'accueil des pays les plus riches de la Méditerranée. Concrètement, c'est le droit commun qui s'appliquerait. Ceux qui n'ont pas de droits, ceux qui seraient en situation irrégulière seraient appelés à repartir chez eux. Mais cette situation convoque avant tout notre histoire et notre humanité : qui sommes-nous pour faire des débats sur les structures d'accueil quand quelqu'un se noie ?

    La maire Michèle Rubirola ne se contente pas pourtant d'annoncer l'ouverture du port de Marseille, elle demande au président Emmanuel Macron d'accompagner la Ville et à l'État "de prendre ses responsabilités"...

    Benoît Payan : La politique doit être globale, et on doit arrêter de détourner le regard sur ce qui se passe. Jusqu'à quand fera-t-on la part belle aux passeurs en fermant les yeux sur la situation ? Quand cherchera-t-on des réponses ? Quand aidera-t-on l'Italie qui paie un lourd tribut à organiser l'accueil de ces populations dans l'indifférence générale ? Il y a des milliers de morts par an dans la Méditerranée, il appartient à Emmanuel Macron de prendre le leadership sur cette question. La France est le plus grand pays de la Méditerranée et l'un des pays les plus riches du monde, il est temps de prendre nos responsabilités pour travailler à une politique globale sous peine de laisser la Méditerranée devenir un immense cimetière.

     

    Mobilisation autour du navire de SOS Méditerranée bloqué en Sicile

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    Une trentaine de personnes ont manifesté samedi soir sous l’Ombrière du Vieux-Port.PHOTO AFP

    Le sauvetage en mer est un devoir, La mer ne doit pas devenir un cimetière. S'ils n'étaient qu'une trentaine samedi soir à manifester sous l'Ombrière du Vieux-Port, les pancartes derrière lesquelles les militants de SOS Méditerranée se sont couchés sur des gilets de sauvetage durant 45 minutes, pour un symbolique die-in, rappelaient les drames qui continuent à se dérouler au large de nos plages, et l'urgence à libérer l'Ocean Viking.

    112 000 signatures

    Le navire de l'ONG née à Marseille est bloqué depuis fin juillet par les autorités italiennes, à Porto Empedocle, en Sicile, en raison de "plusieurs irrégularités techniques et opérationnelles". "On lui reproche de transporter plus de passagers que ce qu'il est autorisé à recevoir, or le droit maritime distingue bien la notion de passagers et celle de rescapés, mais à force de se retrouver seule en première ligne pour gérer l'accueil des migrants, l'Italie finit par trouver des prétextes fallacieux pour bloquer les navires de sauvetage comme le nôtre", se désole Fabienne Lassalle, la directrice adjointe de SOS Méditerranée. Des manifestations du même type avaient été organisées à Toulouse, Lyon et Paris samedi, après Bordeaux, Lorient ou Frontignan les jours précédents.

    Une pétition lancée il y a un mois sur change.org avait déjà recueilli hier soir près de 112 000 signatures. Selon SOS Méditerranée, qui revendique avoir sauvé plus de 31 000 hommes, femmes et enfants depuis 2016 avec L'Aquarius puis l'Ocean Viking, au moins 22 000 migrants ont perdu la vie en Méditerranée en six ans.

  • Archipelisation ou libanisation ?, par Philippe Germain.

    La technocrature, maladie sénile de la démocratie  : (18/20)

    La combinatoire apocalyptique

    Il faut à la France une alternative aux trois hypothèses d’assujettissement aux partis de l’étranger soutenu par les clans des Yes, des Da et des Hajal. L’alternative devra être française, en un mot  : souveraine.

    philippe germain.jpgUne alternative et non pas une quatrième hypothèse prospective car, comme pour les pôles idéologiques, il est probable qu’aucun des clans ne l’emportera sur les deux autres. Il faut donc nous attendre à ce que les trois hypothèses se combinent dans une proportion encore impossible à définir. C’est l’alternative à cette combinatoire qui est indispensable à la France. Cette combinatoire sera apocalyptique car «  sur le territoire de la France une société nouvelle s’organisera, qui ne sera plus française, même si elle se souvient vaguement d’en avoir reçu l’héritage 1 ».

    En revanche, « Ne désespérons tout de même pas.  » conseillait le romancier royaliste Jean Raspail dans le Figaro du 17 juin 2004. En cela il rejoignait le maurrassien « Tout désespoir en politique est une sottise absolue  ». Il y présentait sa vision de l’avenir français : « Assurément, il subsistera ce qu’on appelle en ethnologie des isolats, de puissantes minorités, peut-être une quinzaine de millions de Français et pas nécessairement tous de race blanche qui parleront encore notre langue dans son intégrité à peu près sauvée et s’obstineront à rester imprégnés de notre culture et de notre histoire telles qu’elles nous ont été transmises de génération en génération. »

    Célèbre pour sa stupéfiante prophétie romancée du Camp des Saints de 1973, Raspail annonçait aux lecteurs du Figaro, une future «  communauté de la pérennité française  » s’appuyant «  sur ses familles, sa natalité, son endogamie de survie, ses écoles, ses réseaux parallèles de solidarité, peut-être même ses zones géographiques, ses portions de territoire, ses quartiers, voire ses places de sûreté et, pourquoi pas, sa foi chrétienne, et catholique avec un peu de chance si ce ciment-là tient encore  ». La communauté de la pérennité française de Raspail, cohabiterait avec une communauté musulmane démographiquement expansioniste et avec une communauté déclinante des français de souche acceptant le nouveau moule « citoyen » de 2050.

    Fini le romantisme du camp des saints tirant ses dernières cartouches. Jean Raspail rejoignait la combinatoire apocalyptique de Pierre Debray, envisageant comme son maitre Maurras, la démocratie fermant l’histoire de France.

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    Grand remplacement  ? Libanisation  ?

    Anticipant les contestations, Raspail prenait soin de justifier sa vision en citant le discours de Laurent Fabius au congrès socialiste de Dijon, le 17 mai 2003 : « Quand la Marianne de nos mairies prendra le beau visage d’une jeune Française issue de l’immigration, ce jour-là la France aura franchi un pas en faisant vivre pleinement les valeurs de la République… » L’ancien premier ministre socialiste allait très loin. Rêvait-il àlors à un grand remplacement du type de celui opéré par les colons anglais du Canada éliminant les «  nations premières  »  ? Etait-il alors acquis à la thèse du grand mouvement démographique annoncé en 1974 par le président Boumediene  : « Aucun nombre de bombes atomiques ne pourra endiguer le raz de marée constitué par les millions d’êtres humains qui partiront un jour de la partie méridionale et pauvre du monde, pour faire irruption dans les espaces relativement ouverts du riche hémisphère septentrional, en quête de survie. »  ? Pour sa part, l’Action française se refuse à minimiser la question dune «  une immigration de masse pouvant se trouver à l’origine d’une substitution de population2  ». Elle ne craint pas d’utiliser l’expression «  immigration-invasion  » là ou Pierre Debray utilisait le terme «   d’invasion barbares  ». En revanche la combinatoire faisant cohabiter les trois hypothèses d’américanisation, de pouvoir blanc et de soumission lui semble s’apparenter à autre chose qu’au scénario du Grand remplacement présenté par Renaud Camus en 2010.

    L’Action française ne se satisfait pas plus de la notion de «  libanisation  » de la France, suivant l’expression introduite dans le vocabulaire politique, trente ans auparavant par Jean-Marie Le Pen. Là aussi, même si on peut imaginer que l’état-major de l’Armée de Terre travaille sur ce scénario prospectif, l’Action française n’envisage pas une guerre inter-religieuses comme se fut le cas au Liban à partir de 1976. En revanche, de la notion de «  libanisation  », l’Action française retient bien la «  partition  » géographique de territoires entre différentes populations. La République n’a-t-elle pas déjà perdue certains territoires  ? La partition entre les territoires des métropoles urbaines et ceux de la France périphérique n’est-elle pas admise par tous, depuis les très sérieux travaux du géographe Christophe Guilly dans son ouvrage novateur Fractures françaises ? Mieux, la partition de notre nation, envisagée par l’Action française n’est-elle pas confortée par les travaux du sociologue de Jérôme Fourquet sur L’archipel français  ?

    De l’archipellisation à la partition

    La France se trouve-t-elle déjà confronté à un séparatisme comme l’a affirmé le Président de la République le 18 février 2020  ? Le séparatisme, précise le dictionnaire Larousse est l’Attitude, tendance à sortir d’un ensemble national et à former une entité politique distincte de l’État d’origine.

    Ce qui est certain c’est que la notion de partition semble se trouver confortée par les travaux détaillés et nuancés de Jérôme Fourquet. A partir d’un ensemble d’études d’opinions illustrées par une série de cartes, il montre comment la nation française, jadis structurée par la tradition chrétienne et « l’Église rouge » communiste, est aujourd’hui multiethnique et de facto multiculturelle dans ce qu’il nomme une «  archipelisation  » par des poches de populations, avec leur habitus, leur culture et leur comportement électoral.

    Fourquet se veut rassurant dans la mesure ou dans un archipel, toute île possède une autonomie mais maintient ses capacités d’échanges avec les îles environnantes.

    La dynamique d’archipelisation signifierait donc que la société n’est pas totalement communautarisée et donc pas encore en voie de partition. C’est-à-dire que son territoire ne serait pas encore divisé en plusieurs régions dotées de régimes politiques différents. C’est ce que nous allons devoir vérifier pour bâtir une alternative politique adaptée aux besoins de la France.

    Germain Philippe ( à suivre)

    1 Pierre Debray, Une politique pour le XXI° siècle – Une action française au service de l’avenir, Editions de Flore, 2019, p.203.
    2 François Marcilhac et François Bel-Ker, Immigration  : esclavage moderne, Editions de Flore, juin 2019, p.4.

  • Meurtre de Philippe Monguillot: «Jusqu’à quand allons-nous tolérer l’intolérable?», par Barbara Lefebvre.

    Véronique Monguillot à la marche blanche en hommage à son mari, décédé de mort cérébrale après l’agression violente dont il a été victime. GAIZKA IROZ/AFP

    Source : https://www.lefigaro.fr/vox/

    Pour Barbara Lefebvre, co-auteure des «Territoires perdus de la République», l’agression mortelle du chauffeur de bus de Bayonne témoigne de la passivité de nos dirigeants face à une barbarie devenue ordinaire.

