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Maîtres et témoins (III) : Léon Daudet

PRESENTATION DE L'ALBUM

PRESENTATION DE L'ALBUM

On connaît la formule célèbre de Thibaudet, selon laquelle "Maurras est un continent". Mais, chacun à sa façon, chacun avec son style et dans son domaine, Bainville et Daudet sont, aussi, "des continents". Et leur amitié avec Maurras fut si indéfectible (seule la mort vint les séparer); leur action fut si intimement mêlée à la sienne, à partir du moment où ils le rencontrèrent, pour ne plus jamais le quitter; leur fréquentation réciproque fut si constante ("Au bon temps, nous nous voyions tous les jours", dira Maurras, lorsque mourut Bainville...); leur accord sur tout ce qui est essentiel fut si complet, si profond, si permanent... qu'il est impossible de parler de l'un des trois amis (au sens le plus complet et le plus fort du terme "ami", celui de l'amitié d'esprit) sans évoquer, immédiatement et pour ainsi dire automatiquement, les deux autres.

Qu'on n'aille cependant pas imaginer une désolante et stérile uniformité régnant entre eux : en dehors des points majeurs, sur lesquels l'accord est indispensable pour la véritable amitié ("eadem velle, eadem nolle, ea est vera amicitia...") la plus grande liberté régnait, au contraire, entre eux sur tous les autres sujets : Henri Massis a raconté plaisamment comment, un soir, alors qu'il ramenait en voiture Jacques Bainville et Léon Daudet, celui-ci lui avait dit, après que Bainville eût été déposé, et juste au moment d'arriver chez lui, au 33 rue Saint-Guillaume : "Maurras, quelle tête politique ! Mais ses idées littéraires, ah ça, non !".
Tout est dit dans l'anecdote, qui est, de fait, bien plus qu'une anecdote...

C'est d'ailleurs à Henri Massis, qui lui reprochait de faire l'apologie d'André Gide, que Daudet écrira une courte réponse contenant ces mots :
"Notre mouvement d'AF n'a subsisté que par l'extrême liberté de chacun de nous - sauf sur le terrain politique - dans les domaines de littérature, de philosophie, des sciences et d'art. Autrement, où irions-nous ?..."

Voilà pourquoi - en ayant commencé par un Album "Maîtres et témoins, I : Frédéric Mistral" - et après un Album "Maîtres et témoins, II : Jacques Bainville", un Album "Maîtres et témoins, III : Léon Daudet" s'imposait tout naturellement.

Partir, ainsi, à la découverte de Léon Daudet, homme et oeuvre confondus; "lire Daudet", c’est d'abord partir à la découverte d'un homme d'exception, d'une personnalité hors norme; c'est aussi découvrir, de l'intérieur, l'histoire de l'Action française; et enfin, bien sûr, parcourir 60 ans de la vie publique et officielle française, et pas seulement "politique".
C'est aussi la lire en dehors du cadre de la vérité officielle, et se permettre ainsi d’accéder à la vérité vraie, à l’histoire véritable de l’extrême-fin du XIXème siècle et de la première moitié du XXème siècle français, échappant ainsi aux travestissements, déformations, omissions ou mensonges en tous genres et de toutes natures dont les chroniqueurs patentés du Pays légal l’ont littéralement truffée.
Le tout, à la manière et avec le style inimitable de Daudet, sa verve et sa truculence qui furent, à la fois, sa principale qualité et, probablement aussi, son principal défaut. Et qui permettra de découvrir un homme extraordinairement ouvert, curieux de tout, qui savait vivre en dehors de "la politique" et qui aimait aussi bien Monet ou Camille Claudel, Barbey d'Aurevilly, Courteline, Rodin ou... Picasso !

Cet Album a été construit, pour l'essentiel, à partir des dix ouvrages de "Souvenirs" de Léon Daudet :

1. Les sept volumes de ses Souvenirs proprement dits, dont Pierre Gaxotte dit qu’ils sont "indestructibles" et dont Marcel Proust parle comme de "prodigieux Souvenirs", ajoutant :
"Les ressemblances entre Saint-Simon et Léon Daudet sont nombreuses : la plus profonde me semble l'alternance, et l'égale réussite, des portraits magnifiquement atroces et des portraits doux, vénérants, nobles."
Bernard Oudin, qui a établi les notes de "Souvenirs et polémiques" dans la collection Bouquins (1992) ajoute, pour sa part :
"Nul n’a su comme lui faire le portrait au vitriol de ses contemporains, esquisser une silhouette en quelques traits mordants, décerner des surnoms qui collent à la peau, trouver la formule assassine qui étend raide l’adversaire, décrire avec une verve prodigieuse les ridicules d’un salon, d’une académie, d’une assemblée parlementaire, d’un tribunal, évoquer l’ambiance hallucinante des hôpitaux de sa jeunesse. Tout un monde, toute une époque, ressurgissent sous sa plume, avec les couleurs de la vie même." :

