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Echéances à l’horizon, par Hilaire de Crémiers

 (Analyse d'Hilaire de Crémiers, parue dans le n° 113 de Politique magazine, décembre 2012) 

Le seul objectif des hommes au pouvoir est de repousser les échéances, en faisant croire qu’ils sont en état de les assumer. Les hommes de l’opposition « républicaine » n’ont pour tout horizon que de s’éliminer les uns les autres, en vue de la reconquête du pouvoir ! 

Nous avons de mauvaises institutions : en France, d’abord ; au niveau européen, ensuite. Nous en payons le prix.

La Ve République n’offre plus de ressources institutionnelles. Nicolas Sarkozy en a épuisé toutes les dernières illusions. Elle ne garantit plus la cohésion intérieure de l’unité nationale ; elle n’assure plus la défense extérieure des intérêts français. Les ressorts sont brisés et les volontés affichées de réussites ne changent rien à la réalité des incapacités institutionnelles. La machine des partis qui est un laminoir, a écrasé tout projet proprement français. Ce qui subsiste de solide est compromis par la vertigineuse dégringolade française si précisément analysée par un Nicolas Baverez ou un François Lenglet. L’économie sur ce point dépend du politique ; or la politique se réduit aujourd’hui à un magma de volontés acharnées à prendre le pouvoir, à se l’approprier, à le reprendre, à le garder, à le façonner et le structurer pour se le conserver.

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Site de Florange : François Hollande arrivera-t-il à passer ? Avec un Montebourg que personne ne maîtrise. 

La réalité politique s’impose

Ailleurs, il en va autrement, contrairement à ce qu’imaginent les Français, trop enclins à penser que le monde leur ressemble. 

david cameron.jpgAinsi il est une politique anglaise, toujours la même, et nos hommes politiques semblent – et depuis plus d’un siècle ! – inaptes à la comprendre. Ils se font constamment surprendre par le jeu d’approche et par le retrait final anglais. De la même façon, pourquoi s’étonner du sens général de la politique allemande qui, en ce moment et de plus en plus, retrouve ses axes historiques et jusqu’à ses réflexes, ses attitudes et ses discours grinçants à la Henri Heine ? Et n’est-ce pas, d’ailleurs, Henri Heine qui avait averti les Français, dès le xixe siècle, de ne pas s’y tromper ? Le Bild se moque de la France tout autant que The Economist. Il est, bien sûr, une politique russe de conservation et d’expansion de son ère historique, même si des journalistes français sont assez sots pour vouloir l’empêcher d’exister ! Et, de même, Obama ou pas, perdure et s’impose une politique états-unienne, que ni Jefferson ni Monroe ne désavoueraient. Même les salons politiques français commencent à savoir que l’ère Mao en Chine est finie et qu’il est une direction chinoise qui, au-delà des hommes qui passent, poursuit une politique spécifiquement chinoise. Et ainsi du Japon, de l’Inde et du Brésil et d’à peu près tous les pays et continents, y compris de l’Afrique qui retombe dans ses divisions ethniques que la politique française d’aveuglement idéologique a niées, provoquant, comme le montre depuis longtemps Bernard Lugan, drame sur drame. Et que dire du monde arabe qui se croit uni et qui ne l’est pas ?

Les nations mènent des politiques nationales ; telle est la première réalité de la mondialisation qu’il ne s’agit pas de nier, mais que les politiques français ne voient qu’au travers de leurs idéologies de parti, libérale ou socialiste, sans appréhender sa vraie consistance politique.

La presse internationale signale ce retour violent ou hypocrite du réalisme politique, quelquefois le plus cynique : il est des constantes du passé qui se retrouvent de nos jours et qui frappent tout esprit qui a le sens politique et historique. Les nations, d’une manière générale, savent ce qu’elles veulent, quand elles ne renient pas leur histoire, et elles sont préoccupées, au premier chef, de leurs intérêts. Que cela ne suffise pas, c’est sûr, et qu’il faille veiller à créer un ordre international, c’est plus que souhaitable. A condition que ce ne soit pas de simples discours pour s’aveugler ou pour tromper.

 

Une France qui ne se reconnaît plus

Ce qui laisse pantois les observateurs internationaux, c’est qu’ils ne reconnaissent plus rien de la France. 

Le chef de l’état n’a plus de crédibilité ni à l’intérieur ni à l’extérieur. Ses préjugés partisans, ses habitudes de louvoiement, ses approximations sur les questions les plus claires le desservent constamment au moment des décisions. Les sommets internationaux où sa nullité souriante et bêtasse affiche une insupportable assurance, ont, depuis qu’il est là, tous échoué. En Europe , encore dernièrement, aux états-Unis, même en Asie où, au mois de novembre, il est allé faire la leçon au nom de la justice, comme il le fait dans un congrès politique français, en oubliant que les Asiates sont totalement insensibles à ce genre de rhétorique.