    Il s’appelait Philippe Monguillot. Pour les Français, le «chauffeur de bus de Bayonne» a désormais un nom et un visage, celui d’un époux et d’un père de famille «sans histoire». Sans doute, sa famille, ses amis, ses collègues auraient souhaité que cela continue ainsi: une vie tranquille, une retraite paisible.

    2.jpegComme le souhaitent toutes les familles de France qui vivent sans être «défavorablement connus des services de police», sans troubler l’ordre public, sans violenter qui que ce soit pour un regard de travers, sans agresser en meute de lâches un homme ou une femme, seuls. Nous aspirons à vivre tranquillement parce que nous respectons la loi, parce que nous croyons que le respect de l’ordre public est le pilier d’une société civilisée. Mais, chacun de nous sait que cette tranquillité n’existe pas, parce que nous avons tous été témoins ou victimes d’une «violence gratuite» comme la nomenclature désigne cette forme de décivilisation, de sauvagerie qui consiste à agresser autrui sans autre motif que décharger contre lui sa haine recuite, sa frustration minable. Beaucoup d’entre nous ont décidé d’apprendre à leur enfant à baisser les yeux, à ne pas répondre à l’insulte qui fuse. Se soumettre dans l’espace public à la terreur d’une minorité (qu’on identifie généralement sans avoir recours à un sociologue), c’est déjà abandonner sa part de citoyenneté autant que d’humanité. Nous y sommes hélas tous accoutumés parce que nous voulons rentrer chez nous sains et saufs, et continuer à vivre «nos vies sans histoire». C’est légitime. C’est humain. Mais cette tolérance vis-à-vis de l’intolérable nous dévore en tant que corps social, en tant que nation.

    Il est des pedigrees qu’il convient de révéler à l’opinion publique illico presto.

    Avant Philippe Monguillot, combien d’autres «faits divers» de cette nature? Combien de vies brisées sous les coups de couteaux, de pieds, de béquilles, de barres de fer infligés par des individus dont on s’assure le plus souvent à protéger l’anonymat. C’est le cas des quatre mis en cause à Bayonne que la bien-pensance médiatico-politique a tenté de faire passer pour des «punks à chiens» alors qu’il s’agit de délinquants récidivistes d’une cité voisine connus des services de police. Pour eux, la protection de l’anonymat serait donc requise? On se souviendra que l’homme de 84 ans (mort en détention depuis) qui avait tenté d’incendier la mosquée de Bayonne et blessé deux personnes en octobre 2019 avait vu son identité et son adresse dévoilées dans la presse. Il est des pedigrees qu’il convient de révéler à l’opinion publique illico presto: ainsi cet octogénaire, souffrant d’une altération partielle de son discernement selon les enquêteurs, avait été candidat aux départementales pour le Front National en 2015, information sans rapport direct avec les faits puisqu’il disait vouloir «venger la destruction de Notre Dame de Paris». Pour les quatre mis en cause dans le meurtre de Philippe Monguillot, on préfère préserver probablement leurs proches en ne les nommant pas, mais pourquoi ne pas indiquer seulement leurs prénoms? On nous dira sans doute que ce n’est pas là de la «saine information» pour l’opinion publique qu’il ne faut pas échauffer inutilement.

    Avant la visite du fraîchement nommé ministre de l’Intérieur à Bayonne ce samedi, combien de visites de ministres de l’Intérieur et autres préfets venus présenter leurs condoléances et assurer que la «justice sera exemplaire pour punir ce crime odieux» ? Combien de bavardages, de coups de menton, de promesses de Karcher et autres «QRR» pour Quartiers de reconquête républicaine? On peut se demander quelle est la dose maximum de verbiage inconsistant que l’opinion peut encore supporter sur ces sujets? Si l’on prend la peine de lire les différentes enquêtes conduites, on peut constater qu’elle ne le supporte plus, mais dans la Vème République post-démocratique, l’opinion publique n’a plus aucun moyen de manifester son exaspération sinon par la défiance à l’égard du politique et l’abstention. Deux comportements qui indiffèrent en réalité nos dirigeants puisqu’ils ne les empêchent pas d’être élus ou réélus malgré des socles de votants toujours plus misérables. L’impuissance politique n’est jamais sanctionnée dans les urnes, au contraire elle est encouragée par des simulacres d’élections sans réelle valeur démocratique.

    Certaines communes sont des zones où règne la loi du caïdat, où les édiles locaux doivent pactiser avec la mafia locale pour qu’elle les laisse gérer le reste de la commune.

    Nos élus, nos ministres s’écoutent-ils parler quand ils nous servent leurs discours creux sur «la République qui ne laissera plus rien passer et poursuivra sans relâche les auteurs de ces actes inqualifiables»? Sont-ils à ce point amnésiques ou narcissiques qu’ils ne s’entendent pas répéter comme des ventriloques les mêmes mots que leurs prédécesseurs? On nous resservira bien un petit verre de «vivre ensemble» et une tranche «d’égalité des chances» avant de rentrer au ministère à Paris? Pendant qu’ils bavardent avec la presse, consultent des experts, se font rédiger des rapports par des hauts fonctionnaires, d’incivilités en violences la société est entrée dans une mécanique où l’on s’habitue à cohabiter avec les acteurs d’une forme de banalité du mal. Mais un mal dont la description sociale, culturelle, idéologique, effraie certains esprits bien-pensants. Notre société est-elle à ce point tétanisée et dépressive qu’elle se soit accoutumée à cela? Notre société est-elle si déphasée qu’elle préfère se donner bonne conscience en traquant «les discours de haine» - c’est-à-dire en légalisant la police de la pensée - plutôt qu’en combattant avec la dernière vigueur républicaine et la plus grande sévérité judiciaire, les actes concrets de haine d’une minorité d’individus qui pourrissent la vie de la majorité.

    Plus de vingt ans que des pans entiers de certaines communes ont fait pire qu’une sécession: ce sont des zones où règne la loi du caïdat, où les édiles locaux doivent pactiser avec la mafia locale pour qu’elle les laisse gérer le reste de la commune (par exemple, cette petite zone pavillonnaire où se concentre la minorité des votants permettant d’être réélu). Sur ce fond de délinquance, de trafics de drogue et de criminalité, on sait que l’islamisme trouve l’écosystème propice pour se développer. À un fléau est venu s’en ajouter un autre, au grand dam de nombreux habitants de ces quartiers qui n’ont pas tous les moyens de fuir. Et depuis vingt ans, rien n’est fait pour éradiquer l’un et l’autre. Au contraire, ils ne se sont jamais aussi bien portés! Nous autres, auteurs des «Territoires perdus de la République» publié en 2002, avons longtemps été méprisés voire traités de racistes pour décrire le réel de ces quartiers, puis après une longue décennie de déni, après 2015, ce fut «le grand réveil» des éditorialistes, journalistes, politiques. Presque tout le monde y est allé de ses analyses en les croyant originales, les grands discours sur l’entrisme islamiste et le séparatisme. Mais derrière tout ce verbiage, quels actes? Aucun qui permette de dire que la peur a changé de camp. La réponse n’est même plus dans le déploiement ponctuel d’une compagnie de CRS ou l’arrivée de trois policiers supplémentaires au commissariat délabré du coin, dans le renouveau de l’équipement de notre police ou la confiance du ministre envers les forces des l’ordre. Tout ceci est indispensable mais pas suffisant.

     

    Rien n’est possible sans un sursaut moral, et donc politique au sens noble du terme, de tous les citoyens, seuls détenteurs de la souveraineté démocratique dans la République. C’est à eux, partout, de se mobiliser pour exiger leur droit à la sécurité. Ce droit est non négociable et aucune situation de crise ne peut justifier de surseoir à son exécution. Maintenant. Cette sécurité nous est due par l’État parce que nous nous acquittons de nos devoirs. Nous la payons en acceptant que notre liberté s’arrête là où commence celle d’autrui, en travaillant légalement et payant nos impôts, en éduquant nos enfants dans le respect d’autrui, en respectant la loi de la République quand bien même, à titre personnel, elle nous indispose.

    Pour Philippe Monguillot qui respectait paisiblement la loi et voulait la faire respecter jusque dans son bus, et pour tous ceux qui ont été blessés ou assassinés par ces barbares, nous citoyens devons exiger de nos dirigeants (locaux, régionaux, nationaux) des actes pour assurer notre sécurité. Celle de nos aînés ou nos enfants est encore plus urgente, eux que leur fragilité expose davantage à la violence de ces sauvages qui agissent en groupe, puisque leur lâcheté et leur bassesse morale les rendent incapables de soutenir un face à face à la loyale. En plus d’une éducation généralement défaillante, l’impunité acquise souvent dès les premiers délits d’adolescence les a rendus indifférents à celui qui n’est pas de leur clan, de leur quartier, celui-là n’est plus pour eux un frère humain. Quant à nous, hommes et femmes «à la vie tranquille», sommes-nous définitivement acquis à cette morale d’esclave que décrivait Nietzsche pour continuer à tolérer, parmi nous, ces ennemis du genre humain?

    Barbara Lefebvre, enseignante et essayiste, est l’auteur de Génération j’ai le droit (éd. Albin Michel 2018).

  • La France face aux périls géopolitiques, par Jean-Philippe Chauvin.

