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La faute aux politiques, l'analyse politique d'Hilaire de Crémiers....

(parue dans le numéro 100 de Politique magazine, d'octobre 2011)

 

Les politiques refusent d’endosser leur responsabilité. Pourtant, tout ce qui arrive est principalement leur faute. Et ce sont leurs décisions qui sont la cause initiale de la crise.

 

        C’est la faute aux marchés, c’est la faute à la crise, c’est la faute aux banques, c’est la faute aux Américains, c’est la faute aux Grecs, demain ce sera la faute aux Allemands… Non, c’est la faute aux hommes politiques français. Voilà des hommes qui ont fait croire qu’ils étaient faits pour être des chefs, pour représenter leur peuple, pour agir en son nom. Ce sont eux qui ont pris les décisions. Ces décisions sont allés dans le même sens depuis cinquante ans, quels que soient les hommes et les partis au pouvoir. Ils doivent aujourd’hui assumer leur responsabilité : le désastre qui se pointe, c’est leur œuvre.

        Ils ne l’ont pas voulu, certes, mais, aveuglement, stupidité, manque de réflexion, idéologie, ils sont la cause politique, en raison des choix qu’ils ont faits, de l’enchaînement d’effets calamiteux dont ils font mine aujourd’hui d’être surpris. Quelle inconséquence !

 

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Le système craque

        Ils faisaient marcher leur machine politicienne dont ils connaissaient le fonctionnement et, approximativement, les rouages. 

        Ils étaient habitués à ses tressautements électoraux qui leur prouvaient qu’elle tournait et c’était ordinairement sans risque. 

        Ils faisaient ce qu’il fallait : ils votaient les lois presque machinalement, ils faisaient des discours, ils menaient des campagnes, ils se disputaient parce que c’est la vie.

        Et puis voilà que tout se dérègle. Comme souvent, comme toujours, une fois que ça commence à aller mal, tout va mal. La vérité : tout va aller de plus en plus mal. Financièrement d’abord : les plus intelligents d’entre eux le savent déjà. Donc économiquement et socialement : certains s’en doutent et même s’en effrayent ; ils ont raison. Que va-t-il se passer quand il n’y aura plus d’argent ? Qu’il ne sera plus possible de rien payer ? Quand les fonctionnaires, quand les hôpitaux, quand l’Éducation nationale, quand les collectivités territoriales, quand les banlieues, oui, les banlieues… Quand les traitements, les subventions, les allocations, les systèmes sociaux seront diminués, supprimés… Quelque-uns y pensent, le redoutent ; ils sont encore rares, ceux-là. 

        L’anticipation n’est pas le don premier du personnel politique, ni des financiers, d’ailleurs, ni des journalistes sauf exceptions. Qui se souvient aujourd’hui de l’avant-guerre ? Le désastre est venu et, à part quelques Cassandres bien connues et qu’il ne fallait surtout pas écouter, personne n’avait rien prévu. Décidément, c’est toujours la même chose… Eadem semper, disait le poête antique.

 

Les partis à l’épreuve

 

        Seulement, aujourd’hui, ce que perçoit clairement la classe politique, ce sont les craquements sinistres qui ébranlent la machine politicienne. Les uns craignent d’être jetés, emportés ; les autres se livrent à la joie, à la pensée de pouvoir en profiter pour s’emparer des commandes… Qui sait ?

 

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"Pour la première fois, le Sénat connaît l'alternance", a déclaré le chef de file des sénateurs PS, Jean-Pierre Bel, qui a succédé à Gérard Larcher (UMP) à la tête de la Haute assemblée.

 

        Les dernières élections sénatoriales qui donnent la majorité à la gauche au Sénat pour la première fois de la Ve République, ont été un coup de semonce pour l’UMP. Et, pourtant, où est la surprise ? À force de perdre les élections locales, devait arriver le moment où le grand Conseil des communes de France serait à la couleur de la majorité des collectivités territoriales. L’action du gouvernement, au moment où les difficultés s’accumulent, en deviendra plus difficile. « Les investisseurs » pour parler le jargon financier, n’en seront pas rassurés.

        Voilà ce que c’est que de toujours miser sur les seules élections présidentielles et de ne faire un parti que pour les gagner, ces maudites élections, au service finalement d’une ambition personnelle, forcément toujours démesurée. Immense défaut du système français, si mal adapté aux besoins vrais de la France. Il est prévisible que l’UMP qui n’a été constituée, comme jadis le RPR, que pour Chirac, puis, prise en main à cet effet, pour Sarkozy, va s’y casser. Et peut-être même avant les présidentielles, car le doute s’insinue et sur la personne du candidat et sur l’efficacité de la machine. C’est qu’il y en a d’autres que Sarkozy… Horrible système, destructeur de tout, qui fait penser à la fin de l’Empire romain où les empereurs se succédaient en s’entretuant ou en se faisant entretuer, tandis que les invasions se poursuivaient et que l’économie et la société éclataient ? D’ailleurs, les effroyables réglements de comptes dont les Français sont témoins, dans les sommets de l’État et de la justice, manifestent publiquement l’atmosphère et les mœurs qui y règnent.

 

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        L’élection présidentielle est désormais fortement compromise pour la droite, sauf redressement. Les députés qui se sont intitulés de la Droite populaire l’ont parfaitement senti. Réussiront-ils ou, au contraire, la cassure s’effectuera-t-elle avec une UMP centriste qui n’a pas d’autre idée que celle du moment ? Le risque est grand et les élections législatives qui suivent les présidentielles, seront une épreuve encore plus significative.

        Le Front National, pareillement, mise tout structurellement sur les élections présidentielles avec un seul homme, maintenant une seule femme, et quel que soit le talent de la dame dont la cote dans l’opinion est plus haute que ne le disent les sondages trop officiels, le risque est le même. Terrible ! Soulever une espérance pour finir dans un échec.

        Qui pourrait ouvrir les yeux des Français ? Faire qu’ils réalisent à quel point le système dans lequel on les fait marcher – qui, on ? –, est pervers et les dressent constamment les uns contre les autres pour uniquement la satisfaction d’ambitions qui ne sont pas les leurs. En dépit de ce qu’on leur raconte et quels que soient les hommes ou les femmes, leur qualité personnelle n’étant pas en jeu.

 

Un gagnant perdant

 

        Il y a tout lieu de penser que François Hollande gagnera « les primaires » socialistes (1). Lui, il est de ceux qui se réjouissent de ce délabrement de l’appareil politique français. Il se voit déjà président de la République. Mais c’est tout ce qu’il voit. Son sourire perpétuel le montre assez. Il ne voit rien d’autre. Il est, à proprement parler, sans vision. Fils de famille qui en a toujours pris à son aise, chez qui la misère sociale n’est qu’un thème de discours, il n’est absolument pas armé pour affronter le déferlement d’évènements qui va submerger le pays. De ce point de vue, c’est un niais, mais, après tout, comme tant d’autres. Sait- il que le prochain chef de l’État sera d’abord et essentiellement un syndic de faillite ? Ce n’est pas un sort enviable quand on a le cœur haut.

        Mais arrivera-t-il seulement aux élections présidentielles ? Et Sarkozy ? Et les autres ? Nul ne peut dire ce que sera la situation de la France et de l’Europe dans un mois, dans deux mois, dans trois mois… Gageons que beaucoup de gens prendront leur distance quand le péril viendra. Cependant que les aventuriers, une fois de plus, voudront faire… leurs affaires. ■ 

(1) ; le numéro est, évidemment, paru avant la fin des primaires socialistes....

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