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Maîtres et témoins...(II) : Jacques Bainville.

La Revue Universelle, présentée par Massis (II)

La Revue Universelle, présentée par Massis (II)

2. Naissance de la "Revue Universelle" (pages 145/146/147) :

Voilà les sentiments et les idées, les volontés et les besoins qui ont présidé à la naissance de la Revue universelle.
Charles Maurras n'était point de ceux qui, comme Barrès, comme Millerand, croyaient que la victoire et le retour de nos provinces perdues allaient spontanément créer en France un climat de haute tension morale, de renouveau intellectuel, de foi nationale. Dès le lendemain de l'armistice, il apparut urgent à Maurras et à ses amis de recommencer leur effort de 1900 à 1914 pour le mouvement national, en le reprenant par ses causes profondes, ses principes directeurs de psychologie, de morale, d'esthétique, d'histoire. Pour cela, ils pensaient que le journal ne suffirait pas. Un moment, l'idée leur vint de ranimer l'ancienne Revue d'Action française; mais, de ses rédacteurs normaux, les uns étaient morts, comme Henri Vaugeois et Léon de Montesquiou, les autres étaient accaparés par le quotidien. Et puis le stade du "laboratoire" était désormais dépassé ! Il s'agissait de donner aux idées qui s'y étaient élaborées une audience plus vaste; il fallait les étendre à ces régions que la guerre leur avait en quelque sorte ouvertes, reconnaître ces terrains nouveaux, se gagner ceux où ces idées étaient en quelques manières désirées, attendues. Une "publication alliée et autonome" ne servirait-elle pas mieux une telle entreprise, une "Revue" où seraient suivis et développés, selon les libertés de l'ordre, dans la passion du salut public, les principes généraux de notre Renaissance ?
Pour diriger un organe de cette sorte, Bainville n'était-il pas là, Bainville qui, avec sa prodigieuse facilité de travail, ou plutôt ce don génial de produire sans travail, eût accepét d'ajouter cette charge à toutes celles qu'il assumait déjà ?
"Mais, disait un jour Maurras, en évoquant ce temps de notre début, il fallait près de Bainville quelqu'un de jeune et de complètement libre, qui fût autre chose qu'un second et un aide de camp. Où le trouver ? Qui ? La difficulté fut résolue par une rencontre de chemin de fer que fit Léon Daudet. Henri Massis rentrait de l'armée d'Orient (Athènes ou la Syrie) et manifesrait excatement le même souci que nous sur la France et sur l'Occident. Sans être officiellement des nôtres avant la guerre, Massis avait poussé dans notre sens, après son enquête sur la Sorbonne, par des études éparses sur le problème national ou religieux. Il faisait parti d'un jeune groupe catholique très fervent et très militant, auquel avait appartenu Ernest Psichari. Il avait joincté Péguy. Il était l'ami de Jacques Maritain. Nous fûmes vite d'accord pour admettre la suggestion de Daudet et suggérer à Massis de venir partager avec Bainville cette charge de la Revue. En même temps, le fameux héritage d'un héros, Pierre Villard, mettait entre mes mains le capital rondelet d'un million de francs germinal. L'Action française, à qui je l'avais remis, se dessaisit volontiers de cinquante mille francs pour la Revue."
A ce rappel des décisions qui précédèrent la naissance de la Revue au cours du second trimestre de 1919, je n'ai rien à ajouter et je me souviens encore des va-et-vient qui donnèrent lieu à sa fondation....
La collaboration de mon ami Jacques Maritain devait ajouter à cet apport de l'Action française un élément propre qui donna à la revue son caractère de publication catholique. Maritain était, au reste, le second légataire de Pierre Villard, et, à l'exemple de Maurras, c'est à la Revue Universelle et à son action publique qu'il consacra les premières disponibilités de sa part d'héritage.

(Illustration : le franc germinal, créé le 7 avril 1803, et qui dura jusqu’en 1926).