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BIOETHIQUE & SOCIETE • L’homme du futur, par Lars Klawonn*

 

L’homme du futur se prépare dans les laboratoires scientifiques.

La Suisse n’est pas la terre des écrivains et des poètes. C’est celle des ingénieurs, des chercheurs et des entrepreneurs. On y excelle dans le développement des nouvelles technologies. C’est une véritable fourmilière de recherches astucieuses publique et privée. En voici quelques échantillons:

L’EPFL (Ecole polytechnique fédérale de Lausanne) déclare la guerre aux infirmités. Ses chercheurs ont réussi à faire marcher des rats paralysés dont ils avaient sectionné la liaison nerveuse entre leur moelle épinière et leurs pattes arrières pour ensuite injecter des produits chimiques dans leur colonne vertébrale et installer des électrodes de sorte que les fonctions nerveuses ont pu reprendre vie. Ce nouveau traitement pas encore homologué est destiné à guérir les paralysies partielles. Autre exemple : le centre de neuroprothèses de l’EPFL met actuellement au point une main bionique commandée directement par la pensée et non plus par des contractions musculaires. But de l’opération : permettre aux patients amputés de retrouver le sens du toucher. En même temps, le nouveau Campus Biotech de Genève développe des outils neurotechnologiques, de petites puces implantées sous la peau, pour faire marcher les tétraplégiques.

Peut-on, doit-on, s’opposer à ce magnifique Progrès du Bien qui permet aux handicapés de surmonter leur infirmité et de vivre une vie normale ? Ceux qui le font s’exposent à des attaques violentes de la part des progressistes égalitaires. Leur haine est la haine la mort, de la vieillesse. La vieillesse n’est plus considérée comme un état naturel mais comme un handicap, donc une injustice. Tout handicap est une injustice de la nature et de la fatalité. Or l’homme nouveau n’accepte plus ni la nature ni la fatalité.

Dans la vie moderne, il faut « réussir ». On ne reconnaît plus la faiblesse. Les handicapés doivent à tout prix échapper à leur condition. Ils ne trouvent de dignité que dans leur combat contre la fatalité, dans leur volonté de surpasser leur handicap. Car grâce à la science, tout est désormais possible et les coûts sont secondaires. En vérité, cet acharnement contre les infirmités n’est rien d’autre que la négation du handicap et de sa spécificité. C’est la négation de l’héritage chrétien qui nous enseigne que le handicap, la faiblesse, les maladies sont aussi des expériences humaines dotées d’une valeur propre et qu’il s’agit en fait d’apprendre à vivre avec son handicap, de l’accepter et de le faire accepter par ses proches. Au lieu de cela, la science s’emploie à le supprimer à l’aide de la biotechnologie (les prothèses) et des cellules souches (la régénération).

Cependant le vrai danger est encore ailleurs : la science de la destruction de l’unité organique reçue à la naissance ne se limite pas aux cas des handicapés. Elle est en marche pour une humanité plus parfaite : des êtres humains réparés comme on répare des robots, reconstruits, régénérés, qui exhibent leur prothèses et repoussent leur mort. Une nouvelle unité corporelle homme-machine est en train de se former afin d’améliorer les capacités naturelles non seulement des handicapés mais aussi des personnes valides. C’est dans cet esprit que l’armée des Etats-Unis travaille actuellement à l’amélioration de la vision des leurs pilotes de chasse par l’utilisation des implants dans leur rétine.

L’homme nouveau fera tout ce que la science lui permettra de faire. Il n’y aura plus aucune limite. Or un monde sans limite est un monde invivable car inhumain.  

 - Politique magazine

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