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Maîtres et témoins (III) : Léon Daudet

Dénonciation d'Hitler et prédiction de la guerre..

Dénonciation d'Hitler et prédiction de la guerre..

Sitôt connues les premières moutures du calamiteux Traité de Versailles, Bainville et toute l'Action française, mais aussi Foch, Joffre et tous les esprits lucides prévoyaient une nouvelle guerre "pour dans vingt ans"...
Bainville et Daudet alertèrent dès 1919 sur le péril allemand en général, et - dès 1930 - sur le péril nazi, en particulier.
En vain.
Le Pays légal ne voulut pas entendre et, se réfugiant dans un "pacifisme" de mauvais aloi, accusant même de bellicisme, de vouloir et de préparer la guerre ceux qui, comme Daudet et Bainville, voulaient préparer la France aux assauts prochains des revanchards allemands.
Moyennant quoi, en 1945, Bainville et Daudet étant morts depuis 9 et 3 ans, Maurras sera condamné pour "intelligence avec l'ennemi" !... par ceux qui, précisément, représentaient le courant qui a mené, dans les faits, une politique folle et suicidaire "d'intelligence avec l'ennemi", en continuant cette "tradition négative" d'admiration envers la Prusse et l'Allemagne inaugurée par les Lumières, et poursuivie par la Révolution, les Républiques et les deux Empires...

De "La pluie de sang", page 45 :

"...A l'heure où j'écris, cette notion de salut public est de nouveau obscurcie par l'infiltration maçonnique et primaire dont feu Briand fut le porte-parole.
Mais en même temps la menace allemande avec Hitler, von Seekt, Schleicher, Hammerstein et Cie reparaît à l'horizon prochain avec une telle force tragique, un tel déploiement pangermaniste et guerrier, que seuls les aveugles volontaires peuvent nier le péril revenu; et dans des conditions peut-être pires qu'en 1914, après dix ans d'un véritable avachissement moral organisé chez nous.
En 1914 l'Allemagne était gorgée. En 1932 elle est affamée.
En 1914 elle n'avait qu'à perdre. En 1932 elle a tout à gagner.
Ce fut la folie de Poincaré, et aussi sa honteuse faiblesse, de ne pas faire ce raisonnement si simple et de laisser venir la question sur l'évacuation de Mayence, qui a déclenché l'éruption des fureurs actuelles, qu'on ne voit plus aucun moyen d'arrêter..."

Ces propos de Daudet sont à rapprocher de ceux que tenait Jacques Bainville, depuis 1930, dans son "Journal" : il dénonçait "l'agitateur", "l'énergumène Hitler", "le monstre", "le Minotaure" :

1. Journal, Tome III, 1927/1935, note du 26 Juin 1930 :

« Tandis que le chancelier Brüning est toujours à la recherche d’un ministre des finances, il se passe en Allemagne des choses singulières. Pays déconcertant, pays à surprises, auquel on ne peut faire confiance qu’en se méfiant beaucoup. Les succès électoraux que remporte Hitler ne sont-ils pas un phénomène prodigieux ?
Quel est le programme de cet agitateur ? Toutes les outrances. Il est à la fois nationaliste et socialiste : c’est même le double nom du parti qu’il a fondé. Il est pour la revanche et contre le capitalisme. On a dit que son drapeau pourrait être le drapeau rouge avec la croix gammée, signe de ralliement des antisémites. Hitler joue sur tous les tableaux de la démagogie violente. Et tout ce qui ferait qu’ailleurs, dans un pays sensé, il ne serait suivi que par une poignée d’énergumènes, lui attire en Allemagne une clientèle qui s’accroît tous les jours. »

2. Journal, Tome III, 1927/1935, note du 3 décembre 1930 :

"Comment empêcher l'Allemagne de se donner un régime national-socialiste et de se vouer à Hitler, si elle en a envie ? C'est une démocratie libre. Elle a le droit de disposer d'elle-même. Hommes et femmes votent et revotent. "Mon corps est à moi."
Le programme des nazis ne tient pas debout. Toute la doctrine hitlérienne, si cela peut s'appeler une doctrine, est une suite de négations, une collection d'anti. C'est une pure démagogie, mais qui semble très bien adaptée au caractère allemand et faite pour lui plaire. Plus c'est absurde, plus c'est outré, et plus cela réussit. L'Allemagne n'est pas un pays où il soit vrai de dire que tout ce qui est exagéré ne compte pas. Il n'y a même que l'exagération qui, chez elle, paraisse avoir des chances de réussir."

3. Journal, Tome III, 1927/1935, note du 27 février 1935 :

"Qui eût dit qu'Adolphe Hitler, l'énergumène en chemise brune, recevrait un jour la visite du ministre des Affaires étrangères de Grande-Bretagne ? Qui l'eût dit après le massacre du 30 juin, après l'assassinat du 25 juillet ? (respectivement, "Nuit des longs couteaux" et assassinat du chancelier autrichien Dollfuss, ndlr) On a pour l'Allemagne hitlérienne plus d'égards encore que pour l'Allemagne républicaine. On lui passe tout.
Pour les Allemands, quelle justification de la violence ! Pour les autres, quel étrange moyen de fonder la paix sur la moralité !
Le gouvernement britannique croit que le moment d'une grande tentative d'accord pacifique en Europe est venu. Il faut s'entendre ou périr. En tout cas, ajoute-t-il, on ne risque rien à sonder les dispositions du Führer... C'est vrai pourvu qu'on ne lui fasse pas sur l'essentiel des concessions imprudentes et qu'on ne ferme pas les yeux à la réalité de ses armements, tandis que lui-même aura toute facilité de tromper des partenaires trop complaisants."

4. Journal, Tome III, 1927/1935, note du 2 mars 1935 :

"...Sir John Simon sera dans quelques jours à Berlin. Il verra Hitler, c'est-à-dire le monstre lui-même. Quel espoir y a-t-il de conclure un traité de désarmement avec le Minotaure ou de le signer autrement que pour se faire dévorer ?"