    La Covid 19 écrase tout dans l’actualité et je ne suis pas certain que cela soit une bonne chose : non que la maladie soit insignifiante ni ses effets fortement indésirables, mais la Terre continue de tourner et la vie de se poursuivre, avec ses bonheurs et ses malheurs, et les grands enjeux de notre humanité, qu’ils soient géopolitiques, économiques ou sociaux, et environnementaux, entre autres, ne doivent pas être négligés, au risque de réveils plus douloureux encore que l’actuelle pandémie.

    jean philippe chauvin.jpgSoyons bien certains que les régimes dictatoriaux ou autoritaires, eux, profitent de l’aubaine, mais aussi nos propres États démocratiques en interne, confirmant les intuitions argumentées de Bertrand de Jouvenel dans « Du Pouvoir » : quand les opinions publiques s’inquiètent de leur propre santé, les États chinois et turcs (liste sans exhaustivité…) avancent leurs pions, qui en Mer de Chine, qui en Méditerranée, et le silence des Démocraties fait parfois penser à un « Munich » réactualisé. Et pourtant ! Sans être un adepte de la démocratie libérale dont les faiblesses comme les crispations m’inquiètent, l’histoire nous instruisant terriblement sur ces défauts qui peuvent être, parfois, mortels pour les pays, les populations et les libertés réelles, il me paraît hautement préférable de défendre notre démocratie française, non parce qu’elle serait démocratique mais parce qu’elle est, en ce temps, l’incarnation institutionnelle et politique de la France, et que c’est la France dans son essence, rapportée par son nom même qui signifie « Liberté » (1), qu’il s’agit de préserver envers et contre tout. C’est sans doute l’écrivain royaliste Georges Bernanos qui a le mieux expliqué cette position qui est mienne, en particulier lors de la Seconde guerre mondiale durant laquelle il fut, du Brésil, la plume de l’espérance et de la liberté françaises sans jamais céder aux sirènes de l’idéologie démocratique ni aux honneurs qu’elle semblait promettre à ses thuriféraires. (2)

     

    Ainsi, j’ai soutenu, dans cet été meurtrier, la position française fermement tenue par le président Macron face aux ambitions de la Turquie ou plutôt du régime de M. Erdogan qui, sans être une dictature au sens exact du terme, est bien plutôt une « démocrature », doublement nourrie par le suffrage universel (malgré la victoire de ses adversaires à Ankara et Istanbul, victoire aujourd’hui devenue inconfortable et invisible, au moins à nos yeux d’Occidentaux) et le rappel permanent de l’histoire ottomane ou, plutôt, de sa forme la plus « nationaliste ». J’ai soutenu l’envoi de navires français et de quelques avions Rafale qui, par leur simple présence, ont sans doute contribué à gêner les velléités turques de frapper ou d’humilier les Grecs et les Chypriotes, bien seuls dans l’épreuve. Cela a aussi forcé l’Allemagne à « sortir du bois », paraissant « retenir » le bras de la France mais, en fait, se posant en médiatrice dans le conflit pour assurer une sortie honorable à la Turquie de cette impasse géopolitique et militaire dans laquelle cette dernière s’était aventurée. Quand l’Otan avait, purement et simplement, trahi la France en refusant de trancher dans l’affaire de « l’illumination » par des navires de guerre turcs du croiseur français Courbet en juin dernier ; quand l’Union européenne est aux abonnés absents faute d’envie politique et de pensée stratégique, l’Allemagne, pourtant gênée par une « cinquième colonne » turque sur son territoire (et sur laquelle comptait M. Erdogan, en jouant sur le nationalisme ottoman de ses expatriés – plus de 2,5 millions en Allemagne - pour poursuivre ses provocations sans être inquiété), a fait ce que l’on attendait d’elle, tant il est vrai que l’on ne peut attendre de cette « puissance qui ne veut pas être puissance » un engagement plus avancé aux côtés de la France… Tout compte fait, mieux vaut cette posture médiatrice de l’Allemagne que son indifférence qui, pour le coup, aurait mis la France dans une impasse, voire pire… Entre deux maux, il faut savoir choisir le moindre, ce que Maurras résumait en expliquant qu’il fallait toujours éviter « la politique du pire qui est la pire des politiques » : en ce sens aussi, me voilà susceptible d’être accusé de « modérantisme »…

     

    Mais ces événements nous rappellent à la nécessité d’un réarmement militaire, non pour faire la guerre en tant que telle, mais pour l’éviter ou, au pire, la contenir. Les provocations de M. Erdogan qui menace la France de tous les maux et des pires défaites possibles sont, en fait et aujourd’hui, d’abord destinées à son opinion publique et à ses partisans : cela en limite la portée, et c’est tant mieux. Mais le bras de fer n’est pas fini, et au-delà du réarmement militaire de notre pays et de son soutien à la Grèce et à Chypre dans cette affaire qui touche aussi à l’exploitation des ressources méditerranéennes d’hydrocarbures, c’est un réarmement moral auquel il faut travailler, réarmement qui passe par un travail de communication et d’éducation « nationales » (au sens fort de ce dernier terme) en France : car rien ne peut se faire durablement si les Français ne comprennent pas toute l’importance de ce qui se joue en Méditerranée, et la nécessité, non de l’affrontement militaire mais de la fermeté politique et diplomatique face aux États bellicistes. De plus, l’Otan, en état de « mort cérébrale » comme le disait avec une certaine justesse le président Macron il y a quelques mois, la France ne peut compter que sur elle-même pour sa défense et doit pouvoir imposer ou du moins défendre son point de vue sans être prisonnière des décisions prises à Washington, ce que le général de Gaulle avait compris, au grand dam des États-Unis de l’époque.

    Mais nous entrons bientôt en période électorale et la présidentielle est, en notre République, la ligne d’horizon de toute politique, ce qui en limite la portée et l’efficacité : le successeur de M. Macron, si ce dernier n’est pas réélu, aura-t-il la même détermination face à M. Erdogan et à ses ambitions ? C’est bien le grand inconvénient de cette République quinquennale : le risque des remises en cause permanentes, d’une élection à l’autre, remises en cause qui fragilisent la position diplomatique française et défont parfois le travail du président précédent et de ses gouvernements. Il y eut, après le règne gaullien, une sorte de poursuite de l’élan donné dans les années 60 et une tradition qui, parfois, est revenue dans la pratique diplomatique française comme on a pu le voir en 2003 lors du « grand refus » de la France de suivre les États-Unis dans leur aventure irakienne dont les conséquences se font encore sentir de par le monde. Mais, pour enraciner cette stratégie et cette tradition « capétienne » de l’indépendance française, ne faut-il pas réfléchir aux formes institutionnelles de l’État et considérer que le temps doit être un allié, et non une menace quinquennale ? « Faites un roi, sinon faites la paix », écrivait le socialiste Marcel Sembat avant 1914 : mais, si l’on veut l’une, ne faut-il pas, en fait, sur le long terme et face aux puissances parfois incertaines et donc instables et dangereuses, l’autre ? Après tout et au regard du monde périlleux qui s’annonce (ou qui est déjà là, sous nos yeux…), la question mérite d’être posée…

     

    Notes : (1) : Le nom de France vient des envahisseurs francs du Ve siècle et signifie, à l’origine « le royaume des hommes libres ». Cela nous a aussi donné le mot « franchises » qui évoque les libertés d’un corps de métier, d’une communauté ou d’une ville sous l’Ancien Régime. On retrouve la même acception dans la langue bretonne qui reprend, en le modifiant légèrement, le terme cité précédemment.

     

    (2) : La lecture des textes politiques de Bernanos écrits durant la période de la guerre et de ses lendemains, au-delà de la colère d’un homme qui ne cède rien aux mœurs et aux idéologies triomphantes du moment, m’apparaît, pour plagier Marcel Proust, comme « une cure d’altitude mentale »…

    Source : https://jpchauvin.typepad.fr/jeanphilippe_chauvin/

  • Contre le chômage, ni étatisme ni ”laisser-tomber” !, par Jean-Philippe Chauvin.

    La crise sanitaire actuelle ouvre la porte à de nombreuses autres crises, et le cycle infernal dans lequel nos pays semblent entrés sans savoir où se trouve la sortie n’est pas pour rassurer nos concitoyens :

    jean philippe chauvin.jpgselon un sondage publié par l’Unedic jeudi dernier, et que rapporte Le Figaro dans son édition du vendredi 25 septembre, « la quasi-totalité des Français (93%) a le sentiment que le chômage peut toucher tout le monde », donc soi-même, et c’est bien la survenue de la Covid 19 dans le paysage sanitaire qui a aggravé ce sentiment fort et anxiogène : « 73% des Français estiment que la situation s’est dégradée en raison du Covid-19. Un chiffre qui bondit de 27 points par rapport à la première vague de l’enquête réalisée avant le confinement et publiée en avril par l’organisme en charge de l’assurance-chômage. » Cela rompt avec le (relatif) optimisme qui pouvait, au moins dans les milieux gouvernementaux, prévaloir avant janvier dernier : le nombre de chômeurs s’était stabilisé, sans pour autant diminuer de façon assez significative pour indiquer une inversion de tendance véritable. D’autant plus que, ces dernières années, on assiste à la montée inquiétante d’un précariat qui correspond aussi à l’ubérisation de l’économie et de la société, et qui doit nous interroger sur les définitions du travail et de l’emploi.

     

    Aujourd’hui, le chômage atteint des sommets que l’on espérait réservés aux pays lointains ou aux manuels d’histoire relatifs à la dépression des années 30 : le « nombre de demandeurs d’emploi en catégorie A, (est) en progression de plus de 500.000 entre janvier et juillet 2020, et (…) près de 600.000 emplois salariés détruits en l’espace d’un an ». Sans oublier que 8,8 millions de Français ont été ou sont encore concernés par le dispositif de chômage partiel au plus haut de la crise… Quelques articles publiés dans la presse économique dès le mois de mars dernier indiquaient que la Covid 19 risquait de tuer plus d’entreprises et d’activités que de personnes physiques : cette sinistre prédiction s’est largement réalisée, et elle peut parfois faire oublier le risque sanitaire lui-même, alors même qu’il ne faut négliger ni l’un ni l’autre, tout en sachant garder raison, comme le proclame la célèbre formule capétienne.

     

    Mais il ne faut pas oublier aussi que le chômage de masse, en France, n’est pas une réalité récente et qu’il n’est pas certain, contrairement à la formule fataliste du président Mitterrand dans les années 1980, que l’on n’ait tout essayé contre ce qui reste un fléau social de grande ampleur pour nos sociétés. Observons aussi la structure sociologique du chômage : les plus frappés sont les jeunes et les personnes proches de la retraite, principalement dans le secteur industriel, et ces caractéristiques risquent de s’aggraver autant que la courbe du chômage elle-même. Le danger serait que les nouvelles générations débarquant dans la vie active se sentent exclues du monde du travail et de l’insertion sociale, ce qui fragiliserait un peu plus le processus d’intégration à l’ensemble national et pourrait nourrir les séparatismes de toute sorte, et pas seulement religieux ou communautaristes. L’histoire du XXe siècle, pour se contenter d’elle, nous enseigne que le chômage, s’il ne créé pas les totalitarismes ou les idéologies totalitaires, peut les nourrir suffisamment pour les faire advenir et ensanglanter le monde.

