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L'éditorial de Politique Magazine.

             Histoire et mémoire, tel est le thème de cet édito du numéro 69 de Politique Magazine ( http://politiquemagazine.fr/  ).

             L'intérêt du sujet n'échappera à personne : on touche là a en effet à quelque chose qui, bien loin d'être anodin, est au contraire absolument essentiel....  

          "Tout le monde politicien et partisan n'a cessé de jouer avec la France, avec ce qu'elle représente, avec son histoire, avec son avenir. Il ne s'agit jamais que de se l'approprier, de s'identifier à elle, de parler en son nom, de revendiquer son histoire - histoire nécessairement déformée à cette intention -, enfin d'inscrire son avenir dans un programme électoral qui est censé lui indiquer une route salutaire et radieuse.  

           Le caractère violemment idéologique du perpétuel conflit politique français, même et surtout quand les idées font défaut, n'ont fait qu'en ajouter et en réajouter dans cette lutte pour l'appropriation partisane de l'histoire, donc de la mémoire, donc pense-t-on de l'avenir.

           Nous payons aujourd'hui le prix d'une conception idéologique de la République avec cette grave ambiguïté qui tient à la dénomination même de République qui, tantôt, peut être prise dans son acception étymologique d'Etat, sens courant à tout époque, même aux XVI°, XVII° et XVIII° siècles français, tantôt se dresse dans sa stature idéologique qui varie, de plus, au gré des opinions de chacun.

           Dans ce dernier cas, il faut bien reconnaître que la République s'apparente à n'importe quel régime d'idéologie sommaire qui prétend imposer ses vues partisanes comme des normes universelles. Alors, de quoi s'agit-il ? Premièrement d'enlever de la mémoire collective tout ce qui n'entre pas dans le cadre voulu par les idéologues : l'histoire n'existe plus. Cet anéantissemnt fait même partie du programme pour permettre l'éducation des esprits. "Du passé faisons table rase", c'est la formule bien connue. Deuxièmement, il faut aller plus loin : il faut revoir l'histoire, la dicter. Toujours dans le même but : la rendre éducative, en façonner les esprits, en faire un lieu de culte idéologique.

            C'est ainsi en France. C'est une doctrine pour ainsi dire officielle. 

            L'histoire, donc la mémoire, est tout à la fois anéantie et reconstruite, dévalorisée et retaillée à façon. Comme la République, une et indivisible dans son principe, est devenue dans les faits plurielle, la façon est aujourd'hui multiple. Chacun a son histoire qui n'est pas celle de l'autre. Le parti, la communauté deviennent la règle, elle-même, identifiée à la République.

            Le résultat n'était pas difficile à prévoir : d'abord, un amoindrissement de tout ce qui dans l'histoire nationale a tendu à l'unité : Bouvines, Jeanne d'Arc pour prendre ces exemples. Jeanne d'Arc, héroïne nationale, fête nationale légale n'existe plus guère aujourd'hui qu'à Orléans où, Dieu merci, elle existe bien. La cause de ce désintérêt se devine aisément : sa leçon nationale est royale. Puis une multiplication des fêtes mémorielles pour satisfaire les vues des partis, des groupes à qui le politicien, parvenu au pouvoir, donne satisfaction. Inutile de le sénumerer !

            D'où le rapport Kaspi qui a été remis en novembre au chef de l'Etat et qui souligne cette pulvérisation de la mémoire collective selon les besoins du clientélisme politique. Il propose de ramener les commémorations nationales - il y en a bien d'autres !... - de 12 à 3. Le 14 juillet comme fête de la nation, le 11 novembre et le 8 mai, qui sont les anniversaires des victoires de la France lors des deux dernières guerres mondiales. Ces deux dernières dates se comprennent parfaitement comme fêtes d'unité de la nation, encore ne faut-il pas les déformer et leur retirer leur caractère national.

            Mais il suffit d'évoquer le 14 juillet pour saisir tout ce qu'a d'ambiguïté la fête nationale de notre patrie. Que fête la nation ? Une fédération autour de son roi qui a, d'ailleurs, échoué ? Une révolte avec meurtre et sans gloire que le mythe a transformé en modèle historique ? Toutes ces ambiguïtés ne sont pas sans conséquences. A force, l'unité de la France en souffre; la Marseillaise, l'hymne national, a été sifflé. Ce signe est tragique. Chacun conçoit sa révolte et en fait un héroïsme.

            L'unité de la France ne se décrète pas. Elle se vit. Et elle doit se vivre dans le vrai sens de son histoire."

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