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Faut-il un référendum sur l’immigration ?, par Catherine Rouvier.

Il est touchant de voir que plusieurs candidats à l’élection présidentielle promettent, avec une belle unanimité, qu’ils organiseront, dès leur arrivée au pouvoir, un « référendum sur l’immigration ».

6.pngCe n’est certes pas Macron, un Président signataire du Pacte international des migrations de l’ONU, dit « pacte de Marrakech », et qui est actuellement en pleine opération « Afrique-France » destinée a faire oublier la nauséabonde « France-Afrique » néo-colonialiste et paternaliste, qui prendra l’initiative d’un tel référendum. Ni les deux assemblées à sa botte. Ni le vaillant peuple des gilets jaunes, car le « référendum d’initiative partagée » instauré en 2008 par Nicolas Sarkozy est impossible à mettre en œuvre : il faut 4,7 millions de signatures citoyennes (pas moins) puis un verrou parlementaire…

Il faudra donc, en effet, attendre qu’un Zemmour ou une Le Pen, voire même un Barnier – qui vient de le promettre à son tour -, soient élus en mai prochain. Mais, même alors, l’incertitude sera grande.

D’abord parce que même un peuple présumé rationnel comme le peuple suisse a donné, ces derniers temps, des signes de ralliement au politiquement correct. Et tout peuple qui se transforme en « foule psychologique » sous l’effet d’un choc émotionnel (souvenons-nous de la photo du petit Dylan) peut, au lieu du « oui » attendu à la question « Voulez-vous l’arrêt de l’immigration ? », répondre « non ».

Ensuite parce que, même s’il recueille un « oui » massif, le projet de loi devra affronter les foudres luxembourgeoises et strasbourgeoises. Nous avons adhéré par deux fois, une fois en tant que France en 2013 et une fois en tant qu’Union européenne (article 6 al. 3 du traité de Lisbonne de 2007), à la CEDH, et la Cour de Strasbourg est, de manière notoire, bien plus préoccupée de la sécurité… des migrants que de celle des habitants des pays d’accueil !

Par ailleurs, la Charte des droits fondamentaux, proclamée à Nice, le 7 décembre 2000, et incluse dans le traité de Lisbonne actuellement en vigueur, est devenue le fondement incontournable de la jurisprudence de la Cour de Luxembourg. Or, la Charte, tout au long de ses six chapitres, décline sur tous les tons le sacro-saint principe de « non-discrimination ».

Certes, en matière d’immigration, il n’y a pas de compétence exclusive de l’Union et on devrait donc pouvoir appliquer le merveilleux principe de « subsidiarité » et laisser chaque État légiférer sur un sujet aussi crucial.

Seulement, voilà : dans les matières dites de « compétence partagée », les États ne peuvent appliquer leur propre politique qu’autant et aussi longtemps que l’Union européenne n’a pas statué sur le sujet. Or, en matière d’immigration, le « pacte sur la migration et l’asile » de septembre 2020 est entièrement axé sur la protection du migrant…

Certes, si une France patriote revigorée prend, en mai, l’initiative de contrecarrer la politique migratoire de l’Union européenne en arguant de la souveraineté d’une décision populaire, ce sera un signal fort. Mais les obstacles mis au succès de ce projet sont tels qu’à l’heure présente, trop en parler, c’est offrir à Macron une aubaine et une de ces diversions qu’il affectionne et multiplie. Car quel meilleur argument que cette xénophobie de ses adversaires pour rallier à lui tout l’électorat venu de l’immigration, ainsi que l’extrême gauche immigrationniste et pro-islam, derrière son nom ?

Promettre d’appliquer sans faille les lois réglementant le séjour et, surtout, le retour des immigrés clandestins ou délinquants est plus sûr, car là, les États ont encore des marges de manœuvre non négligeables que la France, à la différence de la Hongrie ou du Danemark, n’utilise pas. Il faut dire que le Danemark, qui a pu mettre en œuvre tout récemment une politique de contrôle de l’immigration très efficace, eut la précaution de demander à ce que les accords de Schengen et la Charte ne s’appliquent pas intégralement à lui. C’est sans doute en effet par là qu’il faudrait commencer.

 

Catherine Rouvier

Docteur d'Etat en droit public, avocat, maitre de conférences des Universités

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