1. Première série des souvenirs : "Fantômes et vivants" (Souvenirs des milieux politiques, littéraires, artistiques et médicaux de 1880 à 1905), paru en 1914;
2. Deuxième série : "Devant la douleur", paru en 1915;
3. Troisième série : L’Entre-deux-Guerres" (Souvenirs des milieux politiques, littéraires, artistiques et médicaux de 1880 à 1905), paru également en 1915;
4. Quatrième série : Salons et journaux" (Souvenirs des milieux politiques, littéraires, artistiques et médicaux de 1880 à 1908), paru en 1917;
5. Cinquième série : "Au temps de Judas" (Souvenirs des milieux politiques, littéraires, artistiques et médicaux de 1880 à 1908), paru en 1920;
6. Sixième série : "Vers le Roi" (Souvenirs des milieux politiques, littéraires, artistiques et médicaux de 1908 à 1914), paru en 1921;
7. Septième et dernière série : "La pluie de sang", paru en 1932, et consacrée à la Guerre de 1914/1918...

2. Puis trois autres ouvrages qui, s'ils ne portent pas explicitement le nom de "Souvenirs" peuvent et doivent pourtant, bel et bien, être considérées comme tels, et donc être ajoutés à cette liste, dont ils font de toute évidence partie, de fait :

1. "Député de Paris", dans lequel Daudet raconte ses quatre années et demi de mandature dans la Chambre Bleu horizon, paru en 1933;

2. "Paris vécu", en deux tomes, "Rive droite", "Rive gauche", parus en 1929 et 1930.

Les passages concernant "Un autre Victor Hugo" ont été tirés de "La tragique existence de Victor Hugo"; et ceux concernant l'exil à Bruxelles, de "Vingt-neuf mois d'exil", deux autre ouvrages de Léon Daudet...

Enfin, quelques passages ont été empruntés au livre d'Albert Marty, "L'Action française racontée par elle-même"; au "Maurras et notre temps", d'Henri Massis; et, en ce qui concerne la critique du libéralisme, au "Stupide XIXème siècle", que Daudet fit paraître en 1922, alors qu'il était Député, en même temps que son "Sylla".
Et, pour ce qui est d'un grand nombre de renseignements précis (dates, lieux, chiffres, personnages, synthèses...) on largement utilisé le remarquable Dictionnaire Encyclopédique d'Histoire, de Michel Mourre...

Juste deux mots, avant d'ouvrir et de feuilleter cet Album, fait pour établir ou rétablir la vérité, face au(x) mensonge(s) officiel(s) d'une vérité "politiquement et historiquement correcte(s)", alors qu'on n'apprend souvent au public qu'une histoire grossièrement tronquée, falsifiée, dénaturée...

1. D'abord, pour ceux qui seraient surpris, voire choqués, par la verdeur de certaines phrases, jugements, appréciations etc. de Daudet : le "b.a.-ba" de tout historien, ou de quiconque lit un texte "ancien", en tout cas d'une autre époque, est de ne pas le faire avec la mentalité de son propre temps, à lui, mais en se remettant dans l'esprit et la mentalité de l'époque qu'il étudie : or, du temps de Daudet, tous les polémistes, à quelque bord qu'ils appartînssent - de l'extrême-droite à l'extrême-gauche - s'exprimaient avec une virulence dont on n'a plus idée aujourd'hui; et, souvent même, ils dépassaient très largement les "verdeurs" de Léon Daudet...

2. Ensuite, sur deux termes de vocabulaire. Là où Daudet parle (il y a cent ans...) de "République" et de "Démocratie", les royalistes d'aujourd'hui préfèrent parler de "République idéologique", de "démocratie idéologique", et critiquer "le Système". Nous ne sommes pas hostiles, en effet, à la république en soi - conçue comme la "res publica", la "chose publique" - ni à la participation active des citoyens à cette "res publica", qu'est la vraie démocratie. C'est la République idéologique, la Démocratie idéologique que nous rejetons : nous sommes, comme le disait Maurras, 36.000 fois républicains, à la base, au niveau communal; fédéralistes au niveau intermédiaire des Provinces (technocratiquement baptisées aujourd'hui "Régions", par un Système qui a rétabli, mais mal, en partie seulement, et d'une façon aberrante pour certaines, les Provinces que la Révolution avait supprimées, justement, par idéologie...); et, enfin, pour reprendre l'expression de Léon Daudet, nous sommes royalistes une seule fois, uniquement "au sommet", car nous souhaitons "nationaliser l'Etat par le Roi" : le Roi, protecteur des républiques françaises; ou, les républiques sous le Roi, tel est - reprenant les formules de Maurras - le vocabulaire employé par les royalistes aujourd'hui. Celui de Daudet s'explique par son contexte (une République idéologique récente, datant de 1875, et voulue par l'étranger, en l'occurrence, l'Allemagne de Bismarck) : autres temps, autres mots, et autre façons de "présenter" les choses. Mais ce sont bien, toujours, évidemment, les mêmes idées...