Le voilà, sur le plan intérieur, engagé dans des réformes sociétales sur lesquelles il n’a aucune idée, n’ayant, dans son égoïsme savamment protégé, jamais réfléchi de sa vie aux suites effroyables de ses folles théories. Sur le plan politique et social, il sera confronté à ses contradictions : les préjugés stupides qui forment le fond de sa prétendue culture politique vont à l’encontre des nécessités de la vie économique et, comme il doit devant l’évidence de la crise tenir compte de ces nécessités, il ne peut que décevoir, contrarier, irriter son électorat et tant de pauvres gens qu’il a abusés. Sa fausse majorité ne peut que s’effriter, du côté écologique, du côté communiste et gauchiste entre autres.

peer steinbrück.jpgLes chiffres tombent, tous mauvais. L’augmentation du chômage, établi maintenant à plus de 3,1 millions, en ne comptant que les inscrits ; la réalité du chiffre de la croissance pour 2013, rappelée tant par l’Union européenne que par l’OCDE, qui sera au mieux à 0,2 % ; l’impossibilité pratique, tel que se dessine le budget 2013, de ramener le déficit annuel à 3 % du PIB en dépit des promesses réitérées ; une dette française cumulée qui peut atteindre rapidement les 100 % du PIB pour peu que la France éprouve des difficultés à se refinancer et qu’ayant été dégradée de son triple A par deux agences de notation, elle se voie soumise à un chantage, puis à une spéculation ; les chiffres désastreux du commerce extérieur ; les dettes insoutenables des collectivités territoriales qui devront faire appel à l’état comme en Espagne ; les déficits cumulés des organismes de sécurité sociale à plus de 135 milliards d’euros qui remettent en cause les politiques de santé, bientôt les retraites. (Illustration : Peer Steinbrück, l'homme du SPD. Social-démocrate, il s'oppose à Angela Merkel parce qu'elle en lâche trop aux Français ! Et il est censé être le François Hollande de l'Allemagne... Les politiques français se sont toujours trompés sur la politique allemande)

D’où un certain affolement malgré des paroles péremptoires qui ne sont pas sans rappeler celles des politiciens de la IIIe et de la IVe République. Après « le pacte de croissance et de stabilité » – words, words, words comme soupirait Hamlet ! – voici « le pacte compétitivité emploi » – again words –  avec ses 35 mesures – pas une de plus mais pas une de moins ! – où pour compenser les surtaxations et surimpositions un système de crédit d’impôt doit permettre aux entreprises de récupérer pour 20 mds sur l’état une partie des sommes déjà versées à titre social et à titre fiscal au Léviathan. Et tout ça à condition que… encore des papiers, des fonctionnaires, des contrôles, de la cogestion…. Et ces 20 mds, l’état compte, lui, les recouvrer en augmentant la TVA. Soyez sûrs que la CSG y passera aussi.

Si ces messieurs croient ainsi arrêter l’hémorragie, ils se trompent. Les capitaux français sont épuisés ou se garent ou se dissimulent ; les capitaux étrangers ne viennent chez nous que pour y faire des affaires. Les gesticulations d’un Montebourg sont grotesques, au rythme dune déclaration nouvelle chaque jour. La désindustrialisation française dont la sidérurgie n’est qu’un exemple, est le résultat de mauvaises décisions accumulées depuis des décennies qui, elles-mêmes, sont le fait de mauvaises institutions politiques. Le discours socialiste ne change pas la donne.

 

Sortir du chaos

La France, d’ailleurs, risque de se trouver dans une situation étrange pour peu que l’Europe soit menacée d’éclatement. Le dernier sommet européen qui a abouti à un échec sur le budget prévisionnel des prochaines années, n’a que trop montré l’éloignement de l’Angleterre, la volonté allemande qui s’impose de plus en plus sous forme d’ultimatum, et les réticences de tous les partenaires qui ne cherchent plus que leur intérêt immédiat. En période de crise, c’était prévisible. Et si la Grèce a été sauvée encore une fois par un déblocage de 41 milliards d’euros, la situation grecque ne peut pas s’améliorer, sauf à effacer la plus grosse partie de ses dettes, même vis-à-vis des institutions publiques, mais alors il serait sage de prévoir le commencement de l’éboulement. Car, du coup, que valent les actifs de la BCE et des banques centrales ? La France serait dans ce cas très mal prise, sans solution de rechange.

Le Parti socialiste n’est évidemment pas à la hauteur de la situation. Et l’UMP, l’autre parti, dit de gouvernement ? Poser la question, c’est aujourd’hui y répondre. Elle se révèle pour ce qu’elle est : une machine à ambitions personnelles. Jusqu’à la rupture, au grand scandale des Français. Comment peut-il en être autrement ? C’est une affaire d’institutions. à supposer que l’explosion n’ait pas lieu, ça recommencera forcément. Que Marine Le Pen et Nicolas Dupont-Aignan ne se réjouissent pas trop : leur cas ne serait pas meilleur.

Qui aura le courage de dire la simple vérité : libérons l’état du régime des partis. Demain, pour sortir du chaos, ce sera la première question qu’il faudra résoudre. Ce sera une urgence de salut public.

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