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Dans notre Éphéméride de ce jour : un courrier de François Gerlotto, à propos de L'Hermione...

Francois Gerlotto

Sur ce sujet, je me permets de vous joindre l'article que j'avais publié dans Royaliste au moment du lancement de l'Hermione : Dans un monde de la « communication » où la forme du message est plus importante que la réalité qu’il présente, où le tweet du jour, voire de l’heure, est la seule information qui intéresse vraiment le monde des media, il est réconfortant de vivre des événements riches de sens.
Et s’il en est un, c’est bien celui-là : dix-sept ans après la pose de sa quille dans la forme de radoub de Rochefort, là même où l’originale avait été construite en 1779, la copie de la frégate l’Hermione a pris le large et fait route vers les Amériques, revivant, deux cent trente ans après, le voyage qui a transporté vers le Nouveau Monde, outre le jeune marquis de La Fayette, le soutien de la France aux « Insurgents » dans leur lutte contre la Grande Bretagne pour l’indépendance des Etats-Unis.
Riche de sens dans tous les domaines. Dans celui de l’histoire maritime, car cette frégate représente certainement l’apogée de la Marine à voile. La « frégate française» de la fin du 18ème siècle est universellement reconnue comme le plus beau et le plus marin des navires de guerre jamais construits , au point que durant un siècle (1750-1850) elle a été constamment copiée par toutes les marines du monde, à commencer par la Royal Navy . Plus encore, ces premières frégates modernes, dites « de 12 » (pour porter des canons de 12 livres), dont l’Hermione est l’exemple achevé, sont avec le vaisseau de 74 canons, les éléments les plus visibles de l’immense effort fait par la France de Louis XVI pour redonner à notre pays une Marine digne de ce nom. Cet effort sur la marine, qui est voulu et imposé par le « Roi géographe » , sera récompensé par nos plus grandes victoires navales contre les anglais, permettant celles, sur terre, des armées coalisées franco-américaines. Jamais sans doute la « Royale » n’aura autant pesé dans l’histoire du monde.

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Illustration fournie par François Gerlotto

 
Et donc, du sens dans l’histoire tout court, tant en France et en Amérique que dans le monde entier, même si l’on peut regretter que dans l’aventure de l’Hermione les exigences des media aient imposé de ne parler que du général Lafayette, quand toute personne un peu éprise d’histoire sait maintenant le rôle essentiel de Louis XVI dans cet épisode historique majeur. Quoi qu’il en soit, ce voyage frappe les trois coups d’une pièce à la trame infiniment complexe, aussi complexe d’ailleurs que les relations entre la France et les Etats-Unis (qui, quinze ans plus tard, d’alliés qu’ils étaient, se retrouvaient en « quasi-guerre » navale). Ce sont ces événements en effet qui ont ouvert la voie à la Révolution Française, en rendant sa puissance militaire et diplomatique à la France, qui « retrouvait en Europe son rang de puissance majeure, d’où l’avait déchue la guerre de Sept Ans » (Jean-Christian Petitfils, Louis XVI ), et en y plantant les germes que l’on sait : l’application de la philosophie des Lumières en Amérique, jointe à la réorganisation administrative et militaire de notre pays par Louis XVI, ont donné à la Révolution à la fois les principes qui ont bouleversé le monde et les instruments pour les imposer face à ses ennemis.
Enfin cette aventure a aussi un sens plus moderne. Rendez-vous compte, dans notre monde de l’immédiateté et du présent perpétuel, une poignée de farfelus rassemblée autour d’Eric Orsenna a conçu un projet inutile et fou : reconstruire la frégate l’Hermione à l’identique, matériaux, outils et méthodes artisanales inclus ! Et durant dix sept ans, avec acharnement, peu à peu suivi par des dizaines, puis des milliers d’autres, ils ont poursuivi –et mené à terme- ce programme contre vents et marées. Pour rester dans le domaine de la marine à voile, nous voilà bien loin des effets d’annonce sur La Boudeuse dont nous avions parlé dans ces colonnes . Ici pas d’arrière-pensée sondagière, et si les moyens de communication et de publicité ont été utilisés –fort bien d’ailleurs, ils l’ont été pour financer un projet coûteux, pas pour augmenter un quelconque pourcentage d’opinions favorables. Il est rassurant de voir qu’en dehors de la sphère politico-médiatique, le tweet ravageur n’est peut-être pas encore devenu l’alpha et l’oméga du génie humain. Réjouissons-nous en particulier de voir que lorsque l’occasion lui en est donnée, le français retrouve le goût de son histoire, les gestes de ses ancêtres, et peut rivaliser avec eux dans la qualité de ses productions, de la plus modeste à la plus impressionnante. L’artisanat qu’il a fallu reconstituer ou réinventer pour construire l’Hermione montre à quel point notre pays a conservé toutes ses capacités d’initiative dans ses actions et de qualité dans son travail : quand on peut comprendre et apprécier le but assigné, l’effort est consenti dans l’enthousiasme. Voilà enfin qui renforce la confiance que l’on peut avoir dans le futur de notre vieux pays, qui montre une fois de plus son génie dans cet événement à la fois festif, historique et rassembleur, qui ravive la mémoire, la fierté nationale, le bel ouvrage, la grande aventure. Qui disait que les français ne s’intéressaient plus à rien, ni au passé ni à l’avenir, et avaient perdu le goût de vivre ensemble ?
Alors, bon vent à l’Hermione, et vive la Royale !

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