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Maîtres et témoins (III) : Léon Daudet

11 Novembre 1918 : le défilé de la victoire...

11 Novembre 1918 : le défilé de la victoire...

De "Paris vécu", Première série, rive droite, pages 195/196 :

"...Le 11 novembre 1918, ce fut l'armistice de la Grande Guerre, attirée sur nous par le désarmement, l'incurie démocratique et l'aveuglement de tous les gouvernements de la République, auxquels cette terrible épreuve, du reste, n'a pas servi.
L'Action Française prit place dans le vaste défilé qui s'organisa de la place de l'Etoile aux Tuileries, au milieu d'un enthousiasme délirant.
Il n'y en avait que pour Clemenceau, qui faillit être étouffé et écrasé, en se rendant à une estrade, sise place de la Concorde, non loin de la rue Saint-Florentin.
Des petites boutiques aux couleurs alsaciennes, aux noms de villes et de bourgs d'Alsace, où l'on vendait des drapeaux et des cocardes, décoraient l'avenue redevenue glorieuse, que garnissaient, de chaque côté, des centaine set des centaines de caissons et de canons, pris aux Boches par l'armée Mangin.
Des avions traversaient l'air, volant bas, au milieu d'acclamations, de chants, de fanfares.
C'était le débordement de la joie, le déliement de l'angoisse immense, aussi vaste que la nuit, et que l'océan.
Tout avait la couleur, le goût, le tressaillement de l'aube. Un puissant espoir se levait au-dessus du charnier le plus pathétique de l'histoire moderne, charnier voulu PAR TOUTE L'ALLEMAGNE et par toutes les créatures de l'Allemagne, par malheur insuffisamment châtiées.
La France brillait tel un beau fruit, au sommet de l'arbre dur de la dure victoire.
Mais le ver, la République, restait dans le fruit. On allait le voir".

Illustration : Le défilé de la victoire devant la porte Saint Denis, le 11 novembre 1918, par Jean Leprince, XXème siècle, musée Carnavalet, Paris.