Tranches de vie (III) : le souper chez Maurras....
Dans son "Charles Maurras et son temps" (Ernest Flammarion, 1930), Léon Daudet a raconté le voyage mouvementé effectué, de Paris à Martigues, par les deux familles Daudet et Bainville, invitées par Maurras dans sa maison du Chemin de Paradis.....
"En septembre 1925, nous avions décidé, nos amis Bainville, ma femme et moi, de nous rendre à l’invitation de Maurras à Martigues et de lui amener, comme il le désirait, Hervé Bainville, jeune homme de quatre années et son très jeune filleul François Daudet...."
Mais rien ne se passa comme prévu, le train eut quatorze heures de retard, et les deux familles n'arrivèrent à Marseille qu'à onze heures du soir ! Sautant dans deux voitures, elles finirent, enfin, par arriver au Chemin de Paradis, où les attendait Maurras.. :
"Son hospitalité fastueuse avait combiné, ce soir-là, un festin de Pantagruel ou de Gamache, lequel commençait par une bouillabaisse classique, exhaussée de la « rouille » traditionnelle, qui met la soupe de soleil à la puissance 2 ; se continuait par des soles « bonne femme » et des loups grillés ; atteignait au grandiose et au sublime avec un plat d’une douzaine de perdreaux de Provence, demeurés tièdes et dorés, sur des « lèches » de pain, comme on ne les obtient que dans la vallée du Rhône – pardonne-moi, ô Bresse – et arrivés à la consistance du baba. Chaque enfant mangea son perdreau. Celui qui écrit ceci, comme disait Hugo, mangea deux perdreaux, pécaïre, toute une sole, le tiers de la bouillabaisse, et le reste à l’avenant, suivi de près par Jacques Bainville, romancier, journaliste, historien et financier des plus gourmands...."