    Aussi, le chômage appelle une réponse qui n’est pas qu’économique, mais qui doit être sociale, politique, voire civilisationnelle : redonner du sens au travail, mais aussi à la communauté de travail, c’est renouer des liens sociaux aujourd’hui distendus par l’individualisme et sa traduction politique, le libéralisme. C’est aussi favoriser l’entraide entre les différents acteurs du monde du travail, que cela soit au sein des entreprises, des communes et, bien sûr, de la nation : pour l’heure, la solidarité s’exprime de façon surtout financière mais sans que cela soit expliqué, au risque de susciter de l’agacement à l’égard de ceux qui, chômeurs, reçoivent une aide sous forme d’allocations : « 38% (des Français) considèrent que les demandeurs d’emploi sont des personnes assistées (+5 points), qui perçoivent des allocations chômage trop élevées (36%, +4 points), et qu’une partie d’entre eux fraudent (35%, +4 points). » Bien sûr qu’il y a des fraudeurs et des assistés, mais ils sont une minorité, Dieu merci, et il s’agit justement d’en réduire le nombre pour permettre de mieux aider, et pas forcément financièrement, les autres, les « vrais » chômeurs. La fraude est sans doute plus facile à combattre que l’assistanat qui, lui, est largement suscité et entretenu par le système lui-même, y compris à travers l’Education nationale qui, trop souvent, a cessé de valoriser les valeurs de l’effort et de la joie du travail bien fait, tout comme elle a marginalisé le travail manuel et l’autonomie, individuelle comme familiale : où sont les cours de cuisine ou de jardinage, par exemple, qui permettraient, en particulier aux jeunes citadins éloignés des campagnes, de savoir faire pousser des légumes et de les cuisiner pour s’en nourrir ? Notre société de consommation a coupé les jeunes des racines de la terre et de l’envie de créer pour mieux les asservir au « tout-fait, tout-prêt » marchandisé, et elle a préféré l’assistanat qui n’est, en définitive, qu’une forme à peine subtile d’esclavage social et économique…

     

    Dans cette affaire, le rôle de l’Etat est principalement de mettre en place une stratégie de soutien et d’incitation toujours préférable à l’assistanat et à l’étatisme, mais aussi à la logique du « laisser faire-laisser passer » qui est souvent l’alibi du « laisser tomber », et dont les plus faibles ou les moins habiles sont les principales victimes. La République a tenté sous de Gaulle cette stratégie volontaire et d’équilibre, que l’on pourrait qualifier de néo-colbertisme, mais les successeurs du général ont eu moins de constance et de colonne vertébrale pour soutenir cet effort qui méritait d’être pérennisé et amplifié, et, surtout, le temps court de leur mandat (sept, puis cinq ans depuis M. Chirac) n’a pas permis de déployer sur le long terme une stratégie qui, comme le rappelait le philosophe Michel Serres, aurait mérité au moins un quart de siècle pour être pleinement efficace. « Pour avoir un Colbert, encore faut-il un Louis XIV », et ce dernier n’est possible qu’en Monarchie royale, celle qui apprivoise le temps sans s’en croire le maître absolu… La lutte contre le chômage, dans ce monde et ce temps mondialisés, nécessite « la durée, la mémoire et la volonté » qui sont, qu’on le veuille ou non, l’apanage des monarchies, y compris constitutionnelles, mais qui sont véritablement effectives et efficaces dans cette Monarchie royale « active » que nous appelons de nos vœux, cette monarchie éminemment politique qui ne se contente pas de la douce monotonie des inaugurations et du spectacle symbolique, mais qui assume, effectivement, « le risque politique de dire et de faire ». Non une monarchie qui « dirige tout » mais un régime qui assume son rôle d’arbitre au-dessus des forces (voire des féodalités) financières, économiques et politiques, et fixe le cap, comme un capitaine de navire le fait pour mener le navire à bon port. Une monarchie qui valorise les Richelieu, les Vauban et les Colbert contemporains, pour le plus grand service de la France, de ses peuples comme de ses personnes.

    Source : https://jpchauvin.typepad.fr/jeanphilippe_chauvin/

  • Courage et bas les masques…, par Oli­vier Per­ce­val.

    Les hasards du calen­drier nous offrent par­fois des actua­li­tés qui se bous­culent et dont la proxi­mi­té est riche d’enseignements.

    En cette période de trouille géné­ra­li­sée à cause de la Covid, s’ajoutent l’accusation de racisme de l’Occident, le retour du dji­had sur fond de pro­cès des atten­tats san­glants et une crise éco­no­mique sans pré­cé­dent. Reste à mesu­rer la réac­tion des auto­ri­tés et aus­si celle du peuple fran­çais devant l’accumulation de ces épreuves.

    olivier perceval.jpgDeux atti­tudes pos­sibles : La pre­mière consiste à se cou­cher, s’aplatir, s’agenouiller en signe de sou­mis­sion et de repen­tir en bat­tant notre coulpe sur la poi­trine de nos ancêtres et ne jamais se livrer, selon l’expression consa­crée, au péché d’amalgame.

    Notons que la peur de la vio­lence se tra­dui­sant par une volon­té « paci­fiste » de tout accep­ter venant de l’Islam, y com­pris la vio­lence envers les femmes, et la peur d’être atteint par la pan­dé­mie semblent aller de pair.

    L’autre atti­tude consiste à ouvrir les yeux et oser la luci­di­té. Faire le constat que si tous les musul­mans ne sont pas des ter­ro­ristes, tous les ter­ro­ristes sont musul­mans. Prendre un peu de recul et faire le constat que l’esclavage n’est pas l’apanage des occi­den­taux, mais qu’il était pra­ti­qué d’abord, notam­ment, en Afrique et au moyen Orient, alors qu’il n’avait plus cours depuis long­temps en Europe. Il ne s’agit pas de se dis­cul­per, mais de contes­ter la concen­tra­tion des accu­sa­tions média­tiques et « racia­listes » uni­que­ment à charge contre l’Occident.

    Dès lors que l’on avance ce type d’argumentation on est cata­lo­gué, éti­que­té, rha­billé pour l’hiver, et cou­vert de tous les qua­li­fi­ca­tifs infa­mants, dont la gauche a le secret et qu’une cer­taine droite (dite de gou­ver­ne­ment) approuve pour essayer de res­ter dans la par­tie, La fameuse droite dite répu­bli­caine.

    Peut-être fau­drait-il arrê­ter d’argumenter en jus­ti­fiant de notre bonne foi et en res­tant sur la défen­sive.

    Peut-être, vau­drait-il mieux rap­pe­ler que la France s’est consti­tuée à coup d’épée, que tant qu’elle gran­dis­sait et s’épanouissait, elle s’imposait par son génie, la foi qui l’animait et aus­si, quand c’était néces­saire, par la force des armes. La construc­tion de la France, en par­ti­cu­lier par les capé­tiens, est à la fois patiente et épique. Ce seul sou­ve­nir devrait être un motif d’exaltation et de confiance dans l’avenir. Les péto­chards (mas­qués) don­neurs de leçon, les par­ti­sans de l’abandon de notre his­toire et de nos tra­di­tions, les êtres trem­blants devant la vio­lence et n’envisageant pas une seconde de pro­duire de la vio­lence légi­time en réponse, ceux-là même qui demandent encore plus de mesures res­tric­tives contre le virus, et sur­tout contre les impru­dents irres­pon­sables qui n’observeraient pas scru­pu­leu­se­ment les gestes bar­rières, mais qui acceptent avec bien­veillance l’invasion exo­gène de leur pays, ne méritent pas que l’on s’attarde auprès d’eux en de vaines dis­cus­sions dont nous sommes conti­nuel­le­ment les pré­ve­nus.

    Il est confon­dant d’observer les experts sur les pla­teaux télés, s’interrogeant sur la manière la mieux fon­dée de gérer les « mineurs iso­lés », concept lou­foque inven­té par notre admi­nis­tra­tion pétrie d’idéologie, pour faci­li­ter l’entrée sup­plé­men­taire sur notre sol de clan­des­tins en toute léga­li­té (Au pas­sage, on peut se deman­der pour­quoi un pakis­ta­nais musul­man s’est retrou­vé chez nous comme réfu­gié, car à notre connais­sance, dans ce beau pays du Pakis­tan, se sont plu­tôt les chré­tiens qui sont per­sé­cu­tés.)

    Pour qu’il y ait une volon­té poli­tique réelle dans notre pays de lut­ter contre l’importation de la bar­ba­rie isla­miste, il fau­drait que le peuple fran­çais en grande majo­ri­té, et nous incluons dans « peuple fran­çais », l’ensemble des Fran­çais de souche ou par assi­mi­la­tion, se lève pour mettre un terme défi­ni­tif à la poli­tique d’immigration irres­pon­sable menée par les pou­voirs suc­ces­sifs depuis plus de trente ans.

    Mais une telle réac­tion sup­pose, en plus d’une révi­sion de fond en comble de notre sys­tème poli­tique et d’un affran­chis­se­ment radi­cal de toutes orga­ni­sa­tions supra­na­tio­nales, du cou­rage, et l’épreuve affli­geante du CORONAVIRUS montre que pour l’instant, une impor­tante par­tie de nos com­pa­triotes en manque sin­gu­liè­re­ment. Cela n’est cepen­dant pas irré­mé­diable, Il appar­tient à tout un cha­cun de deve­nir cou­ra­geux. Il faut seule­ment avoir quelque chose de grand à défendre…Quelque chose qui dépasse son petit ego, sa petite indi­vi­dua­li­té, qui est un « nous » et qui est plus grand que soi…

    Mais après tout, si l’on regarde l’Histoire, a‑t-on besoin d’une majo­ri­té pour chan­ger les choses ?

