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Maîtres et témoins (III) : Léon Daudet

Du "Père la Victoire" au "Perd-la-Victoire"...

Du "Père la Victoire" au "Perd-la-Victoire"...

De "La pluie de sang", pages 319/320/321 (fin de l'ouvrage) :

"...(la victoire) On sait comment celle-ci continua de s'élargir et de progresser (sans une heure de défaillance) du 10 août au 4 octobre, où l'Allemagne demanda la paix, puis du 4 octobre au 11 novembre, date de l'Armistice.
Ainsi finit l'hécatombe de quatre ans.
Malheureusement Clemenceau (dont l'énergie politique suffit à déterminer la victoire) ne connut pas, dans son ampleur, le délabrement du moral ennemi depuis la dégermanisation du ministère de l'Intérieur français, et la disparition de ses journaux.
Il ne le connut pas et l'état-major allié, occupé à marteler et fracasser l'ennemi (suivant une méthode à la Descartes) ne le connut pas davantage.
Ce n'est d'ailleurs pas l'affaire des militaires, si grands soient-ils, de calculer la portée politique de leurs coups, ni le bénéfice que leur gouvernement peut en retirer.
Clemenceau connaissait les Anglo-Saxons, mais il ne connaissait ni les Allemands, ni l'histoire d'Allemagne et il eût bien fait, sur ce point, de consulter quelqu'un comme Bainville qui a écrit ce chef d'oeuvre : "Histoire de deux Peuples".
Bainville lui eût appris que l'Allemand, son arrogance une fois brisée, tombe au-dessous de tout autre peuple.
Il lui eût appris aussi que l'arrogance, comme la détestable unité allemande, se brise en un seul endroit : à Berlin.
Aujourd'hui, quatre points semblent établis, conformes à la tradition et au bon sens :
1. L'Armistice était prématuré. Il a manqué un Sedan allemand. Or ce Sedan était certain et imminent.
2. La paix véritable n'est acquise que si l'armée victorieuse occupe la capitale ennemie.
3. C'est au moment de l'Armistice et dans le désarroi de la défaite que doit être exigé de l'ennemi vaincu le premier et le plus fort versement d'indemnités réparatrices.
4. De 1924 à 1932, la politique, imbécile et criminelle de Briand (Locarno, Thoiry et Cie), exploitée habilement par Stresemann, continuateur, comme il l'a déclaré lui-même, de Stein et d'Hardenberg, a permis à l'Allemagne de se relever, de devenir de nouveau, avec Hitler, Schleicher et le grand Etat-Major, maîtres de Stresemann et de Brüning, comme de von Papen, agressive et menaçante.
Nous avons, là-dessus, un texte décisif, de la sorte de ceux qu'exigeait Fustel de Coulanges, notre plus grand historien : une lettre de Stresemann au Kronprinz, publiée par L'Illustration du 1er mai 32, assurant celui-ci que toute sa politique, à lui Stresemann, avait consisté à gagner du temps, à ronger par morceaux le Traité de Versailles, à faire le lit de la monarchie Hohenzollern, en un mot à "finasser...finassieren".
Jamais diplomate, ministre, politique, n'a été roulé plus complètement, plus ignominieusement, avec plus de continuité que ce déplorable et sinistre Briand.
L'Action française en avait cent fois averti le peuple français, avec un luxe de preuves égal à celui de juin et juillet 1914, alors que le même Briand déclarait à déjeuner, devant Stéphane Lauzanne, du "Matin", que "les Allemands n'étaient pas fous" et qu'ils ne nous feraient jamais la guerre." (fin du chapitre, fin du livre).

Illustration : Clemenceau, par Joseph-Félix Bouchor