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Maîtres et témoins (III) : Léon Daudet

Au soir d'une longue vie de lutte, jusqu'au bout..

Au soir d'une longue vie de lutte, jusqu'au bout..

Dans quel état d’esprit devait se trouver Léon Daudet en 1940, au moment de la mort de sa mère, peu de temps avant sa propre mort ?
Il ne semble pas difficile de s’en douter un peu…
Depuis l’assassinat de son fils, en 1923, il n’est plus le même, à l’intérieur de lui, à cause du drame atroce qui – pour reprendre la juste formulation d’Henri Massis – "va faire du trop heureux Daudet un "pauvre Léon malheureux"... ".
Pourtant, il a fait front et il a continué le combat, comme si de rien n’était, et fait face, vis-à-vis de "l’extérieur"; mais la blessure intérieure, même stoïquement supportée, ne s’est jamais refermée…
Entre 1923 (son fils Philippe) et 1925 plusieurs de ses chers amis ont également été assassinés, dont Marius Plateau, mais aussi, en moins de six mois, sept militants monarchistes ou appartenant à d’autres mouvements nationalistes : il fallut que Maurras adressât une lettre menaçante à Abraham Schrameck, ministre de l’Intérieur, le 9 juin 1925, pour que, d’un coup, comme par enchantement, cette suite assassinats prît fin…
Son grand ami, Jacques Bainville, est mort trop tôt, en 1936, enlevé prématurément à son affection à l’âge de 57 ans, exactement comme son propre père, Alphonse Daudet…
Ce fut une perte immense pour l’Action française, qui titra "Deuil de l’Etat", mais aussi, justement, pour la France, et, bien sûr, humainement et affectivement, pour tous ses proches, dont Léon Daudet, qui a alors presque 69 ans.
Il a commencé à ressentir dans son organisme les premiers signes du mal qui l’emportera (une hémorragie cérébrale), un mal qui s’installe insidieusement en lui, peu à peu, se manifestant par plusieurs alertes, surmontées, et qui l’emportera dans six ans, en juillet 1942…
Sa soeur Edmée est morte un an après Bainville, en 1937.
En même temps, il vient de vivre les dernières années de sa mère qui, à l’inverse de son père, à la vie très brève, aura une vie très longue (96 ans), disparaissant juste un an avant Jeanne Hugo, la première femme – et pour bien peu de temps… - de Léon Daudet, décédée, elle, en 41...
Il ne le sait pas encore, mais son frère Lucien décédera en 1946, quatre après lui : ainsi, de 37 à 46, en moins de dix ans, ce sera la fin pour "les Daudet" : Edmée, d'abord, puis sa mère, lui, Léon, ensuite, et enfin son frère Lucien... Pampille, l'épouse idéale, "mon second et véritable mariage", partira la toute dernière, mais un peu plus tard, en 1960...
Mais, plus encore que ces deuils familiaux, ce sont les malheurs de la France qui achèveront d’abattre le colosse, cette force de la nature, cette surabondance de vie…
« C’est trop bête ! » Tel peut être, dit trivialement, certes, le sentiment que l’on éprouve en observant les faits : en 1918, la France était sortie victorieuse - mais après combien de souffrances, et à quel prix ! – d’une guerre que l’Action française avait tout fait pour éviter, mais que le Régime, lui, ne sut pas éviter.
Tout était possible, alors, à la France.
L’Action française, Maurras, Bainville, Daudet etc… n’eurent de cesse de conseiller les responsables politiques, qui n’entendirent pas, ou ne voulurent pas entendre…
Il fallait démembrer l’Allemagne, trouver enfin, du côté de "la rive gauche du Rhin" une frontière sûre et qui mît la France en état de sécurité, ce qui nous assurait – mais aussi à l’Europe et au monde – la paix "pour 150 ans", disait Daudet : or, le Pays légal maintint l’Allemagne en l’état, lui laissa l’essentiel de ses forces, se contentant de l’humilier, ce qui provoqua chez elle une haine et un désir de vengeance exploités par Hitler; et la France, la grande France victorieuse de 1918, se retrouva vingt ans après, en 1939 - exactement comme l’avaient annoncé Bainville et d’autres, comme Foch... - face à une Allemagne qui ruminait et préparait sa vengeance, et parfaitement préparée à la guerre, alors que le Pays légal avait laissé la France dans un état d’impréparation manifeste…
Toutes ces choses réunies, et l’âge avançant, expliquent la lente mais inexorable détérioration de l’état de santé de Léon Daudet, à partir de la mort de Jacques Bainville.
Daudet eut, du reste, plusieurs "attaques" révélatrices de son mal, et annonciatrices d’une fin prochaine; mais il s‘en remit à chaque fois, du moins c’est l’impression qu’il donna, tant était grande sa vitalité…
En tout cas, jusqu’au bout, jusqu’à l’extrême limite de ses forces et de ses capacités, Léon Daudet resta fidèle à ce mouvement et à ce quotidien auxquels il avait consacré sa vie, depuis sa rencontre avec Charles Maurras. Même retiré en Provence, il continua, tant que ses forces le lui permirent, d’envoyer son article au journal.
C'est le 17 avril 1941 que parait son dernier article, qu'il conclut, malgré tout, par un cri d'espoir, véritable acte de foi en l'avenir : "Vive l’Avenir de l’Intelligence !"