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

  • Goldnadel: «Lettres ouvertes à Obama, aux juges de Sarkozy et à Décathlon»

    Gilles-William Goldnadel. JOEL SAGET/AFP

    Le chroniqueur et avocat fustige cette semaine tous ceux qui font preuve d’une intolérance décomplexée, se sachant appartenir au camp du bien. Il répond ainsi aux commentaires de Barack Obama sur l’origine ethnique de Nicolas Sarkozy, aux magistrats qui s’en prennent à l’ancien président, et à la marque Décathlon qui boycotte la chaîne CNews.

    Sans vouloir attenter au secret de la correspondance auquel je tiens comme tout à chacun, je voulais vous faire part de la teneur des courriers que j’ai tenu à adresser à des gens qui voudraient passer pour gentils et qui souvent y parviennent, du moins dans le monde virtuel de la gauche médiatique.

    J’ai adressé la première de mes lettres ouvertes à l’ancien président Obama, véritable chouchou du Monde et du New York Times réunis, et dont la lecture des mémoires que paraît-il on s’arrache m’a inspiré des sentiments pour le moins mélangés, touchant au portrait qu’il a cru devoir faire de notre Sarkozy: «Monsieur le Président et ,si j’ose, cher Barack, je sais bien que les personnalités politiques de droite peuvent être moquées impunément. Le président honni des États-Unis jusqu’en janvier en est le témoin vivant. Avant lui Charles de Gaulle, Ronald Reagan et Margaret Thatcher ne peuvent plus témoigner de la manière dont ils furent maltraités, l’Histoire leur a cependant largement rendus justice.

    Mais tout de même, vous avez une drôle de manière de traiter Nicolas Sarkozy. Je vous cite:

    «Sarkozy était tout en emportements émotifs et en propos hyperboliques. Avec sa peau mate, ses traits expressifs, vaguement méditerranéens (son père était hongrois, son grand-père maternel juif grec), et de petite taille (il mesurait à peu près 1,66 m mais portait des talonnettes pour se grandir), on aurait dit un personnage sorti d’un tableau de Toulouse-Lautrec. Les discussions avec Sarkozy étaient tour à tour amusantes et exaspérantes, ses mouvements perpétuels, sa poitrine bombée comme celle d’un coq nain».

    Toujours estomaqué par la manière particulière dont l’homme de droite Sarkozy était traité, j’ai adressé ma seconde missive publique à l’actuel représentant du Syndicat de la Magistrature

    En dehors du fait que vous êtes autrement plus délicat dans votre «Une terre promise» avec le sultan ottoman Erdogan que vous trouvez «cordial» et «attaché à la démocratie»! qu’envers le quart de petit juif grec, mon imagination est impuissante à décrire les réactions de votre New York Times ou de mon Monde, si par extraordinaire l’ancien président français s’était hasardé à railler votre physique jusqu’à vous tenir pour infirme tout en soulignant vos origines ethnico-religieuses.

    Très respectueusement vôtre.».

    Toujours estomaqué par la manière particulière dont l’homme de droite Sarkozy était traité, j’ai adressé ma seconde missive publique à l’actuel représentant du Syndicat de la Magistrature.

    Ce syndicat a en effet cru devoir adresser le 20 novembre écoulé un courrier au Conseil Supérieur de la Magistrature pour dénoncer «une forme de pression inacceptable et intolérable» sur les magistrats instructeurs émanant de l’ancien président actuellement poursuivi. Ce dernier, en sa seule qualité de justiciable, et après que son principal accusateur Takkiedine soit revenu sur ses accusations le concernant dans l’affaire libyenne, a dit tout le mal qu’il pensait de cette procédure diligentée à son encontre et de la méfiance que lui inspiraient les magistrats poursuivant.

    C’est donc dans ce cadre dénué de toute aménité particulière que le syndicat de magistrats a cru y voir «une atteinte à l’indépendance des juges d’instruction spécialisés en matière économique et financière». Saisissant ma plume après l’avoir trempé dans une encre, j’en conviens, assez encolérée, j’écrivais au représentant syndical et magistrat ce passage que je reproduis un peu édulcoré:«J’ai beau savoir que l’indécence et l’inversion des rôles était dans l’ADN de l’extrême-gauche, je ne soupçonnais pas que vous puissiez trouver l’audace d’en remontrer encore en matière d’indépendance judiciaire. On n’est nullement obligé d’apprécier Nicolas Sarkozy. Ni l’homme ni son style. Ni la manière dont il a exercé le pouvoir. Nul n’est contraint de lui accorder le bon Dieu sans confession.

    Je n’ai pour ma part jamais rencontré notre créateur et les confidences que j’ai reçues de mes clients qui ne sont pas tous des saints estampillés, je les garde pour moi. Mais le syndicat de magistrats que vous représentez était la dernière organisation qui pouvait se permettre d’écrire au Conseil Supérieur de la Magistrature touchant l’indépendance des juges en général et Nicolas Sarkozy en particulier. Je ne suis pas le plus mal placé pour devoir vous rappeler ce que vous semblez avoir curieusement oublié.

    Ma dernière lettre très ouverte a été adressée en poste restante à un certain Yann (...) qui officie pour la communication de la maison « Décathlon »

    Sur votre Mur des Cons qui fera date dans l’histoire de la dépendance politique et idéologique de la magistrature que vous représentez, vous avez punaisé Nicolas Sarkozy au milieu de personnalités politiques que vous détestez et de parents de victimes assassinées. Nicolas Sarkozy et certaines autres personnalités politiques épinglées sur votre panneau syndical, que j’ai l’honneur de représenter, ont parfaitement raison de ne pas se sentir en sécurité, si, par un hasard funeste, ils se retrouvaient dans le cabinet d’instruction ou poursuivis par des magistrats appartenant à votre organisation, quand bien même ils n’auraient strictement rien à se reprocher.

    Que vous ayez pu dans ces circonstances, et bien que votre prédécesseur ait été condamné par un arrêt à l’encontre duquel il s’est pourvu, oser vouloir donner une leçon d’indépendance à l’un de vos épinglés, représente un exploit inatteignable sur l’échelle de l’audace. Veuillez croire à mes sentiments vraiment impressionnés».*

    Ma dernière lettre très ouverte a été adressée en poste restante à un certain Yann, dont j’ignore le patronyme, mais dont je sais qu’il officie pour la communication de la maison «Décathlon» qui commercialise comme chacun sait les articles destinés aux sportifs ou à ceux qui voudraient tenter de conserver la forme comme l’auteur de ces lignes. C’est dans ces conditions que j’ai été conduit à faire la connaissance du précité qui twittait le 20 novembre à 18 heures 04:

    «Bonjour, en effet nous avons retiré nos publicités de C News en cette fin d’année. Bonne fin de journée, Yann.»

    Je reproduis ci-après pour mes lecteurs partie du gazouillis que j’ai été conduit à adresser lorsque j’ai compris que Décathlon avait cédé aux pressions de ces Géants Endormis qui sont censés traquer tous les «discours de haine» selon la haute idée que ces activistes gauchistes bas de plafond se font de la détestation.

    Quand, après les fêtes de fin d’année et le boycott insensé d’une télé (...) vous ferez les comptes des hidjabs athlétiques et des burkinis aquatiques que vous vendez...

    «Très Cher Yann de chez Décathlon, vous pourriez peut-être regretter bientôt votre message. Quand, après les fêtes de fin d’année et le boycott insensé d’une télé au mépris de la liberté d’exprimer, vous ferez les comptes des hidjabs athlétiques et des burkinis aquatiques que vous vendez et des baskets qui vous resteront sur les bras, il se pourrait que le coureur de Décathlon connaisse le sort de celui de la bataille de Marathon.

    Bonne fin de journée.». Rien de tel qu’un courrier bien senti pour commencer son lundi.

     

    Gilles-William Goldnadel est avocat et essayiste. Chaque semaine, il décrypte l’actualité pour FigaroVox. Son dernier ouvrage Névroses médiatiques. Le monde est devenu une foule déchaînée est paru chez Plon.

    Source :https://www.lefigaro.fr/vox/

  • Du nouveau monde à la préhistoire ou la revanche de la nature et le déroulement d'une catastrophe annoncée, par Yves Mor

    L’état désastreux du monde et de notre pays n’est pas la conséquence d’un hasard aveugle mais d’une série de dérèglements anthropologiques et d’aveuglements politiques.

    2020 restera dans les mémoires comme une année maudite, ce que les Romains appelaient annus ater ou annus horribilis, et ce dans le monde entier. La Covid-19, partie de Chine, s’est répandue sur toute la planète, semant la souffrance, la mort, le chagrin et la ruine, et faisant, à ce jour, près de 50 millions de victimes et environ 1 300 000 décès. Et ses ravages humains, économiques et sociaux sont très loin d’être terminés.

    Un état d’exception sans précédent depuis longtemps

    Cette pandémie a totalement bouleversé notre économie, notre vie sociale et professionnelle, notre vie personnelle, notre vie politique, et jusqu’au fonctionnement même de nos institutions. 1 543 321 de nos compatriotes ont été atteints par la Covid-19, et 38 614 d’entre eux en sont morts. Et bien des pays (États-Unis, Inde, Brésil, Russie, Belgique, Espagne, entre autres) connaissent une situation pire que la nôtre. Chacun de nous est en danger de contamination, et donc de mort. Nous vivons désormais en état de siège. Nos libertés individuelles ont, par la force des choses, subi un recul sans précédent depuis l’Occupation de 1940-44. Il nous est désormais interdit de sortir sans avoir une bonne raison de le faire, indiquée sur une feuille d’ « attestation de déplacement » exigée des forces de police, et dont l’absence vaut à l’imprévoyant (ou au contrevenant volontaire) une amende de 135 euros. Les déplacements ne peuvent d’ailleurs excéder une centaine de kilomètres depuis son domicile. On ne peut circuler dans l’espace public sans porter un masque, là encore sous peine de contredanse. La plupart des commerçants ne peuvent plus travailler et prennent le chemin du dépôt de bilan. Le télétravail est imposé partout où il est possible, c’est-à-dire dans toutes les activités professionnelles autres que manuelles. Les lieux de culte, de culture et de spectacles sont fermés, et toute manifestation à caractère cultuel, culturel ou festif est interdite. L’État et le gouvernement décident de tout, sans opposition et sans contrôle, même du Parlement ; et, du coup, la vie politique devient inexistante.

    Une situation aussi dramatique qu’inextricable qui suspend le cours de toute vie normale

    Nos dirigeants agissent suivant les recommandations (on devrait dire les directives) d’un « conseil scientifique » qui transforme notre régime en « médicocratie ». De surcroît, la situation comporte d’inextricables dilemmes : le confinement produit des faillites en cascades, une recrudescence du chômage, l’élévation vertigineuse du montant de la dette publique, la chute abyssale du PIB ; mais son assouplissement ou sa suppression permet à l’épidémie de poursuivre sa galopade effrénée, et provoque l’engorgement de nos hôpitaux et l’impossibilité, pour nos personnels soignants, surchargés et trop peu nombreux, de faire face à l’afflux continu des malades ; de plus, le même confinement et les autres contraintes se révèlent indispensables pour avoir une chance de reprendre le contrôle de la pandémie, mais sont de plus en plus mal supportés par la population, désespérée de voir s’éterniser une situation d’exception et doutant de l’efficacité des mesures prises et des sacrifices consentis ou imposés, suivant les cas, et en vient à se demander si le mal sera vaincu un jour et si elle pourra retrouver des conditions de vie normales. Bien des Français vont passer seuls la fête de Noël et le réveillon du Nouvel An, sans leurs parents, leurs grands-parents, leurs frères ou sœurs, puisque le confinement leur interdira de les rejoindre ou d’être rejoints par eux. Beaucoup vivront ces fêtes sur un lit d’hôpital ou en ayant un parent ou un enfant hospitalisé. Beaucoup n’auront guère le cœur à se réjouir en raison de la menace pesant sur leur emploi ou leur entreprise. La lutte contre l’épidémie de Covid-19, depuis les mesures de prévention jusqu’à la lente et difficile élaboration d’un vaccin, en passant par les tests de dépistage et le traitement médical des malades, est devenue la préoccupation majeure, voire unique, exclusive, de toute l’activité gouvernementale, la condition impérieuse du retour à une vie personnelle, sociale, économique et politique normale. Tout lui est subordonné, et le cours normal de la vie politique, avec ses débats, ses grandes questions, ses affrontements classiques, est suspendu sine die. Nécessité fait loi.

    Une pluralité de fléaux mondiaux propres à rendre notre monde invivable

    Certes, nous n’avons pas le choix. L’implacable réalité nous écrase. Mais, si nous n’avons plus le choix aujourd’hui, nous l’avons eu – et nous l’avons fait – en d’autres temps. Car, il faut en avoir une claire conscience, l’actuelle pandémie de Covid-19 n’est pas et ne sera pas le seul mal à s’abattre sur nous et la population mondiale.

    En premier lieu, nous devons nous souvenir qu’elle n’est pas le seul fléau microbien qui nous a affectés. Rappelons-nous des épidémies de SRAS (2002-2004) et de grippe A (2009-2010), d’ailleurs annonciatrices de la présente pandémie de Covid-19, sans oublier le SIDA, apparu au début des années 1980, qui fit des ravages, et demeure une menace permanente nous obligeant à une prévention contraignante.

    Par ailleurs, nous sommes confrontés aux redoutables problèmes de la pollution, de la destruction des écosystèmes régulateurs de la vie sur terre et du réchauffement climatique. Sur ce dernier point, nous savons que, même si tous les pays du monde s’accordaient pour une action concertée et énergique (ce qui n’est pas présentement le cas), nous ne parviendrions à arrêter le réchauffement qu’autour de 2050, après des hausses inévitables de température jusqu’à cette date approximative. Notre planète devient donc à la fois un cloaque et un chaudron.

    Notre civilisation libérale dominée par la loi du marché nous a amenés à ne rien tenter pour conjurer des risques connus depuis longtemps

    Pourtant, cet avenir dramatique aurait pu être évité. Depuis longtemps, en effet, nous savons que les mouvements continus et déplacements incessants de quantités d’individus dans le monde, l’urbanisation et les concentrations de populations massives, engendrent la mutation et la prolifération des virus parmi les hommes (lesquels ne sont pas naturellement immunisés contre leur action), et que nos manipulations microbiologiques douteuses en laboratoire peuvent avoir des conséquences dangereuses. Par ailleurs, l’aggravation continue de toutes les formes de pollution, la destruction graduelle des écosystèmes et de tout l’équilibre de la vie sur terre, l’accentuation continue du réchauffement climatique, sont connus depuis au moins le milieu des années 1960. Depuis plus de quarante-cinq ans, les biologistes, zoologues, botanistes, ingénieurs écologues, géographes et climatologues, n’ont cessé de tirer la sonnette d’alarme et de nous démontrer, preuves à l’appui, que notre modèle économique ultralibéral, étendu au monde entier, hyper-connecté, ignorant les frontières et les distances, uniforme, dominé par la loi du profit et de la Bourse, caractérisé par la course effrénée aux bénéfices, une urbanisation démentielle, une industrialisation sans contrôle et des migrations sauvages, provoquait le gaspillage et l’épuisement des ressources, la destruction des espaces naturels et de leur équilibre, la perturbation du climat et une pollution en progrès constants et dangereuse, transformant ainsi peu à peu notre planète en enfer. Leurs avertissements n’ont servi à rien, ou presque. En 1989 encore, René Dumont expliquait que si, dans les dix ans à venir, aucune politique environnementale sérieuse n’était entreprise au niveau mondial, nous nous engagerions dans une spirale catastrophique irréversible pour plusieurs décennies, et dont nous aurions le plus grand mal à sortir, sans pouvoir éviter des désastres écologiques et climatiques importants et irrémissibles. Ce pronostic effarant est devenu réalité, une réalité dans laquelle nous vivons quotidiennement et qui s’aggrave chaque jour davantage.

    Le nouveau monde accouche d’une nouvelle préhistoire

    Nous inaugurons une mutation décisive de l’histoire de l’humanité en général et des nations en particulier. Jusqu’à présent les hommes vivaient une histoire marquée par les les guerres, les crises économiques, les oppositions de classes, les révoltes et révolutions suscitées par les inégalités sociales, les carences politiques et institutionnelles, les dictatures, etc. De nos jours, tout cela est passé au second plan, et les hommes sont confrontés non plus à leurs semblables et à leur système politique, économique et social, mais à des dangers et des désastres d’ordre épidémiologique, environnemental et climatique. Nous sommes revenus en des temps où les hommes avaient à lutter principalement contre la nature en général et contre les animaux en particulier pour survivre le plus longtemps et le moins mal possible. Notre civilisation exclusivement urbaine, démentiellement industrielle et technicienne, matérialiste, dominée par la loi du marché, nous a placés dans une situation préhistorique d’affrontement entre l’homme et la nature. Le nouveau monde, cher à notre président de la République, ressemble à une manière de néolithique. La nature prend sa revanche sur l’homme trop orgueilleux, qui se prenait pour Dieu. Elle nous inflige une terrible leçon. Vraisemblablement, la malédiction caractérisera non seulement l’année 2020, mais le XXIe siècle tout entier.

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    Source : https://www.politiquemagazine.fr/

  • Goldnadel: «Que reste-t-il des Césars? Rien».

    Gilles-William Goldnadel. JOEL SAGET/AFP

    Pour l’avocat Gilles-William Goldnadel, la cérémonie des César de vendredi, ne fut que l’illustration consternante du conformisme idéologique de notre époque, et de l’absence de courage d’une partie du milieu artistique, qui ne fait plus rêver les spectateurs.

    La cérémonie consternante des César de vendredi soir me donne malheureusement le prétexte de poursuivre ces réflexions hebdomadaires que j’ai inaugurées sur la folie idéologique de la société contemporaine au sens quasi psychiatrique du terme.

    Mettons aujourd’hui sur la sellette ce monde artistique censé incarner l’empire du Bien et de la générosité.

    Mais avant cela, quelques mots évidemment, sur ce à quoi il nous a été donné d’assister et qui constitue l’objet de nos observations.

    Un artiste qui venait d’être primé, un certain Jean Pascal Zadi, a cru devoir rendre un hommage appuyé à Adama Traoré sous les applaudissements, sans que quelqu’un eut le courage ou l’intelligence d’émettre le moindre sifflement.

    Est-il nécessaire ici de rappeler que le défunt élevé au rang de martyr de la police française raciste, principalement par sa famille composée notablement de délinquants multirécidivistes, se voit contester ce statut judiciairement? Que dans le cadre de la procédure en cours, aucun expert judiciairement nommé n’a confirmé que l’arrestation opérée lors de sa fuite n’avait été la cause unique de son décès?

    Que d’autre part, et le fait aura été amplement commenté, le défunt martyr allégué a été gravement mis en cause pour avoir obligé l’un de ses codétenus à pratiquer sur lui une fellation sous la menace d’une fourchette. La victime a obtenu une décision judiciaire d’indemnisation de son préjudice des suites de cette infraction, précisément en raison du décès de son auteur présumé.

     

    Un mâle noir fut-il délinquant sexuel peut-être candidat au martyre, au rebours de son équivalent blanc, condamné à la géhenne irrémédiablement. 

     

    On comparera en conséquence l’hommage de cette année 2021 à cet improbable héros avec la cérémonie des César de l’année précédente qui fit scandale par ce que le film Dreyfus et son auteur Roman Polanski furent honorés en dépit du lourd passé sexuel de ce dernier.

    Adèle Haenel , pour protester, fit une sortie aussi spectaculaire qu’appréciée pour flétrir une injure faite à toutes les victimes des prédateurs sexuels.

    Comment ne pas en tirer la leçon idéologique aveuglante qui s’évince de ces deux démonstrations outrancières autant que contraires: un mâle noir fut-il délinquant sexuel peut-être candidat au martyre, au rebours de son équivalent blanc, condamné à la géhenne irrémédiablement.

    Comme si cela ne suffisait pas, lors de cette soirée, effectivement assez infernale, pour évoquer allusivement l’affaire Polanski de l’année passée, Vincent Dedienne, de l’audiovisuel de service public évidemment, vint lourdement mobiliser «Monsieur Hitler», en le citant, et en disant qu’il fallait absolument savoir séparer l’homme de l’homme politique.

    On en tirera une autre leçon idéologique: désormais sous l’empire du Bien, on peut faire fi de beaucoup: Dreyfus, Hitler, l’enfance de Polanski au ghetto de Varsovie, mais point de la couleur de la peau, du genre et de l’orientation sexuelle.

    Dans ce marigot de méchante sottise et de laideur, est-il dès lors besoin d’évoquer le triste effeuillage de la comédienne Corinne Masiero qui crut devoir se dénuder entièrement en signe, paraît-il, de solidarité avec les intermittents?

    La malheureuse espérait peut-être choquer le bourgeois comme elle avait tenté de le faire l’an passé avec une audace équivalente en s’en prenant aux «blancs catholiques de droite».

    La seule question que je me pose dans le cadre d’une hypothèse intellectuelle, j’en conviens, assez hardie: Quelle aurait été la réaction médiatique si quelque artiste de sexe masculin avait décidé d’exhiber à la télévision son appendice sexuel pour protester contre la dissolution de Génération Identitaire, par exemple et au hasard?

     

     

    L’histoire a montré, pendant l’occupation sans trop d’aménité, que les artistes ne se comportaient pas de manière plus noblement courageuse que les crémiers ou les avocats. 

     

    Je pense qu’il se serait trouvé quelque fin juriste pour soulever la question loin d’être absurde d’exhibition sexuelle publique.

    Mais comme disait le président du tribunal correctionnel jugeant Zola , refusant d’aborder l’affaire Dreyfus: «la question ne sera pas posée».

    La question ne sera pas posée parce que le monde artistique, et spécialement cinématographique, est le plus conformiste que l’on puisse imaginer. L’académie des César ne pouvait donc qu’avoir l’esprit académique.

    Comme je l’ai écrit dans mes «Névroses Médiatiques»: On pourrait écrire un traité sur le conformisme politique cinématographique. Les explications ne manquent pas: obsession de la mode, plaisir de paraître, conformisme de l’anticonformisme d’apparat, esthétisme de la radicalité pépère.

    L’histoire a montré, pendant l’occupation sans trop d’aménité, que les artistes ne se comportaient pas de manière plus noblement courageuse que les crémiers ou les avocats.

    Aujourd’hui plus qu’hier, le paramètre du temps est le maître à penser. Il suffit d’observer la mode d’une époque pour savoir très exactement ce que regardera uniment le public.

    En France, le cinéma d’avant-guerre était exotique, colonialiste et assez antisémite. Pendant l’occupation, la plupart des artistes ont continué à tourner, sans trop d’égard pour leurs camarades empêchés pour raisons raciales, quand ils n’ont pas collaboré ouvertement jusqu’à ce que le vent tourne.

    Après la Libération, après une épuration sélective, l’idéologie communiste est la matrice obligatoire du discours sur pellicule durant la période stalinienne.

    Mais c’est indiscutablement Hollywood qui fut la capitale du politiquement correct. Monstrueusement paternaliste à l’égard des noirs jusqu’aux années 60, Hollywood, quoique largement représenté par les Juifs, s’est montré d’une pusillanimité particulière pendant la seconde guerre en raison d’un antisémitisme, alimenté par les nazis, qui tenait le Juif comme fauteur de guerre.

     

    L’acteur ou le réalisateur français n’impressionne plus grandement un particulier qui a fini tout de même par comprendre le scénario immuable. 

     

    Jusqu’à ne pas me prononcer le vocable «Juif», y compris dans le cadre des films de propagande anti-hitlérienne. Les Nababs ont donc courageusement tu la Shoah ( Arthur Sulzberger Jr, patron du New York Times faisait de même) puis après la victoire se sont fait un devoir de toujours trouver un petit Cohen de Brooklyn se faire trouer la peau dans le Pacifique.

    De même, dans le domaine des mœurs, et alors que sa conduite individuelle défraye régulièrement la chronique, l’artiste, fleur à la boutonnière, n’est jamais avare, aux Oscars comme aux César, d’une leçon de maintien.

    Et voilà pourquoi évidemment, nous en sommes aujourd’hui à l’antiracisme racialiste, à la culture de l’annulation devenue folle .

    C’est dans ce cadre immuable où ni le courage ni l’intelligence ne se bousculent, qu’à force de descendre les degrés de l’estime publique, l’acteur ou le réalisateur français n’impressionne plus grandement un particulier qui a fini tout de même par comprendre le scénario immuable. L’artiste a descendu définitivement l’escalier.

    S’il lui arrive d’être plus beau qu’un terrien ordinaire, il n’est à présent à ses yeux, ni meilleur à l’intérieur, ni plus intelligent, ni plus généreux.

    Le jet-setter musical ou l’acteur aérien, aux multiples pied-à-terre avec vue sur mer, qui recommande aux gens d’accueillir davantage de migrants sans-logis dans leurs deux pièces cuisine, exaspère aujourd’hui plus qu’hier, avec sa générosité qui ne lui coûte pas cher.

    Raison pour laquelle de nombreux artistes, qui ont les pieds sur terre et le sens de la distance, commencent à se faire économes de cette générosité ostentatoire … trop virtuelle.

    Et voilà pourquoi nous rendrons aux César ce qui leur reste: Rien.

     

    Gilles-William Goldnadel est avocat et essayiste. Chaque semaine, il décrypte l’actualité pour FigaroVox.

    Source : https://www.lefigaro.fr/vox/

  • L'alerte démographique, par Jean-Philippe Chauvin.

    La question démographique n’est pas une question secondaire, et le croire serait une erreur autant vitale que sociale : l’avenir d’un pays repose sur sa capacité à vivre et à transmettre et, quand la vie semble négligée, seules les ruines encombrent le paysage sans qu’elles ne parlent d’autre chose que d’un monde disparu, mort.

     jean philippe chauvin.jpgLes peuples et les nations sont mortels, et pas seulement comme sociétés : l’histoire est un immense cimetière de civilisations, et de nombreuses chaînes de transmission ont été brisées faute d’entretien démographique, moral ou politique. Il serait fort dommage que la France (ce qu’elle est et porte dans l’histoire du monde et des hommes) disparaisse à son tour dans une globalisation d’amnésie bien-pensante et de féodalismes identitaires et techno-financiers, d’où ce souci démographique qui anime ceux d’entre nous qui veulent un avenir français sans, pour autant, méconnaître les autres manières d’être au monde.  

     

    Or, les chiffres de la natalité et de la fécondité françaises de cette dernière année ne sont pas bons et peuvent même paraître inquiétants : le taux de fécondité (le nombre d’enfants par femme en âge de procréer) s’établit pour 2020 à 1,84 et le nombre des naissances n’a jamais été aussi bas depuis… 1945 ! Entrons-nous dans un nouvel hiver démographique, ou n’est-ce que la conséquence passagère d’une crise sanitaire dont nous ne savons pas encore la fin ? Or, au début du premier confinement, l’idée courante (mais fausse) était que l’enfermement contraint allait provoquer une embellie démographique neuf mois après, ce que la réalité vient de cruellement démentir. En fait, la crise sanitaire a accéléré un processus antérieur qui voit la fécondité française diminuer et la natalité avec, sachant que, déjà, le nombre de femmes en âge de procréer a logiquement diminué ces dernières années, conséquence du premier « baby krach » du milieu des années 1970 et de l’élévation de l’âge de la première maternité (presque 31 ans en moyenne pour les femmes françaises aujourd’hui) qui « étire » ainsi la natalité dans le temps.

     

    Mais l’une des causes principales de la baisse de la natalité est politique, ce que rappelle le démographe Gérard-François Dumont dans un entretien très instructif publié par Le Figaro dans son édition du vendredi 12 mars dernier, intitulé, avec raison, « La France paie le démantèlement de sa politique familiale » : « Si l’on considère les niveaux de fécondité des pays européens et les différentes politiques familiales, le résultat est clair : les pays dont la politique familiale est faible ont les fécondités les plus basses. Ceux dont la politique familiale est moins timorée ont les fécondités les plus élevées. Jusqu’au milieu des années 2010, la politique familiale de la France lui permettait d’avoir la fécondité la plus élevée d’Europe, un temps devancée seulement par l’Irlande. C’était une politique qui, avec ses multiples déclinaisons financières, fiscales et de facilitation de la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale, satisfaisait les Français. Puis, sous le quinquennat Hollande, un démantèlement systématique est intervenu : fin de l’universalité des allocations familiales ; diminution de l’équité fiscale ; réforme du congé parental rendant celui-ci considérablement moins attractif ; forte diminution de l’autonomie fiscale des collectivités locales contraintes de revoir à la baisse leurs systèmes de grade de jeunes enfants. » Ainsi, la politique pratiquée par les socialistes au pouvoir a oublié qu’il ne faut jamais mélanger les genres et que confondre politique sociale et politique familiale entraîne une déstabilisation de cette dernière : c’est bien ce qui s’est passé, et la chute fut brutale, le taux de fécondité passant de 2,01 en 2014 à 1,84 en 2020, ce qui s’est concrètement traduit par une baisse significative du nombre de naissances.

     

    Or, cette nouvelle situation démographique a des conséquences sociales et pas seulement sur les moyen et long termes, comme le souligne M. Dumont : « La dénatalité exerce des effets économiques à court terme sur la demande et sur le dynamisme économique, puisque l’enfant est un élément « actif » de l’économie. A moyen terme, c’est la population active qui diminue, par conséquent un potentiel moindre de création de richesses. » Des naissances en moins, ce sont des classes en moins, des professeurs en moins, des écoles en moins, et cela dès les premières années après le « creux » de la natalité : « En France métropolitaine, il naît désormais 100.000 enfants de moins qu’il y a dix ans. C’est un phénomène spectaculaire », explique dans la même édition du Figaro Yvon Sérieyx, chargé de la conciliation vie familiale-vie professionnelle à l’Unaf, et c’est un phénomène qui n’incite guère à l’optimisme.

     

    Mais il y a un autre souci économique et social, c’est le financement des retraites qui risque d’être lourdement impacté par cette baisse de la natalité française, et cela dans un délai de quelques décennies, affectant aussi le système de santé ainsi que celui de l’assurance-chômage, du moins si le système d’une « solidarité nationale » effective et inter-générationnelle (retraites par répartition, sécurité sociale, etc.) perdure, ce qui reste à défendre face aux pressions de la mondialisation dérégulatrice et d’une Union européenne moins protectrice que ne peut l’être, malgré tous ses défauts (et ils peuvent être lourds…), l’État français hérité des années 1936-1962…

    Alors, que faire ? Il serait évidemment nécessaire que l’État, qui n’est pas pour autant le maître des chambres à coucher, travaille à la mise en place d’une véritable stratégie, non pas seulement nataliste, mais familiale au sens le plus complet du terme, et qu’il s’appuie sur tous les acteurs économiques (sociaux, « corporatifs » et locaux) de l’ensemble français, pour la faire advenir : en somme, « susciter plutôt qu’imposer », en favorisant les familles et en soutenant les parents isolés, et toutes celles qui souhaitent avoir des enfants et en sont empêchées par les difficultés économiques du moment ou par les contraintes du milieu professionnel. Car il est un élément à prendre en compte, c’est le désir d’enfants en France qui est, pour les femmes en âge de procréer, de 2,3 : un chiffre supérieur à ceux que nous constatons aujourd’hui et qui est une promesse et une espérance si notre société sait répondre à cette attente ! Bien sûr, de la théorie à l’effectivité, il y a parfois une marge importante, mais il semble que l’enjeu en vaut la chandelle. De plus, il faut rendre aux familles et à leurs enfants qui sont « les parents de demain » des perspectives d’intégration au monde du travail et des possibilités d’une meilleure qualité de vie, et promouvoir une politique audacieuse d’aménagement des territoires, fondée sur le désir de plus en plus fort d’une vie extra-urbaine par exemple (désir exprimé par une part croissante de la population)  ou d’une alternative « heureuse » à la société de consommation. En fait, ce ne sont pas les pistes qui manquent, et c’est aussi ce qu’avance le Haut-commissaire au Plan François Bayrou en train de préparer une note sur ce sujet. Encore faut-il que ce souci démographique ne soit pas la proie des seuls économistes, mais qu’il devienne une des priorités de l’État : en ce domaine comme en d’autres, « Politique d’abord » ! C’est la volonté politique qui peut permettre un rétablissement durable de la natalité, non dans l’excès mais dans la mesure et la raison qui, toujours, doivent guider l’action politique envers la société et les citoyens. La République en est-elle encore capable ? Il n’est pas certain que la réponse soit positive...

     

    Mais, la bonne santé démographique d’une nation n’est pas la seule condition de la force de celle-ci, même si Jean Bodin expliquait au siècle de François 1er que, vraiment, « il n’est de richesses que d’hommes » : il faut y ajouter l’envie de vivre et de transmettre, le besoin de cette amitié nationale qui favorise l’unité des peuples du pays autour d’un axe fédérateur et qui doit s’imposer aux égoïsmes individuels ou communautaires, tous nécessaires mais devant être apprivoisés pour ne pas être empoisonnés… Que la Monarchie royale en France puisse s’apparenter à un État-famille, et que la France soit une « famille de familles », pourrait aider à la vie pérenne et toujours renouvelée de ce pays, « le plus beau royaume qui soit sous les cieux »… 

    Source : https://jpchauvin.typepad.fr/

  • Camelots du Roi. Irruption au conseil régional d'Occitanie : l'Action française renoue avec l'agit-prop, par Paul Conge.

    Des militants d'Action française (Illustration.)
    Pierre Gautheron / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

    Ce jeudi 25 mars, le groupuscule d’extrême droite s’est introduit manu militari dans l’hôtel régional, à Toulouse. Une action qui a choqué jusqu’au sommet de l’Etat. Vieux groupe monarchiste, l’« AF » renoue avec sa stratégie du « chahut » de ses jeunes années.

    1.jpgJeudi 25 mars vers 14 heures, huit militants de l’Action française (AF) ont brusquement fait irruption dans l’enceinte du conseil régional d'Occitanie, en pleine séance. Mais les agitateurs, membres de la section du Languedoc de l’« AF », n’ont pas eu le temps de faire grand-chose, stoppés par des agents de sécurité, avec lesquels ils en sont venus aux mains. Seuls deux, de noir vêtus, sont parvenus à forcer l’entrée de l’hémicycle. Leurs cris et slogans (« Action française ! ») interrompant quelques minutes l’assemblée qui se tenait dans l’hôtel de région de Toulouse. « La porte de l'hémicycle a été ouverte brutalement et j'ai vu mes agents de sécurité se battre avec des personnes de façon violente », a dénoncé sur Europe 1 la présidente de région, Carole Delga (PS), qui animait à ce moment-là la séance.

    « Ça a poussé un petit peu. Mais il n’y a pas eu de coups », pondère Adrien Molin, porte-parole de ce groupuscule monarchiste, auprès de Marianne. « L’objectif, c’était de rentrer, de déployer la banderole, de crier nos slogans et de repartir, sans agresser. » Du coup d’éclat ne resta bientôt plus que leur bannière verte et rouge, étendue au sol : « Islamo-gauchistes, traîtres à la France ». Dans la soirée, le groupuscule d’extrême droite a expliqué avoir voulu protester contre ce qu’ils appellent la « politique régionale islamo-gauchiste » de la majorité socialiste.

    Trois mois avant les élections régionales, cette opération d’agit-prop a enclenché une onde de réactions indignées dans la classe politique. Jusqu’au chef de l’Etat : « L’extrême droite a une nouvelle fois montré son vrai visage : action violente, volonté de bâillonner la démocratie », a tonné Emmanuel Macron. Pour le porte-parole de l’AF, qui invoque leur défense de la « décentralisation », cela « a du sens » de forcer l’entrée d’une « institution de province », assure-t-il : « C’est pas une attaque contre la démocratie comme on l’a entendu, faut pas exagérer. » Deux de ses congénères ont été entendus par la police.

    Banderoles et mégaphones

    Plus rien n'arrête l’Action française, groupuscule fondé en 1898, mais qui bouge encore. Depuis plusieurs années, les camelots renouent avec les actions coup de poing, en suivant toujours le même modus operandi : ils forcent l’entrée dans un lieu symbolique, munis des banderoles, de drapeaux aux fleurs de Lys (emblème de la royauté) et de slogans rageurs. Pas plus tard que le 28 février, une dizaine de leurs militants s’introduisaient dans l’abbaye Saint-Vaast, à Arras (Nord), pour dénoncer sa vente à une chaîne d’hôtels de luxe. La ville a déposé plainte. Un an auparavant, le 30 novembre 2019, ils envahissaient le toit de l’usine Latécoère, à Labège (Haute-Garonne), avec une banderole « US Go home », pour protester contre la cession à 65% de l’équipementier aéronautique à l’américain Searchlight. Dix de leurs militants avaient été interpellés à la suite de cette action.

    Les restrictions Covid aussi ont inspiré les héritiers des camelots du Roi, très opposés à ce qu’ils disent être une « dictature sanitaire »… en témoigne le très rebelle « apéro-liberté » organisé place des Vosges, à Paris, le 14 mars dernier, où une vingtaine de militants réunis autour de bières en bouteille réclamaient la « fin du port du masque » obligatoire et la « réouverture des bars et restaurant ».

    Le retour du "chahut"

    L’agit-prop est de nouveau à la mode à l’extrême droite, sous l’impulsion de Génération identitaire, entre autres, qui en fait sa marque de fabrique — leur dernière action, des patrouilles anti-migrants en 4x4 à la frontière franco-espagnole, est intervenue peu de temps avant leur dissolution par le ministère de l’Intérieur. « En réalité, on retrouve notre histoire », clame le porte-parole de l’AF en citant les frasques de l’AF au XXe siècle, comme l’affaire Thalamas. En 1909, lorsque des camelots du Roi avaient interrompu les cours du professeur Amédée Thalamas, la Sorbonne était alors prise d’assaut, le professeur fessé publiquement.

    « Le chahut, les émeutes violentes et les agressions contre des adversaires politiques sont une pratique structurelle de l’AF. C’est un mouvement qui a toujours fait usage de la violence politique », acquiesce Baptiste Roger-Lacan, spécialiste des droites radicales et du royalisme. Mais surtout entre 1898 et 1914. Certes, ils restent héritiers de la logique du « coup de force », théorisé par Charles Maurras, qui consiste à créer l’événement par la violence. Mais sans doute leurs actions d’aujourd’hui diffèrent-elles des celles d'hier, comme la « Nuit des purges », en 1923, où ils attaquaient des adversaires politiques, leur jetaient du goudron et leur faisaient ingurgiter de force de l’huile de ricin (un vomitif)...

    "On va continuer"

    Leur effectif militant s’est considérablement effrité depuis. « On n’est pas revenus à la grande époque des années 1910 ou 1920, mais un maillage est en train de se refaire », poursuit Adrien Molin. Forte de plus de 3.000 militants aujourd'hui, selon les responsables, soit 50% de plus qu’en 2013, l’organisation s’agrémente de nouvelles sections locales, comme celles ouvertes cette année à Caen et à Pau. Selon nos informations, il devrait en ouvrir une bientôt à Agen et Brive-la-Gaillarde.

    Une divine surprise pour l'AF : « Nos adhésions augmentent chaque année, donc forcément, notre appareil militant essaie de se structurer davantage. Nous coordonnons nos actions au niveau régional pour mener ce type d’actions au mode opératoire de plus en plus rôdé ». Le porte-parole conclut : « Ce sont des actions qu’on va continuer de faire. »

    « L’AF a toujours eu besoin de quelque chose "contre" lequel réagir. Dans son histoire, elle a défini la communauté nationale par la négative : ce qui n’est pas juif, pas communiste, pas musulman… pas islamo-gauchiste aujourd’hui », conclut Baptiste Roger-Lacan. « Stratégiquement, cela a du sens pour elle de reprendre à son compte des expressions et des concepts qui marchent bien au sein des droites en général. Pour tenter de sortir de son isolement politique dans lequel elle est depuis la 2e guerre mondiale. »

    Source : https://www.marianne.net/